1e PARTIE : L’origine de la subordination des femmes
Les réactionnaires (et une majorité de l’opinion publique) disent : « C’est dans la nature ; ça a toujours été comme ça ». « Les différences biologiques, indéniables, mènent automatiquement à des différences sociales, culturelles et donc à une hiérarchie entre les sexes. » ou encore « La force musculaire majeure de l’homme l’amène à la domination. »
A cela nous, en tant que matérialistes historiques, répondons facilement
1) Que la force masculine est très relative et dépend du contexte, de l’entrainement, de la nourriture etc.
2) Que dans nos sociétés actuelles la force physique est totalement secondaire pour la satisfaction des besoins par rapport aux technologies utilisées.
Si par contre on veut renvoyer aux origines de l’humanité alors il faut vraiment étudier la préhistoire et ne pas se baser sur des mythes comme « l’homme en tant que chasseur » qui aurait développé des caractéristiques physiques mais aussi psychologiques de suprématie comme tels que l’agressivité, l’astuce, la planification stratégique etc.
Allons donc voir les œuvres de base en nous posant la question : est-ce que la domination masculine a toujours existé ?
Dans la littérature marxiste on renvoie à une œuvre classique écrite par Engels à la fin du 19e siècle [1], « L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat ». (basée sur des discussions avec, et des notes de Marx – qui n’a plus eu l’occasion de les systématiser).
Engels n’est pas d’accord avec l’idée que l’inégalité (l’oppression, l’exploitation) entre les personnes a toujours existée. Sur la base des premières études ethnologiques, notamment de Lewis H. Morgan, Engels part de l’hypothèse de l’existence d’une société primitive égalitaire, communautaire, sans classes, qu’il appelle « communisme primitif » où la position des femmes n’était pas subordonnée aux hommes. Il pense au contraire, que ces sociétés étaient des matriarcats. Les femmes constituaient les noyaux stables des clans, la descendance était déterminée par elles. En conséquence, elles avaient beaucoup de pouvoir et jouissaient d’une grande considération de la part des hommes.
Les études anthropologiques suivantes ont démontré que ceci était une erreur. On ne peut pas parler de sociétés matriarcales, mais bien matrilinéaires – où la descendance était déterminée par les femmes – et souvent matrilocales – où ce sont les hommes qui se déplacent chez les femmes quand ils s’unissent. De toute façon il s’agit de sociétés plus égalitaires.
On ne peut parler d’un véritable matriarcat que si les hommes sont subordonnés aux femmes, pas seulement quand elles ont un rôle important dans la division du travail, dans l’économie domestique ou dans la prise de décisions concernant le ménage (comme par exemple encore maintenant chez les Moso en Chine [2]), mais quand leur pouvoir inclut le domaine public et celui des relations extérieures ; quand elles prennent des décisions essentielles pour la communauté y compris le pouvoir de normer et de contrôler le comportement sexuel des hommes. Cela entraine aussi le pouvoir de définir des valeurs et des systèmes symboliques d’explication.
De cela on n’a pas de preuves dans aucune société existante ou passée. Donc là Engels s’est trompé.
Mais ce qui est important, c’est la méthode qu’il a utilisée.
D’abord le fait de lier la position des femmes au contexte matériel, économique et social, à la division sexuelle du travail et à la contribution de chaque sexe à l’alimentation de la tribu.
Ensuite, et ceci est tout à fait pertinent, le fait d’avoir reconnu la reproduction biologique et sociale comme un facteur, un enjeu, tout aussi important que la production matérielle.
Parenthèse : c’est un débat tout à fait actuel dans le féminisme et dans les écoles de matérialisme dialectique qui reconsidèrent maintenant la valeur du travail de production et de reproduction dans le troisième âge du capitalisme.
Enfin, une autre prise de position originale pour son temps : l’identification de la famille monogame actuelle comme noyau de l’oppression des femmes dont il déduit la nécessité de la dépasser.
Que disent les études anthropologiques actuelles ? [3]
Dans presque toutes les civilisations connues de l’histoire, dont on a des témoignages écrits, à partir de 1.500 a.C., il y a oppression des femmes. Considérons donc la période précédente. Nous examinerons une période préhistorique, qui va environ de 35.000 ans à 6.000 ans a.C. appelée le paléolithique supérieur, dont on n’a pas de témoignages écrits.
Comment procèdent les historiens/anthropologues ? G.Lerner : « Nous lions des morceaux d’évidence dure (des outils, des tombes, de la poterie, des restes d’habitations et de squelettes,…) avec des mythes qui nous sont parvenus et de la spéculation ; nous les combinons avec ce que nous apprenons des peuples ‘primitifs ‘ qui survivent encore aujourd’hui. »
Nous n’avons donc pas de preuves, nous pouvons seulement faire des hypothèses. A l’aide de ces études scientifiques, nous essayerons de faire un développement matérialiste historique en plaçant les femmes et les hommes préhistoriques dans leur contexte géographique et écologique.
