Le village est composé de 4000 habitant-e-s et vit principalement de la culture d’olives. Pendant la semaine nous avons accompagné quatre familles pour la récolte de leurs olives près des colonies.
La récolte des olives, une situation exemplaire…
Le 1er novembre 2006, à sept heures du matin nous nous rendons dans les champs de Moiaed avec son ami Saleth et un garçon de la famille. Ses champs sont dans une zone qui comprend un camp militaire, la colonie de Yaqir et un poste avancé d’extension de la colonie. La famille a des oliviers sur la route, considérée comme militaire, et qui rejoint la route de la colonie. Une partie de leurs oliviers est accessible, les forces de l’occupation les ont autorisés à faire la récolte et nous allons les aider pendant deux jours.
Mais ils possèdent également deux champs, de 50 oliviers chacun, situés entre la colonie et le poste avancé. Jusqu’à l’année passée les parents de Moiaed, âgés de plus de 80 ans, ont pu récolter leurs olives, accompagnés par des internationaux. Mais, en 2005, ils ont subi des menaces de la part des forces d’occupation. Le père est décédé ce mois. Son fils n’a plus vu ses champs d’oliviers depuis 4 ans. Il profite de notre présence pour faire un repérage et évaluer la possibilité de faire la cueillette cette semaine avec nous. Durant cette visite, nous avons pu constater que les oliviers étaient en bon état et qu’il serait possible de faire la cueillette. Nous n’avons pas été inquiétés, ni par les colons ni par l’armée. Nous envisageons de faire la récolte un autre jour avec un groupe plus important de Palestinien-ne-s et d’internationaux. Au retour de cette journée, Moiaed nous montre le tracé du futur mur, qui le séparera de l’ensemble de ses 200 oliviers.
Nous constatons que, sur l’autre versant de la vallée, il y a une plantation de nouveaux oliviers. Ils se situent en face de l’avant poste de la colonie. Riseq, le coordinateur de notre mission, nous explique : « La plantation de ces 1000 nouveaux oliviers est une forme d’occupation du sol, de résistance et de réponse à l’implantation des nouvelles colonies ».
Vivre sans salaire depuis plusieurs mois…
Lors de nos journées de cueillette, nous avons discuté avec quelques enseignant-e-s. Ils ne reçoivent plus de salaire depuis plusieurs mois et sont en grève depuis début septembre. Ils-elles nous parlent de leur situation économique très difficile ; ils-elles doivent acheter à crédit pour se nourrir, ils-elles ne peuvent plus payer leurs factures d’électricité et d’eau, encore moins leurs impôts. C’est le cas pour beaucoup d’habitant-e-s du village.
Avec la construction du mur, la situation économique s’est fortement détériorée dans la région. Les grands marchés le long de la « ligne verte » ont disparu. Les Israéliens y vendaient leurs produits de 2e main (meubles, frigos etc) et ils achetaient la production agricole des Palestinien-ne-s. De nombreux Palestiniennes et Palestiniens n’ont plus la possibilité de travailler en Israël, ils sont au chômage. Cette année à Deir Istya 16 habitant-e-s sont partis aux USA, ce qui pose des problèmes sociaux aux familles.
Des formes de résistance…
Dans la situation politique et économique actuelle, la possibilité d’exporter la production d’huile est un enjeu essentiel. Aujourd’hui un agriculteur doit vendre son huile quasiment au prix de revient.
Le soir du 3 novembre, nous participons à l’assemblée d’une coopérative de producteurs d’huile d’olive organisée par l’Union des Fermiers palestiniens. Vingt-cinq producteurs y assistent. La perspective de la récolte est de 2000 tonnes. Le débat porte sur la mise en valeur de 3 sortes d’huiles : l’huile d’olive vierge, l’extra vierge et l’extra vierge biologique. Jean Marie, un expert oléicole français présent, s’exprime ainsi : « Vous avez un produit magnifique. Il est unique, c’est ce qu’on appelle une huile dynamique. Il est nécessaire de se battre pour un juste prix. Depuis 1983 l’évolution positive a été la diminution du temps entre la cueillette et son pressage. Il est important d’améliorer encore trois aspects de la production : le ramassage, le transport dans des cageots (cela représente le 70% de la qualité) et l’aménagement des moulins. »
La plantation de nouveaux oliviers, l’amélioration de la qualité de l’huile sont des formes de résistance à l’étouffement de l’économie palestinienne. Lors de notre première mission en 2002, la confrontation avec les colons et les forces de l’occupation étaient au centre de la cueillette des olives. Cette année la mission a pu se dérouler sans incidents majeurs, mais les tueries à Gaza sont présentes dans l’esprit de tout le monde. Une vie ordinaire n’est jamais possible en Palestine, les colonies, le mur et les attentes aux check points nous le rappellent constamment.
Brigitte – Adriano – Alain
Membres de la 9e Mission
civile suisse pour la protection
du peuple palestinien
novembre 2006