RENVOI DANGEREUX FRANCE-PAKISTAN. L’ADMINISTRATION FRANÇAISE AU-DESSUS DES LOIS ?
Le 23 / 11 / 2015
En avril 2015 Ali Sher, 20 ans, a été arrêté en préfecture et renvoyé de force au Pakistan, où il craignait pour sa vie. Alors qu’il avait fait un recours devant la Cour nationale du droit d’asile, l’audience se tiendra sans lui, dont nous sommes sans nouvelles…
Ali Sher avait quinze ans lorsque des chefs de village de sa région du Pakistan ont assassiné une partie de sa famille sous ses yeux. Le genre de crime contre lequel la police pakistanaise n’entend pas protéger les plus démunis. Ses parents se sont alors sacrifiés pour lui faire fuir le pays ; quelques mois après son arrivée en France, ils étaient morts. A sa majorité, Ali est malheureusement devenu « sans papiers ».
Lorsqu’il a été arrêté par la police en Gironde en mars 2015, et placé en rétention, Ali a formé une demande d’asile qui a eu une issue favorable. L’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) lui a accordé la « protection subsidiaire », une protection internationale, en reconnaissant qu’il courait un grave danger en cas de renvoi au Pakistan.
Piégé et renvoyé, alors qu’il était en danger : Libéré de rétention, Ali se rend en toute confiance à la préfecture, le 20 avril 2015, pour aller chercher son autorisation de séjour. Mais il est alors piégé : entre temps, l’OFPRA avait fait volte face et lui a retiré, sans le prévenir, sa protection. Au guichet de la préfecture de Gironde, on lui notifie cette décision de retrait de protection, on l’arrête, et on l’envoie en centre de rétention administrative au Mesnil Amelot, tout près de l’aéroport Roissy Charles de Gaulle.
Le 23 avril 2015, il subit une tentative d’embarquement violente, qui échoue, grâce à un personnel de bord courageux. Deux jours plus tard, Ali est réveillé à l’aube par une escorte, et renvoyé au Pakistan. Depuis, nous sommes sans nouvelles de lui.
Une chaise vide à l’audience. Ali Sher, 19 ans, aura été renvoyé vers un pays où il avait de sérieuses craintes pour sa personne, sans avoir vu le juge des libertés et de la détention. Il n’aura pas été vu non plus par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), alors qu’il avait pourtant formé un recours devant cette juridiction contre la décision de retrait de protection de l’OFPRA. Le 9 décembre, la CNDA examinera son affaire, face à l’OFPRA, la place du requérant sera vide, à cause de son renvoi forcé.
Contexte
Le droit interdit de renvoyer une personne qui demande l’asile sans avoir examiné son cas. Il interdit également de « piéger » les étrangers en leur réservant un autre sort que celui indiqué à l’avance sur la convocation en préfecture. Selon la Convention européenne des droits de l’homme, les demandeurs d’asile doivent bénéficier d’un recours suspensif et effectif en cas de rejet de leur demande d’asile. C’est-à-dire que si l’administration répond négativement à leur demande de protection, ils ne devraient pas pouvoir être renvoyés dans le pays où ils se sentent menacés tant qu’un juge n’a pas tranché. Ces droits ne sont toujours pas respectés pour tous en France. Une personne privée de liberté en rétention administrative risque d’être éloignée de force vers un pays où elle est en danger, avant même que la Cour nationale du droit d’asile n’ait statué.
Averti en amont, du danger, le ministère de l’Intérieur a persisté sourdement. Il n’a pas non plus daigné apporter de réponse satisfaisante à nos demandes de renseignements sur les raisons d’un tel traitement.
Quand le risque de renvoi dangereux est évoqué, comme dans le cas d’Ali Sher, de tels écarts avec les droits de l’homme peuvent avoir des conséquences dramatiques.
L’administration française ne devrait pas être au-dessus des lois. Elle doit rendre des comptes en cas d’actes contraires aux droits de l’homme ou de procédures inquiétantes. Le respect de l’État de droit, avec un contrôle efficace du juge sur les actions de la police, est une garantie pour tous, pour les étrangers comme pour les citoyens. Les organes internationaux de protection des droits de l’homme comme le Haut Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies sont là pour rappeler les États à l’ordre. Si vous voulez agir en faveur d’Ali Sher, envoyez cette lettre à Monsieur Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations unies.
Pour agir en faveur d’Ali Sher, vous pouvez envoyer cette lettre au Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations unies.
Le modèle de lettre
Mode d’emploi pour agir
Monsieur Zeid Ra’ad Al Hussein
Haut Commissaire aux droits de l’homme
Palais Wilson,
Rue des Pâquis 52,
1202 Genève, Suisse
Monsieur le Haut Commissaire,
Je tiens à vous faire part de ma vive préoccupation au sujet d’Ali Sher, un jeune homme de nationalité pakistanaise qui a été reconduit au Pakistan par les autorités françaises le 25 avril 2015 alors qu’il s’y disait en danger.
L’administration française lui avait tout d’abord accordé sa protection en considérant qu’un renvoi au Pakistan représentait pour lui un danger très sérieux. . Quelques jours plus tard, l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a fait volte face et a pris une décision de retrait de protection injustifiée. Dans la foulée, le jeune homme a été piégé, arrêté au guichet de la préfecture de Gironde puis envoyé dans un centre de rétention en région parisienne.
Avant sa reconduite, le jeune homme de 19 ans a réussi à transmettre son recours à la Cour nationale du droit d’asile, mais le ministère de l’Intérieur français n’en a pas tenu compte et l’a tout de même fait reconduire au Pakistan avant qu’il ait vu le juge. C’est une violation de son droit fondamental à un recours suspensif.
