Une piste revient régulièrement dans plusieurs contributions [à la réflexion engagée dans l’espace « Phénix »], c’est celle des biens communs. Nous pouvons les rattacher à l’expérience contemporaine des services publics et en faire une cible la cible d’une réflexion stratégique, ce que nous suggère d’ailleurs le texte « nos réponses à la crises » [du congrès du NPA]. Cette expérience renvoie à la coexistence dans la durée à l’intérieur de l’Etat bourgeois de deux pratiques sociales différentes, l’une hégémonique et l’autre dominée mais ouvrant cependant des fenêtres vers un avenir social diffèrent.
Dans ses Vingt défis [1], Samy Johsua souhaite que lutter pour « une hégémonie sociale de gauche » doit devenir « un élément central, ce que nous faisons rarement dans notre pensée stratégique » et la problématique des biens communs n’élude pas la contestation du régime de propriété. Bien entendu, cette contestation n’atteindra son but que dans des moments « proches d’une situation révolutionnaire ou de forte rupture. ». Mais à sa formule, je préfère celle d’hégémonie émancipatrice, qui me semble plus claire sur l’objectif, l’expérience du MLAC dans les années 70 restant un des plus beaux exemples.
1° Des points d’appui utiles dans la réflexion antérieure
Puisque l’expérience est contemporaine, elle n’est pas oubliée dans la réflexion de Gramsci, mais aussi chez Trotsky (en ébauche). Mais pour explorer cette piste, je trouve intéressant de souligner d’autres aspects de sa notion d’hégémonie, qu’on a tendance à oublier.
La notion d’Hégémonie de Gramsci ambitionne de nous donner les moyens de faire de la politique dans une phase préparatoire révolutionnaire. Comment ? En élargissant notre vision du front unique à un objectif de conquête de hégémonie politique et culturelle dans « la société civile ». D’où la nécessité de formuler « un projet politique capable de résoudre une crise historique de la nation et de l’ensemble des rapports sociaux » [2].
Dans leur texte de 1987 traitant des questions de stratégie en Occident, Antoine Artous et Daniel Bensaïd précisent les champs d’intervention possibles pour une confrontation hégémonique :
« Si nous reprenons la thèse de Gramsci, par culture ou idéologie, il ne faut pas simplement entendre l’intériorisation de certaines normes par les individus, mais des réalités bien matérielles[…]comme les institutions publiques et privées qui structurent la société et qu’il faut distinguer de l’État au sens strict.
« Il faudrait ajouter, surtout pour les analyses portant sur la période qui suit la Seconde Guerre mondiale, l’instauration d’un certain nombre de « droits sociaux » (santé, éducation, travail, etc.). Ils sont certes le produit de rapports de forces entre classes, mais ils sont perçus comme des « droits démocratiques », produits de l’évolution logique de la démocratie. Et d’ailleurs, comme les « libertés démocratiques », ils représentent un acquis effectif et important pour la classe ouvrière. » [3]
Précisons que nos deux camarades reconnaissent l’utilité de Gramsci dans la quête d’hypothèses stratégiques, à condition que leur donnée de base reste la place centrale occupée par la lutte pour le pouvoir.
L’extrait suivant de Trostsky concerne ce type d’expérience, puisqu’il décrit une forme voisine de confrontation de type hégémonique. Elle oppose les foyers minoritaires de démocratie prolétarienne à la démocratie bourgeoise dominante.
« Au cours de plusieurs dizaines d’années, les ouvriers ont construit à l’intérieur de la démocratie bourgeoise, en l’utilisant tout en luttant contre elle, leurs bastions, leurs bases, leurs foyers de démocratie prolétarienne : les syndicats, les partis, les clubs de formation, les organisations sportives, etc. Le prolétariat peut arriver au pouvoir non dans le cadre formel de la démocratie bourgeoise mais par la voie révolutionnaire[…] Mais c’est précisément pour cette voie révolutionnaire que le prolétariat a besoin de bases d’appui de démocratie prolétarienne à l’intérieur de l’Etat Bourgeois. » [4].
