La mobilisation ne faiblit pas.Les manifestations qui se succèdent sont toutes des succès. Et le gouvernement aura beau mentir et mentir encore sur les chiffres, sur la nature de sa réforme, il ne peut pas masquer l’ancrage de la mobilisation, la profondeur du rejet de sa politique. Celles et ceux qui manifestent sont très nombreux et ils représentent une immense majorité de la population. C’est le signe d’une crise sociale et politique plus importante encore que celles de 2003 et de 1995. Le pouvoir s’acharne et il peut le payer très cher. Plus il attend, plus il devra concéder, voire céder sa place. Et au NPA, nous nous en réjouissons.
Oui, nous pouvons gagner. Pour cela, il ne faut rien lâcher, continuer à faire des temps forts décidés par l’intersyndicale nationale et les intersyndiales locales des démonstrations de force. Mardi, il faut que la grève soit massive dans le public comme dans le privé et que les manifs soient au moins aussi importantes, voire plus importantes que celles de mardi dernier.
Mais il faut aller plus loin, il faut que de plus en plus de travailleurs s’engagent dans la grève reconductible Il faut que le jeunesse de ce pays concrétise de plus en plus fort la jonction avec les salariés symbolisant la solidarité entre les générations qui est au cœur de la retraite par répartition. Il faut que les actions de blocage qui ont démarré se multiplient, quitte à ce qu’il n’y ait plus de pétrole, que plus rien ne roule, ni trains, ni avions, ni camions, que pas un bateau n’entre ni ne sorte d’un port, que l’activité des entreprises soit gelée. En quelques jours, quand l’économie sera paralysée, que le patronat commencera à voir fondre ses bénéfices, alors le pouvoir sera forcé de capituler.
Ni négociable, ni amendable, retrait du projet de loi ! Sarkozy, Fillon, DEMISSION !
NPA, 15 octobre 2010
PARTOUT COMME DANS LES ARDENNES : GRÈVE GÉNÉRALE RECONDUCTIBLE !
L’intersyndicale (CGT, CFDT, FO, FSU, Solidaires, Unsa, CFE-CGC) des Ardennes a voté vendredi à Charleville-Mézières un appel à la grève générale reconductible à partir de demain contre la réforme des retraites. Les responsables syndicaux partant d’un constant de « vrai ras-le-bol » et d’une « saturation » du fait que « le gouvernement ne prenne pas en compte les revendications et les attentes de la population ». « Pour nous c’était une démarche naturelle », a déclaré la secrétaire générale de la CFDT des Ardennes.
Cet appel sera débattu dans les entreprises ardenaises lundi matin. On annonce des débrayages à l’usine PSA (Peugeot Citroën) de Charleville-Mézières, qui compte 2.300 salariés.
Faisons partout pareil ! Pour un nouveau mai 1968 aux couleurs du XXIe siècle !
LE GOUVERNEMENT CHERCHE À BRISER LA GRÈVE DES RAFFINERIES AU HAVRE ET À GRANDPUITS
A la raffinerie Total de Grandpuits et au dépôt de la CIM au Havre le gouvernement se lance dans des tentatives désespérées pour briser les grèves.
A la CIM au Havre, ce dimanche matin, alors que 95% des ouvriers sont en grève avec piquet, la direction a débarqué par la mer un groupe de cadre pour relancer l’expédition de gazole vers Roissy. Le directeur du site affirme ne pas avoir décidé de cette expédition, le préfet prétend ne pas être informé. Pourtant un courrier émanant du cabinet de Borloo commande la réouverture de l’approvisionnement de Roissy « par tous les moyens ». Les derniers ouvriers au travail ont rejoint la grève. La sécurité du site n’est plus assurée par les grévistes. Le gazole envoyé dans le pipe de Roissy n’a pas été échantilloné. Cette intervention des cadres, quellle que soit leur compétence dans leur domaine normal et statutaire de travail, met clairement en danger la sécurité du site (plus grosse zone seveso II de France) et la sécurité des avions. Les grévistes du Havre invitent les passagers des appareils passant par Roissy à prendre connaissance de cette information.
