L’élection d’Enrique Peña Nieto à la tête du Mexique en 2012 – qui a marqué le retour au pouvoir du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) et mis fin à l’offensive fédérale lancée sous la présidence de Felipe Calderón (2006-2012) – n’a en rien changé la situation de la liberté d’information dans le pays.
Le Mexique reste l’un des pays les plus dangereux au monde pour les journalistes. Plus de 80 d’entre eux ont été assassinés et 17 ont disparu au cours de la dernière décennie, et certains médias sont régulièrement la cible d’attaques armées et de menaces, dans le nord du pays en particulier. A l’origine de ces intimidations ? Les cartels de la drogue, soucieux de faire taire les journalistes et blogueurs informant des activités du crime organisé et des violences qui y sont liées.
Les intimidations proviennent également des autorités d’Etats et fédérales. A San Luis Potosí, plusieurs journalistes du quotidien Pulso ont fait l’objet d’une « campagne de haine anonyme » sur les réseaux sociaux au début de l’année 2013, attribuée au gouvernement de l’Etat, suite à la publication d’articles « gênants » pour ce dernier. Outre les intimidations, le gouvernement fédéral aurait conclu un accord avec certains gouvernements d’Etats en 2013 visant à minimiser les faits de violence, afin de réduire le sentiment d’insécurité général.
L’impunité reste la règle dans l’immense majorité des cas d’assassinats et de disparitions. Les procédures sont souvent bouclées à la hâte ou freinées en raison de lenteurs bureaucratiques. L’impunité s’explique aussi par la collusion entre le crime organisé et les autorités politiques et administratives – souvent corrompues, voire infiltrées par les cartels – à tous les niveaux.
Ce climat de violence et d’impunité a poussé de nombreux journalistes à s’exiler, afin de fuir les menaces pesant sur eux et souvent leurs familles. Nombre de médias ont renoncé à traiter du narcotrafic, par crainte de représailles violentes, d’où un climat d’autocensure préjudiciable à la liberté d’information. Les réseaux sociaux sont parfois devenus les seules sources d’informations sur les ravages liés aux cartels de la drogue, qui n’hésitent plus à cibler les blogueurs tentant de rompre la spirale du silence.
Sur le plan juridique, un parquet fédéral spécialisé dans les atteintes à la liberté d’expression (Fiscalía Especial para la Atención de Delitos Contra la Libertad de Expresión) a été créé en février 2006. Depuis cette date, son travail n’a toutefois abouti qu’à une seule condamnation. En 2012, le Sénat a entériné une réforme constitutionnelle permettant aux autorités fédérales de reprendre sous leurs juridictions les crimes et délits portant atteinte à l’exercice du journalisme. Cette réforme a permis la création du Mécanisme fédéral de protection des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes, qui reste toutefois critiqué pour ses insuffisances. L’une des rares avancées ? La dépénalisation des délits de presse au niveau fédéral, promulguée en 2007.
Enfin, il existe des liens très forts entre autorités politiques et médias, préjudiciables à l’indépendance et à la transparence de ces derniers. Le paysage médiatique mexicain est également caractérisé par son manque de pluralisme, puisque Televisa et TV-Azteca possèdent 90% des concessions de télévisions gratuites et payantes. Quant aux nombreuses radios communautaires, elles restent bien souvent privées de fréquence légale et souffrent régulièrement de persécutions.
Fiche réactualisée en juin 2013