Ne plus vivre la condition d’enfant illégitime de prêtre dans la honte, mais au vu et au su de l’opinion publique. Avec patronyme et droit à l’héritage. Le Vatican compte régulariser ses prêtres concubins et leurs enfants. La nouvelle n’est pas un canular d’été, ni un revirement subit sur le célibat des prêtres. Il s’agit tout bonnement d’une défense préventive de la part du Saint-Siège.
Avec la banalisation des tests ADN, l’Eglise n’est pas tranquille. Une multitude d’actions en justice pour reconnaissance de paternité venues d’Amérique latine ou de pays européens comme l’Autriche, terres de prêtres concubins notoires, pourrait lui tomber dessus. D’où l’échappatoire de reconnaître les faits. Sauf que, pour l’héritage, les biens personnels des prêtres seraient clairement distingués de ceux liés à leur fonction, qui, eux, resteraient, quoiqu’il arrive, propriété de l’Eglise.
CATASTROPHE FINANCIÈRE
Elle éviterait ainsi de se retrouver dans la même situation qu’aux Etats-Unis, où les procès pour abus sexuels de prêtres ont été une catastrophe financière pour les diocèses. La question aurait été étudiée, ces dernières semaines, à la congrégation pour le clergé dirigée par le cardinal brésilien Claudio Hummes.
La nouvelle, parue dans La Stampa, quotidien généralement bien informé sur ce qui se passe derrière les colonnades de Saint-Pierre, a été démentie par le porte-parole du Vatican. L’article, illustré par une photo du père Ralph, de la série télévisée « Les oiseaux se cachent pour mourir », symbole de ces passions en soutane, a probablement eu le tort de dévoiler ce qui devait encore rester secret.
Mais, tôt au tard, c’est cette solution qui va s’imposer selon Giancarlo Zizola, un expert des choses vaticanes, qui rappelle qu’« aussi bien le cardinal Ratzinger (le futur pape Benoît XVI) que le cardinal Hummes, se sont déjà exprimés en ce sens ». Quant à l’auteur du scoop, Giacomo Galeazzi, il reconnaît juste une erreur de timing. L’expert sollicité par le Vatican pour donner son avis, Giovanni Franzoni, père conciliaire, ex-abbé bénédictin de la basilique romaine de Saint-Paul, « a parlé trop tôt ».
La question est difficile à régler, et le terrain miné par les décisions du passé. « C’est une solution alambiquée. Juste envers les enfants, moins pour les épouses, qui auront peu de droits. Mais ce qui ne va pas, ce sont ces prêtres qui vont pouvoir continuer à exercer leur ministère alors, qu’ils ont sciemment menti à ces épouses et à ces enfants », lâche Gianni Gennari. Ce théologien et homme d’église s’est marié en 1984, après avoir été « dispensé » de sa fonction de prêtre. Ce qu’il faudrait, dit-il, c’est un peu plus de courage sur le modèle des prêtres mariés de rite oriental. Mais l’église romaine n’est pas à la veille de faire tomber le tabou.
S. A. (Rome, correspondance)