Londres,
C’est le plus grand arrêt de travail national qui ait eu lieu depuis la grève générale de 1926. Les services municipaux et les transports publics ont été fortement immobilisés. Particulièrement à Newcastle, dans le nord-est de l’Angleterre, ainsi qu’en Irlande du Nord. La fermeture du tunnel de Mersey, à Liverpool, a bloqué des milliers d’automobilistes se rendant au travail, tout comme la fermeture du métro de Glasgow. 17500 écoles ont été fermées pour la journée, tout comme de nombreuses bibliothèques et des centres de loisirs. La collecte des ordures n’a pas eu lieu, les services funéraires n’étant même plus assurés. Un peu partout, les salariés ont organisé des piquets de grève devant les bureaux municipaux, les commissariats de police, les universités. Ils ont aussi organisé des manifestations locales qui ont été mieux suivies, pour des événements de ce type, que par le passé. À Londres, une manifestation centrale, qui s’est tenue à la fin de la journée, a rassemblé des milliers de grévistes.
Onze organisations syndicales d’employés municipaux avaient appelé à cette journée de grève contre la remise en cause de la « règle des 85 », qui permet aux employés municipaux de prendre leur retraite à taux plein à 60 ans, dans la mesure où l’addition de leur âge et de leurs années de service atteint 85 ans.
Une attaque du même type a déjà eu lieu, l’année dernière, contre un plus grand nombre de travailleurs du secteur public (fonctionnaires, enseignants, santé). S’il y avait eu une réaction unitaire à l’époque, il aurait été possible d’avoir encore plus de travailleurs en grève et d’améliorer les chances de faire reculer le gouvernement. Malheureusement, en octobre 2005, les dirigeants des autres syndicats du secteur public, y compris celui du syndicat des enseignants et des fonctionnaires, avaient passé un accord qui permettait aux cotisants actuels des caisses de retraite de garder le droit de partir à 60 ans, mais qui impliquait que les nouveaux embauchés travaillent au moins jusqu’à 65 ans.
Mais même ce compromis ne fut pas proposé aux travailleurs municipaux. Ils se sont donc sentis traités comme une sous-catégorie de fonctionnaires, d’autant que la plupart sont des femmes. Après la grève, le New Labour a enfoncé le clou en avançant au 30 mars le dépôt de la loi au Parlement, pour accélérer son introduction. Tout cela se passe également dans un contexte où un rapport du gouvernement propose de passer l’âge de départ la retraite à 68 ans d’ici 2050 ! Les syndicats concernés ont réagi avec colère à ces changements, et Unison, le plus grand d’entre eux, a prévenu que la grève du 28 n’était qu’un début et a déposé un programme d’actions ciblées qui concernera plus d’un million de membres au cours du mois d’avril. Le Labour, commme les patrons du secteur privé, traite les employés municipaux de privilégiés. Pourtant, avec une retraite moyenne de 3 800 livres (5 500 euros) par an pour les hommes, et de 1 600 livres (2 300 euros) pour les femmes, beaucoup d’employés municipaux sont plongés dans la pauvreté pour finir leurs jours. Comparer à la retraite moyenne de 240 000 euros des directeurs des 100 plus importantes entreprises britanniques...
Unison, tout comme d’autres syndicats, a prévenu qu’il envisageait sérieusement d’appeler à la grève le 4 mai, le jour des élections municipales. Cela décuplera l’audience de cette lutte et menace de sanctionner par les urnes tous les candidats des partis qui soutiennent l’attaque contre les retraites. Chose qui ne s’est jamais vue, le Labor Link, le comité d’Unison qui s’occupe des relations avec le Labour et qui lui verse des donations, vient de décider de suspendre toute donation et toute distribution de tracts en faveur du Labour dans toute l’Angleterre, tant que le conflit n’est pas réglé.