Le tsunami de décembre 2004, dans l’océan Indien, a décidé notre association à s’engager dans des campagnes de solidarité financière envers des populations frappées par des désastres dits naturels (qu’ils soient d’origine humaine ou pas), des conflits militaires, ou des crises sociales dévastatrices. Nous pensions alors qu’il était temps qu’un plus grand nombre d’associations, de mouvements sociaux, de syndicats assument directement leurs responsabilités en ce domaine, au lieu de s’en remettre à des organismes paragouvernementaux et des ONG spécialisées. Nous en sommes aujourd’hui plus convaincus que jamais.
L’expérience montre qu’effectivement l’aide directe « de mouvements populaires à mouvements populaires » est efficace, économe. Nous avons choisi pour partenaires privilégiés des organisations « de terrain » capables d’agir immédiatement, connaissant le tissu social et liant secours d’urgence et reconstruction durable dans une perspective solidaire, progressiste, indépendante des pouvoirs établis. Les coûts de « gestion » sont réduits au minimum. Les intérêts des plus démunis sont mieux défendus. L’auto-organisation des populations sinistrées est encouragée – et cela a des implications décisives pour l’avenir.
L’expérience a aussi nourri une réflexion de fond sur ce terrain d’action, sur le rapport entre l’humanitaire et le politique, sur le rôle de la solidarité dans un mode où l’ordre néolibéral, où la crise écologique, où la permanence des guerres ne cesse de provoquer des déplacements forcés de population et de véritables processus de décomposition du tissu social. Dans ces conditions, nous devons concevoir l’aide de façon à ce qu’elle renforce le pouvoir des communautés populaires (ouvriers, villageois, pêcheurs…), et des secteurs (femmes, enfants, castes opprimées, peuples indigènes, « minorités »…) qui se retrouvent en situation de faiblesse et de subordination aggravées après de telles catastrophes.
Notre association ayant tissé des liens militants surtout en Asie (usuellement parente pauvre des solidarités européennes), c’est à cette région que nous consacrons nos propres efforts – ce qui ne nous empêche évidemment pas de nous associer aux appels à la solidarité en direction du Moyen-Orient, de l’Afrique, de l’Amérique latine et des Caraïbes…
ESSF ne bénéficie d’aucune subvention et n’a aucun salarié – ses activités sont menées sur des bases entièrement militantes [1]. La grande majorité des dons que nous recevons sont le fait d’individus, même si diverses organisations ont aussi contribué à nos campagnes (avec des montants parfois importants).
Suivant les campagnes, nous avons aussi pu collaborer avec des syndicats (Solidaires), associations (Fédération de Paris du secours populaire), instituts (IIRE, Focus on the Global South) et réseaux (CADTM). Nous souhaitons que ce type de collaboration se poursuive et s’élargisse.
Nous présentons ci-dessous un bilan de nos campagnes financières pour la période 2005-2015. En onze ans, nous avons envoyé 148.188,04 € euros à nos partenaires asiatiques pour soutenir leurs actions. [2] Cela montre ce qui est et ce qui serait possible de faire, en travaillant en synergie avec d’autres mouvements.
UNE ACTION PERMANENTE EN DIRECTION DE TROIS PAYS
Durant la période considérée, nous avons envoyé de l’aide dans huit pays. Au fil des ans, pour trois d’entre eux, le soutien à nos partenaires est devenu annuel. Ce fut d’abord le cas pour le Pakistan, puis les Philippines et enfin le Bangladesh.
Bangladesh
Nos partenaires au Bangladesh sont les associations paysannes jumelles BKF-BKS, membre de la Via Campesina.
Notre aide a commencé en 2011 avec un soutien très modeste à une « caravane » sur le changement climatique, le genre et la souveraineté alimentaire. Elle a pris de l’ampleur après le désastre qu’a représenté l’effondrement de l’immeuble industriel Rana Plaza. En 2015, nous avons aussi aidé les BKF-BKS a apporter un soutien des populations rurales déshéritées, frappées par de graves inondations dans le nord du pays.
Par ailleurs, les populations rurales ont aussi été victimes d’ une météo inhabituellement froide – les changements climatiques en cours provoquent déjà au Bangladesh des modifications dans les cycles saisonniers et des températures extrêmes auxquelles les personnes ne sont pas préparées. Enfin, un appel a été lancé pour une aide médicale d’urgence.
