La politique de Sarkozy, depuis son arrivée au pouvoir, se décline en deux fronts : une offensive sociale sans précédent depuis 1945 et une offensive sécuritaire et raciste permanente depuis 2002. Cette politique vise à « diviser pour mieux régner », détourner la colère des couches populaires vers des boucs émissaire, renforcer le nationalisme, pour masquer les véritables divisions de classe de la société. Les visées électorales ne sont pas non plus absentes et Sarkozy s’est lancé dans une surenchère permanente pour gagner l’électorat de Le Pen.
Depuis 2002, on en est actuellement au vote de la cinquième loi sur l’immigration. Les sans-papiers sont en première ligne. Ils sont environ 400 000 à vivre dans la clandestinité, mais tous travaillent, dans des conditions souvent dignes du moyen-âge. Un certain nombre d’entre eux cotisent même : un collectif initié par Droits Devant !! a estimé que les sans-papiers versaient 3 milliards d’euros dans les caisses de l’État (Urssaf, Sécu, retraites) sans avoir le moindre accès à leurs droits, car travaillant sous le nom d’un autre.
Mais les sans-papiers résistent, depuis des années : premières luttes de travailleurs étrangers dans les années 1970 avec les lois de 1974 sur l’immigration, luttes dans les foyers, lutte des sans-papiers de Saint-Bernard en 1996… La liste est longue. Depuis quelques années, le mouvement antiraciste a connu un renouveau des luttes : RESF, collectifs, syndicats… Depuis 2008, la lutte pour la régularisation a pris une forme nouvelle avec les grèves, en particulier l’action lancée il y a un an jour pour jour par 6 000 travailleurs sans papiers en région parisienne.
Cette lutte exemplaire est la meilleure réponse aux débats moisis de Besson sur l’identité nationale. Jusqu’à présent, cette hystérie raciste ne rencontre pas un soutien majoritaire. Sondage après sondage, plus de 60 % des gens soutiennent la régularisation des sans-papiers. Nous sommes encore nombreux à refuser de faire de l’immigration un problème.
Pour le NPA, la seule véritable solution est simple, c’est la régularisation de tous les sans-papiers. Nous luttons pour un autre monde, pour la liberté de circulation et d’installation, pour l’égalité complète des droits, le droit de vote de touTEs à toutes les élections. Le 12 octobre, dans la rue, c’est tous ensemble que nous manifestons contre Sarkozy, français et immigrés. C’est cette solidarité de classe, internationaliste, que nous voulons construire.
Historique de la lutte
Depuis le jeudi 7 octobre, 500 travailleurs sans papiers occupent la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (CNHI). Cette action est une nouvelle étape du mouvement des travailleurs sans papiers qui se sont mis en grève il y a un an presque jour pour jour, le 12 octobre 2009.
Après une première série de grèves lancées à partir du 15 avril 2008 et qui avait permis la régularisation de près de 2 500 personnes, un « acte 2 » est donc lancé en octobre 2009. C’est la deuxième vague de grève des travailleurs sans papiers, grève interprofessionnelle avec occupation des lieux de travail. Ce mouvement rassemble près de 6 300 grévistes qui ont durant près de huit mois mené ce mouvement. Le courage et la détermination des grévistes qui ont bravé tout un hiver durant les conditions d’occupation difficiles, des expulsions, la confrontation parfois très dure avec des patrons agités, les difficultés financières, ne cessent d’impressionner les syndicalistes et les militants des comités de soutien de ces grèves.
En juin, les piquets de grève convergeaient pour occuper les marches de l’opéra Bastille à Paris dans le 11e arrondissement. Après des nuits dans des conditions encore une fois des plus précaires, l’occupation tient bon et le 18 juin, les négociations avec le gouvernement aboutissent à un addendum au « guide des bonnes pratiques » qui accompagne la circulaire de novembre 2009.
Ce texte n’a pas de valeur juridique, mais il prévoit d’attribuer à tous les grévistes qui déposent un dossier une autorisation provisoire de séjour (APS) de trois mois avec autorisation de travail et fixe le cadre d’une régularisation par le travail.
Mais le gouvernement et les préfectures n’ont en fait jamais mis en œuvre ce qui avait alors été négocié. Plus de 2 000 dossiers ont été déposés par la CGT et seuls quelques dizaines de grévistes ont reçu l’APS promise.
C’est pour faire face à cette situation de blocage que plus de 500 travailleurs sans papiers occupent désormais la CNIH, exigeant que le gouvernement respecte ses engagements et leur régularisation.
