Au Collectif National
Cher-e-s camarades,
Nous avons pris bonne note de la demande de faire le point sur les positions des divers protagonistes, et en particulier de la LCR. Nous nous plions volontiers et par écrit à l’exercice, sur les questions stratégiques comme sur les questions programmatiques, afin que chacune et chacun, dans le mouvement pour des candidatures unitaires, puisse se faire un avis en toute connaissance de cause.
Sur les questions « stratégiques » : Comme vous le savez, tout en continuant à participer nationalement et localement aux discussions des collectifs, nous avons décidé de ne pas ratifier les conclusions du texte « ambitions-stratégie » car à notre sens les formulations qu’il comporte laissaient ouverte la possibilité in fine de participation à un gouvernement en partenariat avec la direction socialiste.
Mais au-delà des textes, nous jugeons aussi nos partenaires aux actes. Et nous regrettons que, de ce point de vue, les choses empirent : à Bordeaux, la direction du PCF, nationale et locale, a préféré le soutien à une liste PS/PC à une liste d’unité de la gauche du « non » qu’avaient proposée nos camarades. La Conférence nationale du PCF des 21 et 22 octobre, non seulement considère que le texte de Saint Denis autorise en « rejetant la théorie des deux gauches de la LCR » à renouer avec la direction du PS (par delà le « oui » et le « non », clivage pourtant constitutif du mouvement unitaire), mais Marie-George Buffet utilise désormais la formule hautement révélatrice « nous ne sommes pas la gauche de la gauche ». Que sommes nous alors ?
La réponse de la direction du PCF se précise quand les rencontres avec la direction socialiste se multiplient, non plus seulement pour discuter de la nécessaire riposte aux mesures de la droite, mais aussi pour décider de convergences programmatiques possibles. Ainsi, le risque que tout cela se termine dans une nouvelle formule d’union de la gauche s’est accentué ces dernières semaines.
Une fois de plus, puisqu’il faut être le plus clair possible, nous rappelons qu’il n’y a chez nous aucune tentation de renvoyer la gauche et la droite dos à dos.
Virer la droite en 2007 est pour nous une mesure de salubrité publique. Mais c’est aussi et surtout sa politique que nous voulons battre et cela signifie n’entretenir aucune illusion sur la possibilité d’une alliance avec le ou la candidat-e qui sortira du vote socialiste. Pas par sectarisme, mais parce que nous ne voulons pas soutenir ou participer à un gouvernement qui fait l’inverse de ce pourquoi nous nous battons, tous ensemble : contre les OGM, contre la privatisation des services publics, pour le partage des richesses… Cela n’empêche en rien, au contraire, que nous parvenions à convaincre de nouveau nombre de militants, de sympathisants et d’électeurs socialistes d’opter pour nos propositions comme cela s’est déjà produit le 29 mai. La fracture du « non » et du « oui » n’est pas résorbée à gauche et le choix de la radicalité ne conduit pas à la marginalité.
Cette question, que nous avons maintes fois posée, constitue le centre d’un désaccord stratégique majeur avec la direction du PCF, et avec ceux qui ont soutenu le texte « ambition et stratégie », un désaccord qui, au fil des semaines, s’avère de plus en plus indépassable, à moins d’un changement significatif de ligne des dirigeants de ce parti.
Mais cette question s’adresse aussi à tous les postulants candidats. En effet, quelque soient les candidats annoncés, nos désaccords demeurent quant à l’indépendance vis-à-vis du PS.
Et au-delà de la position des candidats à la candidature, des dirigeants de telle ou telle sensibilité ou organisation, nous savons aussi que ce débat, légitime, anime de nombreuses réunions de collectifs et que notre souci est partagé par beaucoup, y compris par des militantes et militants communistes. De nombreux exemples en attestent comme les amendements au texte « ambition-stratégie » défendus le 10 septembre par les comités des Bouches du Rhône, la position du camarade Raoul-Marc Jennar exprimée par courrier le même jour, les courriers que nous avons reçus de militants de mouvements nous interpellant et affirmant leur volonté, que nous partageons pleinement, de continuer à travailler ensemble.
Sur les questions programmatiques : Vous nous avez également demandé un jugement sur le texte adopté le 15 octobre à Nanterre. De nombreux passages de ce programme ont notre accord. Un certain nombre de positions ou de formules n’ont pas notre assentiment.
Voici trois exemples :
– La hauteur du SMIC à 1500 euros « bruts » n’est pas acceptable, ce n’est pas ce que nous avions adopté ensemble dans la charte antilibérale. Il est bien connu en effet que cela signifierait à peu de choses près poursuivre sur 5 ans les soi-disant revalorisations entamées par le gouvernement de la droite. Nous sommes favorables à une réelle mutation des bas revenus et cela signifie 1500 euros en net.
– Le nucléaire est une autre question majeure pour une élection générale aussi importante où les enjeux de choix énergétiques sont au cœur d’une problématique de transformation sociale. Certes, nous sommes preneurs de tout débat sérieux et d’une consultation populaire sur la question. Mais quelle est la position qui serait défendue par un-e candidat-e commun-e dans ce débat ? Pour nous, elle ne saurait être autre qu’une position partant de l’incontournable exigence de la sortie du nucléaire.
– Enfin la question de l’attribution de tous les droits citoyens liée au seul critère de résidence apparaît capital. Imagine t-on notre porte-parole revendiquer le cas par cas pour résoudre la situation des sans-papiers ?
De façon plus générale, la faiblesse essentielle du document est de ne pas poser avec assez de clarté la question du rapport de force, des mobilisations nécessaires, sans lesquelles il serait impossible d’imposer la rupture nécessaire pour satisfaire l’urgence sociale : prendre sur les profits, limiter les prérogatives des patrons et des gros actionnaires...
Nous partageons le souci démocratique largement répandu quant au fonctionnement des comités, comme le refus de la tentative d’instrumentalisation du rassemblement issu du 29 mai et la volonté de maîtriser collectivement la désignation du candidat. En effet, la Conférence nationale du PCF n’envisage aucun autre choix que le ralliement des collectifs à la candidature de Marie Georges Buffet. Ce n’est pas là ce que l’on peut appeler une discussion démocratique et cela signe le retour des pratiques hégémoniques.
Pour notre part, comme vous le savez, nous avons engagé la candidature et la campagne d’Olivier Besancenot. Cependant nous n’avons jamais été arc-boutés sur la présentation de notre camarade. Nous l’avons dit à plusieurs reprises : nous serions prêts à le retirer si un accord clair se dégageait. Mais nous sommes obligés de constater que, pour les échéances électorales à venir, les désaccords se creusent plus qu’ils ne se comblent.
Recevez, cher-es camarades, nos sincères salutations.
La délégation de la LCR :
Anne Leclerc, Léon Crémieux, Yvan Lemaître, Pierre-François Grond