Rana Plaza (aide médicale d’urgence, achat de machines à coudre pour des ouvrières handicapées à vie et travaillant à domicile dans leurs villages) : 7387 €
Inondations (dans les sous-districts de Bhurungamari et Nageshwary au Kurigram) : 2387 €
Vague de froid rurale (vêtements chauds, chauffage…) : 1150 €
Caravanes « changement climatique, le genre et la souveraineté alimentaire » : 2555 €
Aide médicale d’urgence : 800 €
TOTAL BANGLADESH (2011-2015) : 14.279 €
Pakistan
Nous avons inauguré nos campagnes de solidarité financières après le tremblement de terre qui a frappé le nord du Pakistan et le Cachemire sous contrôle pakistanais en octobre 2005. Elles se sont poursuivies avec l’aggravation des conflits militaires dans le Nord-Ouest (frontière afghane) et le flot de réfugiés (les « personnes déplacées internes ») qui s’en est suivi. Durant l’été 2010, d’importantes inondations ont endeuillé plusieurs provinces du pays. Enfin, nous nous sommes engagés dans un soutien durable à l’action de la Labour Education Foundation (LEF) aide à l’organisation des paysans et ouvriers, ainsi que les populations sinistrées.
Tremblement de terre (notamment au Cachemire) : 16.500 €
Au départ, nous avons bénéficié d’une couverture médiatique assez importante sur le tremblement de terre et nous avons reçu des dons d’organisations (y compris européennes), et pas seulement d’individus.
Inondations : 6100 €
Soutien à l’activité de la Labour Education Foundation (LEF) : 9200 €
Défense des défenseurs des droits humains : 3.880 €
La situation des droits humains ne cesse de se dégrader au Pakistan et les défenseurs de ces droits sont menacés soit par des organisations fondamentalistes, soit par les grands possédants. Baba Jan (ainsi que ses camarades) est l’un d’entre eux. Il a été condamné par deux fois à la prison à perpétuité par une cour antiterroriste au Gilgit-Balistan, dans le nord du pays. Le caractère inique de ces jugements a été largement dénoncé par des associations d’avocats et de défense des droits.
TOTAL POUR LE PAKISTAN (2005-2015) : 35.680 €
Philippines
Mindanao est la région des Philippines la plus touchée par des conflits militaires, en sus des catastrophes naturelles. En juin 2007, avec l’aide d’organisations, nous avons pu envoyer une aide ponctuelle pour la réhabilitation de communautés villageoises. En novembre 2013 la principale campagne de en aide aux victimes du super typhon Haiyan a été initiée.
Réhabilitation de communautés villageoises à Mindanao (2007) : 10.017,27 €
Aide à des populations victimes des conflits militaires, transmise par le biais du réseau Sumpay Mindanao.
Victimes du typhon Washi / Sendong (2011-2012) : 4050 €
Ce typhon a frappé en décembre 2011l’île de Mindanao. Nos soutiens ont été envoyés dans la province d’Iligan en passant par l’association RDRRAC – Centre d’action Ranaw de réponse aux catastrophes et de reconstruction.
Super typhon Haiyan-Yolanda (2013- 2015) : 31.510 €
Ormoc. A partir de novembre 2013, aide destinée à quatre communautés sinistrées dans l’île de Leyte (à Ormoc et ses environs), transmise par le biais la coalition MiHands basée à Mindanao : 31.000 €
Fédération des transports informels de Tacloban (Tacloban Informal Drivers Federation) – conducteurs de tricycles : 300 €
Association locale d’aide aux réfugiés de Tacloban venus à Manille : 210 €
Lumads (tribus montagnardes) : 3000 €
Aide aux populations montagnardes de la région d’Upi (Magindanao) dans l’île de Mindanao, avec l’association Sumpay.
TOTAL POUR LES PHILIPPINES (2007-2015) : 48.577,27 €
DES CAMPAGNES PLUS PONCTUELLES
Nous avons mené, par rapport à cinq pays, des campagnes plus ponctuelles.
Birmanie (2008) : 1.250 €
Typhon Nargis : Dans le cas de la Birmanie, nous n’avions aucun lien direct avec la « société civile » birmane, soumise au contrôle d’une dictature militaire. Il a fallu du temps, après le cyclone Nargis en 2008, pour que des liens soient établis, bien qu’indirectement, grâce à une ONG européenne. Un tel retard réduit considérablement l’efficacité d’un appel, la question ne faisant plus la « une » de l’actualité. La somme collectée a été modeste, mais elle n’en a pas moins notablement renforcé l’aide apportée à des réseaux indépendants de la société civile en Birmanie.
Indonésie (2006-2015) : 3.500 € au total
Nous sommes intervenus après le tremblement de terre de mai 2006 dans le Centre Java, puis après les inondations qui ont frappé Djakarta (la capitale). Notre aide a été envoyée à des coalitions d’organisations populaires mobilisées dans les municipalités de Klaten ou Bantul (Centre Java), ainsi qu’à Djakarta.
Ainsi, de juin 2006 à mars 2007, 3.350 euros ont été transmis Java.
Par ailleurs, en décembre 2015, 150 € ont été donnés pour crèche destinée aux enfants de travailleurs
Nous envisageons d’assurer une aide régulière au travail mené par l’organisation Perempuan Mahardhika (Femmes libres) en faveur d’ouvrières.