Ouverte en catimini, sans inauguration officielle, le 10 octobre 2007, la CNHI souffre d’être sous co-tutelle du ministère de la Culture, de l’Éducation, mais aussi des infréquentables ministères de l’Intérieur et de l’Identité nationale et de l’Immigration. L’un des responsable CGT des salariés de la cité, après avoir souhaité la bienvenue aux grévistes, les a d’ailleurs remerciés d’être venus fêter cet anniversaire « en lutte ».
Cette occupation sonne un peu comme une revanche, ce bâtiment qui accueillit l’exposition coloniale internationale de 1931 y proposait un village Kanak, un zoo humain qui attirait alors de nombreux visiteurs. Ce bâtiment devint ensuite celui du ministère des Colonies. Il est aujourd’hui le siège d’une nouvelle bagarre pour la régularisation des sans-papiers.
Vitry : le collectif reste mobilisé
Le 19 octobre 2009, dans la foulée de l’acte 2 de la grève des sans-papiers, les sans-papiers de Vitry-sur-Seine occupaient le centre des impôts de la ville. Leur choix était de rester groupés, alors que tous ne travaillaient pas au même endroit, et de dénoncer le fait qu’ils payaient des impôts sans bénéficier d’aucun droit. Ils furent délogés du centre des impôts le soir même, mais restèrent sur le trottoir jusqu’au 14 janvier où la police évacua le piquet. Pendant ces trois mois, près de 150 personnes ont tourné sur le piquet et une quarantaine y ont dormi la nuit. Après l’évacuation, la lutte ne s’est pas arrêtée, les sans-papiers ont occupé une salle municipale pendant plusieurs mois et le collectif de Vitry a décidé de déposer des dossiers à la préfecture. Deux sans-papiers ont également participé à la marche Paris-Nice.
Un an après le début de la lutte, sept sans-papiers ont reçu une autorisation provisoire de séjour de trois mois, mais pour une trentaine d’entre eux, des obligations de quitter le territoire français (OQTF) ont été envoyées, tandis que les autres n’ont aucune nouvelle de leurs dossiers. Le 6 octobre dernier, un membre du collectif s’est rendu au ministère de l’Immigration avec les représentants du ministère de la Régularisation de tous les sans-papiers, anciennement situé rue Baudelique, à Paris, pour réclamer l’examen des dossiers des 3 000 sans-papiers présents ou représentés à Baudelique. Le collectif de sans-papiers de Vitry ainsi que le comité de soutien qui regroupe largement les organisations et associations de la ville (Attac, Mrap, RESF, SUD, NPA, Europe Écologie) restent mobilisés. Ils refusent de reprendre la vie dans la semi-clandestinité et de continuer à subir les arrestations incessantes de la part de la police.
Le 19 octobre, un rassemblement solidaire et festif est organisé devant le centre des impôts pour fêter le premier anniversaire de l’occupation, avec une projection de vidéos, d’un diaporama et une exposition d’aquarelles, d’affiches... retraçant une année de lutte.
Alors qu’est votée la loi Besson qui aggrave encore la situation des sans-papiers, il est important d’y venir nombreux. Rendez-vous à partir de 18 heures, rue Camille-Groult à Vitry-sur-Seine.
Les 68 de Creil
Dans le cadre de la lutte nationale des travailleurEs sans papiers, 68 intérimaires en grève occupent la Bourse du travail de Creil (Oise) depuis novembre 2009. Petit historique : en octobre 2009, à l’appel de la CGT, des grévistes d’Île-de-France arrivent à Creil pour soutenir des intérimaires sans papiers creillois dans l’occupation d’agences intérim. Celles-ci portent plainte pour exiger leur évacuation et les grévistes se rabattent sur la Bourse du travail. La solidarité s’organise alors et les soutiens syndicaux, associatifs, politiques et citoyens affluent. Ce collectif, baptisé Collectif Ousmane Ba en hommage à l’un des grévistes décédé d’un cancer pendant la lutte, organise avec les sans-papiers des cours d’alphabétisation et apporte une aide alimentaire, financière, administrative, etc.
Les 68 de Creil participent à toutes les actions nationales (manifs, occupation de la Bastille, de la Cité de l’immigration) et organisent des actions locales afin de rester visibles dans le bassin creillois : occupation de chantier, interpellation des élus locaux, demandes de domiciliations auprès des CCAS, cercles de silence, marchés, etc.
