Poitiers : l’arrestation musclée de Katia qui s’oppose à l’abattage des arbres
Elle s’appelle Katia Lipovoï et c’est l’une des plus farouches opposantes au projet l’abattage de 98 platanes dans le quartier de Beaulieu. Ce matin, Katia manifestait derrière le périmètre de sécurité mis en place par la ville. Les policiers l’ont interpellée sans ménagement. Vidéo.
Elle a été arrêtée, mise au sol, menottée, emmenée au poste de police et placée en garde à vue pour être interrogée. Katia Lipovoï n’imaginait pas cette séquence lorsqu’elle est allée manifester ce matin à proximité de son domicile dans le quartier de Beaulieu avec d’autres militants de son association. Tous protestent contre le projet de la mairie qui prévoit l’abattage de 98 platanes fragilisés par différentes tempêtes et coups de vent.
Elle regrette maintenant d’avoir secoué et fait tomber une barrière de sécurité derrière laquelle les policiers se trouvaient. D’où leur intervention. Son arrestation spectaculaire a été filmée et photographiée par plusieurs journalistes qui s’étonnaient du niveau de force employé pour maîtriser un petit bout de femme sans grand danger.
« Pendant la garde à vue, explique-t-elle, ils ont voulu me faire signer une déposition selon laquelle j’avais agressé un policier. J’ai refusé en leur expliquant que je m’étais simplement débattue parce qu’ils me faisaient mal. » Elle sera finalement relâchée à 17 heures avec une convocation pour se rendre en avril prochain devant un tribunal qui pourrait la condamner à payer une amende.
« Tous les soutiens que j’ai reçus me confortent dans ma détermination », dit encore Katia, qui va continuer son combat et annonce que les opposants au projet se réunissent dès ce soir à 19 h pour décider des suites de leur action.
Bernard Dussol
Voici les images de son arrestation, filmées par Francis Tabuteau :
http://france3-regions.francetvinfo.fr/poitou-charentes/vienne/poitiers/video-poitiers-l-arrestation-musclee-de-katia-qui-s-oppose-l-abattage-des-arbres-929421.html
* France 3– Poitou Charentes. Publié le 15/02/2016 | 18:44, mis à jour le 16/02/2016 | 10:36
Poitiers (86). Qui nous protège de la police ?!
Scène incroyablement révoltante ! Une femme de 72 ans, attrapée, bloquée au sol par des policiers, puis embarquée au commissariat pendant plusieurs heures.
Cela alors qu’elle manifestait, avec d’autres, son mécontentement contre le choix de la municipalité d’abattre 98 arbres sains dans leur quartier. Plus précisément, car prise par l’émotion de voir les arbres tomber sous ses yeux et face au refus de la mairie d’entendre les arguments des habitants, elle a poussé une barrière qui tenait les habitants éloignés de l’abattage en cours... Une violence policière de plus ! Il faut voir la vidéo qui circule sur les réseaux sociaux (en cliquant sur les mots « la vidéo » ou ICI).
Cette interpellation est choquante et inadmissible. Nous pouvons voir dans la vidéo que la femme crie à plusieurs reprise aux policiers « vous m’étouffez ! ». Une dame âgée de 72 ans peut être plus fragile que la moyenne de la population et sous le choc pourrait très bien avoir des problèmes de santé grave. Des drames sont déjà arrivés. La police n’a pas forcément besoin d’arme pour tuer, il ne faut pas l’oublier !
La mairie de Poitiers complice.
Cette violence policière fût précédée d’un autre type de violence : une violence politique. Celle de supprimer des dizaines d’arbres, âgés de plusieurs décennies, dans un quartier de Poitiers, à Beaulieu. Sans concertation, sans prise en compte de ce que cet acte peut symboliser pour des hommes et des femmes qui chaque jours passent devant, vivent en harmonie avec eux. Les arbres d’un quartier font parties de la vie et du quartier. Mais ce genre de préoccupations n’intéressent guère la municipalité de notre ville qui se moque royalement de l’avis de sa population. Comme ce fût le cas des 178 frênes abattus et des haies arrachées il y a quelques mois dans le quartier des Couronneries.
