Un territoire méconnu
Les années 2006 et 2007 ont vu l’explosion du nombre de suicides de salariés. L’aspect spectaculaire de ces évènements n’a pu échapper à personne et ils ont fait l’objet d’une médiatisation relativement exceptionnelle au regard de ce qui se fait d’habitude en matière d’accidents du travail. Mais une fois passé l’émotion légitime suscitée par ces évènements, les études, analyses et surtout la lutte contre les situations de travail qui ont provoqué ces drames semblent bien marginales.
Tout d’abord il n’existe quasiment pas d’études, ne serait-ce que quantitatives, sur cette question, les statistiques elles-mêmes étant pratiquement inexistantes. Dans un premier temps ceci rend même difficile voire un peu rapide la conclusion que le phénomène prendrait une ampleur significativement beaucoup plus importante ces derniers mois ou années.
Dans ce domaine, comme souvent en matière d’accident du travail ou de maladies professionnelles, on en est réduit à des évaluations reposant sur des recherches locales et partielles.
Au total, il ressort malgré tout de ces études qu’il se produirait environ un suicide au travail par jour, soit entre 300 et 400 suicides par an dans les entreprises. Ce chiffre est à rapprocher des 700 à 800 décès au travail par an en France. Chez les 35-54 ans, un suicide sur 10 serait dû au travail.
En fait, plus encore que les accidents du travail, graves, mortels, les suicides liés au travail sont difficilement quantifiables. Pourtant la législation définit clairement la notion d’accident de travail (article L.411-1 du Code du Travail) : « accidents survenus sur les lieux ou à l’occasion du travail ».
La première difficulté en ce qui concerne le suicide lié au travail est qu’il peut se produire en dehors du champ précis de l’entreprise (lieu de travail et trajet) tout en pouvant être lié explicitement au travail (témoignages, lettre, disquette, messages informatiques, etc.).
Même si l’acte a pour théâtre le lieu de travail, les employeurs vont s’attacher à rejeter hors du travail les causes du suicide. Malgré tout, en raison de son caractère spectaculaire, le suicide, comme l’accident très grave ou mortel peut difficilement être complètement occulté.
C’est la survenance des suicides de ces derniers mois dans des entreprises importantes avec de plus une présence syndicale significative qui a permis de les rendre, par exception, plus visibles.
Cette visibilité de la série de suicides survenue à Renault Guyancourt et à Peugeot Mulhouse notamment a déclenché une couverture médiatique interpellant tous les acteurs et faisant sortir de l’ombre les mêmes actes, habituellement ignorés dans d’autres entreprises.
Ceci a permis de constater que le suicide au travail ne concerne pas une entreprise ou une activité particulière car la multiplication des cas valide le caractère multiprofessionnel du phénomène. Tour à tour, on a vu un grand nombre d’entreprises concernées : outre Renault Guyancourt et Peugeot Mulhouse, France Télécom, HSBC, BNP Paribas, La Poste, Sodexho, Ed, IBM, etc. ont été frappés par de telles tragédies.
Une dénégation systématique
Une fois le suicide connu voire reconnu comme lié au travail, la bataille commence sur l‘interprétation. Pour les employeurs la stratégie consiste à relativiser la part liée au travail. Leur démarche commence par la tentative de négation administrative voire juridique de la causalité du travail. Pourtant, là aussi la loi (article L.411-1) et les dernières jurisprudences sont claires : « est considéré comme accident de travail, quelle qu’en soit a cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelques titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ».
Cette reconnaissance du suicide comme accident de travail entraîne le risque pour l’employeur d’être reconnu responsable de cet acte. En l‘occurrence on peut considérer qu’il ne remplit pas son obligation de résultat en matière de santé et de sécurité au travail et dès lors sa responsabilité peut être engagée pour faute inexcusable dès lors qu’un lien est établi entre le travail et l’acte du salarié.
On pourrait même envisager une mise en examen au titre du code pénal (article 223-13) qui prévoit : « le fait de provoquer au suicide d’autrui est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque la provocation a été suivi du suicide ou d’une tentative de suicide ».
