Tragédie humanitaire
En Syrie, tragédie humanitaire dans la Ghouta orientale
Les bombardements du régime de Bachar Al-Assad et de son allié russe ont tué plus de 250 civils en deux jours.
C’est un message audio lugubre, transmis par l’application WhatsApp, mardi 20 février. Un médecin y raconte les conditions de vie dans la Ghouta, au troisième jour de l’offensive aérienne menée par le pouvoir syrien et son allié russe contre l’enclave rebelle en périphérie de Damas, assiégée depuis cinq ans. « Bombes, missiles sol-sol, barils explosifs : le régime utilise toutes ses armes contre nous, témoigne le docteur qui se fait appeler Abou Ahed. Les gens sont terrés chez eux. Dans tous les quartiers, ça pue le sang. Même les animaux ont disparu des rues. »
Toutes les trente secondes environ, avec la régularité macabre d’un métronome, le fracas d’une explosion, plus ou moins lointaine, vient masquer sa voix. « Vous entendez ? Le scénario d’Alep est en train de se répéter », prédit le médecin en référence à la grande ville du nord de la Syrie, que les opposants avaient dû évacuer, en décembre 2016, après des mois de siège et de bombardements, suivis d’une offensive terrestre éclair. « C’est la même politique de destruction tous azimuts. Bachar [Al-Assad, le président syrien] veut briser notre esprit de résistance. Il veut nous expulser de la Ghouta. »
Les faits ne lui donnent pas tort. Depuis dimanche, au moins 250 civils, dont près de 60 enfants, ont péri sous des tirs d’artillerie et des raids aériens, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). C’est le deuxième pic de bombardements depuis le début du mois, après une première vague, entre le 5 et le 10 février, qui avait fait un nombre similaire de morts. Ce pilonnage est présenté par la presse prorégime comme le prélude à une opération de reconquête de la Ghouta, plaine agricole d’une centaine de km2, peuplée de 400 000 personnes, qui est l’ultime bastion rebelle aux portes de Damas.
Signe de la détermination du camp pro-Assad, l’aviation russe a repris du service dans cette région, dont elle était absente ces derniers mois. La banlieue orientale de Damas était intégrée dans l’accord de « désescalade », conclu en septembre par Moscou avec la Turquie et l’Iran, parrains respectifs des insurgés et du régime syrien. L’arrangement, qui prévoyait une réduction des hostilités et une arrivée d’aide humanitaire dans quatre zones aux mains de l’opposition, est resté peu ou prou lettre morte. Selon l’OSDH, les chasseurs-bombardiers russes ont notamment touché l’hôpital d’Arbin, l’un des plus importants de la Ghouta, désormais « hors service ».
Six autres centres de soins ont été visés par des bombardements, dont la moitié ont dû suspendre leurs opérations, selon un communiqué de l’ONU, publié mardi en début de soirée. Quelques heures plus tard, l’association d’aide médicale Syrian American Medical Society, très investie dans les territoires tenus par la rébellion, rajoutait six sites à cette liste, portant à treize, selon elle, le nombre d’établissements de santé endommagés ou détruits en l’espace de quarante-huit heures.
« Nettoyage ethnique »
Certains d’entre eux ont été touchés par des barils explosifs largués par hélicoptères. Une arme que l’armée syrienne s’abstenait d’utiliser dans la Ghouta ces dernières années, de peur que ses appareils ne soient touchés par des tirs venus du sol, et dont la réapparition signale le regain de confiance des autorités.
« C’est du nettoyage ethnique, accuse Amani Ballour, une pédiatre d’une trentaine d’années jointe par WhatsApp, quelques minutes après qu’une explosion a détruit le hall d’entrée de l’hôpital où elle officie et dont elle préfère taire le nom pour des raisons de sécurité. On s’est réfugié avec tous les blessés dans un couloir. On entend encore les avions dans le ciel. On sait qu’on peut mourir à tout instant. »
Cet acharnement sur les infrastructures civiles est un composant-clé de la stratégie contre-insurrectionnelle poursuivie par les autorités syriennes. Avant que les troupes progouvernementales ne pénètrent dans Alep-Est, place forte de la rébellion dans le Nord syrien, les hôpitaux de ces quartiers avaient été soumis à un déluge de feu similaire à celui qu’endurent aujourd’hui leurs homologues de la Ghouta. Comme à Alep, Moscou impute son intervention à la présence, dans la Ghouta, des djihadistes de Hayat Tahrir Al-Cham, proche d’Al-Qaida. Des combattants certes exclus du protocole de désescalade, mais totalement minoritaires sur le terrain, et dont les rebelles ont demandé le départ.
