Tokyo Correspondant
Le non-respect des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) était un sujet sur lequel les déclarations à Séoul du président Barack Obama étaient attendues. En Chine, l’hôte de la Maison Blanche a été peu mordant. Il ne l’a pas été davantage à Séoul dans le cas d’un pays certes moins puissant dont la situation a été qualifiée de « pire du monde » par Vitit Muntarbhorn, rapporteur auprès des Nations unies sur les droits de l’homme en RPDC.
Des organisations de défense des libertés civiles avaient exhorté M. Obama à la fermeté : « le problème nucléaire a trop longtemps éludé d’autres questions », estime Elaine Pearson, directrice adjointe pour l’Asie de Human Right Watch. Dans une lettre ouverte au président américain, Timothy Peter, directeur de Helping Hands Korea, rappelle que la Chine rapatrie de force les Nord-Coréens qui passent clandestinement la frontière. Ils seraient actuellement de 30 000 à 50 000. La plupart sont des migrants économiques qui passent temporairement en Chine en quête de travail et de nourriture. Ramenés en RPDC, ils risquent de lourdes peines de prison.
Les organisations de défense des droits de l’homme dénoncent les détentions abusives (de familles entières), les traitements inhumains, les sévices et tortures dont sont victimes les prisonniers. A Séoul, Yong Sang-hyun, député du parti gouvernemental, fait état de 154 000 prisonniers répartis en six camps de travail. Sous la pression internationale, précise-t-il, quatre sur les dix camps existant précédemment ont été fermés et le nombre des détenus, estimé à 200 000 à la fin des années 1990, a diminué. Mais la Croix-Rouge n’a toujours pas eu l’autorisation de s’y rendre. Les prisonniers doivent travailler dix heures par jour. Les rations alimentaires sont minimales et les soins médicaux inexistants. Dans un rapport (« Repression and Punishment in North Korea ») publié en octobre par East West Center à Honolulu, Marcus Noland et Stephan Haggard, qui ont interviewé plusieurs centaines de réfugiés en Chine et en Corée du Sud, estiment que la répression ne viserait plus seulement des opposants, mais serait devenue un vaste système d’extorsion de la part des services de sécurité visant à obtenir des pots-de-vin. Une évolution qui a pour toile de fond, avancent les auteurs, les changements sociaux intervenus au cours de ces dernières années à la suite de l’apparition d’une économie parallèle fonctionnant selon l’offre et la demande.
« Conspiration »
Selon les autorités nord-coréennes, les dénonciations des violations des droits de l’homme relèvent de la « conspiration » des Etats-Unis. Dans un rapport soumis en août au Conseil des Nations unies pour les droits de l’homme, la RPDC rappelle que la protection des droits figure dans la Constitution amendée en avril. Selon des réfugiés récemment arrivés en Corée du Sud, la torture est « moins pratiquée » mais les « traitements inhumains », dont sont victimes notamment les femmes, se poursuivent.
La RPDC est signataire de quatre conventions des Nations unies : sur les droits civils et politiques, les droits économiques et sociaux, les droits des femmes et ceux des handicapés. En ce qui concerne ces derniers, des progrès notables ont été enregistrés et des coopérations existent avec la Croix-Rouge internationale et l’ONG Handicap International, dans le cadre du programme d’assistance de l’Union européenne (UE) à la Corée du Nord.
Un début de dialogue sur les droits de l’homme entre l’UE et la RPDC a été rompu en 2003 par Pyongyang à la suite de l’adoption d’une résolution de la Commission (devenue par la suite le Conseil) des droits de l’homme, condamnant le régime. Le Conseil se prononcera de nouveau le 7 décembre. Le principe de consultations sur cette question entre la France et la RPDC a été retenu lors de la récente visite à Pyongyang de Jack Lang mandaté par le président Nicolas Sarkozy pour s’informer de la situation dans ce pays.
Philippe Pons
UN ÉMISSAIRE AMÉRICAIN À PYONGYANG LE 8 DÉCEMBRE
Le président américain, Barack Obama, a quitté le 19 novembre Séoul, dernière étape de sa tournée asiatique, où il était arrivé la veille. Au cours d’une conférence de presse avec son homologue sud-coréen, Lee Myung-bak, il a appelé la Corée du Nord « à cesser sa politique de provocations ». Il a par ailleurs annoncé qu’un émissaire américain, Stephen Bosworth, se rendra à Pyongyang le 8 décembre « pour engager des discussions directes » avec le régime destinées à relancer les négociations à Six (Chine, deux Corées, Etats-Unis, Japon et Russie) sur la dénucléarisation de la République populaire démocratique de Corée.