Pour échapper à ses responsabilités, tous les moyens sont bons pour l’employeur qui va tenter de construire un mur du silence et du mensonge autour de l’acte : refus de remplir le triptyque « accident de travail », information malhonnête en direction de l’administration, recours contre la reconnaissance par la Sécurité Sociale du lien avec l’activité salariée, pressions plus ou moins malhonnêtes sur les familles, ses collègues, etc.
Sous ce premier angle, la responsabilité juridique et ses conséquences éventuelles, on voit bien les raisons qu’ont les employeurs d’échapper à leurs responsabilités et les moyens qu’ils mettent en œuvre pour y parvenir.
C’est ainsi qu’ils tentent d’échapper non seulement à leur responsabilité morale mais surtout ils cherchent à toux prix à évacuer les causes profondes et même fondatrices de la souffrance au travail qui peuvent déboucher sur la « solution » extrême qu’est le suicide.
Les déclarations « à chaud » (mais après quand même plusieurs cas, ce qui lui a laissé le temps d’une certaine réflexion...) du PDG de Renault, Carlos Ghosn : « Quand le stress dans l’entreprise atteint des niveaux préoccupants, on ne peut l’ignorer » ne sauraient masquer celles, plus réfléchies, de Laurence Parisot « je pense que c’est très lié au climat général qu’il y a dans notre pays parce que tout est plus dur. C’est plus dur pour l’entreprise de dégager des marges...si nous avions des conditions économiques globales plus favorables, je pense aussi que ça atténuerait la pression qu’il y a dans le travail ».
Au delà du cynisme qui consiste à comparer le stress au travail et les difficultés à dégager des marges pour faire des profits, la présidente du MEDEF nous éclaire sur l’attitude du patronat : tenter d’échapper à toute responsabilité en détachant le suicide de ses liens au travail d’une part et en justifiant d’autre part les problèmes par les difficultés liées à l’économie, c’est-à-dire à la mondialisation, au marché, toutes contraintes considérées comme incontournables.
C’est ainsi que va être systématiquement construite la dénégation de tout lien avec le travail. Tout d’abord par l’affirmation que le salarié avait des « problèmes » d’ordre personnel, des problèmes psychologiques ou physiques plus ou moins largement antérieurs aux faits. Pour ce faire la famille voire les collègues peuvent être eux-mêmes mis à contribution pour construire un environnement et un état psychologique qui serait le responsable principal de l’acte que le salarié à commis contre lui-même.
Ce procédé va avoir comme conséquence éventuelle de permettre à l’employeur de se dédouaner mais aussi de faire peser une responsabilité sur l’environnement personnel et professionnel du salarié.
Dans certains cas l’attitude des collègues ne sera parfois pas forcément très éloignée de celle des employeurs même si les motivations sont très différentes. Il ne s’agit bien évidemment pas là d’échapper aux responsabilités morales, juridiques ou financières de l’acte liées au rapport employeur/salarié, mais les collègues peuvent être tentés d’échapper à la culpabilisation morale, sociale. Plus on est proche professionnellement ou personnellement du salarié et plus on aura le sentiment de ne pas avoir perçu la gravité de la situation, de ne pas avoir su et pu prévenir l’acte.
Ensuite en relativisant voire en niant toute difficulté dans le travail ou en renvoyant les difficultés au comportement du salarié lui-même et non à l’organisation du travail, à l’attitude de la hiérarchie ou des collègues.
Ici l’objectif est de personnaliser le mal-être au travail du salarié. Il s’agit de faire reposer ce mal-être non pas sur l’organisation, la charge de travail, le comportement de la hiérarchie, le climat social dans l’entreprise mais sur l’attitude et le comportement du salarié. Pêle-mêle l’employeur fera des allusions à des difficultés professionnelles (compétences insuffisantes, manque de rapidité, etc.), à des exigences de reconnaissance professionnelle surestimant les qualités intrinsèques du salarié, à des difficultés relationnelles avec des collègues, à des problèmes de santé physiques ou psychologiques sans lien direct avec le travail mais nuisant à la réalisation de celui-ci, voire encore à des déboires sentimentaux, etc.
Une prise en compte encore insuffisante
Face à cette dénégation systématique, à cette culpabilisation des proches familiaux, amicaux, professionnels, la réponse syndicale reste encore largement à construire. D’une façon générale les questions de santé et sécurité au travail sont peu prises en charge par le mouvement syndical.