Gramsci va plus loin puisqu’il introduit les services publics dans la bataille pour l’hégémonie. Mais les deux se retrouvent sur l’hypothèse d’un processus révolutionnaire sur la longue durée (« Au cours de plusieurs dizaines d’années »). Et la guerre de position est (en partie) transposable dans la « voie révolutionnaire des bases d’appui à l’intérieur de l’Etat Bourgeois » si la notion de démocratie prolétarienne rejoint les pratiques contrehégémoniques (avec un stalinisme ou un social démocratie hégémonique, je suis sceptique). Mais il serait plus intéressant de savoir si des situations mettant en jeu ce type de confrontation existe déjà dans le passé.
2° Les points d’appui dans le passé
La III° république bourgeoise en guerre pour une hégémonie républicaine.
Dans ses débuts difficiles , la III° république bourgeoise offre le théâtre de deux guerres idéologiques. La première est contre le danger immédiat que représente le soulèvement de la Commune (« la forme enfin trouvée de la dictature du prolétariat » selon Karl Marx). L’autre prend pour cible un danger aussi menaçant mais plus persistant pour sa survie, représentée par le bloc monarchiste catholique. Pour défendre leur projet d’une société libérée de son emprise sur la société, les démocrates bourgeois mènent une guerre de position en prenant véritablement appui sur l’école primaire et le courrier postal.
Pour gagner son hégémonie politique, sociale et culturelle, elle prend l’initiative d’instituer par la loi coercitive l’école primaire publique, gratuite et obligatoire. Elle est expurgée des religieux. Dans le même sens, l’accès au courrier est aussi « démocratisé » en s’ouvrant aux classes populaires au fur et à mesure que l’instruction se répand. La lettre est timbrée au même prix (modique) pour tous, quels que soient le lieu et la distance d’acheminement. Les premiers services publics défendent le principe républicain d’égalité et deviennent autant de bases d’appui sur l’ensemble du territoire national pour mener sa guerre de position en faveur d’une hégémonie républicaine. Une véritable armée d’Hussards noirs de la République se voit confier la mission de démanteler l’enseignement catholique, la base d’appui des monarchistes.
L’influence monarchiste est lentement éradiquée, et, de façon préventive, celle de la Commune (en reprenant par exemple sa devise de l’école publique).
La III° république bourgeoise ne s’est donc pas faite en un jour et l’historien (ex PCF) Roger Martelli s’en fait l’écho en utilisant Gramsci :
« Mais, bon an, mal an se met en place ce que le philosophe communiste italien Antonio Gramsci appellera plus tard un « bloc jacobin » : une alliance, autour du thème de l’égalité républicaine, des classes populaires et des couches moyennes. Sans doute se noue-t-elle sur la base d’une dominante du second groupe, dans l’exaltation de la petite et moyenne propriété, fruit du travail et de l’épargne. » [5]
L’hégémonie face à la montée du réformisme.
Au XIX° et XX° siècle, l’influence des anarchistes hostiles aux possibilités d’action légale décroît et les partis devenus majoritaires dans le mouvement ouvrier européen se battent pour des interventions de l’Etat bourgeois en matière de politique sociale. Il s’agit d’améliorer les conditions d’éducation, de vie et de travail de la majorité de la population au moyen d’une législation sociale. Cette orientation ouvre la voie au développent des services publics. Mais les conquêtes de droits politiques, de positions électorales, sociales et la place prise par les revendications immédiates entraînent beaucoup d’illusions, prennent de plus en plus d’importance dans leur stratégie et finissent souvent par devenir des fins en soi. C’est la stratégie du réformisme graduel théorisé par Eduard Bernstein vers 1900. Dans la seconde après guerre, le poids pris dans l’Etat bourgeois par les conquêtes sociales avec le développement du salaire socialisé (la sécu) donne cours à une interprétation réformiste de la guerre de position (surtout au PCI).
La stratégie réformiste est encore bien présente avec le front de gauche, son suivisme a-critique envers une orientation syndicale qui écarte d’emblée dans la rue toute possibilité d’épreuve de force avec le pouvoir pendant le récent mouvement social de l’automne en témoigne.
