Japon : une pollution très radioactive détectée au large de Fukushima
Les travaux se poursuivaient à la centrale de Fukushima, samedi 26 mars, mais ils ont été à nouveau ralentis par la découverte de flaques radioactives dans trois des six réacteurs. Trois techniciens ont souffert de brûlures après avoir été exposés dans le réacteur n°3 à un niveau de radioactivité 10 000 fois supérieur à celui mesuré d’ordinaire dans un tel endroit, selon l’organisme gérant la centrale, Tepco. Au total, près de 700 personnes se relaient pour tenter de stabiliser les réacteurs de la centrale depuis plusieurs semaines, en vain.
La découverte de flaques radioactives, qui doivent être évacuées le plus vite possible selon l’Agence de sûreté nucléaire japonaise, n’est que le dernier incident d’une longue série depuis le séisme qui a frappé le nord de l’île, le 11 mars, faisant au moins 10 151 morts et 17 053 disparus. Le premier ministre japonais, Naoto Kan, a reconnu en fin de semaine que l’évolution de la situation restait « imprévisible ». Tepco, qui a raccordé les réacteurs à des câbles électrique, pense que les opérations dureront au moins encore un mois.
Le mystère du réacteur n°3. Les autorités japonaises ont cru que le fort taux de radioactivité dans ce réacteur, qui concentre le plus d’inquiétude en raison de son état précaire, signifiait que la cuve était peut-être endommagée. L’Agence de sûreté nucléaire japonaise a ensuite estimé que cela pouvait provenir d’opérations de dégagement de vapeur menées pour faire retomber la pression, ou d’une fuite d’eau dans les tuyaux ou les valves.
Deux des six réacteurs ne présentent a priori plus de danger mais les quatre autres ne sont pas encore stabilisés et émettent de temps à autre de la vapeur et de la fumée. Malgré tout, l’Agence de sûreté nucléaire nippone a déclaré que la température et la pression s’étaient stabilisées dans l’ensemble des réacteurs. A Vienne, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a jugé que la situation n’avait guère évolué au cours des dernières 24 heures et « qu’il reste des incertitudes, fortement préoccupantes ».
Radioactivité élevée à Tokyo et dans la mer. A Tokyo, samedi matin, une radioactivité de 0,22 milliSievert par heure était enregistrée, soit six fois la normale. Un tel degré de radioactivité ne présente cependant rien d’inquiétant pour la santé des populations, selon les autorités. En revanche, un fonctionnaire du ministère des sciences a confirmé que le niveau de radioactivité quotidienne dans la zone située à 30 km au nord-ouest de la centrale de Fukushima avait dépassé la dose d’une année de radiation naturelle. Et plus on se rapproche de la centrale, plus le taux est élevé.
Ainsi, le gouvernement japonais a mesuré des niveaux d’iode radioactif 1 250 fois supérieurs à la norme légale dans la mer, au large de Fukushima, renforçant les craintes d’une rupture de l’étanchéité d’un ou plusieurs réacteurs. Mardi, un renforcement des contrôles sur les poissons et fruits de mer pêchés le long des côtes avait été instauré. « Si vous buvez 50 centilitres d’eau courante avec cette concentration d’iode, vous atteignez d’un coup la limite annuelle que vous pouvez absorber. C’est un niveau relativement élevé », a expliqué un porte-parole de l’Agence de sûreté.
Les autorités japonaises précisent cependant que la radioactivité relâchée dans l’océan pourrait se diluer avec les marées et que la quantité d’iode absorbée par les algues et animaux marins pourrait être moindre. Reste la crainte de diffusion du césium 137, une substance radioactive dont la concentration ne se réduit de moitié que tous les 30 ans. Tepco dit avoir mesuré une concentration presque 80 fois supérieure à la limite légale de cette substance. L’organisation écologiste Greenpeace a annoncé qu’elle allait effectuer des relevés de radioactivité en dehors de la zone d’exclusion de 20 km autour de la centrale, estimant que « les autorités ont en permanence donné l’impression de sous-estimer à la fois les risques et l’étendue de la contamination radioactive ».
* LEMONDE.FR avec AFP, Reuters | 26.03.11 | 08h29 • Mis à jour le 26.03.11 | 10h08.
Fukushima : la cuve du réacteur n° 3 pourrait être endommagée
La situation à la centrale nucléaire accidentée de Fukushima reste « imprévisible », a prévenu, vendredi 25 mars, le premier ministre japonais, Naoto Kan. « Nous travaillons à ce que la situation n’empire pas. Nous devons être extrêmement vigilants », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. M. Kan a par ailleurs exprimé « son respect envers tous ceux qui ont uni leurs forces pour faire face à la crise la plus grave vécue par le Japon depuis la guerre ». « Deux semaines après le désastre, j’aimerais demander à tout le monde de faire preuve de solidarité pour surmonter cette crise », a ajouté le chef du gouvernement de centre gauche.
L’opérateur de la centrale nucléaire de Fukushima, Tokyo Electric Power (Tepco), a reconnu que la cuve du réacteur n° 3 qui contient les barres de combustible, pourrait être endommagée. « Des substances radioactives se sont échappées loin du réacteur », a de son côté expliqué Hideyuki Nishiyama, porte-parole de l’Agence japonaise de sûreté nucléaire. « Selon ce que semblent montrer les analyses, nous pensons que la capacité de confinement atteint encore un certain niveau, mais il y un fort risque que le réacteur soit endommagé », a-t-il ajouté. Quatre réacteurs de la centrale de Fukushima ont été gravement accidentés après la catastrophe du 11 mars.
