A l’heure où les gestes de désespérance se succèdent dans la Fonction publique et dans ses établissements publics (Direction Générale des Finances Publiques, Douanes, Office National des Forêts), le Conseil d’Etat vient de prendre une décision de principe dans laquelle il « aligne », d’une certaine manière, le statut des agents publics sur celui des salariés du privé en matière de harcèlement moral.
Des dispositions réservées, jusqu’à présent, aux seuls salariés du privé
Le 27 novembre 2000, était adoptée une « directive européenne » interdisant toute discrimination et introduisant, surtout, le principe du renversement de la charge de la preuve : ce ne serait plus au salarié de faire la preuve qu’il a été victime d’une discrimination, mais à l’employeur de faire la preuve qu’il n’y a pas eu de discrimination.
En janvier 2003, sans toutefois bouder son plaisir de voir, pour une fois en France, une loi de transcription rapidement adoptée, Solidaires Fonction publique ne pouvait que déplorer que cette modification allant dans un sens favorable aux travailleurs… ne s’applique qu’aux salariés du privé.
Le secteur public, était le grand oublié de cette loi… Mais ce n’était sans doute que par distraction des membres du gouvernement !
Certes en 2005, les sénateurs, attentifs aux problèmes de la Fonction publique, avaient étendu aux fonctionnaires l’interdiction des discriminations, qui figure désormais dans le Statut général, sans toutefois aligner le statut des agents publics sur celui du privé en matière de harcèlement moral.
Un « arrêt du Conseil d’Etat » du 11 juillet 2011 répare cette omission
Il aura fallu attendre près de onze années pour que les fonctionnaires bénéficient de cet allègement de preuve.
Il aura, aussi, fallu attendre cet arrêt de la Haute juridiction administrative, qui fera date (c’est certain), pour que cette transposition intégrale du droit communautaire s’applique enfin aux fonctionnaires et comble ainsi le vide juridique et le silence de la loi du 13 juillet 1983 portant Droits et obligations des fonctionnaires.
Aujourd’hui, le fonctionnaire ne devra plus faire la preuve qu’il a été victime d’un harcèlement moral, il devra établir les faits qui permettront de « présumer l’existence d’un harcèlement ».
Et, ce sera à l’administration de produire, en sens contraire, une « argumentation de nature à démontrer » que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.
Alors que faire si vous vous estimez victime de harcèlement moral ?
Il n’existe certes pas de solution miracle à ce genre de problèmes mais surtout ne restez pas seul(e) :
– Parlez-en autour de vous,
– demander à rencontrer le médecin de prévention,
– informer votre supérieur hiérarchique ou la personne en charge des ressources humaines,
– et puis, sachez que les militants de Solidaires Fonction Publique sont toujours à votre écoute, qu’ils sont là pour vous conseiller et vous aider dans les démarches à suivre.
Depuis l’instauration de la LOLF (loi organique relative aux lois de Finances) en 2001, la gestion publique n’est plus orientée que vers les résultats et la recherche de l’efficacité : objectifs, résultats, évaluation…
Conjugués aux milliers de suppressions d’emplois et aux réformes structurelles en tous genres, le management et la gestion par les indicateurs statistiques se traduisent, pour tous les fonctionnaires et les contractuels, par une dégradation des conditions de vie au travail, par du stress et un mal être général qui peuvent conduire à des gestes de désespérance.
En alignant le statut des agents publics sur celui des salariés le Conseil d’Etat rappelle, sans doute, à l’Administration que lorsque le harcèlement sera avéré, sa responsabilité sera, comme pour les entreprises privées, automatiquement engagée (y compris financièrement) en vertu de son obligation de sécurité !
25 juillet 2011
Tract Solidaires Fp (Fonction publique)