L’impact politique du tsunami permet de poser à nouveau, en termes concrets et actuels, la question de la dette des pays du tiers monde. Il est très significatif que le Parlement européen ait adopté, le 13 janvier, une résolution demandant « à la Commission et aux Etats membres de prendre l’initiative, dans les instances tant multilatérales que bilatérales, d’annuler progressivement la dette extérieure de pays en développement et leur demande aussi de poursuivre activement l’objectif que 70% du PNB soit consacré à l’aide au développement à l’étranger ». Cette résolution, adoptée à une très large majorité (473 voix pour, 66 contre et 14 abstentions) n’est pas exempte d’ambiguïtés ; mais elle marque un net progrès par rapport aux documents passés.
Pour autant, la bataille pour l’annulation immédiate de la dette extérieure des pays frappés par le tsunami et, plus généralement, du tiers monde, n’est pas gagnée. Diverses organisations ont porté cette exigence solidaire le 12 janvier, devant le ministère des Finances, alors que se réunissait le Club de Paris (qui réunit dix-neuf pays créanciers, dont la France). Ce Club des Nantis se contente en effet pour l’heure de prudentes propositions de moratoires. Un report des remboursements donc, pendant lequel les intérêts de la dette continueront à s’empiler. Un report qui sera évalué par le Fonds monétaire international (FMI) dont on connaît pourtant les orientations néolibérales désastreuses.
Certains gouvernements hésitent à accepter le moratoire. Ils ont peur de perdre en « crédibilité » auprès des investisseurs étrangers, alors même que toutes leurs ressources devraient être consacré à la reconstruction et à l’aide aux populations sinistrées. Voilà qui en dit long sur la dictature que le système de la dette fait peser sur les peuples du tiers monde ; car ce sont bien eux se privent de l’indispensable pour payer les intérêts faramineux d’une dette illégitime aux riches créanciers du Nord. Le système s’alimente lui-même, rendant la dette perpétuelle. Selon l’évaluation du CADTM, les Indonésiens ont déjà remboursé onze fois ce que leur Etat devait en 1982 ; et l’endettement continue, se renouvelant sans fin, maintenant le pays sous la loi du FMI.
« Maintenant plus que jamais, en cette période d’immenses besoins, la demande historique des peuples du Sud pour annuler les dettes extérieures réclamées à leurs pays doit être entendue ». Sur cette exigence, le réseau Jubilée Sud a lancé un appel intitulé « Face à la dette et au désastre : voici un soulagement durable ». « S’il existe un peu de sincérité dans les généreuses expressions de compassion proférées par les gouvernements du Nord envers les peuples du Sud, elle devrait se manifester par des actions concrètes. En plus de la mobilisation des secours d’urgence et de réhabilitation, ce dont nous avons un besoin immédiat, c’est l’annulation de la dette sans condition et dès maintenant. Les gouvernements du Sud ne devraient plus continuer à donner la priorité au service de la dette extérieure en gaspillant ainsi les ressources publiques ».
Une première liste de signatures a été collectée dans l’urgence, pour être présentée à la réunion de Djakarta sur l’aide aux pays frappés par le tsunami. Au 15 janvier, des réseaux internationaux avaient apporté leurs signatures, tels que Jubilée Sud, le Conseil mondial des Eglises, le Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM), les Amis de la terre, l’International Rivers Network, Oxfam International, la Marche mondiale des femmes... Il en va de même pour de nombreux réseaux régionaux, des organisations d’Asie, d’Afrique, des Amériques et d’Europe. Mais à cette date, il n’y avaient encore que six associations françaises signatrices, dont le CADTM, France Amérique latine (FAL) et Europe solidaire sans frontières (ESSF).
L’appel de Jubilée Sud sera distribué à Porto Alegre, au cinquième Forum social mondial. Il est donc encore temps de le faire signer par de nouvelles organisations, notamment françaises.
Pierre Rousset
* Envoi des signatures pour l’appel de Jubilée Sud : Lidy Nacpil « lidyjs jubileesouth.org »
Solidarité financière
Le mouvement Via Campesina, auquel appartient la Confédération paysanne française, intervient dans les zones sinistrées d’Atjeh, et de Sri Lanka. Les dons financiers peuvent être envoyés au Pays basque sur le compte suivant :
Bénéficiaire : Via Campesina
Code Iban : ES23 3035 0022 4202 2005 5606
Code Bic/Swift : CLPEES2M
Banque : Caja Laboral, calle 8 de enero, Guernika, Pais Basco
Tél. : + 34 94 625 00 98
Fax : + 34 94 625 66 62
Avec les dons, envoyez un mail pour informer Via Campesina : « nico.verhagen tonline.de »
Le PRD indonésien
Nous publions ci-dessous de brefs extraits d’une déclaration, datée du 5 janvier 2005, du Parti démocratique du peuple (PRD) en Indonésie, intitulée : « Fournir un système d’alerte aux pays pauvres. Les opérations militaires ‘hors guerre’ ne seront pas une solution ».
« Malgré une situation tragique à Atjeh, le gouvernement maintient l’état d’urgence civile (qui) restreint la participation démocratique des citoyens. L’armée contrôle l’identité des volontaires et exige même (parfois) le paiement d’un ‘droit d’entrée’. (...) Le gouvernement répond de façon ambiguë à la proposition d’un moratoire sur la dette (alors qu’il devrait) lutter pour l’annulation sans condition de la dette des pays pauvres.
« La solidarité du public s’est manifestée fortement et spontanément, avant même les gouvernements, sur le plan national, régional et international. Cette solidarité illustre combien le peuple est un, capable d’engagement et d’efficacité. Cette solidarité doit être renforcé, afin de surmonter les problèmes auxquels le gouvernement n’a pas su s’attaquer pour protéger sa propre population ».
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