Plus grave encore, à la raffinerie de Grandpuits, les forces de l’ordre sont intervenue ce matin (dimanche) et la préfecture de Seine-et-Marne a pris un arrêté afin de requérir du personnel « pour procéder au chargement et à la livraison des clients de la raffinerie » Total de Grandpuits. pour répondre aux « difficultés d’approvisionnement en carburants en Seine-et-Marne ainsi que dans la région Ile-de-France »
Les trois salariés de la raffinerie, concernés ont été menacés de cinq ans d’emprisonnement s’ils refusaient.
Nous sommes entré dans une nouvelle phase du conflit. Le gouvernement, pris de panique veut semer la peur dans notre camp. L’heure est à la protection des grèves par leur généralisation à l’ensemble des secteurs d’activité.
Dimanche 17 octobre 2010.
EFFERVESCENCE VENDREDI SUR LA CANEBIÈRE
A 11 h ce sont plusieurs centaines de travailleurs qui, dans un premier temps se sont rassemblés à l’appel de la CGT, de la FSU et de Solidaires devant le siège de l’Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône (le MEDEF local). Sa façade était rapidement recouverte d’affiches « Touche pas à mon éducation », « Touche pas à ma santé », « Touche pas à ma retraite », « Touche pas à ma poste », comme il y a quelques jours elle avait été recouverte par les feuilles de paye des travailleurs du port visé par une odieuse campagne, à grand renfort de placard publicitaires sur le thème « Touche pas à mon port »
En même temps convergeaient sur la Canebière des centaines de lycéens venus surtout des établissements professionnels, en rang serrés, dynamiques, joyeux et déterminés auxquels se joignaient un nouveau cortège, celui de la Coordination des enseignants. Tout le monde se retrouvait devant le siège du MEDEF puis un cortège se formait pour se rendre devant la Marie où arrivaient trois chaloupes des ferries de la SNCM desservant la Corse au milieu des fumigènes et des fusées de détresse.
Intervenant au nom de l’intersyndicale un responsable de la CGT appelait les manifestants à poursuivre les grèves reconductibles et à la solidarité face aux provocations policières.
En même temps sur le Vieux Port se rassemblaient, de leur côté, hélas sans jonction avec les autres manifestants, environ 200 employés municipaux à l’appel de FO.
VALENCIENNES : JOURNÉE DE CONVERGENCE À LA BASE...
Vendredi 15, six heures, rendez-vous au piquet de grève des cheminots. Jusqu’ici, les journées nationales de grève ont regroupé de plus en plus de monde, des salariés du public et du privé, des jeunes et des retraités, des victimes de l’amiante, nombreuses dans le Valenciennois. Mais maintenant il faut passer un cap, se coordonner pour occuper le terrain, construire la grève générale à partir des secteurs en lutte. Alors ce vendredi, on se regroupe : des profs en grève reconductible sont là, un groupe de métallos d’Alstom aussi qui reconduisent la grève à raison d’une heure par jour.
Deux jours avant, à Alstom, profs, cheminots, métallos d’autres entreprises s’étaient rendus à l’entrée de l’usine. 250 avaient débrayé. Depuis, on se rencontre à l’entrée de l’usine, à l’heure du débrayage pour bloquer ensemble un rond point ou le pont de l’autoroute. Si on veut tenir, il faut s’encourager, montrer aux salariés qu’ils ne sont pas isolés.
Ce vendredi, tous les secteurs mobilisés participent à l’action des cheminots : torches, musique à la sono (MAP, Jolie Môme…), les rares trains qui circulent sont bloqués pendant deux heures.
Un groupe de lycéens sur le quai se joint à nous. Après le blocage des rails, direction la route et le pont qui surplombe la gare. Klaxons d’encouragements de nombreux automobilistes. La circulation est bloquée pendant une heure. A 500 mètres de là, le lycée technique vient d’être bloqué par 400 jeunes. On les rejoint et on fait le tour de la ville en manif. On passe devant la CCI de la ville dont on avait occupé le toit deux jours plus tôt. Les autocollants sont restés sur la façade. Les drapeaux syndicaux changent de main, les jeunes prennent le relais. Au centre ville, on croise un autre cortège de 500 lycéens du lycée professionnel. Nouvelle manif au pas de charge.