Les études anthropologiques récentes concordent
Les premières sociétés humaines étaient composées de petits groupes (clans, tribus,..) informels, nomades, avec une organisation flexible du travail. Ils vivaient de cueillette, de pêche et de chasse au petit gibier à laquelle toutes les personnes participaient. Ils consommaient ce qu’ils recueillaient/produisaient. Il n’y avait pas de surplus.
Une première division de travail a eu lieu (probablement) avec la chasse au grand gibier – suite à une évolution technologique dans la fabrication des armes – qui nécessitait des poursuites sur de longues distances, des absences imprévisibles, difficilement conciliables avec la grossesse et l’allaitement. En plus les femmes étaient précieuses pour la reproduction biologique du clan, il ne convenait pas de mettre leur vie en péril.
La première division du travail est fonctionnelle et non pas due à une « moindre capacité physique » ; en effet il y a des exemples de femmes célibataires, sans enfants, qui participent à la chasse. Cette asymétrie sexuelle ne comporte pas une attribution différente de valeur aux deux sexes. Les deux contribuent équitablement à la survie du groupe. Même plus, dans la plupart des sociétés de chasse et de cueillette, actuelles et passées, la chasse n’est qu’une activité auxiliaire et occasionnelle ; les femmes fournissent 60 % et plus de la nourriture. Pour faire cela elles se déplacent sur un ample territoire en portant leurs bébés et leurs petits enfants avec elles. Leurs activités sont variées et requièrent une connaissance approfondie du milieu, des plantes et du climat, de leurs propriétés nutritives et médicinales ; la garde du feu, l’invention des récipients et l’utilisation de l’argile. En plus les produits de la grande chasse rapportés par les hommes ne sont consommables que grâce au travail des femmes (cuisson, conservation, couture,…)
– L’explication de la subordination des femmes par le mythe de « l’homme chasseur » a été démentie par plusieurs anthropologues modernes.
Deux choses étaient essentielles pour la survie de la tribu : la production de la nourriture et la reproduction où c’étaient les femmes qui avaient un rôle de premier ordre. Un lien presque mystérieux avec l’au-delà ; la vie et la mort.
On a retrouvé partout les statuettes de « déesses mères » qui semblent témoigner du culte des facultés reproductives des femmes ; le respect et peut-être même la crainte que ce pouvoir des femmes pouvait inspirer aux hommes.
S. Coontz conclut : « Les études récentes donnent en gros raison à Engels : les rapports entre les sexes semblent plus égalitaires dans les sociétés primitives de chasseurs-cueilleurs et la position des femmes s’aggrave avec l’émergence de la stratification sociale, de la propriété privée, de l’agriculture et de l’Etat. »
Continuons à parcourir l’histoire
La plupart des sociétés de chasse et de cueillette étaient matrilocales et vivaient de manière pacifique (en tous cas dans des conditions écologiques favorables) avec les autres tribus qu’elles rencontraient de temps en temps.
Dans les sociétés matrilocales en général, la position des femmes est meilleure que dans les sociétés patrilocales. C’est évident.
Il y a discussion entre les anthropologues sur les causes de l’évolution de la matrilocalité et matrilinéarité vers la patrilinéarité et patrilocalité. Il y a plusieurs hypothèses : « Il fallait se procurer plus de femmes pour assurer la survie du clan ». « Les femmes s’adaptaient plus facilement à la nouvelle tribu et ne pouvait pas s’échapper à cause des enfants ». « Il était plus commode pour la tribu que les hommes – grands chasseurs – restaient dans leur tribu d’origine, car ils connaissaient le terrain »
« Dans les sociétés patrilocales on pouvait disposer rapidement d’un apport supplémentaire de force de travail féminin à travers le mariage ou le rapt des femmes, pour la préparation des produits de la chasse et leur redistribution dans le clan donc cela résultait dans une meilleure utilisation du surplus. »
C. Meillassoux dit que les sociétés patrilocales offraient de meilleures conditions pour concentrer la force de travail, les richesses et le pouvoir d’un lignage.
Selon C.L. Strauss « l’échange des femmes entre les tribus était la première forme de commerce » ce qui implique une réification, une réduction des femmes en objet. La création du tabou sur l’endogamie a mené soit à une interaction pacifique et structurée parmi les tribus, soit à l’organisation du « rapt » des femmes dont l’enjeu était toujours de s’approprier de leur capacité reproductive. [4] – Mais l’approche sexiste, androcentrique de C.L.Strauss a été bien critiquée par toutes les anthropologues féministes.
Reste à examiner par contre un autre facteur lié à la chasse au gros gibier par les hommes, à savoir le monopole des armes. Cela implique aussi un monopole sur la technique de fabrication des armes et donc peut-être une meilleure connaissance des techniques avancées ou de savoirs complexes en général (qui pourrait être confirmé par l’introduction d’appareils mécanisés, fabriqués par les hommes et qui ont remplacé les activités complètement manuelles des femmes comme les moulins, les tours de poterie, les métiers mécaniques,…) Ce qui est sur c’est que les principaux instruments de coercition ont toujours été réservés aux hommes et qu’ils ont toujours eu le quasi-monopole de la violence organisée, de la guerre et des relations extérieures.
