L’organisation Etat islamique (EI) a revendiqué l’attaque par son organe de propagande Aamaq. Plus tôt dans la journée, Jamaat-ul-Ahrar, une faction dissidente du mouvement des talibans pakistanais (Tehrik-e-Taliban Pakistan, TTP), l’avait également revendiquée, promettant d’autres offensives « jusqu’à l’imposition d’un système islamique » dans le pays. Depuis 2015, Jamaat-ul-Ahrar a manifesté son soutien à l’EI sans pour autant faire pleinement allégeance.
La bombe a explosé alors qu’environ deux cents personnes, dont nombre d’avocats et de journalistes, étaient rassemblées devant les urgences de l’hôpital civil de Quetta, après l’assassinat, quelques heures plus tôt, du bâtonnier de la province, Bilal Anwar Kasi. Jamaat-ul-Ahrar avait clamé la responsabilité de ce meurtre.
Le bâtonnier et les avocats qui lui rendaient hommage appartiennent à la frange la plus libérale de la province et incarnaient un symbole de résistance face aux injustices et aux atteintes aux droits fondamentaux.
Huit kilogrammes d’explosif
Le bilan de l’attentat risque de s’alourdir, selon Rehmat Saleh Baloch, ministre de la santé de la province, qui a ajouté que l’armée s’était déployée autour des hôpitaux de la ville. Les responsables restent prudents quant aux chiffres en raison de l’activation par les autorités de brouilleurs de téléphonie mobile qui empêchent les communications, notamment avec les responsables sur le terrain.
Un journaliste de l’Agence France-Presse se trouvait à 20 mètres de la foule au moment où l’explosion a retenti. « Il y avait d’énormes nuages noirs et de la poussière, rapporte-t-il. Je suis retourné en courant vers les lieux et j’ai vu des corps dispersés, et de nombreux blessés en train de pleurer. Il y avait des mares et des mares de sang, des morceaux de chair et des membres humains. » Des membres du personnel soignant, eux-mêmes en pleurs, se sont précipités vers les lieux de l’attentat pour aider les victimes, raconte-t-il.
La police a confirmé qu’il s’agissait d’un attentat-suicide. « Le poseur de bombe s’était harnaché avec environ 8 kg d’explosif, remplis d’éclats et de billes de métal », selon le chef des démineurs, Abdul Razzaq. Parmi les victimes figurent deux journalistes de télévision, a fait savoir Daud Khilji, responsable administratif à Quetta.
Une région en proie aux violences
Le Baloutchistan, frontalier de l’Iran et de l’Afghanistan, est une région riche en réserves pétrolières et gazières, secouée par des violences entre sunnites et chiites, des attaques islamistes et une insurrection séparatiste.
Le premier ministre, Nawaz Sharif, a condamné l’attentat, et a ordonné de nouvelles mesures de sécurité. « Nous ne laisserons personne troubler dans cette province la paix qui y a été restaurée grâce aux nombreux sacrifices des forces de sécurité, de la police et du peuple », a-t-il dit, selon un communiqué de son bureau.
Lundi soir, le président de la République française, François Hollande, a condamné un « acte abominable » et exprimé « la pleine solidarité de la France au peuple pakistanais ». Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a quant à lui déclaré que « cibler des personnes endeuillées dans un hôpital civil est particulièrement épouvantable ».
Il s’agit du deuxième attentat le plus meurtrier au Pakistan cette année. Le 27 mars, une bombe avait provoqué un carnage à Lahore, tuant 72 personnes dans un parc pour enfants.
Le Monde.fr avec AFP et AP