Japon (2011) : 14.795 €
Le précédent de la Nouvelle-Orléans avait montré que même dans un pays très développé, les pauvres pouvaient être particulièrement discriminés lors d’une catastrophe humanitaire. Quand le tsunami a frappé le nord-est du Japon en mars 2011, puis que la région a été sinistrée par le désastre nucléaire de Fukushima, nous avons ainsi organisé une campagne de solidarité en lien avec le Conseil national des syndicats (NTUC).
Népal (2015) : 2000 €
Tremblement de terre d’avril 2015 : Nous n’avions pas de contact fonctionnel au Népal au moment où le séisme a frappé. Nous avons ultérieurement pris contact avec la Fédération des Paysans népalais (All Nepal Peasant Federation – ANPFa), membre de la Via Campesina. Nous avons participé à hauteur de 2.000 € à un programme de distribution de semences à des populations paysannes sinistrées dans le district de Lalitpur (région centre).
Sri Lanka (2011) : 500 €
Soutien à la liberté de presse
FONDS DE SOLIDARITES IIRF
Institut international de Recherche et de Formation
Diverses organisations nationales sont passées par ESSF pour leurs campagnes de solidarité Asie (leurs contributions sont intégrées dans le bilan ci-dessus). De même, nous collaborons avec l’Institut international de Recherche et de Formation (IIRF). Initialement établi à Amsterdam, il a essaimé à Manille (Philippines), puis Islamabad (Pakistan). Nous contribuons à alimenter leurs fonds de solidarité Asie.
Cette collaboration nous permet d’aider, par l’intermédiaire de ce réseau, l’activité de mouvements dans un éventail de pays plus ouvert.
IIRF-Amsterdam (2013-2015) : 2.900 €
IIRE-Islamabad (2014-2015) : 500 €
Pour des raisons pratiques (obtention de visas, etc.), l’activité de l’IIRE-Islamabad est essentiellement nationale.
IIRE-Manila (2011-2015) : 24.206,77 €
L’activité de l’IIRE-Manila est essentiellement régionale (Asie-Pacifique).
TOTAL IIRF : 27606,77 €
TOTAL GENERAL : 148.188,04 €
LE FONDS PERMANENT DE SOLIDARITE ASIE D’ESSF
Nous avons constitué un Fonds permanent de solidarité Asie afin, en particulier, de pouvoir aider des projets ou des organisations quand les conditions de campagnes « ad hoc » ne sont pas réunies, ne serait-ce que parce que les médias ne couvrent pas la question. De plus, face à une catastrophe humanitaire nécessairement imprévue, il faut pouvoir envoyer en urgence une première aide, sans attendre le lancement de la campagne financière et ses premiers résultats.
* * *
Pour moins dépendre de la couverture médiatique et favoriser les synergies militantes, nous souhaitons que les mouvements sociaux soient capables de réagir rapidement face à une catastrophe, que nous puissions mieux collectiviser nos liens et nos moyens pour donner plus d’ampleur et de profondeur aux campagnes de solidarité. Il faut pour cela que notre « politique de l’aide » – de « mouvements sociaux à mouvements sociaux » – devienne un élément de notre « culture » partagée, de nos réflexes militants.
Pierre Rousset
Les dons sont le fait soit d’organisations, soit d’individus. Ils proviennent, pour la période considérée, des pays suivants : Allemagne, Belgique, Danemark, Congo, Etat espagnol, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hongkong, Italie, Japon, Norvège, Pakistan, Pays-Bas, Philippines, Québec, Sri Lanka, Suisse, Thaïlande, Taïwan, Turquie, Réseau international CADTM et Quatrième Internationale.
Le point financier de chacune des campagnes de solidarité initiées par notre association, ESSF, est régulièrement présenté sur notre site.
Pour envoyer des dons
Les dons via ESSF peuvent être « dédiés » (en mentionnant le pays ou la campagne auxquels ils sont destinés) ou « libre » (sans mention) : nous les versons alors au Fonds de solidarité permanent et nous les utilisons pour les urgences.
Chèques
Les chèques en euros seulement et payables en France à l’ordre d’ESSF doivent être envoyés à :
ESSF
2, rue Richard-Lenoir
93100 Montreuil
France
Banque :
Crédit lyonnais
Agence de la Croix-de-Chavaux (00525)
10 boulevard Chanzy
93100 Montreuil
France
ESSF, compte n° 445757C
Compte au nom de : ESSF
Coordonnées bancaires :
IBAN : FR85 3000 2005 2500 0044 5757 C12
BIC / SWIFT : CRLYFRPP
Compte au nom de : ESSF
Paypal : vous pouvez aussi transférer vos dons via Paypal (voir la commande placée en haut à gauche de la page d’acceuil).
En France, ces dons donnent droit à des déductions d’impôt. Il nous faut votre adresse pour vous envoyer un reçu fiscal (adresse en général indiquée sur les chèques).