Le nucléaire est le mode principal de production d’électricité en France (75 %). Ce choix vient de De Gaulle qui, après 1945, a voulu se doter de l’arme nucléaire. Or, pour fabriquer une bombe atomique, il faut du plutonium. Comme celui-ci est produit lors de la réaction nucléaire, pour en obtenir, il fallait lancer la construction de centrales nucléaires... et donc faire croire que c’était pour la production de l’électricité dont on a tous besoin. Le nucléaire civil est l’alibi présentable.
Aujourd’hui, le prestige du nucléaire est mis à mal : le risque permanent de catastrophes, la contamination radioactive, le gouffre financier, les conditions de travail dégradées, et maintenant le scandale d’une probable falsification des tests de sécurité de nombreuses pièces de l’EPR de Flamanville. Tous ces fléaux nous obligent à sortir rapidement du nucléaire.
Le NPA a élaboré un scénario pour sortir du nucléaire qui explique comment en finir avec le gaspillage et réduire la consommation électrique, préalable indispensable, qui prend en compte les besoins réels en électricité et le moyen de les satisfaire tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Des arguments qui lient les questions environnementales et les questions sociales, seule façon d’être antinucléaire.
Dossier réalisé par la Commission nationale écologie du NPA
Réduire la consommation électrique
Un arrêt des activités nucléaires économiserait au moins 20 TWh. Les seuls réacteurs consomment déjà 24 TWh. De plus, environ 32 TWh sont actuellement perdus en ligne. Ces pertes peuvent être largement réduites en dix ans par la baisse de la consommation, la modernisation de certains équipements (transformateurs) et surtout grâce au développement des énergies renouvelables produites en local. Nous estimons sans prendre de risque qu’on pourrait ainsi économiser 1/4 des pertes, soit au minimum 8 TWh. Total de ce poste : 28 TWh
Chauffage
En France, au moins 30 % des foyers sont équipés de chauffage électrique (contre 5 % seulement en Allemagne). Le chauffage électrique est une aberration : 1 W électrique consommé nécessite de « brûler » 3 W thermique dans une usine ! Il consomme plus de 60 TWh par an à lui seul... Nous proposons donc l’interdiction de toute nouvelle installation de chauffage électrique, comme en Autriche ou au Danemark, et son remplacement dans 10 % des logements chaque année, ce qui permettrait une économie de 40 TWh minimum.
Normes des appareils électriques (réfrigérateurs, téléviseurs, veilles…)
Une étude de Greenpeace réalisée sur seulement 4 types d’appareils électroménagers montre que 17 TWh peuvent être économisés en 10 ans. Appliquée à tous les types d’appareil, cette économie serait donc bien supérieure.
Éclairage public et domestique
Il faut obliger les entreprises et les collectivités à réduire leurs éclairages et équiper les foyers des particuliers de lampes basse consommation et d’appareils économes. Cela permettra une économie de 16 TWh (sur les 45 TWh consommés) : 8 TWh dans le tertiaire et le domestique, et 8 TWh dans le non-résidentiel et le public.
Industrie et commerces
Nous proposons la suppression immédiate des panneaux de publicité lumineux, l’imposition de normes sur le froid industriel, la suppression progressive de la climatisation (sauf là où elle est nécessaire : hôpitaux, maisons de retraite...), l’amélioration de l’isolation des locaux anciens et la mise en place immédiate d’une réglementation thermique instaurant des bâtiments à énergie positive. Pour les grosses entreprises, une véritable politique de sobriété énergétique qui s’appuierait sur la socialisation de larges pans de l’économie, entraînerait la mise en chantier de moyens de production propres (micro-éoliennes, panneaux solaires sur les toits des grandes surfaces…). L’économie potentielle serait d’au minimum 20 TWh (sur les 120 TWh consommés).
Total économies = 121 TWh.
Dans notre scénario, nous aurions pu prendre des chiffres plus ambitieux comme ceux de Négawatt (124 TWh dès 2020 hors suppression du chauffage électrique et 197 TWH dès 2030) ou de Global Chance (130 TWh dès 2020). Nous voulons simplement montrer que le potentiel d’économies d’électricité est important, même avec une estimation basse.
