Le sujet est d’importance. Avec les 35 heures de présence pour les enseignants dans les collèges, mesure censée résoudre la prise en charge d’élèves en difficulté scolaire, Ségolène Royal n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’elle avait déjà évoqué, en février dernier, la nécessité de « rallonger le temps de présence des enseignants ». Les 35 heures pour les enseignants, c’est une vieille lune, déjà tentée en 1981, après la victoire de François Mitterrand, vite abandonnée devant la levée de bouclier que cette proposition avait suscitée.
Mettons un terme à une contre-vérité sur le temps de travail des enseignants. Les statistiques du ministère de l’Éducation nationale, suite à une enquête effectuée en 2002, établissent que les enseignants du second degré (collèges, lycées) ont un temps de travail hebdomadaire égal à 39 h 47. Le Snes, lui, chiffrait ce temps de travail à 44 heures par semaine. Soit plus du double des heures de cours faites devant les élèves (18 heures pour un professeur certifié).
Ces statistiques sous-estiment largement le réel temps de travail des enseignants. Le temps de présence dans les établissements scolaires dépasse largement celui consacré aux heures de cours : suivi des élèves, réunions diverses, règlement de conflits, prise en charge des problèmes, entre autres, sont déjà effectués par les enseignants et non comptabilisés comme temps de travail.
Les élèves en difficulté reçoivent-ils toute l’aide nécessaire ? Sans doute pas. L’école, à elle seule, ne peut pas supprimer les inégalités. La solution ne consiste pas dans une augmentation du temps de présence obligatoire des enseignants. Ségolène Royal va chercher ses solutions du côté des libéraux, du côté de Tony Blair et des écoles britanniques. Cela n’a rien à voir avec une quelconque alternative antilibérale ou anticapitaliste. Ségolène Royal veut casser le système existant, casser les statuts, fruits des luttes et des conquêtes obtenues.
On ne peut pas faire l’impasse sur les 25 000 postes d’enseignants suprimés depuis 2002 et les 8 700 postes supprimés dans le budget 2007. Rétablir tous les postes supprimés, augmenter les recrutements de titulaires, titulariser les auxiliaires, contractuels, vacataires en poste, diminuer le temps de travail et réaménager le temps de présence des enseignants, limiter à dix-huit élèves les effectifs par classe en collège et lycées professionnels notamment : voilà les premières mesures indispensables pour redonner au service public d’éducation les moyens de son ambition. Osons une revendication : seize heures de présence, soit quatorze heures de cours et deux heures de suivi d’élèves. C’est dans cette direction qu’il faut élaborer et mobiliser pour dessiner une autre école publique.