Centré sur le rapport strictement salarial, l’activité syndicale majoritaire laisse de côté l’approche « conditions de travail » dans la lutte contre l’intensification du travail, l’augmentation de la productivité, de la rentabilité, objectifs permanents du capital. Ces questions, dans le meilleur des cas, sont l’affaire de spécialistes qui se retrouvent dans les Comités Hygiène Sécurité Conditions de Travail. Ces spécialistes sont ainsi souvent isolés dans un domaine qui suscite le plus souvent peu d’intérêt de la part du syndicat voire de la méfiance. Méfiance car la lutte sur ces questions risquerait, selon certains, de cautionner un aménagement du système plutôt que sa contestation fondamentale. Sans compter les errements dramatiques comme sur la question de l’amiante qui a vu pendant des années toutes les confédérations syndicales participer au Comité Permanent Amiante en pleine concertation pour ne pas dire compromission avec les lobbies de la profession et leurs adjoints du corps médical. Il a fallu que naissent hors du champ syndical des associations telles Alerte ou l’Andeva pour que les syndicats modifient vraiment leur approche.
Faiblesse de la mobilisation syndicale et dénégation de l’employeur se conjuguent pour un même résultat : en même temps qu’il essaye d’échapper à ses responsabilités et à exonérer l’entreprise, l’employeur tente de mettre hors champ le syndicat et le CHSCT ou à s’ allier en leur sein des représentants syndicaux.
Au final tout va dépendre de l’attitude des équipes syndicales locales, de leurs capacités et de leur volonté à expliquer, dénoncer et faire condamner les pratiques de l’entreprise.
La première bataille est celle de la réponse immédiate à l’annonce du suicide. Le premier enjeu va être de faire connaître, admettre le suicide comme acte commis dans le cadre du travail. L’information des salariés et la première réponse de ceux-ci sont des éléments essentiels. Le débrayage, l’arrêt de travail immédiats donnent immédiatement son sens à l’acte : sa relation avec le travail. L’attitude de l’employeur peut être variable : prise en charge immédiate de l’information ou au contraire tentative de la garder secrète ou de la déformer. Pour éviter toute riposte immédiate des salariés, l’employeur peut aussi arrêter la chaîne, fermer l’atelier voire l’entreprise, le temps que la colère et l’indignation (« mauvaises conseillères ») s’amoindrissent. A l’information aseptisée, compassionnelle le syndicat doit opposer l’indignation et la solidarité, le refus de toute connivence et la dénonciation immédiate des causes liées au travail.
La deuxième bataille c’est la reconnaissance à la fois juridique sociale et morale de l’employeur. Comme on l’a vu il s’agit d’enjeux essentiels pour le patronat. Le syndicat doit à la fois « surveiller » le processus administratif (déclaration d’accident, reconnaissance par la Sécurité sociale, etc.) et commencer la mise en évidence des responsabilités de l’employeur, de l’organisation du travail et de ses modifications, de l’intensification du travail, et du mode de management, etc. Le travail en parallèle avec le CHSCT ne sera possible que si le(s) syndicats majoritaire(s) dans cette institution représentative du personnel sont d’accord pour mener jusqu’au bout la bataille sur cette question. Jusqu’au bout car il s’agira en réalité de combats qui pourront se prolonger sur plusieurs années mobilisant compétences juridiques, moyens financiers et surtout pèseront moralement, jusqu’à l’usure et au renoncement parfois, sur toutes les personnes concernées.
Le troisième combat consistera à gagner l’appui de la famille élément indispensable à a fois pour la bataille idéologique contre les affirmations mensongères des employeurs mais aussi pour engager las batailles juridiques qui ont pour objectif de faire payer dans tous les sens du terme l’employeur.
A Peugeot Mulhouse, le syndicat CGT s’est retrouvé syndicalement isolé dans l’entreprise et a engagé un élargissement à la fois au-delà du site (aux autres entreprises du groupe, de l’automobile, de la région et plus généralement de la métallurgie) et au-delà du champ traditionnellement couvert par le syndicalisme en mettant en œuvre une expertise et un travail de réflexion, de débats et de concertation ouverts à des experts, médecins, psychiatre.