Il est 11 heures, c’est l’heure de l’AG des cheminots. Flottement, impatience. A Hellemmes, dans la banlieue de Lille, la CGT veut reprendre le boulot lundi : « on peut pas tout bloquer à nous tout seuls ». Coups de fil, Somain, Dunkerque, les autres AG cheminots tiennent bon. Pas possible de céder maintenant, les cheminots de Valenciennes reconduisent la grève. Midi, direction Faurécia Siénor, un équipementier automobile à vingt minutes de Valenciennes où la section CGT a appelé à se rassembler devant l’usine. Dans la région, une quinzaine d’entreprises de la métallurgie a été touchée par des débrayages d’une ou deux heures depuis le début de la semaine. L’USTM-CGT a lancé lundi un appel à la grève reconductible au niveau régional. Reste à convaincre et entraîner. Comme à Alstom sont présents des profs, d’autres salariés de la métallurgie et des militants CGT de Sevelnord-PSA. Une trentaine de salariés débrayent. Prise de parole, conférence de presse et on part en manif à une
soixantaine en ville et dans la zone industrielle.
Samedi la manifestation est encore plus importante que celle du 2 octobre. Le mouvement tient bon. Cheminots, profs, métallos, on se retrouve lundi matin en AG interprofessionnelle et intersyndicale et on remet ça.
UNITÉ ET RADICALITÉ : TOULOUSE À LA POINTE DU COMBAT
La ville rose est à la pointe du combat. Proportionnellement à la taille de l’agglomération, les manifestations sont souvent plus importantes qu’ailleurs et rien à voir avec la chanson de Nougaro qui disait qu’« à Toulouse, même les mémés aiment la castagne ».
L’intersyndicale interprofessionnelle fait partie de celles qui ont le plus poussé à la lutte, notamment en ajoutant aux journées appelées par l’intersyndicale nationale, des journées locales qui permettent de donner un second rendez vous dans la semaine aux secteurs les plus engagés dans la lutte et au soutien à ces derniers. Ainsi, jeudi 14 octobre, les lycéens ont pu faire la jonction avec les travailleurs des divers secteurs en grève reconductible, notamment les cheminots. La manifestation dynamique a rassemblé plus de 10 000 personnes, dont un gros tiers de jeunes. Forte de ce succès, l’intersyndicale départementale appelle à une nouvelle journée le jeudi 21 octobre. C’est encore elle qui organise des actions interprofessionnelles de blocage.
Côté lycéens, le mouvement s’étend toujours. Les lycéens ont manifesté jeudi et vendredi massivement mais ils étaient moins nombreux samedi. Samedi après-midi de nombreux représentants de lycées de l’agglomération se sont retrouvés en coordination pour la première fois, afin de se structurer démocratiquement, de gagner en efficacité, de discuter des méthodes d’implantation de la grève dans les lycée, de planifer les actions. La coordination a en outre désigné des porte paroles, pris contact avec les enseignants en grève et les fédérations de parents d’élèves.
RAFFINERIES : CA Y EST C’EST PARTI POUR GAGNER !
Depuis le 14/10 à 22H, les salariés de la raffinerie d’EXON MOBIL Gravenchon (la 2e plus grosse de France) sont en grève avec arrêt des installations à l’appel de la CGT.
Du jamais vu depuis 1968, c’est désormais l’ensemble des 13 raffineries qui est en grève avec arrêt total des expéditions de carburant vers les stations services et dépots.
Les procédures d’arrêt de telles installations durent au minimum 4 jours. Bien que les 13 raffineries françaises soient en procédure d’arrêt total des installations, toutes les raffineries ne sont pas au même niveau. Certaines comme les raffineries Total de normandie, Total Donges ou Total Grand Puits avaient commencé plus tôt que les autres malgré la pression et les menaces des directions.
