Tout au long de ces derniers mois, le NPA a mené une politique unitaire offensive, et c’est lui qui a été à l’origine de la première réunion unitaire. Il ne s’agit pas d’une quelconque posture visant à démontrer on ne sait quoi, mais bien de la compréhension qu’une telle politique est une nécessité profonde et durable.
Dans une situation marquée tout à la fois par la crise globale du capitalisme, une politique brutale de la droite sur le terrain social comme sur les questions des droits démocratiques et la démission des forces traditionnelles du mouvement ouvrier syndical et politique, il importe d’apporter des réponses à la hauteur des enjeux. Il s’agit pour nous de mener un combat frontal contre la politique du gouvernement dans l’indépendance politique vis-à-vis de la gauche de renoncement et d’adaptation au système incarnée par le PS ou Europe écologie.
Mais l’unité s’entend pour nous avec un contenu. Pour ces élections, il nous faut de manière indissociable lier un positionnement anti-crise et anti-droite, la défense sur les terrains programmatique et stratégique d’une orientation clairement alternative à la gestion socialiste des régions.
Du côté du PCF, la position est claire, pas d’accord possible avec le NPA. Les multiples déclarations de ses dirigeants ne laissent aucune ambiguïté sur le sujet et c’est pour des raisons politiques de fond que le Parti communiste nous évince aujourd’hui du cadre unitaire. Le préalable mis par ce parti, la gestion commune des régions avec le Parti socialiste, est inacceptable pour le NPA.
Ce n’est pas une coquetterie de notre part vis-à-vis d’un PS abstrait, mais l’appréciation du cours de ce parti, des politiques qu’il défend. C’est peu dire que nous sommes en désaccord avec le bilan de la gestion socialiste dans vingt régions. Il s’agit par exemple des multiples subventions publiques à des grands groupes privés ou le financement de la formation professionnelle contrôlée par le Medef, pour ne prendre que ces deux exemples. La cerise sur le gâteau, c’est l’évolution même des débats au sein du PS avec la perspective de nombreuses alliances avec le Modem au deuxième tour des élections régionales.
Là encore, il ne s’agit pas d’un procès d’intention, mais d’une politique d’ores et déjà annoncée par de nombreux présidents socialistes sortants. Pour notre part, nous avons la volonté d’appliquer les points essentiels de notre programme, pas de faire le contraire de ce pourquoi nous sollicitons les suffrages des électeurs. C’est aussi avec cette vieille pratique qu’il faut rompre, si l’on souhaite réellement susciter un renouveau à gauche.
Le PCF participe à la gestion de seize régions et entend continuer, voire étendre cette politique. Il l’a dit et redit avec une belle constance. Ce n’est pas, ce ne sera pas notre orientation. Fondamentalement, c’est pour cette raison que depuis deux mois, le PC a refusé toute discussion programmatique. Et il y a bien évidemment un lien entre programme et stratégie : ou bien défendre une politique de rupture avec le système, ou bien un programme « socialo-compatible », il n’y a pas moyen de ruser, car pendant la campagne électorale, la gestion va continuer.
Dans le cours même de la discussion, nous avons essayé de lever les obstacles à un rassemblement de l’ensemble de la gauche antilibérale et anticapitaliste à ces élections. Certains auront même trouvé que nous sommes allés trop loin dans les concessions. Mais parce que nous souhaitons réellement l’unité, nous avons modifié nos positions en cherchant des compromis (*). Il n’est en revanche pas possible d’accepter l’oukaze du PCF. Ce dernier porte donc la responsabilité du processus d’éclatement du cadre unitaire.
Pour ces raisons, disons-le clairement, les possibilités d’un accord national sont aujourd’hui réduites. Mais que ce soit au niveau national ou dans les régions, le NPA, dans les semaines qui viennent, poursuivra les discussions en cherchant à rassembler toutes les forces disponibles pour une telle politique. Ni adaptation au cadre proposé par la direction du PCF ni satisfaction d’un repli solitaire, qui ne constitue pas notre politique. Voilà les deux écueils qu’il faut éviter.