« Nous avons reçu entre 300 et 400 blessés depuis hier, et il y a de nombreux enfants parmi eux, s’indignait mardi un médecin de Kafr Batna, s’identifiant comme Abou Mohamed. Nous n’avons pas de problème avec le fait que le régime frappe les lignes de front, mais il faut qu’il arrête de bombarder les infrastructures et les civils. Il n’y a pas de combattants parmi les blessés que nous avons reçus. » Une partie des habitants a trouvé refuge dans les sous-sols : des caves, des tunnels de fortune, sans eau, ni électricité ni nourriture.
« Que fait le monde ? »
Dans une vidéo partagée sur un groupe WhatsApp, une femme assise dans un boyau souterrain explique qu’elle y est descendue après que son domicile et celui de ses beaux-parents ont été successivement bombardés. « Il fait très froid, on ne dort pas, on ne mange pas, nos enfants n’ont pas de lait, explique la jeune mère de famille, vêtue d’un voile noir intégral. Frères musulmans, où êtes-vous ? Que fait le monde ? » « On risque d’assister à un deuxième Alep et j’espère que nous avons tiré les leçons » de cet épisode, s’est alarmé en écho à ces suppliques Staffan de Mistura, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie.
Son espoir risque d’être déçu. Le département d’Etat américain s’est borné à se dire « extrêmement préoccupé » et a appelé à un arrêt immédiat des violences. Même positionnement a minima pour Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, qui a fait part de sa « profonde inquiétude ». La Turquie, bien que partenaire de l’accord de désescalade, est restée muette, toute son attention étant concentrée sur l’offensive que mènent ses forces dans le secteur kurde d’Afrin, dans le coin nord-est de la Syrie.
La seule réaction véritablement forte est venue du chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian. Celui-ci a mis en garde devant les députés contre un « cataclysme humanitaire » et a annoncé qu’il se rendrait dans les prochains jours en Russie et en Iran, les deux principaux soutiens du président Assad. Mais sans réengagement américain, la mobilisation de Paris a très peu de chances de déboucher sur des avancées.
Lundi, pressentant que les capitales occidentales n’ont ni les moyens, ni même pour certaines la volonté, de s’opposer aux desseins du camp prorégime, le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a suggéré d’appliquer à la Ghouta « l’expérience de la libération d’Alep ». Incapables de résister à la poussée des forces loyalistes, les rebelles et leurs partisans dans cette ville avaient fini par être évacués par bus, sous la supervision de la Croix-Rouge, en direction d’Idlib, une province plus au sud, sous la coupe des djihadistes de Hayat Tahrir Al-Cham. Dans un rapport publié en mars 2017, l’ONU avait qualifié ce déplacement forcé de « crime de guerre ».
Un raid aérien dans la ville de Hamouria, dans la région de la Ghouta orientale, le 20 février. Le 5 février, l’armée avait déjà déclenché une campagne aérienne de cinq jours d’une intensité inédite sur la Ghouta, faisant environ 250 morts parmi les civils et des centaines de blessés. Elle a, depuis, massé des renforts tout autour de cette ancienne zone agricole qu’elle assiège depuis 2013.
Photo : Un raid aérien dans la ville de Hamouria, dans la région de la Ghouta orientale, le 20 février. Le 5 février, l’armée avait déjà déclenché une campagne aérienne de cinq jours d’une intensité inédite sur la Ghouta, faisant environ 250 morts parmi les civils et des centaines de blessés. Elle a, depuis, massé des renforts tout autour de cette ancienne zone agricole qu’elle assiège depuis 2013.
Au moins 24 civils tués mercredi dans la Ghouta orientale après des raids du régime syrien
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), au moins 24 civils, dont trois enfants, sont morts mercredi 21 février après de nouveaux bombardements du régime syrien contre la Ghouta orientale.
