Les directions des syndicats ouvriers ont décidé presque à l’unanimité d’observer un jour de grève générale le 29 octobre 2014, dans les secteurs public et privé, en vue de forcer l’État à négocier autour d’un paquet de revendications fondamentales des travailleurs. Ces revendications énumérées dans l’appel de la Confédération démocratique du travail (CDT) et de l’Union marocaine du travail (UMT) et la Fédération démocratique du travail (FDT) : une augmentation générale des salaires et des pensions, l’application de l’échelle mobile (l’indexation), la mise en œuvre du ce qui reste de l’accord du 26 avril 2011, la réduction de la pression fiscale sur les salaires, le renoncement à la réforme du régime des retraites, la généralisation de la protection sociale en veillant sur l’obligation de la déclaration des salariés auprès de la Caisse de la sécurité sociale, la protection des libertés et droits syndicaux et des législations sociales, l’abrogation de l’article 288 du code pénal [1], la garantie des services publics par l’Etat, mettre un terme au travail temporaire et précaire et à la sous-traitance et garantir la stabilité de l’emploi.
Cette initiative survient dans un contexte se caractérisant par les résultats désastreux de la politique du « dialogue social », au lieu de la lutte des classes. L’Etat a utilisé les directions syndicales pour imposer ses choix à la classe ouvrière d’où l’assaut contre les régimes de retraite à travers la soi-disant Commission technique, qui a imposé le prélèvement des journées de grèves sur les salaires des fonctionnaires grévistes - un acquis historique pour près de 60 ans (depuis l’indépendance formelle du pays). Elle a gelé les salaires, fermé les yeux sur le refus des employeurs d’appliquer la maigre augmentation du salaire minimum de juillet 2014, ignoré l’accord du 26 avril 2011 (après l’atténuation du Mouvement du 20 Février qui l’avait arraché enlevé), consacré une exploitation brutale dans le secteur privé par les entreprises de sous-traitance et les intermédiaires, et passé une loi sur l’indemnisation pour la perte d’emploi qui est un mépris flagrant envers les victimes du licenciement. D’autre part ladite commission a réduit au maximum les efforts en matière d’embauche malgré le besoin social croissant des services publics, notamment l’éducation, la santé, etc. Et bien pis encore, les bourgeois et leur Etat préparent d’autres attaques, que ce soit par leur détermination à saper les infimes acquis dans le Code du travail ou à supprimer le droit de grève sous prétexte de le codifier, et leur disposition à généraliser la précarité de l’emploi et la surexploitation dans les secteurs de la fonction publique après avoir ruiné les travailleurs du secteur privé, ...
Le délabrement de la classe ouvrière comparé aux succès de l’ennemi de classe, et l’arrogance de Etat vis-à-vis des appels au « dialogue social », est causé en partie par la politique des directions syndicales qui mènent et contrôlent la lutte des travailleurs qui ont fait avorter de nombreuses batailles, laissé dépérir d’autres, y compris celle des travailleurs des Autoroutes nationales en 2011-2012, la grève d’un mois des mineurs de Djebel Aouam en août 2014, le démantèlement de la mobilisation des travailleurs à Ouarzazate par une décision venant d’en haut qui avait conduit à démolir la structure syndicale locale, pour ne citer que ces exemples.
Une partie de l’énergie militante qui pourrait faire du 29 octobre une grève générale véritable a été gâchée lorsque les directions syndicales se sont abstenues délibérément, et au nom du maintien de la « stabilité sociale », de soutenir les grèves en cours et consolider les liens de solidarité de classe, privilégiant une négociation à froid en dehors de tout contexte de lutte.
Cela étant, l’appel à la grève générale par toutes les directions syndicales (à l’exception de celle affiliée au parti de Benkirane) est un aveu d’échec de la politique de « partenariat social » et de « dialogue social ». Si les directions syndicales tentent à travers cet appel d’exercer juste une pression afin de revenir au « dialogue social », alors il est de notre devoir tous, travailleurs dans les secteurs public et privé, de faire de cette journée une journée de grève véritable pour nos revendications, en organisant des rassemblements sur le lieu de travail pour discuter du déroulement de la bataille et les moyens d’assurer son succès, et d’œuvrer, notamment, à l’étendre, pour lui donner la force qui peut contraindre l’ennemi de classe à faire des concessions. Se limiter à un arrêt de travail d’un jour encourage les employeurs et leur Etat à ignorer la grève, et partant imposer de maigres résultats qui démoralisent davantage les bases ouvrières.
Le courant Al Mounadil-a appelle ses militants et tous ses sympathisants ainsi que tous ceux et celles qui s’attachent aux objectifs de l’émancipation de la classe ouvrière, à participer activement à faire parvenir l’appel à la grève générale aux travailleurs, et à collaborer avec tous les militants de notre classe, syndicalistes et militants politiques, et avec tous des résistants à la politique capitaliste destructrice, pour une mobilisation ouvrière et populaire effective qui consolide les liens de solidarité et permette à notre classe de renforcer la confiance en ses capacités militantes.
Le courant Al Mounadil-a affirme de nouveau que la construction d’une stratégie de lutte de classe – combative et démocratique - dans chaque syndicat contre la politique des directions syndicales, est la première condition pour que les organisations syndicales jouent leur rôle consistant en l’amélioration des conditions de notre classe au travail et dans la vie, et en le développement de ses capacités de lutte sur le chemin de son émancipation définitive de l’exploitation capitaliste, sous la bannière éternelle de notre classe : l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes.
Faisons du 29 octobre 2014 une journée de lutte ouvrière et populaire véritable !
Faisons du 29 octobre une grève ouvrière et populaire, et pas seulement une escarmouche pour revenir à la politique catastrophique de « dialogue social ».
Courant Al Mounadil-a
22 octobre 2014