Paris, samedi 29 mars 2008. Manifestation pour exiger la création d’un « revenu d’existence à la hauteur du SMIC brut », afin de faire face aux situations de grande pauvreté liées au handicap. Photothèque Rouge/babar
ette conférence devait faire le point sur les avancées de la loi de février 2005 sur « l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ». Nicolas Sarkozy l’a ouverte par un discours devant 500 personnes, presque toutes membres d’associations gestionnaires du handicap, et pas moins de sept représentants du gouvernement. Il a annoncé la création de 50 000 places en établissements spécialisés, qui prendront en charge ceux qui sont le plus lourdement handicapés. Mais on peut se demander comment et dans quelles conditions ces places seront créées.
Le Pacte national pour l’emploi des personnes handicapées considère tous les handicapés comme des travailleurs potentiels et le ton de la déclaration de Sarkozy fait craindre que la chasse aux « resquilleurs » à l’allocation des adultes handicapés (AAH) soit ouverte. L’objectif est de soustraire de son champ d’attribution nombre des 810 000 personnes aujourd’hui bénéficiaires, en leur demandant d’apporter la preuve de leur incapacité à travailler. On peut craindre que des personnes, considérées aujourd’hui comme ayant cette incapacité, se retrouvent dans des entreprises adaptées (EA) ou des établissements spécialisés d’aide par le travail (Esat), ou qu’elles soient obligées d’accepter les boulots les plus précaires.
Sarkozy a confirmé la revalorisation de l’AAH (actuellement à 628,10 euros) de 25 % sur cinq ans. Cela ne fait pas le compte, quand on sait qu’un handicapé sur trois vit en dessous du seuil de pauvreté. De toute façon, les 31 euros d’augmentation de cette année sont en bonne partie amputés par la hausse du coût de la vie.
Sarkozy est resté très évasif, disant qu’il comprenait la colère des personnes handicapées, qu’il était heureux que cela ne lui soit pas arrivé ni à l’un de ses enfants, que ses prédécesseurs n’avaient rien fait pour les personnes handicapées, mais aucune réelle avancée n’a été évoquée.
Quatre tables rondes étaient organisées : sur l’accessibilité, l’emploi (le taux de chômage est deux fois et demi supérieur à celui des personnes valides), l’intégration scolaire (sans dire avec quels moyens) et le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), dont tout le monde s’accorde à dire qu’elles subissent des disparités entre les régions.
Encore un rendez-vous manqué. Les associations gestionnaires gèrent et ne veulent pas perdre leurs prérogatives qui vont s’accroître. Le gouvernement gouverne et entraîne le handicap sur une pente descendante en ce qui concerne la compensation. Les personnes handicapées attendent toujours qu’on veuille bien prendre en compte leurs revendications de non-discrimination et de droit au travail avec un salaire décent.
Gilles Bisson
* Paru dans Rouge n° 2257, 19/06/2008.
Les handicapés manifestent
A l’appel du collectif Ni pauvre ni soumis, collectif qui regroupe une centaine d’associations d’handicapés, environ 30 000 personnes ont battu le pavé parisien, le samedi 29 mars. Ces personnes étaient là pour demander une augmentation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), qui est actuellement de 628,10 euros, donc en dessous du seuil de pauvreté. Elles voudraient voir cette allocation calquée sur le montant du Smic. Elles dénonçaient aussi les effets d’annonce de Sarkozy (augmentation de l’AAH de 5 % par an, soit 31 euros cette année), alors même qu’avec cette allocation les personnes handicapées ne peuvent toujours pas vivre décemment. De plus, la mesure ne concerne pas les personnes handicapées vivant avec des pensions d’invalidité ou des rentes d’accident du travail.
C’est un tour de force qu’a réussi ce collectif, rassemblant des personnes peu habituées à se mobiliser. Ce collectif a encore de beaux jours devant lui. La conférence nationale sur le handicap, qui doit se tenir en juin, n’apportera sûrement aucune réponse à ces personnes, puisque trois ans après le vote de la loi du 11 février 2005, rien n’est fait pour l’embauche des travailleurs handicapés, sans parler de l’accessibilité aux lieux publics, à l’école ou au logement social. Les handicapés ne sont plus dupes de toutes les « sarkozyades », ils attendent de vraies mesures pour favoriser leur intégration.
* Paru dans Rouge n° 2246, 03/04/2008 .