C’est ainsi qu’une première réunion régionale s’est déroulée en septembre 2007 réunissant des syndicalistes de la métallurgie consacrée aux échanges sur la souffrance au travail et à la pose de jalons pour une réflexion et des actions sur cette question. Cette journée fut suivie d’une autre autour de Peugeot Sochaux quelques mois plus tard regroupant syndicalistes et chercheurs.
Dans le même temps à Renault Guyancourt à partir des 3 suicides intervenus entre 2004 et 2006 et des 3 survenus entre 2006 et 2007, au delà des protestations immédiates s’est surtout développé une action d’expertise engagée par le CHSCT qui a contribué à un débat auquel la Direction n’a pas pu échapper.
Malheureusement les volontés apparemment parallèles de la Direction et des organisations syndicales de recherche des causes et des solutions ont débouché sur la mise en place condamnable d’une « commission relative à ’amélioration des conditions de vie et de travail ». En effet l’objectif de cette commission est de se substituer en le contournant au CHSCT. Son mode de mise en place vise à ôter aux organisations syndicales leurs prérogatives en la matière : non respect de la représentativité des différents syndicats, confidentialité des débats et informations, association des syndicats à « une politique de régulation organisationnelle » (Préconisation du rapport commis par Technologia, expert mandaté par la Direction). Ensuite ce contournement peut permettre de relativiser les droits et pouvoirs du CHSCT (droit d’alerte, droit d’expertise, etc.). Il est particulièrement dommageable que cette mise en place se soit fait avec l’aval de toutes les organisations syndicales y compris de la CGT (après un certes un âpre débat et des manipulations d’une partie de la direction du syndicat).
Des réflexions, des ripostes à construire
Des études, expertises, débats militants sur la souffrance au travail, il ressort des conclusions qui brisent les partages entre les différentes entreprises, différentes régions, différents métiers et dégagent des causes communes à cette souffrance (cf. Rapport de la Commission Thématique violence, travail, emploi et santé dirigée par Christophe Dejours) :
• l’intensification du travail par l’augmentation des cadences, la suppression des temps des pauses et des « respirations » s’accompagnant de l’allongement de la journée ou de la semaine de travail au nom du « travailler plus pour gagner plus » et aussi des l’allongement des temps de trajets domicile-lieu de travail. Dans ce domaine l’augmentation des Troubles Musculo-Squelettiques fournit un indicateur incontournable ;
• la réduction des effectifs s’accompagnant de l’augmentation des charges de travail, de réorganisations subies pour ceux qui restent et de licenciements et/ou sanctions pour ceux qui n’acceptent pas les plans « sociaux » ou de « sauvegarde de l’emploi » ;
• les réorganisations liées soit à des fusions/acquisitions soit à des restructurations internes et qui s’accompagnent de bouleversement des processus de travail, des modifications de postes de travail, de changement de mode de management ou de « gestion des ressources humaines » ;
• la flexibilité vis-à-vis de l’emploi, des statuts, des places, des fonctions, des horaires ;
• l’individualisation du travail (évaluation des performances, qualité totale) qui enferme le salarié dans un rapport solitaire au travail, à ses résultats, a sa hiérarchie ;
• la parcellisation et la division technique et sociale et sexuelle du travail qui fait des travailleurs de véritables mutilés du travail dessaisis de plus en plus de toute compréhension du processus productif et de toute capacité d’action sur ce processus ;
• Les méthodes managériales par lesquelles les pressions exercées sur la hiérarchie avec la descente au plus bas de la structure de l’entreprise de la notion de centre de profit entraînent une exacerbation des rapports hiérarchiques quelque soit l’activité. N’ayant, en général, même plus de reconnaissance par la compétence professionnelle dans l’activité concernée (ce qui était le cas des anciens chefs d’équipes, contremaîtres, voire chefs d’ateliers), ces hyper-spécialistes d’Excel décorent les couloirs et les bureaux mais avant tout reportent la pression qu’is subissent sur les salariés.