Le PCF et son « espace communiste ».
Une autre expérience d’hégémonie, même si elle se limite au vote des classes populaires et au mouvement ouvrier, concerne le PCF au XX° siècle. Pour l’historien Roger Martelli, auteur d’Une histoire électorale du PCF, les zones d’hégémonie le PCF « peuvent s’appuyer sur une projection sociale originale, ce que ne font pas ses concurrents à gauche. L’avenir social, il le montre du doigt en le pointant vers l’est, vers l’image mythique de l’URSS ». Mais l’ancrage sociopolitique se reproduit dans la durée en faisant appel aux pratiques sociales aussi différentes que celles du syndicat, du tissu associatif et de l’action communale.
« Le réseau associatif, professionnel ou non, encadre et donne sens à la vie, quand celle-ci hésite sur l’avenir. La fête le bal, le dîner champêtre, la manifestation artistique, la bibliothèque, le théâtre ou le film regroupent les isolés et les déracinés, ceux qui sont à la quête d’un environnement qui valorise leurs aptitudes et concrétise leurs désirs. » [6]
L’action communale fait l’objet d’une longue contribution signée par le dirigeant communiste Albert Treint dans les Cahiers du bolchevisme en 1925 :
« les municipalités communistes[…] sont pour le prolétariat des points d’appui précieux, aussi bien pour la lutte quotidienne que pour la lutte révolutionnaire.[…] Bien entendu, nous devons combattre, dans les larges masses et dans nos propres rangs, l’illusion que le socialisme peut s’instituer pacifiquement, par la conquête légale, électorale des municipalités. Les municipalités sont intégrées dans l’appareil d’Etat bourgeois. »[…]
En elles peuvent se former en partie les cadres d’administrateurs prolétariens, dont le manque, s’est fait cruellement sentir dans la Russie révolutionnaire. »
3° la problématique des services publics et des biens communs
Le service public, c’est d’abord une institution intégrée dans l’appareil d’Etat bourgeois. Il concrétise un droit démocratique ou un bien commun en le rendant accessible à tous, son support « physique » (l’Hôpital public, l’Education nationale, la SNCF, La Poste…). S’ il est reconnu comme une position ou un point d’appui « culturel » ou idéologique dans le combat pour l’hégémonie, cela exige de notre part une intervention à la fois tactique (la défense de l’institution liée à l’appareil d’Etat bourgeois) et stratégique avec la défense des droits sociaux, la problématique des biens communs.
Apparus par le biais de l’altermondialisme, Samy Johsua pense que la problématique des biens communs de l’humanité rejoint la continuité des services publics français appelés à satisfaire des besoins sociaux et/ou écologiques (eau, éducation, santé, transport, environnement, énergie…). Mais cela exige de faire une distinction entre l’institution (avec ses moyens matériels et humains) et le bien (ou service) qu’elle rend accessible à tous. La question est donc de savoir si nous pouvons utiliser l’institution service public comme un lieu d’intervention pour construire une hégémonie émancipatrice.
Comme tous les services publics intégrés dans l’appareil d’Etat bourgeois, celui de l’Education Nationale n’est pas au dessus des classes. Pourtant, sa mission est vise bien un but d’émancipation en permettant à tous d’exercer son droit à l’éducation, au nom d’un principe d’égalité Il en est de même pour le droit de suffrage dans l’histoire du régime parlementaire bourgeois dont la naissance et son extension vers l’universalité - comme tous les droits démocratiques ou sociaux passés, présents et à naître- sont toujours tributaires du rapport des forces entre les classes. Les droits démocratiques et/ou sociaux sont jusqu’à présent « gérés » par des institutions publiques intégrées dans l’Etat bourgeois. En reprenant l’analyse de Gramsci ces institutions apportent leur contribution dans la production d’illusions sur sa neutralité, s’il est représentatif, démocratique et que les masses s’autogouvernent. Ils sont distincts de l’Etat bourgeois mais restent intégrés.