Les frappes se sont concentrées sur la localité de Kfar Batna, où 22 civils sont morts sous les barils d’explosifs largués par les avions du régime, a précisé l’OSDH. Deux autres civils sont morts dans la localité de Jisrine. Aujourd’hui près de 400 000 personnes sont encore prises au piège dans cette zone.
La population y résidant encore subit des privations de nourriture et de médicaments ; le prix des denrées y flambe. Cette situation touche, en particulier, les enfants, qui composent, selon l’Unicef, la moitié de la population de la zone. La situation est telle que l’ambassadeur français auprès de l’ONU, François Delattre, parlait début février d’un siège « digne du Moyen Age ».
Benjamin Barthe (Beyrouth, correspondant, avec Laure Stéphan)
* LE MONDE | 21.02.2018 à 11h25 • Mis à jour le 21.02.2018 à 19h43 :
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2018/02/21/en-syrie-tragedie-humanitaire-dans-la-ghouta-orientale_5260263_3218.html
Dans la Ghouta orientale, chronologie d’un désastre humanitaire
Ce fief rebelle depuis le début de la révolution syrienne est devenu une cible permanente du régime et de ses alliés.
La Ghouta orientale. Ce toponyme revient régulièrement dans l’actualité, avec son lot de morts et de catastrophes humanitaires. Ancien « poumon vert » de Damas, situé à l’est de la capitale de la Syrie, la Ghouta orientale est un fief rebelle qui fait, depuis 2013, l’objet d’un siège et de bombardements quasi quotidiens.
Aujourd’hui près de 400 000 personnes sont encore prises au piège dans cette zone. Au moins 250 personnes ont trouvé la mort depuis dimanche dans les bombardements commandités par le régime de Damas, selon les chiffres donnés par l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), mardi 20 février.
La population y résidant encore subit des privations de nourriture et de médicaments, le prix des denrées y flambe. Cette situation touche, en particulier, les enfants, qui composent, selon l’Unicef, la moitié de la population de la zone. La situation est telle que l’ambassadeur français auprès de l’ONU, François Delattre, parlait début février d’un siège « digne du Moyen Age ».
Retour sur sept ans de guerre et de siège.
Mars 2011 : la guerre éclate
Quelque temps après la répression dans le sang de manifestations pour la démocratie par le régime de Bachar Al-Assad, la guerre éclate en Syrie. Nous sommes en mars 2011, et une partie des opposants au président passe à la lutte armée, certains constituant l’Armée syrienne libre (ASL).
Juillet 2012 : la bataille de Damas
En juillet 2012, l’ASL lance, de la Ghouta orientale, la bataille de Damas. Cet ancien « poumon vert », qui offrait la plus grande étendue de vergers et de cultures près de la ville et où les habitants venaient pique-niquer le week-end, est alors régulièrement visé par des bombardements aériens et tirs d’artillerie du gouvernement, qui touchent marchés, écoles et hôpitaux et font de nombreuses victimes civiles.
2013 : attaques chimiques
Le régime, qui garde le contrôle de Damas, assiège totalement la zone et ses habitants à partir de 2013. Le conflit prend un nouveau tournant dans la zone avec des attaques chimiques dans les alentours de Damas ; en mai, les journalistes du Monde sur place sont les premiers à être témoins d’attaques chimiques lancées à l’entrée de la capitale syrienne durant plusieurs jours.
Mais c’est surtout lors d’un massacre durant la nuit du 21 août que ces armes sont utilisées massivement. En septembre 2013, les premières conclusions du rapport des experts onusiens ayant enquêté sur place ont commencé à être rendues publiques : il est question de « preuves flagrantes et convaincantes » de l’utilisation de gaz sarin lors du 21 août et de l’utilisation d’armes chimiques « sur une échelle relativement grande » au cours du conflit syrien.
2015 : pénurie de nourriture et de médicaments
Le siège de la zone rebelle se poursuit et des raids aériens réguliers font de nombreuses victimes parmi les civils. En février 2015, nous écrivions :
« La Ghouta orientale, principale région rebelle dans la province de Damas, subit depuis plus d’un an un siège impitoyable de l’armée. Dans ce secteur situé à l’est de Damas, des dizaines de milliers de civils sont affectées par les pénuries de nourriture et de médicaments. »
2016 : l’ONU condamne la « tactique cruelle » du siège
En novembre 2016, le chef des opérations humanitaires de l’ONU déplore l’utilisation de la « tactique cruelle » du siège, « en particulier par le gouvernement syrien », qui y a recours pour forcer les rebelles à déposer les armes et les civils à se soumettre ou à fuir.
