L’occupation du siège national du 9 mars et l’intervention des élus aux côtés des grévistes avait permis d’obtenir des négociations. La direction de La Poste des Hauts-de-Seine s’était engagée dans ces négociations à faire intervenir à Nanterre un cabinet d’expertise choisi par le CHSCT qui aurait la possibilité de remettre en cause les suppressions d’emplois.
La direction est revenue sur ses promesses en fin de semaine dernière. La réaction ne s’est pas fait attendre : un débrayage massif à Malakoff/Vanves et surtout à Nanterre ont obligé la direction à revoir sa copie et à proposer un protocole qui a été signé lundi dernier.
La Poste s’engage à respecter les préconisations du cabinet d’expertise, y compris en termes de créations d’emplois. L’intervention d’un tel cabinet crée un précédent qui va, espérons-le, peser au niveau national.
Les réorganisations des autres bureaux (Malakoff/Vanves, Montrouge, Fontenay) ne seront pas mises en place avant le 15 octobre.
Un collègue en CDD de Malakoff/Vanves est titularisé sur site et un collègue qui a enchaîné huit ans de CDD a quant à lui son CDI à Fontenay, sans aucune condition et avec reprise d’ancienneté.
En cumulant la neutralisation des jours de grève obtenue dans le protocole et la caisse de grève, entre 50 et 60 % des jours de grève, en fonction des bureaux, sont payés pour les grévistes ayant fait le conflit de bout en bout.
Toutes les revendications des grévistes n’ont pas été satisfaites, mais il s’agit clairement d’une défaite pour la direction qui a cherché quasiment jusqu’au dernier moment à rejeter en bloc leurs revendications.
La stratégie des grévistes a payé. Une fois que Nanterre a démarré le conflit le 16 janvier, et malgré l’envoi par la direction de treize fourgons de CRS, les postiers ont opté pour une politique d’extension de la grève. Ils ont ainsi pu regrouper un maximum de forces et étendre le conflit.
Au moment même où le nombre de grévistes atteignait son pic, la direction a réussi à semer la zizanie en convaincant une partie des grévistes qu’il fallait négocier de manière séparée, sans les syndicats.
Malgré tout, favorisés par le contexte de discussions sur la souffrance au travail à La Poste, les postiers ont réussi dans les deux dernières semaines du conflit à regrouper un maximum de soutiens autour d’eux (élus locaux et nationaux du PS, Front de Gauche...). Il a aussi fallu frapper fort en visant directement le siège national pour ébranler la direction. Le coup de grâce a été porté quand les grévistes ont surmonté leurs divergences et exigé ensemble que la direction respecte sa parole.
Au moment où le PDG de La Poste parle d’ « ajustements » concernant les réorganisations, l’issue de la grève dans le 92 est un encouragement à élargir la lutte. Les grévistes du 92 ont acquis une expérience de lutte commune entre bureaux. Ils ont adopté un appel à l’ensemble de leurs collègues postiers à une réunion nationale les 2 et 3 juin pour regrouper les équipes ayant mené ou comptant mener des bagarres contre les réorganisations et pour les salaires.
Correspondant NPA92
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 141 (22/03/12).
Occupation du Siège de La Poste par les grévistes du 92
Unité et radicalité font avancer le conflit
Les postiers grévistes des Hauts-de-Seine ont occupé le siège national de La Poste, et grâce à leur combativité et aux soutiens des élus de gauche, ils ont obtenu la promesse de négociations.
Après plus de 50 jours de grève, les postiers de Nanterre, Malakoff, Vanves, Montrouge et Fontenay se heurtaient à un refus persistant de négocier de la part de La Poste. Les grévistes ont su se saisir du contexte actuel de médiatisation de la question de la souffrance au travail à La Poste pour mettre en difficulté la direction en menant une action au siège national du Courrier de La Poste le 9 mars.
Remuer ciel et terre pour obtenir des soutiens
Les grévistes ont fait le tour des QG de campagne des différents candidats de gauche à l’élection présidentielle. À force de taper à toutes les portes, ils ont fini par obtenir le soutien d’un nombre significatif d’élus du Front de Gauche et du PS, au niveau local et national, en plus de l’appui du comité de soutien local (FSU, Gauche citoyenne, PCF, PG, M’PEP, NPA). Les élus ont même fini par proposer la semaine dernière des négociations « tripartites » (élus-direction-grévistes). Cette unité de différentes forces derrière les grévistes a mis la boîte sur la défensive, elle qui prétendait que les syndicalistes refusaient tout compromis.