Les services publics font donc partie de l’appareil de domination (en participant à la recherche du consentement majoritaire) de la bourgeoisie au pouvoir tout en restant (encore) des prestataires de droits sociaux. Paradoxalement, nous l’avons déjà dit, parce ce qu’ils prennent en charge leur accès, nous devons donc assurer tactiquement la défense de l’institution. Un autre motif de les défendre est qu’ils sont actuellement le talon d’Achille de la domination idéologique libérale.
La phase actuelle du capitalisme étant celle de l’accumulation par dépossession (David Harvey), les produits ou services de base sont dans sa cible. La privatisation des services publics prend la forme d’une disparition programmée de leurs moyens matériels et humains nécessaires à leur fonctionnement, dans le but de privatiser ou mettre en marché les biens communs (énergie, eau, transports collectifs, santé…). Résister à la casse de l’institution revient bien à lutter pour préserver les biens communs.
Un autre paradoxe concerne cette fois l’idéologie dominante. En privatisant et « modernisant » les services publics (soi disant pour les sauvegarder !), la bourgeoisie prend le risque d’engendrer massivement des désillusions sur son « Etat au dessus des classes » nécessaire à sa domination par consentement. Elle sape ainsi sa propre domination idéologique, celle du libéralisme à tout crin, contribue elle même à crédibiliser dans l’opinion publique les luttes dans les services publics et… à la naissance de majorités d’idées contre leur privatisation. Six mois après l’échec d’un important conflit social sur les retraites, un sondage confirme encore largement l’impopularité de la contre réforme gouvernementale sur les retraites. La remarque de Samy Johsua sur la bataille de l’opinion publique comme une « version » de la lutte hégémonique est juste.
4° Le lien avec l’avenir social
Même dans la phase préparatoire révolutionnaire, une stratégie de transition reste toujours liée à la conquête du pouvoir. Son objectif est d’amener les mobilisations sociales a se radicaliser à partir d’exigences mettant en cause la logique du système, et les conduire jusqu’à son seuil. Le texte « nos réponses à la crise » intègre cette démarche.
Mais une difficulté à résoudre aujourd’hui est cependant de « lier l’état présent du combat et de la conscience à la lutte pour un changement de société » (Guillaume Liegard [7]) ou de « penser ce lien entre lutte pour le pouvoir et lutte quotidienne » (Yvan [8]). Or, dans la confrontation de type hégémonique, le lien est présent. Il l’est dans les débuts balbutiants de la III° république, avec un avenir social prenant la forme d’une république égalitaire et utilisant la création de services publics comme points d’appui ; il l’est aussi dans « l’espace communiste » du PCF au XX° siècle sous une autre forme, celle d’une projection sociale orientée vers un socialisme mythique. En relatant l’expérience du PCF, l’historien Roger Martelli donne en effet un contenu original à ce lien puisque c’est une projection sociale née dans la conscience collective, qui devient le point d’appui aux luttes et aux pratiques sociales pour une hégémonie alternative.
Ce type de lien me semble encore transposable dans le contexte des luttes avec le rôle de force propulsive joué par les bastions ouvriers dans les grèves de masse au XX° siècle. Ils existent dans des services publics (les bureaux gares de La Poste en 1936, 1953, 1968 et 1974 ; les gares de la SNCF encore aujourd’hui) ou des entreprises publiques comme Renault avec son usine phare de Billancourt. Leur place acquise (et perdue presque partout suite à leurs disparitions causées par les restructurations) de bastions de la lutte des classes peut être assimilée à celle d’une position de type hégémonique. Un lien est effectivement constaté dans les mobilisations entre ces places fortes et les grèves de masse. On peut utiliser l’image d’une projection sociale pointée vers eux pour mieux cerner ce lien. Celle-ci est réveillée dans la conscience lorsque ces points d’appui « explosent », libérant ainsi une lave de conflits dans l’entreprise, voire sur tout un pays (« lorsque Renault s’enrhume, la France éternue »).