Dans ce registre, l’élue de la ville responsable aux espaces verts, Madame Pintureau, ne manque pas d’air en rappelant que tous les habitant-es du quartiers ne sont pas dans la rue pour dénoncer son choix anti-écologique. La majorité silencieuse, pas forcément au courant de ce qu’il se passe, est donc du côté de la municipalité par essence... Drôle de conception de la vie démocratique !
Pourtant, une mobilisation a bien lieu. Une mobilisation d’habitants et d’habitantes de ce quartier populaire, par une pétition puis l’interpellation de la mairie et en dernier recours une manifestation. Ces habitant-es, oublié-es par la municipalité en ce qui concerne l’élaboration des choix politiques, ne l’ont pas été en ce qui concerne la répression... La municipalité de Poitiers doit désormais prendre ses responsabilités face à ces dérives sécuritaires renforcées par l’état d’urgence, rappelons-le, voté par le député-maire Alain Claeys.
Un cas isolé ?
La police a fait preuve, comme à son habitude, d’une violence inacceptable. Nous devons tous nous indigner contre la violence qui s’est exprimée à l’encontre de cette manifestante pour appliquer les décisions de la municipalité. Mais il faut tout autant s’indigner contre la violence exercée au quotidien contre les jeunes dans les quartiers populaires, contre les sans-papiers, contre les personnes de couleur. Mais également face aux violences dont sont victimes les mouvements sociaux que le gouvernement voudrait faire taire. Les exemples ne manquent pas : Notre-Dame-Des-Landes, les manifestations pour le climat, le soutien aux Kurdes, les salariés de Goodyear etc...
Un monde à changer
Contre la banalisation de la violence et de la répression au service des 1% contre les 99 autres, nous devons faire entendre nos voix pour plus de libertés, plus de démocratie, plus de solidarités. Nous ne voulons pas de policiers à tous les coins de rues, et de politiques austéritaires basées sur la concurrence et les inégalités. Nous refusons la logique du marché et le productivisme le plus anti-écologique, comme ligne idéologique. Il est plus que temps de prendre nos affaires en main, de nous organiser, de mettre un terme à ce cycle sordide du sécuritaire comme seule boussole.
Manon Labaye, Militante du NPA, Conseillère municipale à Poitiers
Alexandre Raguet, Militant du NPA.
* http://www.npa86.org/spip.php?article3603
Communiqué « Osons Poitiers »
Communiqué « Osons Poitiers » suite à la manifestation contre l’abattage des arbres de Beaulieu
Ce matin, à Beaulieu, on a abattu des arbres mais on a également choqué, blessé durablement des citoyens ! Qu’une mobilisation de protestation contre l’abattage de platanes se termine par l’interpellation violente d’une habitante est scandaleux et particulièrement inquiétant pour l’état de notre démocratie. Faut-il lire, ici encore, une conséquence de cet état d’urgence qui confond tout sous prétexte de sécurité publique et mettrait sur le même plan une mobilisation citoyenne et une attaque terroriste ? Quel danger pouvait bien représenter cette femme de 74 ans bouleversée par l’abattage des arbres, mise à terre, maintenue violemment, emmenée sans ménagement au poste de police où elle est détenue depuis plusieurs heures ?
Que penser de cette concertation invoquée par les élus responsables de la décision et qui en arrive à de telles extrémités ? On ne doit pas se contenter de réunir une trentaine de personnes pour justifier une décision déjà prise et quand on constate que des citoyens s’organisent, sont en mesure de réunir 500 signatures sur une pétition, on rouvre sérieusement la discussion, on cherche une solution en écoutant ce qu’ils ont à proposer. Qu’on dise si la centaine d’arbres concernés répondent bien aux critères agités par l’équipe municipale ; qu’on ne présente aucun plan d’abattage qui ne soit accompagné d’un plan de plantations : la ville a besoin de plus d’arbres et les habitants ont leur mot à dire sur ces plantations. Enfin, en cette matière, on ne peut négliger l’émotion attachée à ce qui n’est pas un simple mobilier urbain. Que des habitants aient voulu s’interposer contre l’abattage, ce matin, rappelle en même temps que les arbres sont des êtres vivants. Une ville qui détournerait une voie pour faire le tour d’un arbre, serait, pour nous, une ville où on aurait l’assurance que l’humanité ne serait pas oubliée des décisions à prendre.
Poitiers, le 15 février 2016.