Le Parti des travailleurs (PT) de Lula s’est doté d’une nouvelle direction. Les choses peuvent-elles évoluer ?
Orlando Fantazini - Je ne crois pas qu’il va y avoir du changement parce que le même secteur qui commandait le parti ces dix dernières années, auquel Lula appartient, a réussi à obtenir une fois de plus de 60 à 70 % des voix.
Le président nouvellement élu, Berzoini, a déjà déclaré son total soutien à la politique du gouvernement Lula, notamment à sa politique économique. Il est en faveur de la réélection de Lula à la prochaine élection présidentielle, qui est prévue cette année. Le parti va donc poursuivre son orientation. Il a déjà excessivement fragilisé son camp, en perdant ses repères idéologiques et programmatiques, tout en nouant des alliances avec les partis de droite. Ce sont les raisons de la crise que nous sommes en train de vivre. Le PT n’a même pas le courage de sanctionner ceux qui ont été mêlés aux affaires de corruption !
Quelles sont les perspectives politiques du Parti socialisme et liberté (Psol) dans ce contexte ?
O. Fantazini - Le Psol a été constitué, dans un premier temps, par des militants pétistes exclus du parti, non parce qu’ils avaient été impliqués dans un acte illicite, mais parce qu’ils avaient continué à défendre les positions historiques du parti et les engagements vis-à-vis de la classe ouvrière. Mais la direction majoritaire du PT a décidé d’exclure Heloisa Helena, Luciana Genro, Baba et Joao Fontes. Elle a aussi imposé une sanction à huit parlementaires qui ont refusé de voter les propositions de lois qui prévoyaient des pertes d’acquis concernant la protection sociale - ils ont été suspendus durant 60 jours.
La constitution du Psol s’est faite grâce à une dissidence de la gauche du PT, qui a réussi à se légaliser en tant que parti en août 2005. Au sein du PT, le Bloc de gauche, s’opposant à la politique de Lula, a estimé - après deux ans et demi de batailles internes - qu’il n’y avait plus aucune perspective pour une orientation de gauche ou pour un changement de la politique du gouvernement. Il a donc décidé de sortir et de renforcer les bases du Psol. Aujourd’hui, au Psol, nous sommes sept députés et une sénatrice, Heloisa Helena. La perspective est de mener les engagements historiques que nous défendions au sein du PT, une politique antilibérale, anticapitaliste et anti-impérialiste. Notre politique se tourne vers l’approfondissement de la démocratie, à travers le budget participatif, le renforcement du mouvement syndical, ainsi que les mouvements populaires, avec une perspective d’autonomie et d’auto-organisation des mouvements à partir de leurs propres besoins.
Quel est l’impact du Psol dans la société ?
O. Fantazini - Le Psol a un avantage, il part des bilans, des erreurs et des failles du PT. Nous savons ce qui n’a pas fonctionné, nous ne pouvons commettre les mêmes erreurs. À São Paulo, la structuration interne s’organise autour de cellules, pour garantir une plus grande participation de tous les militants du parti, afin que tous s’enrichissent des débats d’orientation, d’organisation et d’élaboration. Dans le PT, nous étions arrivés à une structuration élitiste qui ne donnait de place qu’aux spécialistes de la politique.
Notre préoccupation n’est pas que le Psol grandisse trop rapidement, mais que sa posture et sa politique se consolident. C’est pour cela qu’il faut travailler davantage sur les perspectives - en freinant s’il le faut l’entrée de certains secteurs -, au moyen d’une politique claire qui permette de dialoguer avec la société. La question du grossissement dans le PT a été un désastre total. La qualité pour nous est beaucoup plus importante. Heloisa Helena bénéficie d’un grand prestige au sein de la jeunesse et des personnes âgées, à la fois pour son irrévérence et sa fermeté dans son engagement, et par l’espoir qu’elle incarne. Ainsi, je crois que l’on va avoir un rôle important lors des prochaines élections, et cela va renforcer le Psol.