Kathleen Gough : « Bien que les hommes utilisent rarement les armes contre le femmes, ils les possèdent en plus de leur plus grande force physique, ce qui est un levier fondamental de la domination des hommes. Les hommes possèdent le contrôle ultime de la force ; cela permet d’acquérir des droits sur les femmes (et aussi un enjeu majeur des rapports entre les hommes eux-mêmes au sein du groupe et vis-à-vis des groupes extérieurs).
En tout cas il est clair que les inégalités se sont développées bien avant l’apparition des classes.
Il est certain que des changements sociaux considérables ont eu lieu avec l’avènement du sédentarisme et de l’agriculture – la révolution néolithique – vers environ 10.000 ans a.C au Moyen Orient, 13.000 ans a.C au Cambodge, plein développement en Europe 6.000 ans a. C.
C’est approximativement quand les sociétés de chasse et de cueillette et d’horticulture ont cédé la place à l’agriculture que les relations de parenté tendent à glisser de matrilinéaires à patrilinéaires et que la propriété privée se développe.
L’apprivoisement et l’élevage des animaux a souvent précédé ou est allé de pair avec la culture des céréales. Le passage à l’agriculture a créé la nécessité de la continuité dans le travail, de la cohésion stable du groupe, du sédentarisme et de la constitution de stocks.
L’usage de la terre revient au groupe de parenté, l’héritage du troupeau va au groupe de parenté. Cela nécessite des règles, des tâches et des obligations réciproques, non plus informelles. Il y a un renforcement de la structure « familiale ».
Aucun producteur ne gère complètement son travail et le produit de son travail. Il dépend pour les semences des cycles agricoles antérieurs. Donc, l’ancienneté devient importante ainsi que les groupes de descendance. Se développe alors le culte des ancêtres reconnus capables de favoriser les conditions climatiques etc.
Le contrôle passe à un chef de village
L’utilisation de la charrue exigeait initialement la force masculine (avant l’utilisation des bœufs). Cela a renforcé le contrôle des hommes sur le surplus. Il fallait plus de travail féminin, pour rendre la récolte consommable, pour la transformation du surplus en stock en plus de toutes les autres activités de reproduction sociale : tissage, poterie, lavage, entretien, fabrications en osier,… Les femmes n’avaient pas de loisir. Les hommes pouvaient se dédier à autre chose (autres métiers et rituels ?)
Apparition de la polygamie : dans ce cadre le contrôle sur la reproduction des femmes – leur force de travail mais surtout leur descendance devient crucial.
A partir de cette époque, a position des femmes s’est nettement détériorée.
2e PARTIE : Le patriarcat
Depuis au moins 7 - 8.000 ans, les femmes ont une place subordonnée dans la société.
Dans toutes les sociétés : à partir de celle d’Europe avec la civilisation gréco-romaine, passant par le Moyen-âge et les Temps Modernes, mais aussi dans les sociétés asiatiques, africaines et latino-américaines mieux connues. Même les sociétés de l’Europe de l’Est qui avaient rompu avec le capitalisme dans le siècle passé n’y faisaient pas exception.
C’était la domination d’un sexe sur l’autre. Naturellement la position des femmes dans les différentes sociétés et systèmes de production a varié et il faut étudier spécifiquement les différentes époques historiques.
L’œuvre de Silvia Federici [5] renverse l’idée d’une évolution progressive des droits et des libertés des êtres humains dans l’histoire et elle explique notamment la perte de pouvoir des femmes et la détérioration de leur situation en Europe lors du passage du haut Moyen-âge au capitalisme marchand. Elle démontre comment la chasse aux sorcières qui a concerné des centaines de milliers de femmes au cours du 16e siècle en Europe (et plus tard en Amérique du Nord) a été cruciale dans la modification des rapports de force entre les sexes et entre les classes en faveur du capitalisme naissant et du patriarcat.
Quand on utilise le mot patriarcat, il s’agit d’un système de domination qui renvoie à l’origine au rôle dominant du mâle adulte hétérosexuel dans la famille traditionnelle qui exerce le contrôle sur corps/vie de toutEs les autres membres de la famille et en dispose (« il padre padrone » ou le père patron) et en même temps la garantit. Le père protecteur, qui pourvoit aux besoins de la famille en réduisant les autres membres de la famille (femme et enfants) à un état de mineurs. Cela présuppose une division des rôles selon le sexe et l’âge et des identités fixes et figées.
Mais, quand on parle de société patriarcale, du système patriarcal ou du patriarcat tout court, cela va bien au-delà du domaine de la famille – qui elle-même a d’ailleurs changé.