Développer les énergies renouvelables
L’éolien terrestre
L’exemple allemand est éloquent : 4 665 MW installés en 2014. Nous proposons d’installer 4 200 MW par an (1 400 éoliennes de 3 MW par exemple), ce qui donnerait sur 10 ans 42 000 MW, soit une énergie produite annuelle de 75,6 TWh. On considère ici un fonctionnement a minima de 1 800 heures/an, ce qui correspond à une implantation sur une grande partie du territoire.
L’éolien offshore
Les vents en mer, plus réguliers et plus puissants, permettent à raison de 16 000 MW en dix ans, de produire 56 TWh (pour 3 500 heures de fonctionnement par an). L’Allemagne a installé en 2014 plus de 1 700 MW d’éolien offshore, cela alors qu’elle dispose d’un littoral bien moins favorable que le nôtre.
Le micro-hydraulique
Les grandes installations (barrages) ne peuvent plus être développées sans mettre en péril les divers écosystèmes ainsi que les modes de vie des populations. En revanche, l’implantation d’unités de production micro-hydrauliques (inférieures à 1 MW) est possible. Cela permettrait d’installer facilement et rapidement jusqu’à 9 TWh selon divers rapports.
Le solaire
Le soleil produit de 8 000 à 10 000 fois la consommation actuelle de l’humanité ! En capter une infime partie permettra demain de résoudre la majorité des problèmes énergétiques dans lesquels nous sommes englués. Les progrès réalisés ces dernières années sont considérables et ne cessent de s’accélérer. Dès aujourd’hui et à court terme, l’énergie solaire peut apporter une contribution majeure à nos besoins en électricité. En France, 100 km2 environ sont bâtis par an. Si on impose que toute construction neuve dispose de panneaux photovoltaïques (ou de chauffe-eau solaires), et ce sur un cinquième des surfaces bâties pour des raisons pratiques (encombrement, accessibilité), on arrive à un total de 25,8 TWh en prenant les pires rendements existants. De plus, sur le bâti ancien, en programmant 350 MW par an, on parvient à 3,4 TWh en 10 ans.
La géothermie
La Suisse qui possède un potentiel bien moins bon que la France prévoit de produire 4 TWh dans les prochaines années avec cette énergie. Un potentiel équivalent à celui de trois réacteurs nucléaires...
La cogénération
Pour l’instant utilisée a minima dans l’industrie et les grands réseaux de chaleur, la cogénération, qui consiste à produire de la chaleur et en même temps de l’électricité, peut être largement développée. La production de chaleur et d’électricité peut être obtenue par des moteurs à gaz (potentiel minimum de 12 TWh), des turbines à gaz ou à vapeur, et des piles à combustible, ou à partir de bois ou de biogaz (potentiel minimum de 18 TWh). Enfin, le remplacement des chaudières à gaz ou au fioul dans l’habitat par des installations de cogénération pourrait produire un minimum de 35 TWh. Nous reprenons les chiffres et les considérants de l’étude menée par le Réseau Sortir du nucléaire il y a 10 ans. Les chiffres retenus pourraient donc être revus à la hausse tant les techniques ont depuis évolué.
Total énergies renouvelables + cogénération = 238,8 TWh.
Et nous sommes loin d’avoir fait le tour de la diversité des renouvelables. Nous pourrions rajouter l’énergie de la mer : hydroliennes (10 TWh d’après EDF...), énergie houlomotrice et marémotrice, le micro-éolien, la méthanisation…
Notre scénario se traduirait par l’installation de 150 à 200 éoliennes par département et de panneaux solaires sur 3,2 % du bâti.
EDF : Défendre l’emploi
Actuellement, la situation provoque une baisse du coût du travail, fait exploser la précarité et la sous-traitance. La filière électronucléaire est aujourd’hui en grande difficulté...
Une des principales « variables d’ajustement » pour les nucléocrates est la diminution des effectifs. Un agent EDF sur deux partant à la retraite n’est pas remplacé. Dans les centrales, ce sont les personnes qui ont « démarré » le nucléaire qui partent, et les jeunes embauchés sont envoyés « au feu » avec très peu de formation. Les contrats précaires, l’intérim et la sous-traitance se développent massivement. 30 000 travailleurs extérieurs assurent aujourd’hui 80 % des activités de maintenance des centrales. Cela accentue encore davantage l’exploitation des travailleurs et leur mise en danger. Et les moyens de contrôle et de protection sont insuffisants : prise de risques pour les mesures de radioactivité, stress permanent, concurrence entre les salariéEs...
