Athènes,
La droite grecque, au pouvoir, est sur une ligne dure : elle envoie la police gazer chaque manifestation et ne lâche pas un centime de plus aux instituteurs en grève. Actuellement engluée dans de nombreux scandales, elle peut espérer limiter la casse grâce à l’impuissance du Pasok (Parti socialiste grec) : en effet, les efforts de Giorgos Papandreou pour en faire un parti à la sauce américaine, et son discours libéral, ont fait fuir une partie de la base. D’où le retour récent à un discours plus classiquement antidroite, qui le ferait passer pour un gauchiste aux yeux de Ségolène Royal !
Cette période, qui aurait dû permettre une convergence de la gauche radicale - s’appuyant sur les importantes mobilisations locales et nationales, souvent évoquées dans Rouge - n’a pas entraîné de changements politiques majeurs : le KKE (Parti communiste grec) cultive son isolement sectaire, le Synaspismos (PC ex-eurocommuniste) balance entre discours radical et alliances avec le Pasok, et si le forum social a permis l’action commune de groupes d’extrême gauche, aucune perspective crédible de regroupement national n’est en vue.
Pourtant, les élections de ce dimanche - municipales et régionales (préfets et présidents de région) - permettront peut-être des avancées à gauche. Dans les trois grandes villes, l’enjeu est de savoir si la droite va perdre des voix : le Pirée pourrait revenir au Pasok, mais à Salonique, l’extrême droite pourrait faire autour de 10 % aux municipales, tandis que le candidat de droite et actuel préfet, au profil d’extrême droite, pourrait repasser au premier tour aux régionales. À Athènes, la droite pourrait repasser au premier tour, grâce à une nouvelle loi faite sur mesure : le candidat dépassant 42 % des voix est élu ! Le KKE, lui, cache derrière son discours de gauche d’étranges alliances, comme à Karditsa où il est soutenu par la droite... contre le Pasok ! Au Synaspismos, il y a à boire et à manger : sa condamnation du libéralisme ne l’empêche pas de faire liste commune avec le Pasok dans plusieurs villes importantes.
Le véritable intérêt consistera à observer les résultats dans des villes marquées par l’action des très nombreux comités qui se forment à l’occasion de luttes locales contre les méfaits divers du libéralisme. Dans ces comités, la gauche radicale joue souvent un rôle important mais, jusqu’ici, elle n’avait jamais présenté de liste unitaire. Or les choses changent, et il faudra observer attentivement des résultats comme ceux de Loannina ou de Zografou, dans la banlieue d’Athènes, où une liste soutenue par presque toute la gauche radicale a mené une campagne active.
Encart
Écoles en grève
La détermination des enseignants du primaire et des maternelles est impressionnante : alors que le gouvernement manœuvre en refusant toute véritable augmentation des salaires et en disant que le dialogue s’ouvrira après le retour des enseignants dans leurs classes, ceux-ci s’engagent dans leur quatrième semaine de grève, toujours massivement suivie. À la manifestation du 5 octobre à Athènes, il y a eu 30 000 participants ! Les instituteurs étaient renforcés par les professeurs du second degré, des délégations de différents secteurs (la confédération du privé avait appelé à débrayer et la fédération du public à 24 heures de grève). Parmi les slogans entendus : « Cette grève est historique, on l’enseignera dans nos classes ! » Mais l’élargissement est urgent, pour faire céder la droite, et la perspective de la grève de l’Éducation est une voie d’autant plus réaliste que des cortèges de jeunes lycéens et étudiants étaient présents.