Le bilan du pire accident industriel au Bangladesh ne cesse de s’alourdir et dépasse désormais les huit cents morts, a annoncé l’armée mercredi 8 mai, après la découverte de dizaines de nouveaux corps au cours de la nuit dans les décombres d’une usine textile qui s’est effondrée voilà quinze jours près de Dacca. Un porte-parole de l’armée, le lieutenant Mir Rabbi, a indiqué que « le bilan s’élève désormais à huit cents trois morts », dont sept cent quatre-vingt-dix personnes retrouvées dans les ruines et treize décès de blessés [1].
L’immeuble de neuf étages, le Rana Plaza, situé à Savar, à une trentaine de kilomètres de Dacca, abritait cinq ateliers de confection. Ces ateliers travaillaient notamment pour les marques britannique Primark (Associated British Foods) et espagnole Mango. Lorsqu’il s’est effondré comme un château de cartes au matin du 24 avril, plus de 3 000 ouvriers étaient au travail, alors que des fissures avaient été constatées la veille sur le bâtiment.
CONDITIONS DE TRAVAIL DÉNONCÉES
Des centaines de rescapés ont bloqué mardi un accès routier central au Bangladesh pour réclamer des arriérés de salaires et des dédommagements. La plupart des ouvriers travaillant pour des marques occidentales d’habillement étaient payés moins de 30 euros par mois, un niveau de rémunération dénoncé publiquement par les ONG et le pape François.
Une manifestation a également eu lieu en Europe devant un magasin Mango à Barcelone, pour fustiger la marque, qui a reconnu avoir commandé des « échantillons » auprès du Rana Plaza, et dénoncer les conditions de travail des ouvriers du textile. Les mains peintes en rouge sang, des membres du syndicat espagnol UGT ont déployé une banderole sur laquelle était inscrit en lettres rouge : « Death, precarity and fashion work » (« mort, précarité et travail dans la mode »).
18 USINES FERMÉES
Le Bangladesh est au deuxième rang mondial des pays exportateurs de textile, derrière la Chine. Cette industrie occupe plus de 40 % de la main-d’œuvre du pays et représente 80 % de ses exportations. Mercredi 8 mai, le pays a annoncé avoir fermé dix-huit usines textiles pour des raisons de sécurité, seize à Dacca et deux à Chittagong, la deuxième ville du pays. « Nous avons constaté que ceux qui prétendent avoir les usines les plus aux normes au Bangladesh n’ont pas totalement respecté les règles de construction », a déclaré à la presse le ministre du textile. Craignant que les marques occidentales se détournent de leurs fournisseurs bangladais, le gouvernement a annoncé lundi la mise en place d’une nouvelle commission d’enquête devant inspecter les 4 500 usines textiles du pays, à la recherche d’éventuels défauts de construction.
Le gouvernement avait fait une annonce similaire après un incendie dans une usine textile près de Dacca en novembre, qui avait déjà fait 111 morts. Mais les inspections avaient été jugées nettement insuffisantes pour faire progresser les conditions de sécurité, déplorables dans ce secteur industriel.