Entre 5 et 6 000 régularisations sur près de 30 000 demandes. Tels sont les chiffres publiés par Sarkozy le 15 juin. Ce qui signifie que près de 25 000 personnes recevront des refus de séjour assortis d’une invitation à quitter le territoire. C’est donc des milliers d’établissements scolaires que la solidarité avec ces familles transformera en nouveaux foyers potentiels de résistance. Parmi les catégories écartées de toute perspective de régularisation, les lycéens sans papiers ont parfois passé une partie de leurs vacances en centre de rétention. Les mobilisations du RESF ont tiré la plupart d’entre eux des griffes de la police de l’air et des frontières. Au 15 août, Sarkozy ne pouvait afficher que trois lycéens à son tableau de chasse : Abdallah Boujraf, lycéen marocain à Paris 19e, inscrit en bac pro pour la rentrée ; Aminata Diallo, lycéenne malienne à Sarreguemines (Moselle), née en France ; Aminata Sambou, malienne elle aussi, scolarisée à épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) depuis quatre ans. Trois jeunes de dix-neuf ans, dont l’avenir est gâché au nom de l’objectif fixé par Sarkozy : 25 000 expulsions avant la fin de l’année.
Le cas de Jeff Babatundé Shittu est emblématique. Au point que le gouvernement a mobilisé le quai d’Orsay et commandé une enquête au Nigeria, son pays d’origine, pour contester la mort de sa mère. Tant de moyens déployés pour essayer de faire passer un lycéen pour un menteur ! Sarkozy en fait une affaire personnelle : Jeff doit être expulsé. À l’heure où nous écrivons, Jeff a déjà passé un mois en rétention. Expulsé ou non, ses camarades du lycée Dorian se mobiliseront pour sa régularisation et son retour si nécessaire.
Marionnette médiatique intronisée « médiateur » par le ministre de l’intérieur, Arno Klarsfeld prétend avoir été abusé par les associations à propos de Jeff. À chaque fois qu’il a été sollicité, il a justifié les décisions des préfectures et de Sarkozy. Il accuse même le RESF d’avoir « poussé des familles qui étaient totalement hors cadre de la circulaire à déposer plus de dossiers » pour « gonfler les chiffres » et d’être responsable si « elles risquent aujourd’hui d’être visées par un arrêté de reconduite à la frontière ». La voix de son maître... En limitant à 6 000 le nombre de régularisations de parents d’enfants scolarisés, Sarkozy montre que le combat du RESF s’inscrit de fait dans la bataille générale des sans-papiers pour la régularisation de toutes et tous. Selon le ministère, ils seraient entre 200 000 et 400 000 en France. Cet été, l’Italie a régularisé 517 000 sans-papiers. En 2005, l’Espagne en a régularisé 700 000. Et Sarkozy nous fait un caca nerveux pour 30 000 malheureuses demandes.