J’utiliserai dans mon exposé indifféremment les termes patriarcat, subordination des femmes, oppression des femmes, domination ou suprématie masculine même si on pourrait donner des significations légèrement différentes à chacune de ces expressions, en mettant plus l’accent sur l’un ou l’autre aspect, économique, symbolique, politique, psychologique,… de l’inégalité entre les sexes.
Le patriarcat est un système de domination qui structure toutes les sphères de l’existence.
Dans son essence, aujourd’hui comme dans la préhistoire, d’un point de vue matérialiste dialectique, il s’agit de deux enjeux de l’appropriation, l’usufruit, le contrôle des mâles sur : le travail des femmes, la force de travail des femmes et sur la reproduction et la sexualité des femmes, le corps des femmes.
Comment l’obtenir ? Par l’insertion partielle et inégale – selon les époques et les régions du monde – des femmes dans le mode de production dominant. Ensuite, à travers une institution « merveilleuse » , très ambiguë qui est la cellule de base de la société, la famille.
On n’a pas le temps de parcourir l’insertion des femmes dans les différents modes de production, l’esclavage, le féodalisme, le mode de production asiatique, le capitalisme commercial et colonial etc.
Limitons-nous ici à l’époque actuelle ou le capitalisme global domine le monde entier.
Les femmes sont utilisées comme armée industrielle de réserve (Marx) dans l’économie capitaliste – insérées dans les périodes d’expansion économique mais expulsées en période de récession ou de crise .
Cette pratique est justifiée par l’idée/l’idéologie que c’est l’homme qui pourvoit fondamentalement aux besoins de la cellule familiale et que la place naturelle et principale de la femmes se situe dans la famille en tant que femme au foyer.
Les femmes sont utilisées en opposition à la force de travail masculine pour affaiblir la classe en la divisant. Ceci joue également dans d’autres sections « mineures », « périphériques » de la classe ouvrière comme les immigréEs.
Attention, il s’agit d’une insertion partielle, temporaire et inégale dans le monde du travail qui est caractérisée par une ségrégation horizontale et verticale. Les femmes se situent dans les couches et fonctions les moins payées, subordonnées (pas dirigeantes), dans les secteurs « féminins » des services, de la reproduction sociale (moins valorisés) qui sont dans le prolongement des fonctions « naturelles » de soins que les femmes exercent au sein de la famille : éducation, nettoyage, restauration, accueil, santé,…
C’est-à-dire que les femmes travaillent à des salaires plus bas, dans des conditions de travail plus précaires à cause de la combinaison du travail pour le marché avec les tâches de reproduction familiale. Ceci a comme conséquence, des carrières interrompues, du temps partiel (imposé),et … des retraites de misère.
En gros les femmes se retrouvent dans une indépendance économique partielle par rapport aux hommes.
On assiste actuellement à une véritable féminisation du monde du travail. Ceci ne renvoie pas seulement à une augmentation massive du nombre de femmes actives dans l’économie ces dernières décennies et partout dans le monde capitaliste globalisé, mais aussi à l’utilisation des soi-disant qualités féminines dans l’entreprise : capacité de relation et de communication, soin et attention à la tâche, dévouement, souplesse, caractère docile,… et à leur insertion précaire dans le monde du travail ; un lien plus « souple » avec l’entreprise ; des horaires de travail variables au service de l’entreprise et dilution des frontières entre temps de travail et loisir (on amène le travail chez soi). Cela devient le modèle pour tous les travailleurs, hommes et femmes.
Ceci nous mène à la fonction reproductrice des femmes et à la famille.
La force de travail doit être reproduite : nourrie, lavée, hébergée, reposée, psychologiquement équilibrée et préparée, saine, en forme, dans les générations successives. Cela ne se produit pas tout seul, automatiquement. C’est le travail gratuit des femmes à l’intérieur de la famille qui garantit cela. Dans ce sens on parle de l’exploitation du travail de reproduction des femmes par le système capitaliste. Si tous ces services devaient être payés par les travailleurs, les capitalistes devraient leur payer le double de leur salaire actuel ; ce qui est impossible pour le système. Mais cela comporte aussi des avantages pour les travailleurs mâles en tant que sexe car ils jouissent de marchandises et de services fournis amoureusement (?!) par les femmes. Ce qui crée donc une certaine complicité masculine.
On parle de double exploitation pour celles qui en plus exercent un travail salarié.
Parenthèse
Je veux signaler une approche intéressante d’un nouveau courant du féminisme qu’on appelle le féminisme du soin (care/cuidado) qui met au centre de son analyse et de sa proposition de modèle alternatif de société, la reproduction de la vie et non pas la production, comme nous, les marxistes, avons été habituéEs de faire. (Bien que nous avons vu qu’Engels …). Elles partent de la considération que l’individu n’est pas une machine inoxydable et éternelle, que l’être humain est au contraire vulnérable, dépendant et temporel. De sa naissance jusqu’à sa mort, il a constamment besoin de soins pour vivre, et besoin de la présence et de l’attention des autres. L’activité de la reproduction humaine est donc cruciale et doit être au centre de nos analyses – et non pas subordonnée à la sphère de la production – qui vient après – et de notre modèle de société.