Puisque les anciens lieux géographiques servant de points d’appui ont disparu ou en voie de disparaître (URSS, bastions ouvriers), par quoi pouvons nous les remplacer ? Pouvons nous reconstituer un lien équivalent dans les luttes d’aujourd’hui ? En retenant toutes les remarques faites ici, les services publics et les biens communs pourraient être cette hypothèse.
D’abord elles sont l’objet d’attaques régulières orchestrées par une bourgeoisie devenue prédatrice d’acquis sociaux. Mais elles soulèvent régulièrement des ripostes sociales de grande ampleur. Il suffit de regarder sa stratégie de grignotage tenace pour s’en rendre compte (1993 : 1° recul avec la réforme Balladur concernant le privé, sans combat ;1995 :succès des mobilisations contre la réforme Juppé visant certains régimes spéciaux ; 2003 : 2° recul contre la réforme « Fillon-Chérèque » ; 2006 : succès des mobilisations contre le CPE ; 2010 : 3° recul avec l’échec du mouvement social d’automne contre la réforme néo-libérale des retraites.). Les grignotages peuvent se transformer à l’occasion en dépeçage à grande vitesse (Portugal, Grèce, Irlande..). Sans trop nous tromper, les chances de connaître à l’avenir des luttes de grande ampleur dans ce secteur restent grandes.
Ensuite, les luttes et les résistances mettant au centre l’avenir des biens communs sont potentiellement porteuses de la perspective d’une confrontation de classe de type hégémonique. Le texte « nos réponses à la crise » la propose même en exigeant le contrôle social de ces institutions intégrées à l’Etat bourgeois, mais aussi de constituer de nouveaux « communs », en donnant accès à des biens et services ayant vocation à sortir du marché. S’il est mis en marche, ce processus s’apparente bien à une lutte pour une hégémonie émancipatrice à l’intérieur d’un Etat bourgeois.
Pour terminer, la difficulté d’établir dans la conscience populaire un lien entre ces luttes et un avenir social qui soit possible d’incarner dans le présent, peut et doit être résolue. A contrario, l’impact majoritairement négatif dans l’opinion publique de la privatisation des produits et services de base (énergie, transports, école, santé..) se traduisant par la conquête de majorités d’idées opposées en ouvre la voie. Même le FN cherche à récupérer ce besoin populaire d’un autre avenir social en prenant la défense des services publics, ce qui témoigne de la force de cette projection sociale qu’ils sont encore capable de faire naître dans la conscience populaire !
Dans la conscience toujours, l’institution « matérielle » du service public se confond avec les droits sociaux qu’il prend en charge, et qui sont aussi perçus comme des droits démocratiques. Or, ce mode de domination par consentement de la bourgeoisie s’étiole en ce moment pour plusieurs raisons. Ce qui est sûr, la projection sociale en question exprime un besoin évident d’avenir social et les services publics véhiculent certainement son image (encore mythique) dans la conscience. De la problématique autour des biens communs et de leurs institutions proviendrait, formulons en l’hypothèse, la force propulsive encore manquante dans la confrontation hégémonique. Cette réserve d’ énergie proviendrait de la naissance d’une image représentant l’avenir social que les luttes et les pratiques émancipatrices doivent conforter. Cette hypothèse, si elle se concrétise permettrait de résoudre une autre difficulté liée encore une fois à la confrontation de type hégémonique dans la phase pré-révolutionnaire : l’expérience pratique et prolongée d’une démocratie supérieure à la démocratie bourgeoise.
" une telle révolution n’aura lieu en Occident que si les masses ont fait l’expérience d’une démocratie prolétarienne dont la supériorité sur la démocratie bourgeoise soit tangible. Le seul moyen dont dispose le socialisme pour atteindre la victoire dans ces sociétés, c’est de représenter incontestablement plus, et pas moins, de liberté pour la plus grande majorité de la population. C’est la réserve encore inutilisée de l’énergie populaire, que toute perspective d’une véritable démocratie ouvrière libérerait, qui fournira la force explosive capable de mettre fin au règne du capital. Car c’est avant de détruire les structures de l’ordre ancien par la conquête de l’Etat que l’on doit montrer ce que serait une nouvelle liberté sans privilège » [9]
Albert GUILLOT