Les opérations de refroidissement des réacteurs à l’aide de canons à eau et les travaux de rétablissement de l’alimentation électrique avançaient lentement en raison de la dangerosité du site, au lendemain de l’hospitalisation de deux ouvriers gravement irradiés.
« Nous en sommes encore à évaluer les dégâts sur la centrale et nous ne pouvons par fixer une date à laquelle les équipements de refroidissement vont fonctionner. Cela pourrait prendre encore plus d’un mois, qui sait », a déclaré un porte-parole de la société. L’Agence japonaise de sûreté nucléaire a par ailleurs annoncé qu’elle n’écartait pas la possibilité de relever à 6 le niveau de l’accident de Fukushima, actuellement fixé à 5, sur une échelle allant de 0 à 7.
L’Agence a dans le même temps reproché à Tepco de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour protéger ses techniciens qui luttent jour et nuit au côté de centaines de pompiers et soldats pour éviter une catastrophe nucléaire. Selon un porte-parole de l’Agence, « des substances radioactives ont fui du réacteur 3, qui pourrait avoir été endommagé ».
Trois ouvriers, chaussés seulement de bottines en caoutchouc, ont été contaminés jeudi par une flaque d’eau très fortement radioactive lors d’une intervention dans la turbine située derrière le réacteur 3. Deux ont dû être hospitalisés avec des brûlures aux pieds. Au total, 17 ouvriers ont été exposés à des radiations supérieures à la limite autorisée depuis le 11 mars. Le gouvernement a ordonné à Tepco « d’améliorer la gestion du personnel, afin d’empêcher la répétition de ce genre d’accident », a déclaré vendredi le porte-parole Yukio Edano, demandant qu’une enquête soit menée pour expliquer « comment les ouvriers ont pu être exposés aux radiations ».
CONTAMINATION ALIMENTAIRE
En attendant que les pompes de refroidissement soient remises en service, des fuites radioactives continuent de s’échapper périodiquement des quatre réacteurs les plus gravement endommagés, nourrissant la peur d’une contamination de la chaîne alimentaire et de l’eau dans la région de Tokyo, où vivent quelque 35 millions de personnes, et même à l’étranger. La vente de certains légumes verts et de lait cru dans au moins quatre préfectures autour de la centrale de Fukushima a été interdite, tandis que l’eau du robinet a été déconseillée pour les enfants en bas âge dans une douzaine de localités autour de la capitale. Le ministère de la santé a également renforcé les contrôles sur les poissons et mollusques pêchés au large de la centrale.
La peur des radiations nucléaires s’étend aussi au reste de la planète. Le nombre de visiteurs étrangers arrivant à l’aéroport international de Narita, près de Tokyo, a baissé d’environ 60 %, entre le 11 et le 22 mars, par rapport à la même période l’an dernier, a indiqué le Bureau de l’immigration. Le nombre d’étrangers fuyant le pays a lui augmenté de 20 000 personnes pendant ce laps de temps. Après les Etats-Unis, l’Australie, le Canada, la Russie, la Chine et plusieurs autres pays d’Asie, les 27 pays de l’Union Européenne ont décrété à leur tour des contrôles sur les produits frais en provenance du nord-est du Japon, qui n’ont désormais pratiquement plus de débouchés à l’étranger.
* LEMONDE.FR avec AFP | 25.03.11 | 06h28 • Mis à jour le 25.03.11 | 12h40
De la radioactivité découverte dans des légumes provenant de Tokyo
Les autorités japonaises ont interdit en début de semaine la vente de plus d’une dizaine de légumes et du lait cru provenant de quatre préfectures proches de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima.REUTERS/Toru Hanai
Un niveau anormalement élevé de radioactivité a été détecté pour la première fois dans des légumes provenant de Tokyo, indique le ministère japonais de la santé, cité vendredi 25 mars par les médias, alors que la liste des pays interdiant l’importation de certains produits alimentaires en provenance de l’archipel ne cesse de s’allonger.
Du césium radioactif, à un niveau excédant la limite légale, a notamment été découvert jeudi dans un légume à feuilles vertes, le komatsuna, cultivé dans un centre de recherche d’Edogawa, à la périphérie de Tokyo et à 250 km de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima. Il a été mesuré à 890 becquerels par kilo, soit au-delà de la limite de 500 becquerels, selon la chaîne nipponne NHK, précisant que la consommation du légume, non destiné à la vente, n’aurait cependant aucun effet sur la santé.
Les autorités ont interdit en début de semaine la vente de plus d’une dizaine de légumes et du lait cru provenant de quatre préfectures proches de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima, en raison d’un niveau anormalement élevé de radioactivité. Le premier ministre, Naoto Kan, a également ordonné des tests dans six autres préfectures, dont certaines proches de la mégapole de Tokyo et de ses 35 millions d’habitants. Des traces de radioactivité au-dessus de la limite fixée pour les bébés avaient également été découvertes mercredi dans l’eau du robinet de Tokyo.
EMBARGO SUR LES ÉPINARDS
Le niveau d’iode radioactif est repassé jeudi sous la limite admise pour les jeunes enfants. De nombreux pays étrangers, dont les Etats-Unis, l’Australie, le Canada, la Russie et Taïwan, ainsi que l’Union européenne, ont annoncé des mesures d’interdiction ou de restriction à l’importation de produits frais nippons.
La Corée du Sud a déclaré de son côté un embargo sur les épinards, les choux, les navets, les brocolis et le persil, ainsi que le lait, en provenance de quatre préfectures japonaises dont celle de Fukushima, a indiqué le bureau du premier ministre dans un communiqué. Pékin a également annoncé des restrictions dans ses importations.
* LEMONDE.FR avec AFP | 25.03.11 | 11h20.