Nous partons du fait que tout le monde connait l’espace, l’activité des mouvements sociaux et donc nous allons seulement nous référer aux questions abordées lors de la rencontre de Genève en octobre 2005 et dans les notes de Paul, Sophie et Josu à propos des mobilisations pendant le sommet de l’OMC à HK.
Point de départ
Sans revenir sur le débat sur la dynamique des forums et le bilan du choix du Conseil international du FSM de réaliser des forums polycentriques en 2006 (une décision contradictoire à celle adoptée l’année passée : ne réaliser des forums mondiaux que tous les 2 ans afin de ne pas gêner les forums continentau), il faut rappeler que le FSM doit faire partie du même processus qui construit des forums à l’échelle continentale. La fréquence annuelle est donc impossible de même d’ailleurs que le retour permanent au Brésil : pourquoi ne pas changer de région à chaque fois ?
Au delà donc de ce débat, le FSM de Caracas a revêtu 2 aspects intéressants : le premier c’est de rapprocher le FSM d’un processus de lutte et d’émancipation et deuxièmement c’est d’être utile aux rapporchements entre les mouvements qui impulsent ce processus et les mouvements sociaux au niveau international.
Cela dit il faut entendre les remarques, critiques formulées sur la structure même du Forum, la façon de l’organiser, les relations entre les secteurs les plus institutionnalisés et les mouvements populaires , éléments qui ont constitué des obstacles à la participation plus massive des mouvements sociaux populaires vénézuéliens.
L’assemblée des mouvements sociaux (qui a rassemblé une forte participation) a constitué un test pour voir comment avancer du point de vue des réflexions que nous avons développé ces derniers mois.
Nous sommes partis des objectifs suivants : nécessité de définir un agenda commun pour les mouvements sociaux au niveau international, donner une expression aux différentes campagnes et initiatives et articuler les mobilisations.
Il est donc utile de ce point de vue de réflechir à ce qui a été fait et ce qui reste à faire.
La dynamique de travail à Caracas
Le premier point à retenir de l’Assemblée des mouvements sociaux est la présence limitée des mouvements vénézuéliens dans les travaux de l’Assemblée, ce que nous avions déjà connu à Mumbaï mais qui est plus difficile à comprendre en Amérique Latine.
En deuxième point il faut signaler qu’il y a eu un travail réel des différents réseaux et initiatives en cours, comme on peut le noter dans l’appel qui reprend les déclarations de ces différents réseaux.
Les points suivants méritent aussi réflexion :
– après la 1re séance de l’Assemblée, premier jour du Forum, (séance qui a permis de faire le point sur la place de l’Assemblée dans le Forum, les conclusions de la réunion de Genève et un tour de parole afin que chacun-e puisse présenter ses propostions et ses préoccupations), le travail n’a pas été vraiment organisé pour les 3 jours suivants du Forum. Au final les choses se sont résolues parce qu’un groupe ouvert auto-organisé s’est chargé d’assurer le travail pour l’ Assemblée finale : écrire un projet de déclaration, rassembler les différentes initiatives et définir un agenda pour 2006.
L’objectif n’était pas seulement d’organiser un agenda fourni mais de définir des priorités et d’en vérifier la faisabilité. Et si les appels et initiatives thématiques ou sectorielles doivent se débattre dans les espaces dédiés, il serait mieux que concernant les points communs à tous de l’agenda (les 4 premiers points de l’appel de Caracas), il y ait un vrai débat dans la sénace pleinière finale.
Le Forum ne sera utile pour les mouvements sociaux que si, au delà le la rencontre, il permet d’articuler les mouvements et d’impulser les luttes. C’est cette perpective que nous devons avoir présente en permanence.
Mouvements sociaux : entre le Forum et l’Assemblée
L’autre aspect à considérer c’est comment organiser l’activité des mouvements sociaux de façon à avancer sur l’élaboration des alternatives et des stratégies de luttes.
Après 6 années d’expériences il semble évident que de ce point de vue le Forum a ses limites : il remplit bien son rôle de cadre de rencontre et d’espace pour des dizaines milliers de militants - organisés ou non- d’ONG, d’intellectuels qui sont essentiellemnt intéressés à connaitre le Forum, à savoir ce qui s’y passe. Cela n’est évidemment pas suffisant.
Ce cadre qui rassemble des orientations et acteurs très divers - pluralité qu’il faut préserver et qui préside aux différentes activités (séminaires, ateliers...) - n’est pas forcément suffisant pour avancer de façon plus précise des alternatives et des stratégies.
Pour cela l’Assemblée des mouvements sociaux doit travailler pus et mieux de façon aborder ces questions pendant les Frorums, comme entre les Forums ; dans une certaine mesure comme cela se passe dans le processus du Forum social européen.
