Mardi 23 avril, la loi sur le mariage pour tous a été adoptée à l’Assemblée. C’est une victoire pour leslesbiennes et les gays, pour qui le pacs ou l’union libre ne seront plus des choix par défaut. Mais ce n’est pasencore l’égalité des droits, et les homophobes ne désarment pas.
Depuis les premières luttes homosexuelles, il aura fallu plus de 40 ans pour arracher aux gouvernants, morceau par morceau, un semblant d’égalité qui n’est que légitime. Cette victoire a pourtant un goût amer, car le compte n’y est pas : la procréation médicalement assistée reste défendue aux lesbiennes, et le Conseil constitutionnel pourrait éventuellement compromettre le droit d’adopter. Rien non plus concernant la facilitation du changement d’état civil pour les personnes trans. Quant au « plan de lutte contre l’homophobie » du PS, il paraît bien illusoire alors que se succèdent les mesures d’austérité. Car comment combattre réellement les discriminations à l’embauche et le harcèlement patronal, quand on accepte le chômage de masse ? Comment prétendre prévenir l’homophobie à l’école ou ailleurs, sans renforcer les services publics ?
Un climat irrespirable
De tergiversations en reculs, Hollande a permis à la droite et à l’extrême droite de plastronner pendant de trop longs mois. Ravis de pouvoir contester un gouvernement dont ils ne peuvent qu’approuver la politique antisociale, les réactionnaires sont bien décidés à poursuivre leurs manifestations où se mêlent, dans un même élan, nostalgiques du fascisme et familles cathos bon chic bon genre. Un climat irrespirable s’est installé, propice aux violences homophobes : des passages à tabac ont eu lieu récemment à Paris, Lille, Bordeaux ou Nice. Les lesbiennes et les gays vont gagner de nouveaux droits, mais ils en ont assez d’être toujours vus comme une race inférieure, que l’on peut insulter ou frapper à tout moment.
Grande nouveauté par rapport aux défilés anti-pacs d’il y a 15 ans, les homophobes des beaux quartiers ont développé une démagogie pseudo-sociale, en opposant hypocritement l’égalité des droits à la question de l’emploi : « La priorité c’est Aulnay, pas le mariage gay » ou « Du boulot, pas le mariage homo », lisait-on sur leurs pancartes. Racisme et homophobie faisant bon ménage, ils ont aussi scandé le soir du 23 avril, à deux pas de l’Assemblée nationale : « Les CRS à Barbès ! ». Pour ces gens-là, c’est dans l’ordre des choses que la police s’en prenne aux immigréEs et aux pauvres plutôt qu’à eux…
Ne leur laissons pas la rue !
Contre un gouvernement Ayrault complice du Medef, les travailleuses et les travailleurs devront reprendre le chemin des luttes. Et par la même occasion, ils pourraient bien montrer que la solidarité de classe n’est pas un vain mot, et qu’ils refusent de se laisser diviser, en fonction de leur orientation sexuelle ou de leur couleur de peau, par les démagogues bourgeois qui les courtisent.
L’égalité reste à gagner : le NPA appelle à participer massivement aux marches des fiertés, qui se dérouleront partout en France fin mai – début juillet.
André Slava
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 193 (01/05/13).
Mariage pour tous : une étape franchie... le combat continue !
La loi dite « mariage pour tous » vient d’être adoptée. Il aura fallu des décennies d’affirmation des homosexuel-le-s, et une mobilisation acharnée ces dernières semaines, pour parvenir à cette étape importante qui est pourtant la moindre des choses. C’est une victoire pour les gays et lesbiennes qui pourront choisir de se marier (ou non), comme pour celles et ceux qui se sont mobilisés pour l’égalité des droits. Et nous ne boudons pas notre plaisir.
Mais cette victoire a un goût amer. La droite et l’extrême droite sont à l’offensive. Nous avons dû supporter les incessantes provocations médiatiques et le spectacle des manifestations des milieux réactionnaires. Et comment oublier la vague d’homophobie de ces derniers jours : des homosexuel-le-s insultés ou agressés physiquement comme à Paris, Lille, Bordeaux, Nice…
Quant au gouvernement, il n’y a pas lieu de le féliciter. Il a beaucoup tergiversé… et reculé, comme sur le droit à la procréation médicalement assistée (PMA) pour les lesbiennes. Nous n’oublions pas non plus qu’un véritable plan de lutte pour l’égalité n’est pas compatible avec ses mesures d’austérité. Comment combattre réellement les discriminations à l’embauche, quand on accepte le chômage de masse ? Comment prétendre prévenir l’homophobie à l’école ou ailleurs, sans renforcer les services publics ?