Regardons de plus près la famille occidentale actuelle, mononucléaire et hétérosexuelle, qui est proposée comme modèle dans le monde entier et adoptée par les classes dominantes et les classes moyennes en général.
Outre qu’elle constitue le lieu de la soustraction du travail reproductif des femmes, elle est également le lieu de la procréation et du contrôle de la sexualité des femmes, pour assurer la paternité et l’héritage (un facteur plus important dans les familles bourgeoises, mais pas seulement). La monogamie des femmes doit être garantie. On voit clairement la double morale : fidélité conjugale proclamée pour tous – exigée particulièrement de la part des femmes.
Pour obtenir cela, il faut conditionner les femmes (et les hommes) pour qu’elles (ils) remplissent leur rôle. Genrer les personnes : leur apprendre à assumer une identité de genre – masculine ou féminine – sans confusion, fonctionnelle pour leur rôle respectif et spécifique dans la société et dans l’économie.
Ce dressage commence très tôt par l’éducation différenciée entre filles et garçons à partir des jouets et des attentes des parents, les activités sportives, culturelles, les libertés concédées,…
Le garçon est éduqué pour l’autonomie, pour se suffire, pour dominer ou au moins ne pas se laisser faire. La fille doit être au service des autres, complaisante, elle doit plaire à l’autre sexe. Il s’agit de tout un appareil psychologique et idéologique mis en œuvre pour obtenir ces résultats. Intimidation, répression, chantage émotif, menace, isolement, amour possessif,… à travers lequel les hommes sont poussés à conquérir le monde, en bousculant les autres, (en concurrence) et les femmes sont poussées à conquérir un homme, fonder une famille, devenir mère.
Dans tout cela il n’y a pas de place pour une orientation sexuelle différente, homosexuelle. Cette division du monde en deux genres exclusifs, opposés et complémentaires imprègne toute notre manière de penser. Elle fait partie de l’idéologie dominante qui est l’idéologie de la classe et du sexe dominant : la culture, l’art, la science (voir l’historiographie), les religions, le langage, notre imaginaire, notre inconscient, …
Les femmes elles-mêmes ont intériorisé leur infériorité et la « naturalité » de la suprématie masculine. C’est souvent un obstacle à leur libération et à la solidarité entre femmes.
Dans la société l’homme, le mâle constitue la norme, la femme le produit dérivé.
L’homme est neutre, la femme est trop ou trop peu affirmative, agressive, « féminine », sexy… dans le domaine public, le travail, la politique, la science,… Le corps de la femme distrait les hommes, perturbe l’ordre. Le corps de l’homme est la norme. Le corps de la femme est l’exception, le malaise, « la maladie » , le cycle menstruel, la grossesse, la ménopause.
Les espaces publics matériels et symboliques (et le rythme du temps) sont créés en fonction de ce modèle. Les caractères physiques de la femme sont toujours vus et vécus « par défaut ».
L’oppression économique, sociale, politique, culturelle, idéologique des femmes, passe avant tout par son corps. Beaucoup de luttes féministes concernent le corps des femmes :
• Droits reproductifs, contraception, contrôle de la naissance/ stérilité, avortement
• Bataille pour obtenir les libertés relationnelles et sexuelles, choix du mariage, divorce, …..
• Lutte contre les violences physiques, sexuelles, pour l’intégrité physique, psychologique des femmes
• Pour le droit à la libre circulation et la libre expression (vestimentaire par exemple).
Ce sont des luttes transversales, qui concernent les femmes de différentes couches sociales, classes ou races – mais pas de la même manière.
Quand on parle de différence sexuelle on ne parle pas de différences innées, immuables, a-historiques. Au contraire le contexte, l’éducation, l’expérience sont déterminants dans la formation des personnes. Il s’agit d’expériences de vie, de dressage/conditionnement, d’aspirations autorisées ou non qui ont une base biologique mais qui la dépassent. En cela nous ne sommes pas d’accord avec les théories féministes différentialistes qui éternisent les différences, leur prêtant un caractère essentiel, biologique, et qui veulent renverser l’ordre symbolique en valorisant toutes les caractéristiques prétendument féminines sous-évaluées et marginalisées par la société patriarcale.
La famille mononucléaire – ou l’idéal da la famille qu’on nous inculque – est en même temps l’endroit des affections, des relations fondantes, le refuge qui devrait nous permettre à mieux résister (ou prester) dans une société ultra compétitive, violente, insécurisante. Ceci surtout en l’absence d’autres formes de socialisation et de vie communautaire qui pourraient fournir d’autres relations affectives permanentes, structurantes, formant la personnalité.
