Le conglomérat chinois HNA – profitant de la crise du groupe brésilien Odebrecht SA englué dans de gigantesques affaires de corruption – est en discussion pour acquérir des parts dans l’aéroport Tom Jobim International à Rio de Janeiro. Odebrecht SA possède – avec sa filiale Odebrecht Transport – 51% du capital du second aéroport le plus actif du Brésil ; cela de concert avec le groupe de Singapour Changi Airport, selon une répartition respective de 60% et 40%.
L’opération en direction de Deutsche Bank (DB) a été faite sous la conduite de la société financière C-Quadrat Asset Management (Grande-Bretagne) LLP, Limited Liability Partnership, qui est aux mains de la société financière autrichienne C-Quadrat Investment AG. Dans la situation actuelle, selon The Wall Street Journal du 3 mai 2017, le conglomérat HNA dispose, ainsi, d’une position plus forte dans DB que, respectivement, le fonds de la famille royale du Qatar et de la société transnationale de gestion d’actifs BlackRock. Cette dernière, avec son siège à New York, est le plus important gestionnaire d’actifs au monde, avec plus de 5000 milliards d’euros.
HNA, par la médiation de C-Quadrat Investment AG, n’a pas voulu obtenir une part supérieure à 10%. En effet, au-delà de cette frontière, HNA serait soumis à des contrôles divers des autorités allemandes. Elles pourraient mettre le nez dans les « affaires de HNA ». De plus, indirectement, s’ouvrirait la possibilité pour les autorités états-uniennes d’obtenir un droit « d’inquisition » dans un conglomérat qui ne cesse de grandir. HNA contourne l’obstacle avec l’accord de la direction de la DB. Elle a accepté, dès mars 2017, la présence du créateur et responsable de C-Quadrat, Alexander Schütz, dans l’instance de surveillance des prêts de DB. Une place qui donne une vue sur toutes les décisions stratégiques de la principale banque allemande. Mardi soir, la capitalisation de HNA s’élevait à 3,4 milliards. L’action de DB a relevé la tête, légèrement.
Gao Jian, le directeur exécutif de HNA, souligne que les multiples acquisitions sont faites avec du cash offshore, donc hors du contrôle des autorités chinoises sur les sorties de capitaux. Un avantage difficile à imaginer sans une sorte de bienveillance de la part de « milliardaires rouges » qui ont leur place à la tête du Parti communiste, une place familiale plus d’une fois. Et de même, sans l’appui de la diaspora chinoise de Singapour, dans laquelle Pékin a ses entrées.
Dès mars 2017, HNA envisage ouvertement une prise de participation dans le capital de la HSH Nordbank AG, dont le siège se trouve à Hambourg et à Kiel. Cette banque publique – issue d’une fusion, en 2003, de deux banques alors en danger : la Hamburgische Landesbank et la Landesbank Schleswig-Holstein – est en aujourd’hui difficulté suite à des créances douteuses dans le secteur maritime.
Une « assistance » de HNA conforterait la position chinoise dans le secteur portuaire, une visée importante qui se situe dans la foulée de l’acquisition du port du Pirée (Grèce).
Cet impérialisme de « comptoir » s’inscrit dans un processus complexe, « interne » et « externe », du capitalisme chinois et donc d’une mondialisation dont les contours bougent, ce qui est une évidence.
Charles-André Udry, 3 mai 2017