2017 : une « zone de désescalade » bombardée quotidiennement
Depuis l’été 2017, la région est censée être une des « zones de désescalade » créées en vertu d’un accord entre la Russie, l’Iran — principaux soutiens du régime — et la Turquie, qui appuie l’opposition. Ces zones devaient, en principe, aboutir à une diminution des combats.
Mais les bombardements restent quasi quotidiens. Des immeubles sont éventrés, des rues entières rendues inhabitables et les habitants vivent dans l’angoisse permanente. En représailles, les rebelles tirent régulièrement des obus sur Damas.
En 2017, l’ONU a condamné la « privation de nourriture délibérée de civils » comme une tactique de guerre à la suite de la publication de photos « choquantes » d’enfants squelettiques dans la Ghouta orientale. Et l’Unicef a dénoncé la pire crise de malnutrition depuis le début de la guerre, en 2011, avec 11,9 % des enfants de moins de 5 ans souffrant de sévère malnutrition, contre 2,1 % en janvier.
5 février 2018 : une offensive aérienne sans précédent
Le 5 février 2018, le régime lance une offensive aérienne d’une intensité inédite sur la Ghouta orientale, faisant environ 250 morts parmi les civils et des centaines de blessés, en cinq jours. Ces derniers jours, l’armée a envoyé des renforts aux limites de la Ghouta orientale. « L’offensive [terrestre] attend juste le feu vert », selon l’OSDH.
Le régime de Damas est soupçonné de mener des attaques chimiques depuis plusieurs semaines. Le 22 janvier, l’OSDH a rapporté 21 cas de suffocation dans le quartier de Douma, des habitants et des sources médicales évoquant une attaque au chlore. Le 13 janvier, une attaque similaire avait visé la périphérie de Douma, selon l’OSDH, qui rapportait « sept cas de suffocation ». Le 5 février, l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley, a fait savoir qu’il y avait des « preuves évidentes » qui confirmaient le recours à du chlore dans les attaques menées dans la Ghouta orientale.
Mardi 20 février, l’ONU a annoncé que six hôpitaux de la Ghouta orientale avaient été bombardés en quarante-huit heures, laissant trois de ces structures hors service et deux partiellement opérationnelles. L’OSDH impute ces frappes à l’aviation russe.
Le Monde.fr avec AFP
* Le Monde.fr | 20.02.2018 à 21h16 • Mis à jour le 21.02.2018 à 19h43 :
http://www.lemonde.fr/syrie/article/2018/02/20/syrie-dans-la-ghouta-orientale-chronologie-d-un-desastre-humanitaire_5259965_1618247.html
Ce qu’il faut retenir de la situation dans la Ghouta orientale, en Syrie
L’enclave rebelle, proche de Damas, est assiégée depuis 2013 par le régime. Depuis dimanche, près de 320 personnes y sont mortes dans des bombardements.
Depuis dimanche 18 février, la Ghouta orientale, dans la banlieue de Damas, la capitale de la Syrie, fait l’objet d’une importante offensive aérienne menée par le pouvoir syrien et son allié russe.
Mercredi 21 février, l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) estimait à près de 320 le nombre de personnes tuées dans les bombardements depuis dimanche.
Le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, a réclamé l’arrêt des combats, et la Russie a demandé la tenue, jeudi, d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU.
Le contexte
Bastion rebelle depuis le début de la révolution syrienne, ancien « poumon vert » de la capitale, Damas, la Ghouta est assiégée depuis 2013 par le régime. Plus de 400 000 personnes y résident toujours, dont de nombreux enfants.
Les bombardements des derniers jours sont les prémices d’une vaste opération terrestre de l’armée syrienne pour déloger les rebelles de la zone.
Depuis le début du conflit, des bombardements quotidiens ciblent cette enclave, d’où partent régulièrement des obus des rebelles visant Damas.