Mais les faits témoignent de la fausseté ou du caractère illusoire de cet idéal. En ce qui concerne les femmes âgées de 15 à 50 ans, la violence masculine est la première cause de mort au niveau mondial. Pour les femmes, le foyer est l’endroit le plus dangereux. La violence domestique s’exprime de plusieurs façons : mépris, menaces, haine, jalousie, isolement, contrainte aux relations sexuelles non voulues ou à la prostitution avant qu’on arrive aux coups qui laissent des signes tangibles.
Malgré cette réalité, l’idéal de l’amour romantique est inculqué (surtout aux fillettes) du matin au soir par tous les moyens de communication. Ses caractéristiques sont : l’exclusivité, l’unicité, la fidélité, la jalousie, la subordination des aspirations de l’individu et surtout de la femme, au couple, ….. et aussi inégalité implicite, attentes différenciées d’intimité et de complicité.
La pression matérielle, sociale et psychologique contre tous ceux et toutes celles qui veulent sortir de ce modèle et de la camisole de force constituée par le genre est énorme, surtout dans les milieux ruraux, appauvris et peu alphabétisés où le poids des religions est le plus fort.
Par contre, dans les milieux urbains, le nombre de mariages diminue et les familles composées autrement ou d’autres formes de vie plus communautaires apparaissent.
L’oppression des femmes dans le domaine public
L’idéologie patriarcale – nécessaire pour faire accepter l’état actuel des choses – pénètre toutes les sphères. Elle est d’ailleurs acceptée par les femmes elles-mêmes, comme par les hommes. En plus les femmes des élites (de classe, de groupe ethnique ou autre) sont privilégiées par rapport aux autres et agissent souvent d’abord en tant que classe ou groupe dominant plus qu’en tant que sexe, en complicité avec les hommes de leur propre classe.
Dans plusieurs pays ou sous-régions, l’espace public n’est toujours pas facile à fréquenter pour les femmes : soit parce qu’il leur est carrément interdit (clubs d’hommes), soit parce qu’il est dangereux (les rues des métropoles le soir), soit parce qu’il est considéré peu « convenable » pour une femme respectable. Dans certains régions – comme l’Afrique du Nord ou le Moyen Orient – ces règles sont aussi rigides que l’apartheid, mais en même temps elles sont bouleversées dans les processus révolutionnaires.
Parmi les lieux communs, il y a le fait que le genre féminin est sensé s’intéresser à la sphère privée et apte de s’en occuper, mais pas à la sphère publique et notamment à la politique, chasse gardée des hommes jusqu’il n’y a pas longtemps.
Grâce à la lutte des suffragettes (1e vague féministe au début du 20e S), le droit de vote des femmes a été obtenu dans plusieurs pays d’Europe après Seconde Guerre mondiale. Dans certains pays le vote des femmes n’est pas encore acquis : Arabie Saoudite.
Partout les femmes sont une minorité dans les institutions politiques (gouvernements, parlements, conseils régionaux) qui comptent. Exceptions : la Scandinavie, mais aussi le Rwanda.
Les partis politiques fonctionnent sur le modèle masculin de l’individu affirmé, équipé pour l’affrontement, sans relations de reproduction, sans émotions ni problèmes physiques, pur intellect.
Le sexisme frappe les femmes dans les espaces publics et rend leur activisme plus difficile.
Nous ne voulons pas seulement créer la place pour les femmes dans la politique existante mais transformer la politique elle-même pour qu’elle convienne aux exigences des femmes.
3° PARTIE : Le concept du genre
C’est la formation d’une identité sexuelle selon l’idéologie (patriarcale) dominante, une construction historique, sociale, culturelle qui varie selon le temps et l’espace. Comme la culture dominante est très globalisée à notre époque néolibérale, elle est assez uniforme.
Le concept du « genre » était introduit dans les milieux académiques et des ONG dans les années 80, 90 en opposition au « sexe » considéré comme trop cru. C’est un terme un peu édulcorant qui risque de cacher les contradictions et les conflits mais que nous pouvons utiliser en tant que catégorie d’analyse pour dévoiler la place et le rôle différent des femmes dans le travail, dans la production du savoir, dans tous les domaines, à analyser cas par cas. Ce qui est souvent caché par un discours neutre qui rend les femmes invisibles. (C .L. Strauss : « Tout le village était parti, il ne restaient que les femmes et les enfants »)
Le genre est une camisole de force pour les hétérosexuels car il oblige à se comporter selon les modèles préfixés et pas selon les inclinations propres de la personne, indépendamment du sexe. Il l’est encore plus pour les personnes LGBT qui aiment les personnes de leur propre sexe.
Dans plusieurs pays, l’homosexualité est encore considérée un crime ou une perversion. Partout, le modèle d’amour imposé est celui du couple hétéro. C’est ce qu’on appelle « hétéronormativité ». L’homosexualité est la déviance.
Partout dans le monde il existe un certain degré d’homophobie (haine, crainte, mépris et discriminations envers les personnes LGBT), exprimée dans le code pénal, les règles sociales et les comportements des gens. Elle est exaltée par l’extrême-droite.
