« Mais, pas d’illusions : cette somme, équivalente à 1% du PIB de l’UE (…) demeure symbolique ». C’est ainsi que le quotidien Le Temps du 30 juin caractérise la décision prise la veille par les chefs de gouvernement de l’UE d’une aide de 120 à 130 milliards -dont 60 avant la fin de l’année- pour sauver les banques espagnoles et italiennes.
Face aux milliers de milliards mis à disposition des banques en 2008-2009, ce sont en effet des peanuts que ces 120 milliards qu’on dit destinés à la croissance. Et qui ne le sont pas, à moins de considérer que l’aide européenne directe aux banques -sans, donc, que cela alourdisse les dettes souveraines des Etats- soit une incitation à la croissance…
C’est pourtant cette somme « symbolique » que l’on présente comme un coup de pouce « aux pays vertueux » dans une « Europe qui doit retrouver de la compétitivité » comme l’explique la presse italienne.
L’Allemagne veut bien contribuer à travers du Fond européen de stabilité financière et du futur Mécanisme européen de stabilité, mais à la condition d’une posture vertueuse, c’est-à-dire, d’une poursuite et d’un approfondissement des contre-réformes sociales.
Car, pour les banquiers et financiers, à défaut de solutions à la crise de l’euro, regagner de la compétitivité est synonyme de réduction des coûts de la main-d’œuvre, de baisse drastique des retraites, d’allongement de la durée du travail, de flexibilisation, et de vente, voire de bradage, des biens publics par le biais des privatisations.
Ce sont les recettes que, pétris de vertu, imposent à leurs peuples Mario Monti et Mariano Rajoy, les chefs des gouvernements italien et espagnol, que la négociation de Bruxelles a, d’après Der Spiegel, élevés au statut de « meilleurs partenaires possibles de l’Allemagne ».
Car, c’est sans tergiversations que ces deux là s’appliquent à réduire les coûts du travail et des retraites et font fi des réticences et résistances de leurs populations. Ce sont eux qu’on montre en modèle au gouvernement d’union nationale récemment mis sur pied en Grèce, qu’on montre aussi aux Portugais et autres Irlandais. Les voilà, les nouveaux héros.
C’est derrière leur image d’exécutants zélés que se rassemblent les puissants d’Europe. Tous les puissants d’Europe. Car, au-delà des désaccords sur l’euro, de Berlin à Paris, de Rome à Madrid, de Londres à Athènes, la solidarité des classes dominantes est sans failles autour d’un même projet de réduction massive des conditions de vie des populations.
C’est au nom de leur solidarité de classe que le Financial Times exhortait les Grecs à « ne pas faire le saut dans le vide » en votant pour Syriza, c’est-à-dire contre les mémorandums imposés par la Troïka.
Contre cette solidarité là, c’est la solidarité de ceux d’en bas qu’il faut construire, pour faire vivre l’espoir auquel les résultats de Syriza et les résistances des peuples, le grec en premier lieu, donnent corps.
Paolo Gilardi