Au cours des mois et des dépôts de dossiers, certains grévistes, selon le bon vouloir des préfets, obtiennent des régularisations provisoires de trois mois qui leur permettent de travailler. Mais au bout d’un an, la fatigue et la lassitude grandissent. Certaines régularisations se sont transformées en OQTF, les arrestations policières abusives se multiplient et les conditions de vie précaires sont de plus en plus dures à supporter. Cependant, la colère des 68 reste intacte : lorsque l’un des leurs est arrêté par la police, ils investissent la préfecture jusqu’à sa libération.
Malgré le mépris des préfectures, la peur des arrestations ou les tentatives de récupération politique, les 68 de Creil sont prêts à aller jusqu’au bout.
Les 25 et 26 octobre, ils organiseront une marche au départ de Creil en direction de la préfecture de Beauvais, pendant laquelle ils interpelleront notamment les députés de l’Oise.
No Border : brisons les frontières !
Depuis plus de dix ans, l’Union européenne ferme ses frontières aux migrants. L’Europe forteresse est devenue une réalité. Les pays européens forcent de nombreuses personnes à la clandestinité, enferment, expulsent les sans-papiers. Ils organisent leurs polices pour des actions conjointes avec l’agence Frontex, véritable armée tentaculaire et souterraine.
Mais la résistance grandit et s’organise aussi. Le réseau No Border relie des militants de toute l’Europe, en lutte pour la liberté de circulation et contre les frontières. Il dénonce la politique européenne en matière d’immigration, les expulsions et les centres de rétention et replace les politiques répressives dans leur cadre capitaliste.
Un camp No Border a eu lieu au cœur de Bruxelles du 25 septembre au 3 octobre. Chaque participant au camp pouvait s’investir dans un des groupes de fonctionnement coordonnés lors d’assemblées générales quotidiennes, pour vivre concrètement l’autogestion.
Mais face à ces militants énergiques et déterminés, la répression policière a été plus brutale que prévue. Des centaines d’arrestations administratives ont eu lieu toute la semaine, notamment autour de la manifestation eurosyndicale du 29 septembre. Des arrestations « préventives » qui ont bafoué le droit de manifester. Ceux qui avaient pu échapper à ce qu’on peut qualifier de rafles dans les rues de Bruxelles et les stations de métro et avaient rejoint la manifestation syndicale, ont été violemment bloqués et extraits du cortège malgré les démonstrations de solidarité de nombreux manifestants syndicaux et politiques.
Les interpellés durant la semaine du camp ont subi insultes, humiliations sexistes, mauvais traitements, coups et blessures. Des plaintes vont être déposées en masse avec la Ligue des droits de l’homme de Belgique.
Une manifestation festive de clôture du camp, le 2 octobre, a réuni 1 500 personnes dont beaucoup de sans-papiers mais aucune organisation politique belge n’y a pris part.
Chaque camp No Border renforce le réseau international de luttes pour les libertés mais, comme à Calais en juin 2009, le camp de Bruxelles 2010 a servi de terrain d’expérimentation pour les liens entre polices européennes. Des services de polices française, hollandaise et allemande ont collaboré dans la répression avec la police belge. Nos liberté civiles et politiques sont menacées.
Nous étions plusieurs militants du NPA Nord-Pas-de-Calais à participer à ce camp. Il nous semble que notre parti qui lutte contre la xénophobie et pour la solidarité entre les peuples pourrait et devrait contribuer à populariser les actions et revendications du réseau No Border pour la liberté de circulation.
No Border appelle à manifester pour la défense des libertés d’expression et de manifestation le 16 octobre à 15 heures à Bruxelles, Porte de Hal.
NPA
* Paru dans Hebdo TEAN 73 (14/10/10).
Sans papiers : occupation de la Cité de l’immigration
Depuis le 7 octobre, 500 sans-papiers grévistes occupent la Cité de l’immigration, à Paris. Parmi eux, Mohamed Ndiaye, délégué CGT.
Mohamed Ndiaye – Depuis quand es-tu dans le mouvement de grève des sans-papiers ?
Depuis le 12 octobre 2009. J’ai été élu délégué du piquet de grève à l’agence d’intérim, au 103 rue La Fayette, dans le 10e arrondissement. Depuis le premier jour, nous nous sommes mis dans la bagarre car il le fallait vraiment.
Depuis quand avez-vous avez tenu ce piquet ?
Nous avons commencé le piquet à Saint-Lazare. Nous avons fait 44 occupations d’agences d’intérim et nous avons été à chaque fois expulsés comme à la Défense, à Orléans, à Compiègne, à Creil. Nous occupions les agences et quelques jours après on nous évacuait, mais à chaque fois, nous allions sur une autre agence. Puis, le 24 juin, on s’est installé à la Bastille car il y avait encore beaucoup de détermination chez tous les grévistes.