Taper là où ça fait mal
Mais pour obliger la boîte à accepter de mettre en place des audiences de négociation, il a fallu frapper fort. Et les grévistes ont tout simplement décidé de taper là où les décisions se prennent : au siège national du courrier. Les grévistes ont réussi à déjouer le système de surveillance et les vigiles privés gardant l’entrée du siège. Ils se sont adressés aux dirigeants nationaux de La Poste. Ils ont exigé qu’au moment où le PDG prétendait ouvrir un « cycle d’écoute et de dialogue » à la suite de suicides, des négociations soient ouvertes concernant un conflit qui n’avait déjà que trop duré. Ils ont tenu face aux pressions des huissiers, de la police, des provocations et des intimidations des gros bras au service de la direction. Ils ont même réussi à être médiatisés et ont obtenu au bout de plus de dix heures de guerre des nerfs un engagement écrit pour des négociations !
Déjouer les ultimes pièges
La direction essaie d’étaler dans le temps les négociations pour laisser pourrir le conflit. Elle est malgré tout obligée de céder du terrain. Mais le temps que les négociations aboutissent, les grévistes vont devoir garder leur sang-froid et tenir. C’est pourquoi la question du soutien financier est toujours aussi importante.
Javier Guessou
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 140 (15/03/12).
50 jours de grève à La Poste 92
La grève des postierEs a commencé à Nanterre le 16 janvier contre une réorganisation qui prévoyait la suppression de quatre emplois. La bagarre s’est étendue aux autres bureaux (Malakoff, Vanves, Montrouge, Fontenay-aux-Roses) où les réorganisations sont prévues dans plusieurs mois. La réplique de la direction consiste à réprimer grévistes et syndicalistes... et à organiser des négociations avec une partie des grévistes, sans les syndicats. En employant ce procédé après plus de six semaines de grève, elle réussit à faire douter les grévistes... mais pas à leur faire reprendre le travail. Maintenant que les grévistes ont réussi tant bien que mal à déjouer ce mauvais coup, il s’agit maintenant de gagner la guerre d’usure imposée par la direction, qui refuse toujours de négocier.
Tous les ans depuis 2009, une grève dure a eu lieu à La Poste dans les Hauts-de-Seine, le département le plus riche de France. Au fur et à mesure de ces conflits, plusieurs dizaines de postiers ont fait l’expérience de grèves regroupant plusieurs bureaux. Ils sont plusieurs dizaines, dont une majorité de jeunes, qui se sont syndiquéEs, avec en tête la perspective de regrouper un maximum de forces pour stopper les réorganisations. L’objectif de la direction de La Poste est de démoraliser ces dizaines, voire ces centaines de postiers pour qui le terme « convergences des luttes » a une signification pratique.
La Poste a bien compris l’enjeu. Pour nous la tâche centrale est de regrouper les dizaines de militantEs, de syndicalistes dans le 92 et ailleurs autour de l’idée qu’il faut regrouper les luttes contre les suppressions d’emploi et pour l’augmentation des salaires.
Il n’y a pas de microclimat dans le 92 à La Poste. Les concentrations de salariéEs y sont beaucoup moins importantes qu’à Paris intra-muros, mais elles sont très nombreuses (environ 200 centres) et rapprochées géographiquement. Comme dans beaucoup de secteurs du « nouveau prolétariat », il s’agit d’unités pour la plupart petites (la majorité entre 10 et 50 salariéEs), et quelques sites regroupant entre 100 et quelques centaines de personnes. Les salaires des postierEs sont particulièrement faibles. Les conditions de travail de la majorité des agents ressemblent à celles de nombre d’entreprises du privé, avec tout de même une présence syndicale significative. Les bureaux actuellement en grève se mobilisent pour la première fois depuis dix ans. Quel que soit le résultat du conflit, cette grève, et celles qui l’ont précédée dans le 92 prouvent que même dans des secteurs où les conditions pour lutter ne sont pas favorables au départ, il est possible de lutter et de gagner.
Les grévistes ont besoin d’un maximum de soutien financier. Populariser leur bagarre et les autres grèves en cours à La Poste est indispensable pour les sortir de l’isolement. Parce que la politique, c’est débattre des grandes questions nationales et internationales, mais c’est aussi inviter sur la scène politique les bagarres menées par des gens ordinaires.
Javier Guessou
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 139 (08/03/12).