PÉKIN CORRESPONDANCE
L’impact de la récession mondiale sur le commerce international se fait de plus en plus ressentir sur l’économie chinoise, très dépendante de ses exportations : après un déclin de 2,2 % en novembre 2008 par rapport au même mois de 2007, celles-ci ont chuté de 2,8 % en décembre selon les chiffres des douanes cités dans la presse chinoise.
Les importations se sont également contractées de 21,3 %, ce qui aboutit finalement à un nouvel excédent commercial record. Celui-ci devrait atteindre pour l’ensemble de 2008 un peu moins de 300 milliards de dollars (225 milliards d’euros). « La crise de 1929 a montré qu’un pays excédentaire souffrait le plus dans le cas d’une fuite en avant dans le protectionnisme. Ce qui n’est pas encore le cas. A cette époque, les Etats-Unis avaient des excédents et étaient un peu dans la position de la Chine aujourd’hui », analyse Pierre Mongrué de la Mission économique française de Pékin.
Les détails des chiffres du commerce pour novembre montrent que les sorties de produits vers Hongkong, donc en provenance essentiellement du Guangdong (sud de la Chine), sont celles qui ont contribué le plus à la baisse des exportations. « Les fermetures d’usines dans cette province ont sans doute précipité le mouvement. La chute des importations provient à 80 % des pays asiatiques, (Taïwan, Corée du Sud, Japon...), ce qui montre l’impact en amont sur les produits ou le matériel importés pour être transformés en Chine », poursuit M. Mongrué.
FRETS MARITIME ET AÉRIEN À LA PEINE
La détérioration de la conjoncture touche des aspects essentiels de la chaîne d’approvisionnement comme le financement du commerce et le transport. Le ministère du commerce a ainsi récemment encouragé les exportateurs chinois à se protéger davantage des risques de défaut de paiement de la part de leurs clients, notamment en s’assurant : selon l’agence Xinhua, la China Export and Credit Insurance Corporation aurait vu le montant des indemnités payées à ses souscripteurs bondir de 174 % sur les onze premiers mois de l’année 2008 par rapport à 2007.
En fait, nombre d’exportateurs sont mal protégés, et en cas de défaut, certaines pratiques commerciales montrent leurs limites : début janvier, 40 fabricants de jouets de Hongkong se sont ainsi regroupés dans un « comité des créanciers de Li & Fung », pour tenter d’obtenir du géant hongkongais de l’import-export des millions de dollars en arriérés de paiement suite à la faillite, aux Etats-Unis, de KB Toys. « (Li & Fung), et non KB Toys, a émis les lettres de crédit, donc c’est à eux de faire les paiements », a déclaré à l’AFP Lewis Luk, un porte-parole des fabricants. Li & Fung, qui annonce de son côté une ardoise de 5 millions de dollars de commissions due par KB Toys, a promis d’aider les fabricants, mais soutient que le règlement des commandes est de la responsabilité de KB Toys.
Après des années d’expansion, le fret maritime et aérien subit le contrecoup de la décélération des échanges : les ports de Shenzhen et de Shanghaï ont vu, en décembre 2008, les volumes de transport par conteneurs chuter respectivement de 15,7 % et 6 % par rapport au même mois de l’année précédente.
Les acteurs de ce secteur les plus en amont sont les premiers touchés : à Shenzhen, CMIC, le premier fabricant mondial de conteneurs a, selon la presse locale, mis au chômage technique 22 000 ouvriers en décembre 2008 et arrêté une partie de ses usines. Les compagnies de fret, qui ont agrandi leur flotte de navire et multiplié les investissements en 2007, se livrent une concurrence féroce : le prix du fret maritime est passé de 1 400 dollars pour un container de vingt pieds à destination de l’Europe à 400 dollars entre fin 2007 et aujourd’hui.
« Il faut voir que nous sommes dans une saison traditionnellement creuse, à l’approche du nouvel an chinois. On observe toujours une croissance des volumes pour le trafic issu de la Chine vers le reste du monde et nous tablons sur une croissance du trafic en 2009 », dit un porte-parole de CMA-CGM, le numéro trois mondial du transport de conteneurs. Confiant dans les perspectives du marché local à moyen terme, le groupe a confirmé ses récents investissements en Chine dans deux terminaux portuaires (Xiamen et Tianjin) et un réseau de 18 gares ferroviaires à conteneurs.
Brice Pedroletti
* Article paru dans le Monde, édition du 15.01.09. LE MONDE | 14.01.09 | 14h58 • Mis à jour le 14.01.09 | 14h58.
Plan de relance pour sauver l’automobile chinoise
La Chine a adopté un plan de relance pour son secteur automobile, le troisième au monde, touché par la crise économique, avec notamment une réduction des taxes à l’achat et un soutien à la production de voitures « propres », ont rapporté, jeudi 15 janvier, les médias officiels.
A partir du 20 janvier, la taxe à l’achat de véhicules propres baissera ainsi de 10 % à 5 %, rapporte le China Daily. Mais le gouvernement a également souligné sa volonté de soutenir le développement des véhicules utilisant les nouvelles technologies et à faibles émissions. Les autorités débloqueront ainsi dans les trois années à venir 10 milliards de yuans (1,1 milliard d’euros) pour que les constructeurs modernisent leurs appareils de production et développent des « pièces et des véhicules utilisant des énergies nouvelles ». Enfin, à partir du mois de mars, le gouvernement débloquera 5 milliards de yuans afin que les paysans puissent remplacer leurs vieux véhicules par de nouveaux.
Pékin cherche à éviter un scénario à l’américaine d’effondrement de l’industrie automobile. Les ventes automobiles en Chine ont progressé de seulement 6,7 % sur un an en 2008, enregistrant leur première croissance à un seul chiffre depuis 1999, selon l’Association des constructeurs automobiles du pays (CAAM). La bonne tenue de l’industrie automobile est vitale pour l’économie de la Chine, sachant que, selon les économistes, 150 industries en dépendent, notamment les aciéries et le secteur pétrochimique.
Le gouvernement a également annoncé des mesures en faveur du secteur sidérurgique et, selon le China Daily, d’autres plans de relance devraient être annoncés dans les prochains jours pour soutenir huit autres secteurs, dont la construction navale, la pétrochimie et le textile. Inquiet des conséquences sur l’emploi et sur la stabilité sociale, le gouvernement a adopté en novembre 2008 un plan de relance budgétaire de 4 000 milliards de yuans (455 milliards d’euros) jusqu’à la fin 2010, dont une partie doit être apportée par le gouvernement central.
* LEMONDE.FR avec AFP
LA CHINE, 3E ÉCONOMIE MONDIALE
La Chine est devenue la troisième économie mondiale. Pékin a en effet révisé à la hausse mercredi son taux de croissance de 2007, à 13 % contre 11,9 %, ce qui la catapulte mécaniquement devant l’Allemagne. Sur la base de ces nouvelles données, l’économie chinoise pesait, en 2007, 25 700 milliards de yuans, soit quelque 3 500 milliards de dollars, contre 3 300 milliards pour l’Allemagne.
Sur la base des données de la Banque mondiale, la Chine est donc passée en 2007 en troisième position derrière les Etats-Unis (13 800 milliards de dollars) et le Japon (4 400 milliards).
La Chine était devenue la 4e économie mondiale en 2005, sa croissance de 10,4 % lui ayant permis de dépasser la France, le Royaume-Uni et l’Italie.