A quelques pas de l’entrée du forum social des Amériques, une quinzaine de personnes s’essaient à la construction d’un habitat en bambou. Cet atelier pratique est initié par l’association Takuara Renda, « le monde du bambou » en Guarani. Depuis dix ans maintenant, les membres de cette organisation située à 100 km environ au sud-est d’Asuncion visent à ce que les populations rurales du Paraguay regagnent ou conservent leur autonomie. Guillermo est le fondateur et directeur de Takuara Renda. Architecte, il a pris conscience il y a plusieurs années que « notre type d’habitat n’était pas naturel et ne répondait pas au schéma organique ». La contradiction entre une ville totalement structurée, « protégée du sol, du froid et de la lumière » face à un paysage « entièrement libre », le heurte. « Dans la culture guarani, on ne sépare pas l’homme de la nature, on les pense ensemble », rappelle t-il.
Récupérer les eaux de pluie
Convaincu que « l’habitat représente la manière dont on vit », Guillermo se penche alors sur le besoin de lieux ouverts dans une forme pentagonale – et non pas rectangulaire comme il est d’usage courant – pouvant combiner extérieur et intérieur. L’un des premiers défis va consister en la mise en place d’un système de récupération des eaux de pluie et de filtration afin de la rendre potable. L’association va aussi progressivement se tourner vers la construction en bambou qui offre de multiples facettes comme le rappelle Guillermo dans l’entretien ci-dessous.
Le choix d’une technique simple permet une appropriation par tous et leur diffusion. Guidées par les principe de la permaculture – « la culture de la permanence » -, les méthodes enseignées par l’association ont le mérite de « prendre soin de la terre et du monde ». S’il est difficile pour Guillermo de mesurer le nombre de personnes qui sont passées par Takuera Renda, l’essentiel pour lui demeure la transmission qui résulte de cet enseignement. Les échanges réalisés avec des groupes de paysans et de communautés indigènes au Guatemala, au Mexique, à Cuba, au Brésil, en Argentine, en Bolivie et au Paraguay sont autant de graines semées pour l’avenir.
Transformer nos vies
« Dans le cas du Guatemala par exemple, explique Guillermo, la récupération des eaux de pluie a transformé la vie de centaines de famille. Les femmes devaient en effet parcourir quatre kilomètres par jour pour chercher dix litres d’eau. Elles ont désormais du temps pour autre chose. » Alors qu’une grande partie de la population au Paraguay connait une grande pauvreté, cette méthode d’écoconstruction adaptée à la région redonne de l’autonomie et une meilleure qualité de vie aux communautés, de manière totalement soutenable.
Maxime Combes