Son public, c’était les participants aux « Assises présidentielles » du FN, organisées pendant deux jours dans la cité rhodanienne autour de sa candidate Marine Le Pen. Cet artiste – à la notoriété plutôt relative – qui apporte aujourd’hui son soutien à la candidate du FN, était auparavant proche des idées de gauche. Il y a cinq ans, il soutenait la candidature de Mélenchon…
Au niveau programmatique, la candidate Marine Le Pen a avancé « 144 propositions » dans son discours d’une heure, dimanche après-midi. Ces 144 points étaient censés avoir été élaborés tout au long week-end pendant plusieurs « tables rondes », mais en réalité, leur contenu avait en partie fuité quelques jours plus tôt. Et surtout, il ne diffère guère du discours de Marine Le Pen... la candidate de 2012.
Des changements en cinq ans ? D’abord, la tonalité. Tentant à tout prix d’apparaître « dédiabolisé », le FN a d’abord communiqué pendant la semaine précédant l’événement de Lyon sur ce que le programme version 2017... ne comporte plus. D’abord le cas de la demande de retour à la peine de mort (sachant que celle-ci n’est plus, aujourd’hui, majoritaire dans l’opinion publique française). Le FN se réserve toutefois une possible marche arrière, puisqu’il se prononce pour des « référendums d’initiative populaire » sur le modèle helvétique, la peine de mort pouvant toujours être réintroduit par ce biais-là.
Derrière la forme, le (vieux) fond
Sur l’immigration, le ton a (très légèrement) baissé : Marine Le Pen propose désormais la délivrance de « 10 000 titres de séjour par an » (contre actuellement 200 000), au lieu du « zéro immigration » auparavant proclamé. Toutefois, le contenu est même devenu un peu plus radical : on y trouve l’inscription de la « priorité nationale » (anciennement « préférence nationale ») dans le Constitution, donc au-dessus des lois ; l’impossibilité de régularisation, sur quelque fondement que ce soit, d’un sans-papiers ; la fin du droit opposable au regroupement familial ; et, bien sûr, la suppression de l’Aide médicale d’État (AME).
En matière sociale, le programme tire un peu moins vers la démagogie sociale qu’en 2012, et comporte plus de mesures libérales. Ainsi le FN souhaite-t-il rendre possible aux riches la transmission à leurs héritiers par voie de don, donc en contournant la fiscalité sur les successions : 100 000 euros tous les cinq ans, au lieu de quinze ans aujourd’hui (et dix ans dans le programme de Fillon...).
Pour les salariéEs, on y trouve du « travailler plus pour gagner plus » dans le style de Sarkozy, avec les heures supplémentaires défiscalisées… Une mesure déjà mise en œuvre par Sarkozy en 2007, supprimée en 2012, et prônée aussi en 2017 par Fillon (ainsi que par Valls dans la campagne de la primaire du PS et de ses alliés).
En 2012, Marine Le Pen avait évoqué une augmentation des bas salaires de 200 euros, une mesure financée en asséchant les caisses de la Sécu en supprimant des cotisations sociales. Aujourd’hui, rien de tel… sauf une « contribution sociale » à hauteur de 3 % sur toutes les importations de biens. Le produit de cette taxe pourrait se transformer en 80 euros de prime salariale.
Bilan, l’étranger, les étrangers, sont toujours celles et ceux qui sont censés payer la sortie de crise en France, sans jamais revenir sur la répartition capital travail… De ce point de vue, rien de bien nouveau.
Bertold du Ryon