Le 16 février dernier, le Parlement européen adoptait en première lecture la directive sur la libéralisation des services dans le marché intérieur, dite directive « Bolkestein », par 394 voix pour, 215 voix contre (pour l’essentiel, des socialistes belges, grecs, français, mais aussi les Verts et les communistes et apparentés), et 33 abstentions. La proposition de rejet pur et simple de la directive Bolkestein, déposée par la GUE/NGL, les Verts et la délégation des socialistes français, avait recueilli 153 voix (contre 486), bien au-dessus du total des forces en présence.
Malgré ces quelques résistances parlementaires, mais fort de ce satisfecit du Parlement européen, la mécanique institutionnelle eurocratique a poursuivi ces derniers mois son acharnement antisocial. Rappelons que ce texte majeur pour l’Union européenne a pour objectif d’éliminer les entraves à la libre circulation de services, en contournant les droits sociaux des travailleurs régis par les dispositions nationales. En mai dernier, le Conseil, représentant les États membres, ayant pris connaissance du nouveau texte, exigeait du Parlement européen qu’il accepte leurs modifications pour la seconde lecture. Les parlementaires de la commission du marché intérieur et de protection des consommateurs ont donc revu leur copie, le 10 octobre à Bruxelles et le 23 octobre à Strasbourg. « Vous pouvez toujours amender ce texte, nous n’en tiendrons pas compte ! » avaient signifié les représentants du Conseil et de la Commission, lors de la séance du 10 octobre, à ceux qui auraient eu l’impertinence de remettre en cause l’esprit du nouveau texte. Sur la forme, il est vrai que ce fameux texte sur la libéralisation des services avait, suite à une importante mobilisation sociale et politique, été délesté de ses passages les plus provocateurs - en particulier la référence directe au « principe du pays d’origine », mais sans pour autant affirmer la primauté du droit du pays d’accueil. Son champ d’application avait également été réduit. Enfin, le pouvoir de contrôle de la Commission européenne avait été un peu diminué par rapport au projet initial.
La messe était donc dite lors de la séance de la commission parlementaire du 23 octobre. La social-démocrate allemande Evelyn Gebhardt, rapporteur du Parlement européen, vient de capituler en acceptant le compromis du Conseil. Le scénario d’un rejet de la directive en seconde lecture au Parlement, ou d’une adoption avec amendements, semble définitivement écarté. Cette version de la directive exclut peu de secteurs du champ de la concurrence : la distribution de l’eau et d’énergie, certains services sociaux, dont la gestion du logement social, sont concernés par la libéralisation.
La ratification de la nouvelle directive « Bolkestein » devrait avoir lieu dès la prochaine session du Parlement européen, entre le 13 et 16 novembre. Le mouvement pour son rejet entre maintenant dans une nouvelle phase.