La pression maximum étant de mise à Grand Puits car elle alimente le bassin parisien et les aéroports, la direction locale menace de mettre la raffinerie en dégazage en vue d’une fermeture du site. La CGT TOTAL a organisé et prévenu qu’aucune relève de personnel ne serait faite lundi matin sur tous les sites TOTAL si la direction dégazait la raffinerie de Grand Puits.
MARSEILLE : LES « TATAS » EN LUTTE
Depuis le 23 septembre, les agents des cantines de Marseille sont en grève reconductible contre la réforme des retraites. Entretien avec Françoise, concierge dans une école marseillaise et militante CGT et NPA.
Comment a débuté la grève ?
Le mouvement a commencé le 23 septembre, après que l’intersyndicale a déposé un préavis reconductible pour l’ensemble du personnel de la ville de Marseille, de la Communauté urbaine et du Centre communal d’action sociale (CCAS).
Il faut noter que FO, syndicat très majoritaire, est absent de l’intersyndicale et n’appelle pas à ce mouvement reconductible.
Malgré cela, celui-ci est très fort dans les crèches et tout particulièrement dans les écoles. Environ 200 cantines sur 350 sont fermées depuis le 23 septembre. Il faut préciser que les statuts de la fonction publique territoriale permettent de faire une, deux, trois heures de grève, ou la demi-journée. Sans quoi, vu le salaire moyen des filles des écoles, ou des crèches, celles-ci seraient vite étranglées financièrement.
Mais cette possibilité de grève partielle est très combattue par l’administration qui multiplie les pressions auprès des agents, essayant de leur faire croire que cela est illégal.
Comment expliques-tu cette combativité ?
À la CGT, on pense que nos collègues ont clairement perçu les conséquences qu’aurait sur leur retraite l’application de cette réforme. Elles ont tout de suite compris la nécessité de se battre, en tant que salariées et en tant que femmes.
À Marseille, les « tatas » comme on les appelle, sont devenues le symbole de la lutte contre la réforme des retraites. À cette occasion, toute une série de revendications et de colères ressort. Combien d’entre nous arrivent à l’âge de la retraite usées physiquement et nerveusement, et étranglées financièrement ? Malgré le gros travail de terrain de l’intersyndicale, nous sommes nous-mêmes surprises d’un tel suivi du mouvement sans le syndicat majoritaire.
Y a t il eu des contacts avec d’autres secteurs en lutte ?
Oui, et particulièrement avec les enseignants. Nous avons participé dans l’unité à une assemblée générale (AG) des professeurs d’écoles et à une réunion à l’école de la Busserine à laquelle participaient des associations, des parents d’élèves, des syndicalistes enseignants, la CGT de la CAF, SUD PTT, le NPA et d’autres… Enfin, les enseignants nous ont invitées à venir nous exprimer à l’AG qu’ils tiendront à l’issue de la manif du 12 octobre. L’intersyndicale des agents territoriaux a reçu un courrier de soutien des enseignants en lutte. Il y a eu par le passé quelques tentatives de jonction, mais c’est la première fois que cette unité se fait à ce point.
Les agentes territoriales des écoles de Marseille sont-elles seules dans ce cas ?
Non. Le mouvement commence à s’étendre dans le département, autour de l’Étang de Berre. Martigues, Istres, Rognac, entrent dans la lutte.
La place déterminante des territoriaux dans la lutte contre la réforme des retraites a été reconnue par l’ensemble des unions départementales des Bouches-du-Rhône, puisque lors de la manif du 12 octobre, ces agents défileront en tête de cortège.
Et après ?
Pour beaucoup d’entre nous, le 12 octobre ne doit pas être la fin du mouvement. Les filles veulent continuer. Le gouvernement a engagé un bras de fer. Elles entendent le gagner.
Propos recueillis par Jean-Marie Battini
* Paru dans Hebdo TEAN 73 (14/10/10).