Le jeudi 26 octobre, la Diète (le Parlement polonais) va commencer à débattre d’un projet de modification de la Constitution présenté à l’initiative du parti gouvernemental d’extrême droite, la Ligue des familles polonaises (LPR), visant à l’interdiction absolue de l’avortement en Pologne. La LPR fait partie de l’actuel gouvernement et son dirigeant, Roman Giertych, tient le ministère de l’éducation... Elle a déposé un amendement constitutionnel formulé ainsi : « La République de Pologne garantit à chaque être humain la protection juridique de la vie depuis le moment de sa conception. » Le but est limpide : cette formulation vise à empêcher toute libéralisation de l’avortement dans les années à venir par la voie législative puisqu’il faudrait préalablement modifier une nouvelle fois la Constitution. La LPR a reçu plusieurs renforts : celui des députés de Samoobrona (Autodéfense), groupe populiste issu d’un syndicat paysan, et celui d’une partie du PiS (Loi et Justice), qui est le parti de l’actuel du président de la République et du Premier ministre, dont le chef de son groupe parlementaire, Marek Kuchcinski, et le président de la Diète, Marek Jurek.
L’enjeu est d’une très grande importance. Rappelons que la loi polonaise sur l’avortement est déjà très restrictive : ce n’est que dans les cas « prouvés » de danger pour la vie de la mère, de déformation génétique grave de l’embryon rendant sa survie très improbable, de viol ou d’inceste, que le médecin peut pratiquer l’avortement. Et même dans ces cas, la majorité des médecins publics refusent de le faire, ce qui a des conséquences dramatiques pour la santé des femmes concernées, certaines l’ayant payé de leur vie. Alors que les données officielles font état de 150 avortements par an, les organisations indépendantes estiment le nombre d’avortements illégaux entre 80 000 et 200 000, avortements par ailleurs souvent pratiqués par les mêmes médecins qui refusent de les faire dans les hôpitaux publics. Et l’interdiction touche en premier lieu la majorité désargentée, qui n’a pas les moyens de payer un avortement clandestin, celui-ci coûtant au minimum entre 2 000 et 3 000 zlotys (500 à 750 euros). Et ce n’est également qu’au marché noir que les femmes peuvent avoir accès à la pilule abortive RU 486.
Face à cette attaque aux droits des femmes, un regroupement de plusieurs organisations féministes, syndicales et politiques de gauche prépare une série d’actions, notamment la tenue d’un tribunal pour le droit des femmes, le 3 novembre, et une manifestation pour la légalisation de l’avortement, qui aura lieu à Varsovie le 4 novembre prochain.
Ce regroupement a lancé un appel à la solidarité internationale avec son combat pour la reconnaissance du droit à l’avortement : « Nous espérons votre aide et votre soutien. Nous demandons des piquets et des marches en solidarité avec notre action. Informez en les médias polonais, écrivez des lettres de protestation au président et au Premier ministre de la République polonaise. Vos communiqués de solidarité seront lus lors de notre manifestation. Nous avons besoin de votre aide ! » Y répondre relève de la solidarité internationale la plus élémentaire.