La mobilisation doit se poursuivre, pour l’accès à la PMA pour toutes les femmes, la facilitation du changement d’État civil pour les trans comme pour le droit de vote des étrangers, car l’égalité des droits ne se divise pas. Ces mesures, il faudra les imposer au gouvernement. Et face aux diversions homophobes et racistes, c’est l’ensemble du monde du travail et de la jeunesse qui doit s’unir, pour montrer aux réacs que la rue ne leur appartient pas ! Contre ceux qui veulent nous diviser, notre meilleure arme, c’est notre solidarité. C’est dans ce sens que nous appelons à participer massivement aux marches des fiertés, qui se dérouleront partout en France de la fin du mois de mai à début juillet.
NPA, Montreuil, le 24 avril 2013
Liaisons dangereuses
Si le mariage pour tous est honni par la frange la plus réactionnaire de la population, les mobilisations organisées par la « manif pour tous » annoncent les noces d’une partie de la droite avec le FN. Copé a beau claironner qu’il n’y aura aucune collusion entre son parti et l’extrême droite, la radicalisation dans la rue d’une partie de son électorat sur le terrain de l’homophobie, crée les conditions d’une recomposition dont les coordonnées lui échappent. Dimanche 21 avril, la présence du député FN Collard au premier rang de la manifestation des « anti-mariage », les embrassades de Barjot et l’absence de réaction des députés UMP et UDI présents, montrent que les rapprochements sont à l’œuvre.
Comment s’étonner des accommodements actuels alors que la campagne de Sarkozy, faites de clins d’œil appuyés aux idées réacs et au FN, a libéré une partie du peuple de droite d’une certaine réserve gagnée par les mobilisations ouvrières antérieures ? Sur fond de crise du système capitaliste, de crise sociale et politique, et d’effondrement des économies, la défaite de la droite lors des dernières élections a ouvert la voie à une redéfinition des contours des partis bourgeois. La guerre Fillon-Copé pour le leadership de l’UMP témoigne, au delà de la lutte des places, de la recherche d’une nouvelle perspective de domination. Sans doute qu’une partie du camp bourgeois envisage une réponse autoritaire aux résistances suscitées par l’offensive de la troïka contre les classes populaires. Les tentatives de division de notre camp social, au travers des attaques contre les LGBTI et par le développement du racisme et de l’islamophobie, en préparent le terrain.
Si nous ne savons pas encore la forme précise que ces liaisons dangereuses prendront dans le futur, le premier effet en est la multiplication des agressions homophobes. Ne doutons pas que l’étape suivante verra des groupes excités s’en prendre aux immigréEs en général et aux musulmanNEs en particulier. Les défaites accumulées, la politique libérale du gouvernement sur le terrain social comme ses renoncements sur celui des valeurs, nourrissent cette offensive. Il y a donc urgence à reprendre la rue pour que s’exprime une perspective de rupture qui ne soit pas qu’un éphémère coup de balai.
Côme Pierron (Édito)
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 192 (25/04/13).
Mariage pour tous : l’égalité des droits, enfin ?
Le débat parlementaire s’est terminé avec le vote de l’ouverture du mariage et de l’adoption pour les couples de même sexe. S’il s’agit d’une avancée, le chemin est encore long vers l’égalité légale totale entre les LGBTI et les autres.
Alors que la fin de la ségrégation n’a pas mis fin au racisme, alors que la légalisation de l’IVG et la disparition du « salaire féminin » n’ont pas mis fin au sexisme, il ne faut pas perdre de vue que l’égalité des droits ne mène pas à l’égalité réelle sans destruction du système dont découle l’oppression.
Déjà au cœur de la Marche des fiertés 2012, le sujet du mariage aura traîné un an, permettant en la légitimant sous le prétexte du « débat démocratique » la libération de l’homophobie de masse. Et depuis le début de ce « débat », le harcèlement psychologique auquel ont été soumiSEs les LGBTI, les injures, menaces, insultes incessantes et complaisamment relayées dans les médias, s’est concrétisé par l’explosion des appels de détresse reçus par SOS Homophobie.
Ces dernières semaines, devant l’imminence du vote, c’est sous toutes ses formes que l’homophobie s’est déclinée : populisme fascisant, avec la récupération des luttes pour l’emploi (affiches : « La priorité c’est Aulnay pas le mariage gay », « on veut du boulot, pas le mariage homo »), mais aussi destruction de biens associés à la communauté LGBT (devanture du « Printemps des associations LGBT » vandalisée à Paris, bars gays attaqués à Lille, Lyon et Bordeaux), et surtout les agressions, que ce soit dans des bars, dans la rue, à Paris, à Nice, ou encore dans des collèges comme en Isère.
Une première victoire
Nous pouvons être fièrEs, car cette victoire contre l’homophobie et la haine, nous l’avons gagnée grâce au combat pour l’égalité légale menée par les LGBTI depuis de nombreuses années. Mais nous ne devons pas nous contenter de cette loi a minima. C’est pourquoi une partie de la communauté LGBT, notamment autour d’Act Up, pointe la responsabilité du gouvernement et rappelle l’abandon de la PMA. Ces derniers, initiateurs d’un front uni, ont rempli la place de l’Hôtel-de-Ville de Paris le 10 avril, puis celle de la Bastille le 21 avril. En régions, des initiatives pour le vote de la loi, à Montpellier, ou pour empêcher les manifs anti-mariage à Poitiers, prouvent que, nulle part, la rue n’est abandonnée aux homophobes.