Depuis lors, nous sommes sans nouvelles d’Ali Sher. Le 9 décembre prochain, la Cour nationale du droit d’asile examinera son affaire, mais en son absence, ce qui est injuste.
Malgré nos demandes, le ministère de l’Intérieur n’a fourni aucune explication satisfaisante quant aux circonstances de son interpellation, ni quant à son sort depuis son renvoi vers un pays encore secoué par les attaques terroristes.
Nous vous demandons en conséquence de convaincre les autorités françaises :
– de faire en sorte que Monsieur Ali Sher puisse revenir légalement en France afin de pouvoir bénéficier d’un droit au recours effectif et suspensif devant la Cour nationale du droit d’asile, déjà saisie de son recours ;
– de diligenter une enquête indépendante sur les conditions d’interpellation et d’éloignement d’Ali Sher.
Je vous prie de croire, Monsieur le Haut Commissaire, en l’expression de ma haute considération.
Télécharger, imprimer et signer la lettre.
L’expédier, au plus vite, à l’adresse indiquée.
(Tarifs postaux : France 0,76 € / UE et Suisse 0,95 € / reste du monde 1,20 €)
Si possible, envoyer une copie de votre lettre à l’ambassade du pays concerné.
Notre adresse postale est :
ACAT-France
7 rue Georges Lardennois
Paris 75019
France
ACAT-France
PIÉGÉ EN PRÉFÉCTURE ET RENVOYÉ AU PAKISTAN
Le 01 / 06 / 2015
Le 25 avril 2015, alors que l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) lui avait accordé la protection subsidiaire et qu’il venait chercher ses papiers, Ali Sher, 20 ans, a été arrêté en préfecture et renvoyé de force au Pakistan, alors même qu’il craignait pour sa vie.
Le 25 avril 2015, alors que l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) lui avait accordé la protection subsidiaire et qu’il venait chercher ses papiers, Ali Sher, 20 ans, a été arrêté en préfecture et renvoyé de force au Pakistan, alors même qu’il craignait pour sa vie.
A quinze ans, Ali a vu son frère et sa sœur se faire assassiner par des chefs de village au Pakistan. Le genre de crime contre lequel la police pakistanaise n’entend pas protéger les plus démunis. Ses parents se sont alors sacrifiés pour lui faire fuir le pays ; quelques mois après son arrivée en France, ils étaient morts. Ali a été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance mais à sa majorité, la France a décidé qu’il serait « sans papiers » et qu’il devrait repartir au Pakistan.
Arrêté une première fois à Bordeaux, il demande l’asile in extremis et obtient la protection subsidiaire de l’OFPRA le 30 mars 2015. C’est la première fois qu’il peut expliquer pourquoi il ne peut pas repartir, pourquoi il est en danger dans son pays. Ali est alors libéré ; il se croit enfin protégé. C’est donc en toute confiance qu’il va à la préfecture le 20 avril 2015 pour venir chercher son titre de séjour, comme mentionné sur sa convocation.
Mais une fois qu’il est à la préfecture, le piège se referme : on lui notifie le « retrait » de sa protection par l’OFPRA et son placement en rétention. Il est arrêté et conduit dans un centre de rétention administrative. Le 23 avril 2015, il subit une tentative d’embarquement violente. Grâce au personnel de bord courageux, le vol est annulé. Deux jours plus tard, à quelques heures de son passage devant le juge des libertés et de la détention, l’escorte réveille Ali à l’aube. Au lieu de l’amener à l’audience, elle le met dans un nouvel avion à destination du Pakistan. Depuis lors, nous sommes sans nouvelles d’Ali Sher.
Selon la Convention européenne des droits de l’homme, les demandeurs d’asile doivent bénéficier d’un recours suspensif et effectif en cas de rejet de leur demande d’asile. C’est-à-dire que si l’administration répond négativement à leur demande de protection, ils ne devraient pas pouvoir être renvoyés dans le pays où ils se sentent menacés tant qu’un juge n’a pas tranché. Le droit interdit également de « piéger » les étrangers en leur réservant un autre sort que celui indiqué à l’avance sur la convocation en préfecture. (par exemple en les convoquant pour l’obtention d’un titre de séjour et en les arrêtant au final). Sinon c’est déloyal et donc illégal aux yeux de la Cour de Cassation.
Ces droits ne sont toujours pas respectés pour tous en France. Une personne privée de liberté en rétention administrative risque d’être éloignée de force vers un pays où elle est en danger, avant même que la Cour nationale du droit d’asile n’ait statué. De plus, le juge des libertés et de la détention, qui est le seul à pouvoir déclarer une procédure déloyale ou illégale et ordonner en conséquence la mise en liberté, n’intervient qu’après cinq jours. Pendant les cinq premiers jours, faute d’avocat gratuit en rétention et sans contrôle du juge, l’administration peut agir impunément. Cette fenêtre de temps laisse des personnes étrangères potentiellement menacées dans leur pays à la merci de l’administration, qui peut les expulser hâtivement pour éviter d’avoir à rendre des comptes.
Ali Sher a subi cette absence de droit à l’extrême. L’administration française avait reconnu qu’il était en danger au Pakistan, puis a fait volte-face. Ni la Cour nationale du droit d’asile ni le juge des libertés et de la détention n’ont pu examiner son cas. Son renvoi forcé vers le Pakistan illustre de manière extrême l’insuffisante protection des demandeurs d’asile contre les renvois dangereux.
Si vous voulez agir en faveur d’Ali Sher, envoyez cette lettre à François Hollande par voie postale ou bien sur le site de l’Elysée.
ACAT France