Au total ce qui est frappant c’est qu’au delà d’un dosage des maux particuliers à chaque profession, à chaque métier, c’est l’’ensemble des salariés qui sont touchés par la dégradation des conditions de travail, l’augmentation des accidents, des maladies professionnelles et des suicides qui en découlent.
Même si le phénomène n’est évidemment pas franco-français, la réorganisation accélérée de l’appareil productif à partir du début des années 70 donne un tour particulièrement grave à la situation.
Le patronat français s’est trouvé confronté à une double crise : d’une part une rentabilité, des taux de profits plus faibles que les pays capitalistes directement concurrents et à une crise des rapports sociaux (dont Mai 68 ne fut qu’un des éléments). Pour y répondre, il s’est lancé dans un bouleversement de l’organisation de la production visant d’une part à augmenter la productivité, d’autre part à briser toute possibilité de riposte collective à la dégradation du rapport des forces entre le capital et le travail.
S’appuyant sur une gestion statistique du chômage patrons et gouvernements ont ainsi soigneusement entretenu la crainte de la perte d’emploi. C’est ainsi qu’ils ont pu mettre en œuvre cette politique sans susciter les ripostes à la hauteur des enjeux, largement soutenus à partir des années 80 par la politique de la gauche qu’elle soit au gouvernement ou dans l’opposition.
Cette politique en développant l’individualisation du rapport au travail a, non seulement, développé le stress mais aussi interdit la construction des collectifs de résistance. Cette individualisation s’accompagne d’une exigence d’adhésion au projet d’entreprise (notamment par le développement d’une communication interne redoutable) qui favorise une mise en porte-à-faux entre ces valeurs (rentabilité, qualité totale, zéro défaut) et la réalité du travail effectué. Ces situations de mal-être étant, de plus, amplifiées à la fois par la suppression des pauses, des temps morts, des temps de respiration et par la fragilisation de la séparation entre vie privée et vie professionnelle. Téléphones portables, ordinateurs, horaires annualisés, tendent de plus à relativiser la rupture ente les temps de travail effectif et les temps de repos.
Un terrain à conquérir, des batailles à construire
Il est vital pour le mouvement syndical de s’engager enfin clairement sur le terrain de la lutte pour la santé au travail. La recherche du profit maximum s’accompagne en permanence de l’accroissement de la souffrance au travail.
Cette activité syndicale doit se déployer dans plusieurs directions :
• faire connaître les situations de mise en danger des salariés et la réalité des accidents graves, mortels et suicides le plus largement possible. La loi du silence ne rend service qu’aux responsables de ces situations c’est-à-dire aux employeurs.
• étudier les questions au fond à la fois dans l’analyse de l’existant (conditions de travail, cadences, pénibilité, risques de maladies professionnelles, etc.) et dans les recherches de solution, d’améliorations. Des outils efficaces existent (droit de retrait du salarié, droit d’alerte du CHSCT, droit à l’expertise des CHSCT et des CE) mais restent trop peu exploités.
• construire des axes de résistances en associant les salariés aux travaux évoqués ci-dessus.
• Retisser les liens par la mobilisation, la syndicalisation et tendre à tout propos et à tout instant à créer du « collectif » au travers des « petites » actions immédiates de riposte à la hiérarchie jusqu’aux mobilisations plus importantes de toutes sortes.
Ceci ne peut se faire qu’en faisant de l’investissement du syndicat dans les CHSCT une priorité tout en renforçant la logique syndicale dans ceux-ci. En effet les CHSCT sont aujourd’hui une des cibles prioritaires des employeurs pour une « dépolitisation » des relations de travail.
Enfin le mouvement syndical à la fois par l’information mais aussi par la concertation, la coordination de cette réflexion, de ces actions disparates doit amorcer une centralisation de la bataille sur les conditions de travail pendant indispensable à la bataille pour un autre partage des richesses. Le blocage quasi complet des négociations sur la pénibilité n’est possible que par la grande faiblesse de l’activité syndicale sur ces questions. La partie visible de l’iceberg de la souffrance au travail que constituent accident mortels et suicides doit alerter et entraîner le mouvement syndical pour amplifier son action dans ce domaine, au risque sinon d’échouer dans une de ses missions essentielles.
Robert Pelletier