Que penses-tu des réponses du ministère de l’Immigration aux grévistes au mois de juin et après l’été ?
Le 18 juin, leur réponse était « arrêtez la grève, quittez la Bastille, que chacun rentre chez soi, constituez des dossiers pour la régularisation ». Il y avait des choses valables dans l’Addendum des bonnes pratiques et chaque travailleur sans papiers rentrant dans ces critères devait être régularisable. Nous avons donc quitté la Bastille, levé les piquets et repris le travail pour certains. Nous avons commencé à constituer et déposer les dossiers dans les directions départementales du Travail et à la préfecture de Paris. Sur les 1 800 dossiers déposés à Paris, il n’y a, à ce jour, aucune réponse, alors que tous les dossiers ont été montés exactement comme demandé, après avoir attendu un mois pour avoir la liste complète des documents à fournir. Actuellement, ces dossiers sont toujours bloqués à la préfecture. En Seine-Saint-Denis, ils ont commencé à donner quelques autorisation provisoire de séjour et de travail (APS-K) et dans l’Essonne quelques régularisations, Donc, en tout, il n’y a que 58 réponses positives depuis le 18 juin.
Quel a été votre réaction face à ce mépris ?
Nous avons repris le mouvement car sommes déterminés. Nous avons décidé l’occupation de la Cité de l’immigration. On arrêtera quand on gagnera. Nous nous sommes mis d’accord pour occuper le musée de l’Immigration jusqu’à la réception des récépissés pour tous les grévistes. Le gouvernement n’a pas tenu sa parole, alors que nous avions fait un pas en avant dans les négociations. Sur 6 804 dossiers, il n’y a que 58 régularisations, c’est-à-dire rien du tout. Nous sommes là pour dire au gouvernement que nous pouvons rester là trois mois tous ensemble.
Pourquoi avoir choisi ce lieu ?
C’est le musée national de l’Histoire de l’immigration, un vrai symbole. Il y avait plusieurs lieux et le choix a été très rapide car nous savions qu’il représente beaucoup.
Comment vois-tu le lien entre la lutte des sans-papiers et celle pour les retraites ?
Les retraites nous concernent aussi beaucoup, parce que nous sommes des travailleurs et la retraite est un droit pour tous les travailleurs. On travaille, on cotise donc on doit avoir le droit de toucher nos retraites. Cela signifie que s’il y a une lutte sur les retraites, nous sommes en première ligne. Aux dernières manifestations, nous étions là avec nos pancartes. Ce n’est pas qu’une question de solidarité, mais c’est aussi notre lutte. Cela fait un an que nous sommes en grève et nous irons fêter cet anniversaire avec les travailleurs qui se battent pour sauver leurs retraites.
Propos recueillis par Antoine Boulangé et Leila Soula.
* Paru dans Hebdo TEAN 73 (14/10/10).
Occupation du Musée de l’immigration
Communiqué du NPA
Le NPA apporte son soutien total aux centaines de travailleurs sans papiers, et aux syndicalistes, qui occupent actuellement le « musée de l’immigration » à Paris. Ce lieu, particulièrement bien choisi estle symbole même du colonialisme d’hier, et de la situation post-colonialequi règne aujourd’hui en Afrique.
La colère des travailleurs sans papiersest à la mesure de la duplicité de l’état français qui ne tient pas ses engagements. La plupart des 6200 travailleurs sans papiers qui pendant plusieurs mois ont mené une grêve exemplaire pour leur régularisation n’ont à ce jour reçu qu’une fin de non recevoir des autorités.
Foulant au pied ses engagements, le ministère du travail, tout comme celui de l’immigration, n’ont pas fait le moindre pas dans ce qui représentait une revendication à minima : l’harmonisation des critères de régularisation.
Ce gouvernement ne connait qu’un seul langage, celui du rapport de force !
Il est temps que la classe ouvrière, française et immigrée, avec et sans papiers lui signifie sa fin de contrat.
Dehors Woerth, Besson, Hortefeux, Sarkozy...
Régularisation de tous les sans papiers, liberté de circulation et d’installation.
