Trois Camerounais ont été condamnés en première instance à cinq ans de prison ferme pour homosexualité par le tribunal d’Ekounou (Yaoundé). Les trois hommes devront également s’acquitter d’une amende de 200 000 FCFA (300 euros), a appris l’AFP, mercredi 23 novembre, auprès de leur avocat. Ces cinq ans de prison sont la peine maximale prévue par la législation camerounaise, qui interdit les pratiques homosexuelles, à l’instar de la majorité des pays du continent africain. L’avocat a fait appel de la décision.
D’après la police, les trois hommes avaient été surpris alors qu’ils avaient des rapports sexuels à bord d’un véhicule dans le quartier Essos, à Yaoundé, en juillet 2011, et avaient été inculpés de « faits d’homosexualité ». Deux des prévenus sont incarcérés depuis, alors que le troisième avait bénéficié d’une mesure de liberté provisoire. L’avocat des trois hommes soutient que l’attitude et les commentaires du juge tout au long des débats ont laissé transparaître qu’il était « homophobe ».
« C’est un scandale », s’est insurgée Me Alice Nkom, présidente de l’Association pour la défense des droits des homosexuels (Adefho) en réaction à cette condamnation. « Ce n’est pas digne d’une justice moderne au service de la démocratie dans un pays comme le Cameroun (...) [ni] d’un pays qui parlerait de droits de l’homme ». L’avocate a aussi critiqué le juge en se référant au président de la République camerounais, Paul Biya : « Je ne peux pas imaginer que ce soit un message envoyé aux homosexuels. [Le] président de la République continue à dire que [l’homosexualité] relève de la vie privée. Pour moi, ce juge n’est pas représentatif de la position du Cameroun. »
TENDANCE À LA SÉVÉRITÉ
Le président du Rassemblement de la jeunesse camerounaise (RJC) se dit pour sa part « très content » et milite pour plus d’arrestations. « Les Occidentaux veulent nous imposer les excroissances de leurs civilisations. Nous n’en voulons pas (...). Nous avons d’ailleurs engagé une lutte contre les homosexuels. »
En août 2010, l’ONG américaine Human Rights Watch (HRW) et l’ONG camerounaise Alternatives-Cameroun avaient déjà demandé la dépénalisation des pratiques homosexuelles au Cameroun, invoquant les recommandations du comité des droits de l’homme des Nations unies, selon lequel la criminalisation de l’homosexualité « viole les droits à la vie privée et à la liberté de ne pas être discriminé ».
Le 26 août, quatre autres Camerounais ont été écroués après avoir été inculpés d’homosexualité. L’instruction de leur affaire est en cours. Trente-huit des cinquante-trois Etats africains ont des lois qui pénalisent l’homosexualité. Et la tendance est à la sévérité, comme au Burundi, qui a créé en 2009 une peine de prison pour punir les relations entre partenaires du même sexe.