Au contraire, selon nous, l’homosexualité est une orientation/une identité comme une autre qui doit être respectée. Peu importe s’il s’agit d’un choix ou d’une tendance innée. Il faut combattre systématiquement l’homophobie aussi bien dans la société que dans les rangs du mouvement ouvrier et dans nos propres organisations.
Parenthèse
Dans plusieurs sociétés préindustrielles, précoloniales – par exemple chez beaucoup de tribus d’Indiens d’Amérique, les gays, lesbiennes, transsexuels jouissaient d’une haute considération car ils/elles étaient considéré.e.s plus proches de l’être divin parfait car ils/elles possédaient en soi les deux sexes. « two spirit people » (des personnes avec deux esprits)
Le mouvement LGBT
Les premières tentatives de dépénalisation de l’homosexualité à l’époque moderne sont effectuées par des scientifiques au début du 20e siècle en Allemagne, Hollande, Autriche.
Elle a été adoptée par la révolution bolchévique, puis annulée par Staline qui a écrasé le mouvement LGBT considéré comme une « dégénération bourgeoise » et envoyé les homos en Sibérie.
Puis anéanti par le nazisme : « homocaust ».
Un véritable mouvement homosexuel débute dans les années 60 lors de la contestation généralisée de l’ordre établi. La révolte de Stonewall (New York) en juin 69 en marque le début symbolique. Les homos réagissent aux tracasseries de la police et aux razzias dans les clubs gays en sortant et en affrontant la police dans la rue pendant plusieurs heures. A partir de cette date, le mouvement homosexuel se développe dans plusieurs pays d’Europe. Il a lutté tout d’abord pour la dépénalisation et la démédicalisation (que l’homosexualité ne soit plus traitée comme une maladie, une anomalie à soigner). Ensuite la lutte a continué contre toute forme de discrimination, sur les lieux de travail, dans les moyens de communication, dans la vie privée. Actuellement dans plusieurs pays d’Europe et d’Amérique Latine le mouvement a obtenu l’équivalence entre l’union des couples hétéro et homo, par le mariage ou par d’autres formes de pacte relationnel, tandis que dans d’autres pays la question LGBT est restée encore complètement taboue.
Le mouvement lesbien se développe au départ dans le cadre du mouvement des femmes, de la 2e vague féministe, ne se sentant pas pleinement représenté dans le mouvement gay. Pas sans conflit – peur du rejet de la part des féministes/ envie de rentrer dans la normalité en luttant « que pour l’égalité », pas contre les hommes. Intransigeance des lesbiennes : le lesbianisme comme seule façon conséquente d’être féministe.
Le mouvement féministe a intérêt à reconnaitre que ce sont les mêmes structures patriarcales qui contrôlent le corps des femmes et qui contrôlent celui des LGBT, « transgressifs » et à assumer la lutte contre la répression des minorités sexuelles car c’est le système entier qui doit être mis en cause.
La perception de l’identité sexuelle n’est pas la même dans les différentes cultures
Par exemple, dans le monde arabe, l’homme qui a un rôle actif, de pénétration n’est pas considéré comme homosexuel mais seulement celui qui est pénétré – qui est fortement stigmatisé.
La sexualité lesbienne n’est pas reconnue car elle peut se passer de pénétration.
Dans plusieurs cultures africaines précoloniales il existait des relations physiques très intimes et désinhibées entre personnes du même sexe – perçues comme initiation, – y compris le massage des organes génitaux, du clitoris, des jeux érotiques et l’apprentissage de l’orgasme.
Il faut souligner le rôle extrêmement contraignant et négatif joué par les religions monothéistes souvent véhiculées par les puissances coloniales, qui ont supprimé/réprimé ces pratiques. L’Eglise catholique notamment a introduit l’idée du pêché et de la perversion, de la déviance et de la maladie. Mais aussi les sectes protestantes, l’islam traditionnel,…
Il est intéressant de voir comment le contrôle des individus passe par le contrôle, la répression et la normalisation de la sexualité. Voir les études de W. Reich et du mouvement Sexpol, des années ‘50, qui essayait de combiner le marxisme avec les découvertes de la psychanalyse ; et aussi de compléter la psychanalyse en y intégrant l’analyse de classe, à une époque où la sexualité était fortement brimée aussi bien par les régimes fascistes que par les staliniens [6].
La structure psychologique est déterminée par la façon dont les pulsions pour la satisfaction des besoins fondamentaux (dont la sexualité) ont été traitées dans l’enfance : réprimées, canalisées, sublimées. La répression de la sexualité, le dressage à l’obéissance, la négation des besoins propres mènent à des personnalités frustrées, rancuneuses, facilement manipulables, utiles au système capitaliste.
La libido est une énergie créatrice fondamentale qu’il faut développer, pour former des personnes (et des militant.e.s) équilibrées et solidaires. C’est en contraste avec la conception stalinienne de la vie du militant en tant que pur sacrifice.