La situation humanitaire y est devenue dramatique. Les denrées et les médicaments manquent. L’ambassadeur de France auprès de l’ONU, François Delattre, évoque un « siège digne du Moyen Age ».
L’ONU a annoncé, mardi soir, que six hôpitaux de la Ghouta avaient été touchés par des frappes en quarante-huit heures. Trois d’entre eux sont hors service, deux fonctionnaient encore partiellement.
La carte
January 30, 2012—Thousands of Syrian troops backed by tanks and armoured vehicles have retaken areas of Damascus held by anti-government forces in some of the fiercest fighting reported during the 10-month uprising. Graphic shows suburbs where clashes between government and rebel forces have taken place in Damascus. « Le Monde »
La citation
« J’appelle toutes les parties impliquées à un arrêt immédiat de toute action de guerre dans la Ghouta orientale afin d’apporter une aide humanitaire à ceux qui en ont besoin. »
C’est la déclaration qu’a faite, mercredi, Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, selon qui, la Ghouta orientale est devenue « l’enfer sur terre ».
D’après des diplomates, la plus haute instance de l’ONU est appelée à voter dans les jours à venir un projet de résolution imposant un cessez-le-feu d’un mois en Syrie.
L’image
Un membre des casques blancs syriens aide à évacuer des civils après le bombardement d’un immeuble dans le quartier de Saqba dans la Ghouta orientale, le 20 février.
La paralysie de la communauté internationale
Face à la catastrophe humanitaire qui se déroule sous ses yeux, la communauté internationale peine, comme depuis le début du conflit syrien, à adopter une position commune contre les massacres.
Si plusieurs organismes des Nations unies condamnent cette sanglante campagne, ils n’ont pas de réel pouvoir politique. Les grandes puissances sont, elles, paralysées par leurs divisions et laissent le champ libre au régime de Bachar Al-Assad.
A défaut, le président de la République français, Emmanuel Macron, a par exemple demandé « une trêve afin de s’assurer de l’évacuation nécessaire des civils, du maintien ou plutôt de la création de tous les accès humanitaires indispensables dans les meilleurs délais ».
« Ce qui se passe dans la Ghouta orientale aujourd’hui est clairement, vigoureusement condamné par la France, a dit le chef de l’Etat. Car au prétexte de la lutte contre les terroristes djihadistes, le régime avec quelques-uns de ses alliés a décidé de s’en prendre à des populations civiles et vraisemblablement à certains de ses opposants. »
Le ministre des affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, s’est entretenu mercredi avec le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, pour lui demander d’obtenir « une cessation immédiate des hostilités », « l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité » permettant de décréter « une trêve humanitaire de trente jours », « un mécanisme de surveillance robuste » et « la reprise du processus politique dans le cadre des Nations unies », selon un communiqué de ses services publié mercredi soir. M. Le Drian se rendra le 27 février à Moscou pour évoquer la situation en Syrie avec son homologue russe, Serguei Lavrov, précise le communiqué.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a réclamé, mercredi, l’accès à la Ghouta. « Nos équipes doivent être autorisées à se rendre dans la Ghouta orientale pour porter secours aux blessés », a dit Marianne Gasser, représentante du CICR en Syrie.
La comparaison avec Srebrenica
Staffan de Mistura, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, avait plus tôt fait un parallèle avec les bombardements massifs que connurent les habitants d’Alep, dans le nord-ouest de la Syrie, à la fin de l’année 2016.
La paralysie de la communauté internationale fait réagir la presse internationale. Plusieurs médias comparent la situation à celle que connut la Bosnie-Herzégovine durant la guerre de 1992-1995. Le quotidien britannique The Guardian parle, par exemple, d’un « autre Srebrenica ». La chaîne américaine de télévision CNN estime qu’il s’agit d’un « tournant, comparable à d’autres moments critiques pour les droits humains ces vingt-cinq dernières années ».
LE MONDE
* LE MONDE | 21.02.2018 à 19h39 • Mis à jour le 22.02.2018 à 12h14 :
http://www.lemonde.fr/syrie/article/2018/02/21/ce-qu-il-faut-retenir-de-la-situation-dans-la-ghouta-orientale-en-syrie_5260531_1618247.html