Ceux-ci se radicalisent et se posent en victimes innocentes de l’État policier soumis au « lobby gay » (car il est bien connu que les forces de l’ordre sont particulièrement bienveillantes avec les LGBT…). Si leurs manifestations prennent un air de chant du cygne avec une affluence certes importante mais sans commune mesure avec les démonstrations de force d’il y a quelques semaines, il est à craindre que leur frustration ne retombe sur les LGBT elles/eux-mêmes.
Au cœur de la réponse à l’homophobie, la question de l’autodéfense doit alors être entendue dans un sens très large. Il ne s’agit pas pour les LGBT de se promener avec des bombes lacrymogènes, mais, avant tout, d’en finir avec l’indifférence générale dans laquelle se déroulent les agressions homophobes. Il s’agit d’assurer enfin une réelle solidarité, des LGBT entre elles/eux, des hétéros avec les LGBT, dans l’optique de l’unité de notre camp social, celui des classes populaires et du monde du travail.
Chloé Moindreau
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 192 (25/04/13).
« Manif pour tous » : Barjot ? Pas si sûr !
La pathétique égérie des partisans de la « manif pour tous » Virginie Tellenne, plus connue sous le sobriquet de Frigide Barjot, aurait pu rester dans le relatif anonymat que lui laissait son statut de médiocre humoriste de droite. Dieu, la droite et l’extrême droite en ont décidé autrement, lui confiant la mission sacrée de prendre la direction de la croisade contre le « mariage gay ».
Depuis plusieurs semaines, les plateaux de télé se l’arrachent, et elle multiplie les déclarations les plus provocatrices, attisant la haine, promettant même à Hollande que « le sang allait couler ». Mais finalement, pour le compte de qui roule ce prétendu électron libre ?
D’abord, rappelons quelques éléments biographiques. Suivant l’adage « charité bien ordonnée commence par soi-même », notre fervente catholique habite à Paris, dans le quartier du Marais, un appartement HLM de la ville de Paris – 173 m2 plus une terrasse de 40 m2 – excusez du peu ! Elle partage ce modeste pied-à-terre avec son mari, un ancien militant du GUD, frère de Karl Zéro (ancien gudard lui aussi). Son mari, connu sous le nom de Basile de Kock, fut membre du club de l’Horloge, think tank qui réunissait dans les années 90 d’éminents membres de la droite et de l’extrême droite. Lié au couple Tibéri, il fut lui aussi condamné pour emploi fictif. Le mariage de Frigide et Basile fut célébré par l’abbé Georges de Nantes, partisan de monseigneur Lefebvre et fondateur d’une association intégriste, la Contre-Réforme catholique, connue pour ses positions pétainistes et pro-Algérie française…
Confusion réactionnaire
Interrogé la semaine passée sur ses liens avec l’animatrice de « la manif pour tous », Jean-Marie Le Pen, se remémorait, tout ému, que la petite Virginie lui sautait sur les genoux, quand son père, cadre du FN, lui rendait visite. Et lors de la manifestation homophobe du dimanche 21 avril, celle qui aujourd’hui encore ose se prétendre « apolitique » n’hésitait pas à claquer la bise au député FN Gilbert Collard !
Jouant en permanence sur l’ambiguïté, alternant d’une heure à l’autre propos lénifiants et appels à la guerre civile, cette fausse naïve ne fait que recycler la vieille recette de Sarkozy qui prétendait récupérer les valeurs de la gauche, allant jusqu’à rendre hommage au résistant Guy Môquet… En appelant à participer à la manifestation annoncée du Front de gauche le 5 mai pour une VIe République, Barjot ne fait pas autre chose. Cette proposition de convergence contre nature n’était bien sûr qu’une provocation, mais elle aura permis d’installer une confusion dans certains esprits déboussolés par la crise politique et sociale et la perte des repères idéologiques. En reprenant le graphisme des affiches du mouvement ouvrier, et en détournant les slogans de 68, en osant s’approprier le terme de « printemps arabe » pour rebaptiser le mouvement réactionnaire actuel en « printemps français », la droite et l’extrême droite comptent profiter de la crise de régime qui se dessine pour bousculer et délégitimer toutes les valeurs défendues par le mouvement ouvrier. Et Frigide Barjot est à l’évidence un des vecteurs de cette stratégie.
La lutte contre les idées réactionnaires, l’autodéfense contre la multiplication des agressions racistes, fascistes et homophobes sont devenues une urgence. Les anticapitalistes doivent être en première ligne dans ce combat, à commencer par une participation massive aux manifestations du 1er et du 5 mai. L’heure de la contre-offensive est venue !
Alain Pojolat
* Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 192 (25/04/13).