Le Rassemblement Islamique du Sénégal (RIS-Alwahda) a été fondé en 2009 dans le but de regrouper et d’unir les différentes organisations islamiques sénégalaises. Le RIS est actuellement presque entièrement aux mains des Frères musulmans. Son site internet regorge de liens vers la Jamatou Ibadou Rahmane (JIR) qui a pour but d’« instaurer une société véritablement islamique au Sénégal » et l’AEEMS (Association des Elèves et Etudiants Musulmans du Sénégal) qui s’oppose à la laïcité, et participe à une « ré-islamisation » de la société, selon le mode des Frères musulmans. Le Rassemblement Islamique du Sénégal ne cache pas ses domaines d’intervention :
• « Social, en renforcement des liens de fraternité et de solidarité islamique
• Economique, par la promotion d’une alternative économique islamique crédible et la contribution à éradication de la pauvreté ;
• Politique, par l’effort d’exercice d’une influence sur les processus de décisions publiques, pour une prise en compte des préoccupations des musulmans ;
• Culturel, par la proposition d’une alternative culturelle islamique ; de la communication, par une visibilité des actions du mouvement islamique et en informant juste ; de la prédication et de l’orientation, par une compréhension juste et une pratique saine de l’Islam ; de l’éducation, par l’érection d’institutions éducatives et d’enseignement préscolaire, scolaire, moyen et supérieur ».
Le RIS entend également : « guidé par le Coran et la Sunnah, prôner l’authenticité du Message et son adaptabilité, au-delà du temps et de l’espace, sans risque de trahir les principes directeurs, ainsi que l’Ijtihad et le Djihad à la fois méthode, esprit et action, la globalité et l’universalité de l’Islam ». Ce qui peut être entendu comme une condamnation des pratiques animistes des musulmans sénégalais.
En pratique le RIS organise des conférences sur des sujets de sociétés, met en place des camp de vacances islamiques pour les enfants, donne des cours coraniques aux élèves, et produit des vidéos islamiques en ligne ; en diffusant l’idéologie des Frères musulmans. Lors des conférences, femmes et hommes sont séparés. Sur sa page Facebook, le RIS relaie de nombreux posts en faveur de Tariq Ramadan, ou d’Hassan Al Tourabi.
Le RIS participe également au défilé commémorant l’indépendance du Sénégal, véritable jour de fête, en faisant défiler sa branche féminine, voilée, de façon militaire.
En août 2013, le RIS manifeste à Dakar pour défendre Mohamed Morsi et les Frères égyptiens, qu’ils appellent « les militants de la cause juste ». Le RIS déclare que « le Peuple sénégalais épris de justice et de paix civile joint sa voix à celle des esprits libres en considérant ce qui s’est passé en Egypte le 03 juillet 2013 comme un coup d’état pur ». Il demande également au président Macky Sall de convoquer l’Ambassadeur d’Egypte pour « lui signifier son opposition au coup d’état et à la violation des droits de l’homme et du peuple en Egypte ». La JIR a de nombreuses fois appelé au boycott d’Israël, à la « rupture des relations avec le régime sioniste », en « soutien avec Gaza ». En 2014, le RIS manifeste à nouveau à Dakar, avec parmi les slogans : « Vive la Palestine, à bas Israël ».
En 2015, le gouvernement sénégalais à pour projet d’interdire le port du voile intégral sur son territoire. Le RIS mène la fronde contre le projet de loi, face au gouvernement qui considère que l’Islam sénégalais n’est pas compatible avec cette pratique wahhabite sexiste. Le RIS lui répond qu’il « considère l’évocation exclusive d’un « particularisme islamique sénégalais » comme une source d’amalgames qui menace la cohabitation pacifique de toutes les tendances doctrinales au Sénégal ». Il accuse également le gouvernement de « dogmatisme conduit à la dictature, au chaos », en qualifiant le voile intégral de « pratique traditionnelle », et en assimilant islam et voile intégral : « l’islam peut, en effet, être un puissant médium pour la paix et la stabilité. Mais il est surtout une référence pour notre libération, notre développement, notre épanouissement à la fois spirituel, social et économique ». La loi contre le voile intégrale est finalement adoptée fin 2015.
En janvier 2016, le RIS organise une table ronde sur les Valeurs Sénégalaises face à la Menace de l’Homosexualité, en association avec d’autres mouvements islamistes, pour former le Collectif Non à l’Homosexualité. Le communiqué de presse est édifiant :
« Constatant les scandales liés au phénomène de l’homosexualité, dans ses multiples formes qui se résument dans l’acronyme LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels et Transgenres), se développent de manière inquiétante au Sénégal, le pool des associations membres du COLLECTIF NON A L’HOMOSEXUALITE a décidé d’engager un combat énergique afin d’éradiquer ce mal rampant dans notre pays. Dans une conférence publique tenue au Lycée Cheikhou Oumar Foutiyyou de Saint-Louis, M. Aboubacry Mbodj, le Secrétaire général de la RADDHO déclarait : « Le Sénégal compte au total 9 associations d’homosexuels reconnues. Parmi elles, 4 évoluent à Dakar et les 5 restantes sont basées à voir ce nombre augmenter. Ce, au regard de l’ampleur prise par cette pratique »…
En octobre 2012, un certain Djamil Bangoura, se disant leader d’Association d’homosexuels, déclarait péremptoirement que : « Nous allons nous battre pour la légalisation de l’homosexualité au Sénégal », n’hésitant pas à publier sa photo à la une des journaux.
