De La Paz,
Dimanche 1er juin, les électeurs des départements amazoniens du Beni et du Pando, après ceux de Santa Cruz, étaient invités à se prononcer sur des statuts visant à doter leur région d’une plus large autonomie envers le pouvoir central. Si les électeurs ont massivement approuvé les statuts (80 % des voix dans le Beni et plus de 85 % dans le Pando), ils se sont fortement abstenus (35 % et 45 % d’abstention), suivant ainsi la consigne du Mouvement vers le socialisme (MAS, gauche) du président Evo Morales.
Le portrait d’une Bolivie fracturée entre un Occident andin favorable au gouvernement et un Orient amazonien converti en terre de résistance à la vague nationaliste incarnée par le MAS est donc à nuancer. D’autant que le calendrier électoral, balisé par les référendums départementaux, s’est vu bouleversé par la convocation d’un référendum révocatoire le 10 août, mettant en jeu les mandats du président et des neuf préfets départementaux.
Né d’un projet de loi proposé en décembre 2007 par Evo Morales en personne pour résoudre la crise naissante avec Santa Cruz, le référendum a été exhumé, début mai, par le parti Podemos (droite), majoritaire au Sénat. L’initiative a suscité la colère des préfets car, outre le fait qu’elle relègue au second plan un processus autonomiste qui semblait jusqu’alors inéluctable, elle met également en danger la position de certains d’entre eux, tel le préfet de La Paz, José Luis Paredes (Podemos), qui devra batailler ferme pour conserver son poste, dans un département désormais acquis au MAS.
S’il est fort probable, néanmoins, que le référendum du 10 août débouche globalement sur un statu quo, avec le maintien de Morales et de la plupart de ses rivaux, il n’en demeure pas moins qu’un climat de forte incertitude politique prédomine aujourd’hui en Bolivie. À cette situation, s’ajoute une tension sociale de plus en plus palpable, illustrée par les agressions répétées à l’encontre de paysans dans les centres urbains. Ainsi, samedi 24 mai, des hordes furibondes menées par le maire et les dirigeants « civiques » de Sucre ont pris à partie une vingtaine de paysans, contraints publiquement de se dénuder et de crier des slogans contre Morales.
Dimanche 1er juin encore, l’Union des jeunesses de Santa Cruz (UJC), venue prêter sa « collaboration » au contrôle du scrutin dans le Beni, a tenté de prendre d’assaut le siège de la fédération paysanne départementale, à Trinidad. La flambée de racisme à laquelle on assiste actuellement en Bolivie illustre la face sombre d’un mouvement autonomiste oriental en quête permanente de respectabilité. Face à cette tension devenue routinière, la solidarité et la vigilance des militants internationalistes sont plus que nécessaires.