Sarkozy présente ses vœux pour 2011 en dévoué président des riches. Il commence, faussement compréhensif, par reconnaître que 2010 « fut rude pour beaucoup » d’entre nous. Mais il se défausse immédiatement sur la crise qui « n’a fait qu’exacerber le sentiment d’injustice ressenti par des salariés qui n’étaient en rien responsables de la crise »… Le sentiment seulement ? Dans la suite on apprend que « grâce au travail des Français, à leur courage, à leur capacité d’adaptation, à la force de notre économie, aux avantages de notre modèle social, la récession fut moins sévère et d’une durée plus courte ». Le bilan positif de son point de vue concerne l’autonomie des universités, les heures supplémentaires défiscalisées et surtout la contre-réforme des retraites grâce à laquelle le « système de retraite a été mis à l’abri de la faillite inéluctable qui le guettait ». De l’autosatisfaction on passe au mépris cynique quand il ignore les millions de manifestants et grévistes et résume l’épisode à « l’esprit de responsabilité des Français qui savaient bien que ce rendez-vous pour douloureux qu’il fut était inéluctable ». Et son « hommage à leur maturité et à leur intelligence collective » ressemble à un crachat !
Il serait trop long et surtout trop pénible de détailler l’intégralité du discours. Derrière les affirmations de « l’intérêt général », de « l’intérêt de la nation » et du « bien commun des Français » s’annonce toute la brutalité des attaques programmées pour 2011.
Au nom de la protection contre la dépendance, il prépare la destruction de la Sécurité sociale. Au nom de la protection contre les délocalisations, il annonce l’harmonisation fiscale qui se traduira par de nouveaux cadeaux aux patrons et aux plus riches. Au nom de la protection contre les violences, il poursuit sa politique sécuritaire et la destruction des libertés publiques.
Il ne parle que de protéger mais applique la loi de la jungle, la loi des plus forts et des plus riches dans tous les domaines.
Il veut suggérer qu’il a plus important à faire que préparer sa réélection en 2012, mais il tourne tout son discours en direction des franges les plus réactionnaires et se situe totalement en référence au discours du FN. C’est bien à Marine Le Pen qu’il répond en combattant la sortie de l’euro mais en reprenant ses accents sur la « préférence communautaire ». C’est bien sur ses terres qu’il chasse en maniant le populisme en matière de justice, en stigmatisant les immigrés, en pourfendant « l’égalitarisme »…
Sarkozy prétend nous protéger, mais qui nous protège de Sarkozy ? Sûrement pas le PS qui, par la voix de Moscovici, s’est contenté de critiquer la forme « peu convaincante » sans dénoncer le contenu. Le PS n’a vu que la préparation de 2012 dans l’intervention de Sarkozy, comme si le programme de destruction sociale annoncé pour 2011 ne valait pas la peine qu’on s’y arrête. Comme sur les retraites pour lesquelles il a voté l’allongement de la durée de cotisations, le PS ne présente pas une orientation fondamentalement différente.
Il y a deux bonnes raisons de refuser d’attendre 2012. D’abord, les attaques contre la protection sociale, l’emploi, les salaires, les services publics… ne vont pas s’arrêter, il faut prendre au sérieux la promesse de Sarkozy de faire de 2011 une année « utile ». Ensuite, mettre nos espoirs dans une victoire électorale du PS et de ses alliés, confier notre avenir au président du FMI ou à tout autre responsable du PS, c’est à coup sûr préparer de durs et tristes lendemains.
Heureusement, l’automne 2010 a montré une autre voie possible, celle de la lutte collective. Et si nous n’avons pas gagné, si nous n’avons pas réussi à bloquer la loi Woerth-Sarkozy, nous avons vécu un mouvement social exceptionnel par sa durée et sa radicalité. Ce mouvement est prometteur parce qu’il est le signe de la résistance de millions de jeunes et de salariéEs, parce qu’il a posé des questions essentielles pour l’avenir : la grève générale indispensable pour gagner, le partage des richesses, l’illégitimité du pouvoir et la légitimité de la rue.
Alors ce qu’on se souhaite pour 2011 : continuer ensemble ce qu’on a commencé en 2010, ne rien lâcher pour pouvoir tout changer !
Christine Poupin
Goûter des Orphelins de Noël. Des cadeaux et des papiers !
Le 20 décembre, RESF a organisé à Paris un « goûter des orphelins de Noël », réunissant une quinzaine d’enfants de pères sans papiers menacés d’expulsion. Un Père Noël (NPA) a remis un cadeau à chaque enfant.
Plusieurs personnalités dont Olivier Besancenot se sont rassemblés autour de ces familles pour que les enfants aient un vrai Noël. Ils se sont engagés à tout faire pour « obtenir la régularisation des parents libérés, faire sortir ceux encore emprisonnés et faire revenir ceux qui ont été expulsés ». Olivier Besancenot a souligné l’importance de chaque régularisation, qui est « comme une petite victoire contre l’injustice ». (Jean-Claude Saget)
Le Pierre Noël (RESF)
Leur monde...Que Dieu pardonne le sous-préfet d’Antony...
Mardi 4 janvier 2011. Il est trois heures du matin et il fait -1°C dehors. Monsieur et madame X se placent dans la file d’attente à l’extérieur de la sous-préfecture d’Antony (Hauts-de-Seine). Étrangers, ils viennent pour une demande de titre de séjour. Ils connaissent par le bouche à oreille la règle non écrite établie par la sous-préfecture depuis un an : elle ne reçoit que le mardi matin et ne distribue que quinze tickets pour quinze personnes. Ils ont préparé soigneusement leur dossier depuis deux mois avec l’aide des militantes et militants de l’association RESF. À trois heures du matin, ils sont troisièmes dans la queue, ils pensent donc avoir toutes leurs chances d’obtenir ce fameux ticket qui leur permettra d’avoir un nouveau rendez-vous pour l’examen approfondi de leur situation deux mois plus tard. À 8 h 30, il y a environ 150 personnes dans la queue. Mais, quand le portail s’ouvre et qu’ils se présentent en troisième position, on leur annonce qu’il n’y a plus de ticket. Même chose pour celui qui était en première position. Aujourd’hui, il n’y a plus de ticket, un point c’est tout. Interrogée, la responsable du service refuse de donner des explications et s’emporte : « vous n’avez qu’à revenir mardi prochain ! » Mais Madame, comment être sûr que ce ne sera pas la même chose mardi prochain, il doit y avoir une erreur, c’est injuste. « Oh pas de moralisme ! Et si nous avons fait une erreur, eh bien que Dieu nous pardonne ! » « Mais c’est inhumain » dit une femme furieuse. En effet, voilà l’exemple de la pire des vexations faite à des dizaines de personnes qui viennent de passer six heures debout la nuit dans le froid après avoir confié leurs enfants à des amis : à la sous-préfecture d’Antony, il n’y a pas de règle, les étrangers ne sont rien, n’ont aucun droit, même pas celui de comprendre pourquoi on se moque d’eux.