« Je ne suis pas partisan de la grève jusqu’au Jugement Dernier, je ne suis pas non plus partisan du chaos créateur », voilà ce que dit de lui-même l’actuel ministre et ancien militant ouvrier oublieux de ses combats contre le pouvoir de Moubarak et de son ministre des finances et de l’économie Youssef Boutros Ghali, en défense des retraités et contre l’injustice frappant les marginaux durant l’ère du PND (Parti National Démocratique, le parti de Moubarak).
Abou Eita, ministre du Travail, déplore aujourd’hui les manifestations alors qu’il était l’une des figures principales des luttes, dans une déclaration proche de la repentance pour des actions qui avait fait de lui, au fil des ans, une figure d’organisateur et de militant.
Dans une conférence sur les libertés syndicales, il est revenu sur ses convictions d’ancien militant ouvrier affirmant que « les grèves perturbent les négociations, empêchent le règlement des problèmes, ne permettent pas la satisfaction des revendications ou leur programmation » ; « le chaos en Egypte ne peut pas être que destructeur », « on travaille et on négocie, on travaille et on combat le terrorisme ».
Le ministre Abou Eita, né en mars il y a 61 ans, soixante et une années passées dans le quartier de Boulaq El Dakrour (un quartier très populaire du Caire), diplômé de philosophie et de psychologie de l’Université du Caire, a déclaré : « la grève pervertit les négociations » alors que ce jour d’avril 2010 où le militant Abou Eita avait menacé le gouvernement d’un sit in illimité sur le trottoir du parlement n’est pas si lointain, sit in pour que le jugement du Tribunal Administratif qui imposait un salaire minimum soit appliqué.
Abou Eita, le fondateur du syndicat indépendant des impôts fonciers, celui qui s’est fait reconnaître par les révolutionnaires comme « le porte voix de la Révolution », « le lanceur de slogans dans les manifestations » et « la conscience du peuple » a mené nombre de luttes et de grèves ouvrières dont la plus remarquable est le sit in des employés des impôts fonciers devant le siège du Conseil des Ministres fin 2007 pour exiger l’égalité des salaires pour les employés, combat qu’il a poursuivi après l’avènement de la révolution et encore après la prise du pouvoir par les Frères Musulmans.
Abou Eita, ministre du gouvernement de Hazem El Beblawi depuis juillet dernier, a été soutenu par de larges secteurs ouvriers pour qu’il soit ministre d’autant qu’il avait déclaré que ses priorités étaient « la remise au travail dans les usines et la fixation d’un salaire minimum ». Mais il a été la cible de critiques à cause de ses prises de position concernant des problèmes sociaux ainsi près d’un mois après sa prise de fonction, on a assisté à l’évacuation des ouvriers de Suez Aciers qui réclamaient la réintégration de leurs camarades licenciés et même à l’arrestation d’un certain nombre d’entre eux sans que le ministre ne bouge.
Le ministre a également été critiqué par des ouvriers licenciés d’entreprises privées qui l’ont accusé de trahir les promesses faites quand il a reçu le portefeuille ministériel.
De la même façon, il a été critiqué par la Fédération Egyptienne des Syndicats Indépendants au sujet de la même crise : « il n’a pas résolu le problème des ouvriers licenciés en raison de leurs activités syndicales », se contentant de répondre à ces accusations « ce n’est pas de mon ressort ».