Guillaume Liégard
Voici la proposition que le NPA a faite lors de la réunion du 16 novembre où le Front de Gauche n’est pas venu :
"La possibilité de participer aux exécutifs régionaux dépend donc des rapports de force politiques et sociaux qui conditionnent la politique qui pourrait y être réellement mise en œuvre. Nous avons la volonté d’appliquer les points essentiels de notre programme, pas de faire le contraire de ce pourquoi nous sollicitons les suffrages des électeurs. Nous refuserons donc de participer à un exécutif dominé par le PS ou Europe Ecologie qui mènerait une politique libérale conforme aux exigences du patronat et de l’Union Européenne. Nous refuserons bien évidemment toute alliance avec le Modem ou une quelconque organisation de droite. Notre campagne, comme notre politique si nous sommes élus, n’ont pas d’autre objectif que de permettre aux travailleurs et aux classes populaires d’imposer leurs exigences contre la politique du patronat et de la droite, de porter ces exigences.
Dans le cadre des mesures d’urgences contre la politiques des classes dirigeantes face à leur propre crise, nous proposons quelques mesures de rupture, sur lesquelles nous ferons campagne et que nous sommes prêts à porter dans les conseils régionaux en aidant les mobilisations et en nous appuyant sur elles :
– les transports gratuits et 100 % publics,
– le refus des subventions au patronat et la récupération des aides versées aux entreprises qui licencient,
– un service public de la formation professionnelle et l’arrêt du financement de la formation contrôlée par le Medef, -
– l’arrêt des fonds publics pour les lycées privés, le refus de la précarité pour les personnels des régions…
C’est sur ces points clés programmatiques que s’établit notre stratégie dans les conseils régionaux . Notre campagne comme la politique de nos élus viseront à créer les conditions de leur mise en œuvre."
Il est tout de même significatif qu’au plan national, personne ne veuille de cette formulation qui représente de la part du NPA une concession de taille. La raison de fond, c’est que le PCF a justement une longue tradition de gestion conforme aux exigences du patronat et de l’UE. Il a participé de nombreuses fois à des gouvernements dominés par les socialistes, que ce soit à la tête de l’Etat ou, actuellement, dans 16 des 22 régions. Il ne veut ainsi rien écrire qui l’empêche de continuer. Pourquoi les autres partenaires n’osent refuser cela ? C’est bien dommage.
Considérant qu’il n’était en fait pas invité à une réunion excluant explicitement d’un point de vue « stratégique » sa démarche concernant les exécutifs de région, le NPA n’était pas présent à la réunion du 18 novembre convoquée par le Front de Gauche.
Régionales : entre compromis et ligne rouge
Parallèlement aux discussions nationales, les discussions sur la constitution de listes unitaires de la gauche radicale pour les élections régionales se poursuivent dans chaque région.
Limousin :
Suite aux réunions unitaires nationales, les comités du NPA du Limousin (Corrèze, Creuse, Haute-Vienne) ont provoqué des réunions bilatérales avec les déclinaisons locales des différentes forces politiques : PG, M’PEP, LO, ADS (Alternativedémocratie socialisme, créée en 1991 et issue du PCF après la démission de Marcel Rigout en 1987). À ce jour, le PCF n’a toujours pas répondu à notre invitation.
Après avoir rencontréles uns et les autres au fur et àmesure des rencontres nationales, nous avons proposéune réunion pour aborder les questions programmatiques. LO nous a confirmé ne pas vouloir participer à une liste unitaire mais veut bien parler des luttes. ADS, affiliée à la Fase en Limousin, s’est déclarée autonome vis-à-vis de cette dernière et a voté récemment pour une participation à une liste unitaire avec le PS, dès le premier tour. Par contre, le PG et le M’PEP ont accepté de nous rencontrer pour commencer à travailler sur les compétences régionales et sur les points importants que nous pourrions défendre dans une campagne commune. Le PG n’est pas très homogène suivant les départements, ce qui est à mettre en relation avec l’influence que le PCF peut avoir et surtout avec le lien de ses élus avec ceux du PS. Mais il ne semble pas y avoir de désaccord notable sur les questions du programme ni sur l’indépendance avec le PS y compris dans l’exécutif. Ce que nous savons pour le moment, c’est que leurs fédérations de Corrèze et de Haute-Vienne devraient rejoindre l’avis de celle de la Creuse pour la mise en place de liste autonome du PS au premier tour des régionales. Certains élus PCF grincent des dents et pourraient dans ce cas de figure se placer comme des « dissidents autorisés » et partir néanmoins préserver le « plaçou »1 sur les listes du PS.