Notre scénario de sortie du nucléaire est favorable à l’emploi. Tout d’abord, toutes les études convergent désormais pour démontrer qu’à investissement équivalent, on crée bien plus d’emplois durables dans le secteur des énergies renouvelables que dans le nucléaire. Ainsi l’Allemagne qui a déjà créé près de 400 000 emplois dans ce secteur. De plus, contrairement au nucléaire, le renouvelable est produit localement, entraînant donc naturellement un maillage territorial au niveau de l’emploi qui facilite la redynamisation de toutes les régions.
Démanteler
De plus, il y a du travail pour plusieurs décennies dans le démantèlement des centrales qu’il faut arrêter. C’est à ce démantèlement et à la gestion des déchets que devra désormais être consacrée une bonne partie de l’énergie humaine. Un chantier gigantesque, indispensable à la survie de l’humanité, qui va devoir occuper les travailleurs, du manœuvre au scientifique, pour réparer les erreurs du passé et la folie capitaliste.
Pour effectuer le démantèlement des centrales dans de bonnes conditions, il faudra embaucher des travailleurs en CDI pour garantir une protection et une sécurité efficaces pour eux-mêmes et pour la population, cela dans le cadre d’un véritable service public humain et sérieux, non soumis aux impératifs du marché.
Renouveler
Enfin, le secteur des énergies renouvelables est créateur d’emplois. Même si nous divisons par deux les chiffres d’Engie qui parle de 20 emplois/MW installé dans l’éolien, de l’ADEME et d’EPIA qui parlent de 30 emplois/MW pour le solaire et de 60 000 emplois dans la filière bois énergie cogénération, on obtient encore 160 000 créations d’emplois dans le solaire, 540 000 dans l’éolien, 20 000 dans le chauffage au bois et la cogénération.
Avec notre scénario, nous serons donc bien au-delà des 125 000 emplois actuels de la filière électronucléaire. D’autant que les autres sources énergétiques auxquelles nous faisons appel dans notre scénario seraient elles aussi massivement créatrices d’emplois.
Ces embauches devront se faire dans le cadre d’un programme de formation pour intégrer les salariéEs qui le souhaitent soit dans la production d’énergies renouvelables, soit dans le démantèlement, avec une garantie du maintien de l’emploi, du statut et du salaire, au moment des fermetures des centrales.
Une production socialisée, un vrai service public de l’énergie
Comme ses concurrents, Areva recherche une position de leader mondial sur l’ensemble de la filière nucléaire. La politique commerciale d’Areva commande la politique énergétique du gouvernement. EDF et ses usagerEs en assurent le coût du développement, le risque commercial... tous les risques en fait ! Et bien entendu, le coût titanesque du démantèlement et de la gestion des déchets sera payé par les usagerEs...
Le nucléaire est donc bien représentatif de la logique du système capitaliste, qui draine un maximum de profits dans le court terme pour les actionnaires, laissant durablement à la charge de la société toutes les conséquences sociales, économiques, environnementales et de santé des choix faits pour se tailler une place sur le marché.
EDF, même lorsqu’elle était publique à 100 %, s’est comportée comme une parfaite entreprise capitaliste, réalisant des investissements hasardeux, en Amérique latine par exemple. Ce sont les usagerEs qui ont assumé ses aventures financières : un vrai gâchis. Pour éponger ses dettes, EDF a dû utiliser une partie des fonds qui auraient pu être consacrés au démantèlement des centrales. La privatisation d’EDF et le maintien de la filière nucléaire offrent un des exemples les plus frappants de socialisation des pertes et de privatisation des bénéfices. La satisfaction des besoins en électricité n’est pas soluble dans le marché.
Pour un monopole public
Ce que le NPA propose, c’est un véritable monopole public de l’énergie, débarrassé de l’énergie nucléaire, cogéré par les salariéEs et les usagerEs, sans indemnités ni rachat. À commencer par une mise sous contrôle total d’Areva par ses salariéEs et ses usagerEs puisque cette entreprise d’État se comporte comme une multinationale privée sans scrupule, soutenant par exemple la dictature au Niger pour rester concurrentielle (l’actuel président du Niger siège au conseil d’administration d’Areva !).
Un tel monopole public devrait évoluer d’un mode de production hypercentralisé vers un maillage énergétique sur l’ensemble du territoire, permettant aux populations de contrôler et de décider. Un tel monopole public aurait aussi pour mission de centraliser l’évaluation des potentiels d’économies énergétiques et de mise en place d’énergies renouvelables.