• Nécessité d’une mise à jour dans la société actuelle qui n’est plus si oppressive. Au contraire on assiste à l’omniprésence d’une sexualité unidimensionnelle, unilatérale, considérée en tant que marchandise, concurrentielle, qui oblige à la prestation dès le plus jeune âge.
• Coupure entre l’épanouissement de l’être humain dans son ensemble et l’acte sexuel partialisé, marchandisé, affiché.
Refus du genre
La théorie queer [7] refuse la classification dans un des deux genres et revendique la fluidité de l’identité sexuelle.
Il y a discussion sur l’existence d’un troisième genre.
Judith Butler (théoricienne queer postmoderne, poststructuraliste) [8] explique que le genre n’existe pas comme une chose objective. Il n’existe que dans la mesure où il est ‘acté’ ou ‘mis en scène’. Nous ne pouvons ni ne devons assumer une subjectivité (une identité sexuelle) stable. Ce sont nos performances variées qui constituent ce que nous sommes.
Elle met en question la différence entre sexe et genre en disant que même le sexe n’est pas une donnée constante, mais une construction idéale qui se matérialise à travers un processus d’imposition réitérée de normes et de langage. Notre perception de la réalité (aussi corporelle) est déterminée par le langage.
C’est une approche philosophique idéaliste, antimatérialiste.
Adrienne Rich (théoricienne lesbienne, féministe) [9] introduit le concept de l’hétérosexualité obligatoire qui nous entoure et nous conditionne dès la naissance. Elle le définit comme une institution qui garantit aux hommes l’accès physique, émotif, économique aux femmes.
Si la sexualité se développait sans contrainte il y aurait différents degrés d’homosexualité dans la population (comme toutes les nuances des couleurs de cheveux) et beaucoup plus de relations LGBT réalisées.
Elle parle de continuum lesbien : l’attraction intellectuelle, émotionnelle, sensuelle que les femmes éprouvent vers d’autres femmes ; leur envie d’intimité et de complicité, de proximité physique et d’empathie. Tout cela est en continuité avec l’attraction sexuelle ; il n’y a pas de rupture. Il faut concevoir la relation lesbienne comme plus ou autre qu’une relation sexuelle en soi. Des formes d’intensité primordiales entre femmes sont à conseiller à toutes comme « autonomisation », pour combattre le chauvinisme masculin.
Elle préconise l’expérience lesbienne comme acte de résistance, de soustraction des femmes par rapport à l’accès illimité que les hommes pensent avoir à elles (à leur corps et à leurs services).
Conclusion
En guise de conclusion : l’approche des révolutionnaires marxistes et féministes tend de plus en plus vers la compréhension de la complexité et de la connexion des relations de domination, qui se renforcent ou se contredisent. On appelle ça dans les milieux académiques : « intersectionnalité ». Il n’y a pas une oppression qui prime objectivement sur les autres. Cela dépend du contexte spécifique et du vécu subjectif des individus.
Les femmes ont des intérêts en commun entre elles, mais aussi des intérêts de classe, de race, de pays, d’orientation sexuelle, d’origine, etc. C’est pourquoi on parle de féminismes au pluriel. Il n’y a pas que le féminisme tel qu’il a été conçu par les femmes blanches en Occident, de classe moyenne et d’origine chrétienne, protestante ou athée.
Il faut organiser les gens en tenant compte de cette complexité, de ses loyautés croisées et parfois contradictoires.
La clé c’est l’auto-expression et l’auto-organisation : « Personne n’a le droit de parler en mon nom ». A partir de là on peut chercher des alliances ou des convergences ponctuelles.
C’est cela le défi pour la construction d’un sujet révolutionnaire.
Nadia De Mond
Bibliographie utilisée
Stéphanie Coontz et Petra Henderson, « Formes de propriété, pouvoir politique et travail des femmes au début des sociétés de classes et des Etats », dans Travail des femmes, pouvoir des hommes sous la responsabilité de Nicole Chevillard et Sébastien Leconte, 1986, La Brèche-PEC, Montreuil.
Eleanor Leacock, Myths of Male Dominance, Monthly Review Press, New York and London, 1981. ISBN 0-85345-538-4
Claude Meillasoux, Femmes, greniers et capitaux, Paris, Maspero, 1975, 254 p.
Maurice Godelier, La production des grands hommes : pouvoir et domination masculine chez les Baruya de Nouvelle-Guinée, Paris, Fayard, 1982.
Gerda Lerner, The Creation of Patriarchy, Oxford University Press, 1986.
Francesca Rosati Freeman, Benvenuti nel Paese delle donne, edizione XL, 2010.
Silvia Federici, Caliban and the Witch, Women, the Body and primitive Accumulation, Brooklyn, NY : Autonomedia, 2004.
Maria Mies, Patriarchy and Accumulation On A World Scale : Women in the International Division of Labour. London : Zed Books (1999). ISBN 1-85649-735-6
Elena Gianini Belotti, Du coté des petites filles, Edition des femmes, 1974
Peter Drucker, Different Rainbows, Gay Men’s Press : London, 2000. 222 pages.