Au moment où ces lignes sont écrites, on annonce que les massacres ont commencé dans Alep-est. Toutes les informations sont concordantes. Ainsi des nouvelles alarmantes arrivent de l’hôpital al-Hayat : on y tue des soignants et des malades. Des maisons brûlent aussi avec des personnes dedans...
Alep-est pousse à cet instant, peut-être, son dernier soupir. Les forces du régime et ses alliés avancent à grande vitesse sous un déluge de feu dans les derniers quartiers résistants d’Alep. Et on ne compte plus les civils morts ou blessés.
Comme à l’accoutumée, l’ONU exprime son « inquiétude », mais aucune réaction ni condamnation du Conseil de sécurité de l’ONU, qui n’est que le terrain de jeu des grandes puissances. Le quatrième véto russo-chinois a tout bonnement avorté une résolution d’aide aux populations d’Alep. Les autres puissances occidentales se bornent à exprimer leurs regrets et « inquiétude », mais n’agissent même pas dans le domaine humanitaire. Le peuple syrien, à Alep et ailleurs, peut continuer à mourir dans le silence général.
Le danger Daesh persiste
Depuis 2014, les USA ont fondé une coalition militaire contre Daesh pour intervenir en Syrie et en Irak. De son côté, la Russie intervient militairement en Syrie depuis 2015, aussi sous le prétexte de combattre l’État islamique.
Pourtant, Daesh est toujours là, actif et offensif. En Irak, il a multiplié les contre-offensives autour de Mossoul [1]. En Syrie, Daesh a pu investir le 11 décembre la ville de Palmyre, cela malgré la présence des forces russes. Ces dernières ont dû évacuer Palmyre juste avant l’entrée des combattants de Daesh dans la ville, selon les témoignages de proches du régime. Daesh a trouvé dans la ville des réserves d’armes les plus lourdes dont des armes anti-aériennes, selon les mêmes sources. Les officiels russes parlent d’une offensive d’environ 5 000 combattants de l’État islamique, qui ont pu occuper la ville en deux jours. Passés inaperçus dans le désert en arrivant de Deir ez-Zor à l’est et de Raqqa au nord. Ce retrait très rapide des forces du régime et des Russes de la ville de Palmyre peut être perçu comme une tentative pour détourner l’attention du massacre qui se déroule actuellement à Alep.
Seul devant l’enfer des armes
Au moment où ces lignes sont écrites, il reste 80 000 civils assiégés dans les deux derniers km2 restant « libres » à Alep. Les cris d’aide de cette population pour l’arrêt des bombardements barbares du régime trouvent bien peu d’écho dans le monde. Pour les accompagner, des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes ces derniers jours dans le monde.
Mais la vérité choquante est que le peuple syrien dans sa lutte pour son émancipation n’a pas trouvé une solidarité internationale à la hauteur de ses sacrifices. Il reste seul devant l’enfer des armes d’un régime sanguinaire, et il montre un courage extraordinaire, de ses jeunes, des masses populaires révoltés, qui font face à la barbarie extrême du régime et de ses alliés.
« Le soleil brillera demain » ?
Allié du régime de Bachar, le gouvernement iranien a exprimé sa joie à propos de « la libération d’Alep ». Le gouvernement turc de l’AKP d’Erdogan se contente de sa présence militaire au nord d’Alep suite à son accord avec Poutine, sans la moindre protestation contre le massacre d’Alep.
Dans le même temps, comme un symbole, ce dimanche 11 décembre, le penseur marxiste syrien Sadek al-Azem s’est éteint en exil, à Berlin. Celui qui a marqué des générations de militants de gauche a soutenu « la révolution » contre un régime tyrannique, car pour lui « c’est une révolution, quel que soit son état ce jour, ce n’est pas une guerre civile généralisée ».
« D’Alep, nous entendons le cri qui dit :
Ne les réveillez pas, ils dorment tous,
Ne dérangez pas nos gouvernants : mourez en silence,
Ne croyez pas leurs mensonges ni leurs larmes,
Depuis quand les statues pleurent-elles ?
Mais le soleil de la liberté brillera… demain. »
Ghayath Naisse