Une coopération au niveau européen, allant dans le sens d’un monopole public européen, devrait par ailleurs permettre une mutualisation des productions d’éolien (dans la Manche et au sud de la France), de géothermie (dans le nord de l’Europe, de solaire dans le Sud…) afin d’assurer un approvisionnement constant.
Enfin, le transfert gratuit de technologies des énergies renouvelables vers les pays du Sud, permettant un développement écologiquement viable, doit pouvoir être pris en charge par un monopole public.
En lutte(s) contre le nucléaire
De nombreuses actions locales existent pour lutter contre le nucléaire et les grands projets inutiles que sont l’EPR de Flamanville dans la Manche et le centre d’enfouissement des déchets à Bure, dans la Meuse.
5 juin : contre Cigéo à Bure, le futur désastre majeur du nucléaire
Le 17 mai dernier, c’est sans surprise que le Sénat a adopté à une très large majorité la proposition de loi précisant les modalités de création de Cigéo (centre industriel de stockage géologique), le futur centre d’enfouissement des déchets radioactifs à Bure dans la Meuse, tentant ainsi d’accélérer le processus en cours.
La loi, habilement concoctée par Longuet et quelques autres sénateurs proches du site de Bure et de ses retombées économiques corruptrices, fait mine de proposer deux choses nouvelles. Tout d’abord la notion de réversibilité du stockage y est « précisée et renforcée ». L’idée est de couper court aux arguments des opposantEs sur le caractère irrévocable de la démarche. Or, récupérer les déchets enfouis est une gageure technique et financière, comme l’attestent diverses catastrophes récentes à travers le monde. Et surtout, à quoi bon chercher une véritable solution pour l’élimination des déchets dès lors que l’enfouissement sera entamé ? La seule vraie réversibilité est le maintien en surface près des lieux de production, tel que prôné par les opposantEs.
Ensuite, cette nouvelle loi de façade autorisera, si elle est votée par les députés, le lancement industriel de la méga-poubelle nucléaire en le faisant passer pour une énième phase de « recherche », baptisée « phase-pilote », ce qui permettra également de faire avaler bien des pilules... « Aucun risque puisqu’on essaye d’abord pendant une phase de test ! »
En fait, il s’agit d’un seul et même processus qu’ils font mine de saucissonner pour griller les étapes législatives. D’ailleurs, sur le terrain, les travaux préparatoires de fouille, de défrichage, de balisages, ont bel et bien débuté depuis plusieurs mois comme si l’autorisation était déjà donnée...
Et pourtant… EDF et Areva proche de la faillite ne pourront jamais financer Cigéo dont le coût est estimé à 35 milliards d’euros par l’ANDRA elle-même, et à beaucoup plus d’après l’Autorité de sûreté nucléaire... Nos décideurs reportent donc une dette pharaonique sur nos descendantEs, et se vantent au passage de responsabilité vis-à-vis de ceux ci ! La vérité, c’est que Cigéo est partagé en lots attribués aux grands groupes du BTP qui sont bien les seuls à se frotter les mains. Trois décennies d’opposition au projet, des montagnes de risques industriels, la condamnation du sous-sol, un désastre financier annoncé et la mort programmée de tout un territoire, tous les éluEs s’en foutent !
Les opposantEs appellent donc à une forte mobilisation dimanche 5 juin : « 200 000 pas à Bure ». La manifestation se fera sur le tracé d’une ancienne voie ferrée que les nucléocrates envisagent de remettre en service pour les trains du nucléaire, et se conclura par un grand rassemblement festif et bruyant devant le « labo » de Bure.
1er et 2 octobre : contre l’EPR de Flamanville, toutTEs à Cherbourg
De la même façon qu’à Bure, les 1er et 2 octobre seront un moment fort de la bataille contre l’EPR de Flamanville. Nous porterons ce jour-là nos revendications dans une région marquée par l’empreinte nucléaire qui va être touchée par les suppressions d’emplois à la Hague.
Nos propositions qui font le lien entre les questions sociales, économiques, techniques et environnementales ont toute leur place dans le débat. Le NPA sera présent et contribuera à développer les luttes antinucléaires de terrain qui n’ont rien à voir avec les promesses électorales bidons, loin des salons ministériels et des ententes électorales entre « petits amis politiciens ». Plus que jamais, intensifions la lutte contre le nucléaire.