La CGT et les sans-papiers
Après 1945, la CGT est, avec la CFDT, le syndicat qui s’est le plus intéressé aux travailleurs immigrés. La centrale est cependant loin d’adopter la posture résolument internationaliste de la CGTU communiste dans l’entre-deux-guerres. Elle analyse l’immigration comme « arme des patrons » jouant le rôle d’« armée de réserve industrielle », et revendique une fermeture des frontières. Mais la CGT cherche également à organiser les travailleurs immigrés qui malgré tout se retrouvent là, et à revendiquer pour eux une égalité des droits sociaux et syndicaux. Face à un État et un patronat qui promeuvent et organisent le recours à une main-d’œuvre étrangère discriminée, ces deux orientations ont pour objectif commun de lutter contre la « concurrence déloyale » que représenteraient les travailleurs immigrés. Elles génèrent à l’égard de ces derniers des attitudes ambivalentes, de l’hostilité à la solidarité.
Mais surtout, dans les années 1970, alors que la nouvelle politique migratoire produit des bataillons de sans-papiers, cette double orientation ne donne plus de réponse toute faite : faut-il revendiquer l’expulsion des sans-papiers au nom de la fermeture des frontières (première orientation), ou leur régularisation au nom de l’égalité des droits des travailleurs (seconde orientation) ?
En avril 2006 se déroule le 48e congrès de la CGT, le dernier avant les grèves de travailleurs sans papiers ; il traduit, là encore, l’ambivalence du syndicat. Le document d’orientation soumis aux congressistes rappelle la nécessité d’« organiser » les flux migratoires (donc de ne pas ouvrir les frontières) tout en préservant « l’exigence d’une égalité de droit au travail et dans la vie ». Durant le congrès, des militants cherchent à introduire deux nouvelles revendications : la régularisation de tous les sans-papiers et la liberté de circulation. Seule la première est retenue. Lors du 49e et dernier congrès, alors que les grèves de sans-papiers font désormais partie du paysage des luttes, le document d’orientation met en avant « l’action résolue menée par la CGT pour la régularisation administrative des ‘‘sans papiers’’ et particulièrement des salarié(e)s », et ne parle plus d’organisation des flux migratoires, sans évoquer non plus la liberté de circulation. Mais il semble que les grèves ont fait bouger les lignes également à l’intérieur du syndicat.
* Paru dans la Revue TEAN 13 (septembre 2010).
États généraux sans papiers
Les états généraux des collectifs des sans-papiers se sont déroulés à la Bourse de travail de Paris, le 25 septembre. Les collectifs de sans-papiers (CSP) de France avaient appelé les différents acteurs de la lutte à échanger sur la stratégie à mener pour gagner le combat de la régularisation globale. Les associations (Ucij, Gisti, Attac, Mrap, Droits Devant !!, RESF), des syndicats (CGT, CNT), des partis politiques (AL, NPA, PCF) ont répondu présent à l’invitation.
Après un inventaire du mouvement depuis 1996, les intervenants se sont penchés sur la situation actuelle. Depuis un an, le mouvement des sans-papiers a fait de nombreuses expériences : la fondation du ministère de la Régularisation de tous les sans-papiers, la grève des travailleurs sans papiers initiée par la CGT et Solidaires. Ces expériences ont permis de renforcer le mouvement et de donner confiance à l’ensemble des sans-papiers et à tous ceux qui se battent à leur côté. Mais le constat est qu’aujourd’hui le mouvement n’a pas réussi à gagner la régularisation globale. Les CSP a reconnu que l’éparpillement des luttes était la raison de la difficulté d’obtenir cette victoire. L’urgence est d’unifier rapidement le mouvement et de construire un cadre rassemblant les sans-papiers, les associations, les syndicats et les partis politiques. La nécessité d’élaborer une stratégie et de mener des actions communes a été soulignée tout au long des débats. Il s’agit d’un réel tournant dans le mouvement après les deux dernières années de division et d’éparpillement. Il n’existe qu’un seul mouvement avec des formes de lutte différentes et complémentaires. Les divisions ont nui gravement au mouvement et ont profité au gouvernement et au patronat qui s’acharnent en cette période de crise à diviser les travailleurs. 78 % des Français sont favorables à la régularisation des sans-papiers et le gouvernement en situation de faiblesse face à leur mouvement peine à justifier le durcissement de sa politique d’immigration.
Le NPA a rappelé lors de son intervention que les sans-papiers sont partie intégrante de la classe ouvrière et que les revendications qu’ils portent (liberté de circulation et d’installation, fermeture des centres de rétention, etc.) sont les nôtres. L’ensemble de la gauche a intérêt à se battre pleinement pour ces revendications et à saisir l’occasion de ces états généraux pour créer un réel rapport de forces avec tous les travailleurs, afin de gagner l’égalité des droits, la régularisation de tous les sans-papiers et créer un front large contre le racisme d’État.
Laeticia Fall
* Publié dans : Hebdo TEAN 71 (30/09/10).