Récemment à Kaolack, au moment où des fidèles musulmans célébraient la naissance du Prophète Muhammad, paix et salut sur lui, 11 présumés homosexuels ont été appréhendés entrain de célébrer, à leur manière, des mariages gays ! Traduits devant le Procureur de la ville sainte de Cheikh ibrahima Niass, celui-ci les libéra à la stupéfaction générale des populations de Kaolack et des Sénégalais « faute de preuves suffisantes » !
Plus grave, le Ministre Sénégalais de la Justice, Me Sidiki Kaba, affirmait à l’occasion de l’inauguration du « Quartier des détenus mineurs » à la Maison d’Arrêt de Thiès : « Aux yeux de la loi au Sénégal, il n’y a pas d’homosexuels. Nous avons une législation qui condamne ceux qui pratiquent des actes contre nature dans un lieu public, c’est-à-dire ce qui est attentatoire à la pudeur. C’est ce qu’il faut surtout retenir », avant de s’empresser de préciser : « toute personne, quelle qu’elle soit, a des droits »…
Des porteurs de projets aux antipodes de nos valeurs veulent manifestement nous imposer ces pratiques contre nature qui heurtent la conscience de l’écrasante majorité des Sénégalaises et des Sénégalais et qui visent à saper les valeurs fondatrices de notre société. Considérant qu’il n’y a pas pire terrorisme morale et sociétal que l‘homosexualité, nous, les Associations, Personnalités et Structures signataires :
1- Interpellons le chef de l’Etat sur sa responsabilité de préserver nos valeurs culturelles, religieuses et morales, base de la paix et de la cohésion nationale ;
2- Exigeons du Ministre de l’intérieur, M. Abdoulaye Daouda Diallo, au cas où les déclarations de M. Mbodji s’avèrent exactes, de dissoudre, dans les meilleurs délais toutes les Associations homosexuelles ;
3- Demandons la démission immédiate de M. Sidiki Kaba de son poste de Ministre de la justice du Sénégal, à cause de sa propension manifeste à défendre les homosexuels ;
4- Exigeons de nos députés à l’assemblée nationale de réviser les lois portants sur les actes contre nature en interdisant nommément : l’homosexualité, le lesbianisme, la bisexualité et le transgenre, afin de maitre fin à toute interprétation perverse de la loi en question ;
5- Avons décidé de porter plainte contre les 11 présumés homosexuels de Kaolack pour les délits d’attentat à la pudeur, atteinte aux bonnes mœurs et à la conscience des croyants que nous sommes, toutes obédiences confondues et pour avoir traumatisé et porté atteinte à l’innocence des enfants de cette école à qui les juridictions nationales et internationales accordent une protection sociale en raison de leur manque de maturité physique et intellectuel »."
Le RIS diffuse une morale rigoriste et anti-choix, il appelle également à lutter « contre les maladies endémiques et les fléaux qui assaillent la jeunesse sénégalaise comme la drogue, l’usage du tabac et de l’alcool ».
Suite à la tentative de coup d’état en Turquie, le RIS soutient ardemment Recep Tayyip Erdogan. Il le félicite de faire primer un élan islamique qui permet d’ « islamiser » la société, en opposition à d’autres visions nationalistes ou régionalistes. Le RIS fustige l’Occident qui en fait « l’homme à abattre », et l’accuse de « complot international », aux manettes derrière le coup d’Etat. Le RIS se félicite : « l’échec de cette opération diabolique est un miracle divin et salvateur », car selon l’organisme, une réussite aurait fait émergé « dizaines de millions de personnes s’autoproclamant DAESH ».
En conclusion, les libertés individuelles, la liberté d’expression, la liberté de presse attendront : « la Turquie est en ce moment le poumon par lequel la Oummah respire. Elle est le refuge des exilés et l’espoir de tout ceux qui sont épris d’un islam modéré et rayonnant. Bref, les raisons qui poussent l’Occident à s’opposer à Erdogan et à son régime sont les mêmes qui poussent les musulmans à le soutenir. Qu’Allah protège et « islamise » la Turquie ».
Carla Parisi
Note d’ESSF : L’un de nos correspondant juge cet article intéressant. Il pense cependant que le pays le plus exposé à la montée d’un islamisme politique est aujourd’hui le Mali. Plus généralement il y aurait, en Afrique, une véritable fracture dans l’islam entre les anciens, tenant de l’ordre qui tentent de maintenir leur pouvoir et les jeunes qui eux essayent d’émerger en embrassant un islamisme contestataire d’obédience wahhabite. Ce n’est évidemment qu’un élément parmi d’autres, mais c’est une piste à travailler pour comprendre ce qui se passe sur le Continent.