Ce lundi à Bonn (Allemagne), à quarante-deux jours de l’ouverture de la COP 21 (30 nov - 11 déc), les négociateurs des pays membres de l’ONU vont devoir se prononcer sur un nouveau texte de négociations. Plus court, mais guère plus compréhensible ni ambitieux, ce texte fait disparaître la contrainte climatique et préfère des dispositifs volontaires, non contraignants et dramatiquement insuffisants, entérinant les crimes climatiques de demain.
Le projet de texte fait simplement disparaître la contrainte climatique telle que le GIEC l’a énoncé dans ses différents rapports. Tout en rappelant que l’objectif est de maintenir le réchauffement climatique en deçà de 1,5 ou 2 °C d’ici à la fin du siècle… il se félicite des contributions nationales (« Intended Nationally Determined Contributions ») des 149 États-membres, qui conduisent pourtant à un réchauffement global de presque 3 °C.
Cet écart entre le réel et le souhaitable devrait être au cœur des négociations à Paris afin de parvenir à un accord qui organise la répartition équitable de l’effort supplémentaire nécessaire. Ce ne sera pas le cas. Pas plus que n’est déterminée une feuille de route vers les objectifs de long terme, qui demeurent totalement flous : peut-être un pic d’émissions pour une date indéterminée, ou la « neutralité carbone », ou des « émissions nettes zéro », ou de faibles émissions.
Pourtant, le GIEC a clairement fixé cette feuille de route : réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 40 à 70 % d’ici à 2050, avec des points de passage à 44 gigatonnes (Gt) de CO2eq (équivalent CO2) par an d’ici 2020, 40 Gt d’ici 2025 et 35 Gt d’ici 2030. En ignorant ces objectifs fondamentaux, les États et l’ONU font comme si l’on pouvait négocier avec l’ampleur, la rapidité et les conséquences du réchauffement climatique.
Comment prétendre s’attaquer aux vrais moteurs du réchauffement de la planète avec un accord qui ne fera aucune référence aux énergies fossiles, dont la combustion représente 80 % des émissions de gaz à effet de serre ? Un accord qui n’évoquera pas les énergies renouvelables, qui nécessiteraient pourtant de puissants mécanismes de transferts financiers et technologiques internationaux ?
Selon les températures planétaires enregistrées jusqu’à septembre, 2015 pourrait devenir l’année la plus chaude depuis le début des relevés thermométriques. Le texte proposé aujourd’hui à Bonn montre pourtant à nouveau le gouffre persistant entre la bulle aseptisée des négociations et la réalité du réchauffement climatique.
Nous appelons l’ensemble des organisations engagées pour la justice climatique, les citoyens et les élus engagés dans la transition écologique et sociale à exprimer leur consternation devant le manque d’ambition exprimé par les États, et à construire des mobilisations diverses, massives et inventives, dans la perspective de la COP 21 et après.
Attac France, 19 octobre 2015