Des questions locales, comme celle de la ligne TGV, défendue par les notables du PS jusqu’au Medef et combattue par un collectif de plus en plus puissant dans lequel le NPA tient une place importante, devraient être cruciales dans le choix des uns et des autres.
Correspondant
1. en Corrèze, petit poste offert en échange d’un autre service.
Midi-Pyrénées :
Une troisième réunion de la gauche antilibérale et anticapitaliste s’est tenue au local du NPA de Haute-Garonne, le 11 novembre. Des délégations de la Fase, des Alternatifs, du PG et du NPA ont pu échanger à nouveau sur le programme et la stratégie pour les élections dans notre région. Peu avant la réunion, le PCF, présent aux réunions précédentes, annonçait qu’il ne participerait pas à celle-ci, estimant qu’il était préférable pour poursuivre les discussions unitaires d’attendre les résultats du vote de la conférence régionale de leur parti du samedi 14 novembre.
Le NPA a défendu la nécessité que chaque composante fasse les compromis nécessaires permettant d’aboutir. Présentant les propositions majoritaires issues du CPN, il a précisé que les propositions d’amendement au texte du Front de gauche n’étaient pas à prendre ou à laisser et que, si les formulations ne convenaient pas, il était possible de rediscuter, notamment pour préciser les conditions programmatiques de la participation aux gouvernements de régions. Pour le NPA, il n’y a pas de problème pour affirmer que les élus de la gauche radicale doivent prendre leurs responsabilités pour s’appuyer sur les mobilisations sociales et appliquer son programme lorsque le rapport de forces le permet. En revanche, il n’est pas question de reproduire les expériences de gestion des majorités sortantes dirigées par le PS. Pour le dire autrement, accepter de cautionner dans les institutions l’inverse de ce pourquoi nous nous battons tous les jours, c’est une ligne rouge que nous ne franchirons jamais. C’est une question de principe.
Évidemment, l’absence du PCF à cette réunion n’a pas aidéà faire avancer les choses. Il a tout de même été convenu de se revoir vendredi 20 novembre et, en attendant, de faire circuler de nouvelles formulations d’amendements au texte pour approfondir la discussion. La conférence régionale du PCF s’est majoritairement prononcée en faveur de listes « Front de gauche élargies », même si une forte minorité, amenée notamment par la plus grosse fédération, celle de Haute-Garonne, s’est prononcée pour la reconduction de l’alliance avec le PS dès le premier tour.
Correspondant
Paca :
Le NPA des Bouches-du-Rhône a pris l’initiative d’organiser une première réunion de la gauche radicale en vue de discuter des possibilités d’une liste commune dans la région Paca. Le PCF consulte ses militants sur une proposition de « Front de gauche élargi », qui sera très probablement majoritaire. Le texte soumis au vote comporte toutefois des ambiguïtés telles qu’on ne peut totalement exclure in fine un accord avec le PS dès le premier tour.
Le NPA a proposé un texte programmatique pour une première discussion. Sur ce texte beaucoup de points d’accord se sont exprimés, sauf par la bouche du PCF.
Le NPA a réaffirméque, de son point de vue, les axes qui permettent une politique alternative ne sont pas compatibles avec les orientations suivies par le PS et Europe Écologie. D’autres organisations estiment que cela dépend des conditions issues du premier tour. Le PCF, quant à lui, considère que l’objectif de parvenir à une union avec le PS et Europe Écologie est la condition non négociable d’une campagne commune.
Le PCF s’est aussi exprimé contre la proposition, émise par la Fase et les Alternatifs, de constituer des listes qui mélangeraient des options favorables à une alliance avec le PS et d’autres qui la considèrent incompatible avec une politique de rupture. Pour le PCF, « la question des exécutifs n’est pas une question de second tour, mais de premier tour ».
Le NPA des Bouches-du-Rhône propose, pour parvenir àéclairer cette question, d’aborder ensemble le fond des politiques proposées. Et, au-delà des divergences connues, comme la sortie du nucléaire, de discuter collectivement des points-clé d’une campagne anticapitaliste et antilibérale, il a demandé que les autres organisations initient ce débat par des propositions d’amendement au texte proposé par le NPA des Bouches-du-Rhône.
Une prochaine réunion est prévue le 24 novembre mais on ne sait pas quel sera l’impact sur celle-ci de l’option de fermeture manifestée par le PCF à l’échelle nationale.