Cela signifie, comme nous l’avons vu lors de la réunion de Genève, que les mouvements sociaux ont besoin au m:oins d’une rencontre annuelle au niveau international avec du temps pour aborder les problèmes évoqués sur l’articulation du mouvement, nos perpectives de travail et la construction de réseaux et d’alternatives.
En somme il s’agit de concrétiser la proposition issue de Genève : organiser un séminaire international - au mois de septembre par exemple.
L’articulation des mouvements et l’Asemblée
L’expérience de Caracas, qui nous renvoie à celle de Mumbaï montre que nous avons besoin d’un minimum de coordination et d’articulation en amont des Forums pour organiser nos activités dans ce cadre.
Quelle coordination minimale ?
En premier lieu celle que l’on doit construire entre les mouvements sociaux du pays dans lequel se tient le Forum et les mouvements au niveau international de sorte que l’Assemblée soit un vrai lieu de rencontre entre les mouvemenst de ce pays et les délégations internationales.
Ensuite il serait utile d’arriver aux Forums avec un accord préalable sur le programme et la méthodologie de travail au moins sur trois aspects :
– la dynamique du travail de l’Assemblée pendant les jours du Forums : pleinières, commissions de travail, présidence etc...
– les propositions de débat en pleinières : essentiellement sur l’agenda et sa réalisation concrète.
– sur la visibilité des initiatives des mouvements sociaux.
Enfin, L’assemblée devrait servir, être utile comme cadre d’articulation et de coordination des initiatives centrales de l’agenda. Il est nécessaire de sortir de l’Assemblée avec une idée avancée de comment travailler, coordonner... pour impulser les mobilisations qui sont décidées.
C’est l’unique façon de voir où on en est et où on va du point de vue de la construction des alliances de la coordination des initiatives afin que l’appel soit un vrai engagement et qu’il ait une traduction concrète.
Rencontre des mouvements sociaux avec Chavez : une bonne initiative mais avec des problèmes
Enfin, nous voulons revenir sur la rencontre avec Chavez à la fin du Forum ; Cette rencontre n’était pas connue de l’Assemblée des mouvements sociaux qui n’a donc pas pu se prononcer sur son intérêt et sa pertinence.
La rencontre fut de fait organisée dans le cadre des relations entre le président -ou ses proches- et des représentants de certains mouvements sociaux latinoaméricains, cependant lors de la réunion, le MST-Brésil a assumé la responsabilité de cette rencontre. Une rencontre qui fut retransmise à la TV et présentée comme rencontre du président Chavez avec l’Assemblée mondiales des mouvements sociaux.
Suite à cela, il y a une question à laquelle ,ous n’avons pas eu de réponse pendant la rencontre elle-même : pourquoi une telle rencontre ne pouvait-elle pas être proposée et discutée dans le cadre de l’Assemblée des mouvements sociaux ?
La présentation qui nous a été donnée : “cette rencontre est organisée à l’initiative du MST avec des invitations particulières”, ne correspond pas ni au scenario de la rencontre (une grande banderolle dans la salle annonçait la réunion comme rencontre entre Chavez et l’assemblée mondiales des mouvements sociaux), ni à la transmission (TV etc...) qui en fut faite.
D’autre part, comment expliquer la présence de représentants de partis poltiques (on ne sait d’ailleurs pas pourquoi majoritairement des partis du Brésil ? Ni pourquoi certains - même brésiliens- pourtant participant à la dynmique du Forum étaient non représentés ? ) alors qu’en tant que tels ils ne font pas partie de l’Assemblée des mouvements sociaux ? De même pour les “intellectuels”, etc...
En troisième lieu quels furent les critères pour choisir de présenter certaines campagnes mais de laisser de côté l’appel approuvé le matin même, qui notamment avançait une définition des relations entre les mouvements sociaux et les gouvernements surgis d’un processus de mobilisation populaire ?
Toutes ces questions mènent à un point : l’utilisation de l’Assemblée des mouvements sociaux pour une réunion avec Chavez qui n’était pas de fait la rencontre avec les mouvements sociaux. Nous ne savons pas si cette situation est liée à l’équipe qui entoure Chavez ou à certains mouvements qui ont organisé cette rencontre en raison de leur relation particulière avec le président.
Dans tous les cas, une initiative qui s’est déroulée sans respecter au moins 2 aspects de base : la transparence face à l’assemblée des mouvements sociaux et la possibilité pour celle-ci de décider des espaces dans lesquels on doit organiser les rencontres, de quelle façon avec quels représentants gouvernementaux.
Piero Bernocchi -Cobas, Italia
Josu Egireun -ESK. País Vasco-