1.- Les changements, comme cela a toujours été le cas, dépendent des rapports de forces en jeu, à chaque moment. La solution de sortie du gouvernement Ortega-Murillo ne doit pas exclure la flexibilité tactique.
2.- A partir d’avril 2018, l’aggravation de la crise sociopolitique a contraint le grand capital à faire un pas en arrière par rapport à l’évidence de la répression et à la détérioration des relations du régime avec les Etats-Unis. Car ses intérêts économiques pourraient s’effondrer et, conjointement, ses intérêts stratégiques. Les circonstances et la crainte de ce qui pourrait se produire l’ont contraint à une modification, au moins partielle, de ses plans de co-gouvernement avec Ortega-Murillo
3.- Avant avril 2018, les membres de la classe dirigeante n’ont jamais eu l’intention de soutenir un véritable processus démocratique. Par exemple, ils se sont tus et ont avalisé le gouvernement Ortega-Murillo, après les élections de novembre 2016, lorsque Ortega a supprimé tous les reliquats démocratiques, lorsqu’il a annulé le statut juridique des partis d’opposition et a réprimé tout mouvement social, etc.
4.- Le mouvement d’avril 2018 est le résultat d’une multitude d’actions au sein de la société nicaraguayenne : 95 marches liées à la résistance paysanne face à la concession du canal transocéanique ; le mouvement en 2013 contre la concession minière de Rancho Grande (Matagalpa, mine d’or) ; la lutte des mineurs de la mine d’or d’El Limón (département de Léon) ; la mobilisation des femmes d’Ocotal (département de Nueva Segovia) pour la reconnaissance de leur contribution à l’économie ; les grèves des travailleurs et travailleuses des zones franches ; les batailles des écologistes pour la durabilité écologique (la forêt tropicale de Bosawas et la réserve biologique d’Indio Maíz) ; les luttes des étudiants en soutien aux personnes âgées lors de la contre-réforme de la sécurité sociale ; les mobilisations des femmes contre la violence sexiste, etc.
5.- Le mouvement social d’avril 2018 a montré qu’en dépit des politiques imposées par la logique de contrôle et de répression, la société était en mouvement et capable de s’exprimer sous diverses formes dans les circonstances les plus défavorables. C’est cette société qui a rendu possible ce mouvement sociopolitique pour un espace démocratique.
6.- L’objectif initial du mouvement d’avril est de redonner un caractère de gouvernement à une instance qui en avait perdu les traits démocratiques, y compris formels. Au cours des onze dernières années (2007-2018), l’Etat a été transformé en un enclos auquel a un accès, presque exclusif, une strate fortement parasitaire, une « classe » politique corrompue prête à conserver le pouvoir à tout prix.
7.- L’erreur en politique consiste souvent à croire que la gouvernabilité d’un Etat émane de la répression de la classe dominante et non de la construction d’un consensus (une sorte d’interdépendance) de la société. C’est pourquoi Daniel Ortega et Rosario Murillo ne peuvent pas saisir qu’ils n’ont pas compris l’origine de cette crise sociopolitique.
8.- Etant donné ce manque de compréhension (avec ses racines matérielles), le gouvernement Ortega-Murillo se doit d’accuser les Etats-Unis d’être les instigateurs de la crise sociopolitique à laquelle le Nicaragua s’affronte. Dès lors, ils décident de recourir à la répression comme le moyen de la résoudre. L’intransigeance d’Ortega a conduit le pays à une aggravation de la crise. Pendant ce temps, l’armée de fourmis résiste toujours.
9.- L’alliance d’Ortega-Murillo avec le grand capital a dénaturé la démocratie naissante et a facilité la concentration de la richesse dans quelques mains, établissant une distribution inversée de la richesse. Ce schéma de pouvoir ne tenait pas compte du fait que ledit marché ne résout pas les inégalités sociales, mais les exacerbe.
10.- Le gouvernement Ortega-Murillo a oublié que la meilleure politique sociale est une politique économique visant un développement et une égalité optimale. La politique sociale doit viser à protéger les plus faibles. Le gouvernement et les grandes entreprises ont « oublié » qu’il était indispensable pour un système politico-économique marqué par l’inégalité et la concurrence d’assurer un minimum de gouvernance démocratique et de jeu politique.
11.- Si l’emploi et le salaire minimum vital, digne, ne faisaient pas partie d’une stratégie de développement à long terme, il n’y avait pas de politique sociale qui puisse persister et résister, à la longue, à la pression de ceux « d’en bas » qui sont convaincus de la nécessité d’échapper à la pauvreté. De même, à moyen et long terme, la stabilité sociale ou politique n’était pas possible sans la construction et la mise en œuvre d’une politique économique distributive.
12.- Les salaires ont été sévèrement attaqués par la financiarisation de l’économie, en contrepartie de l’obtention d’énormes profits pour les activités financières, rentières et spéculatives. En même temps, l’investissement privé privilégie les activités improductives. Et les dépenses publiques privilégient les investissements exigés par la mondialisation : routes, télécommunications, ports, sans mentionner les projets extractivistes, etc.
13.- Le gouvernement Ortega-Murillo a maintenu sous contraintes les investissements sociaux dans les secteurs de la santé et de l’éducation, les maintenant aux mêmes niveaux d’investissement que ceux des gouvernements néolibéraux précédents [Aléman puis Bolanos 1997-2007]. Le gouvernement Ortega-Murillo a permis aux différentes factions de la classe dirigeante de se réorganiser dans la répartition des « excédents » économiques. En d’autres termes, a été mis en marche un blanchiment des secteurs les plus rétrogrades de l’Etat néolibéral.
14.– Les phénomènes sociaux se produisent si les conditions objectives et subjectives sont présentes à un moment donné. Le gouvernement Ortega-Murillo, depuis des années, est entré dans un processus de dégradation socioculturelle qui entraîne toute la société dans la débâcle et la non-viabilité du modèle politique autoritaire, sans avoir la capacité de trouver une issue. Dès lors, le modèle mis en œuvre est entré en crise, sans que le gouvernement puisse échafauder une solution dans un cadre d’immobilisme politique.
15.- La corruption gouvernementale a été un symptôme visible de la dégradation de la « nouvelle classe » au pouvoir. Avec l’apparition de l’argent vénézuélien, sans aucun contrôle, étaient réunies les conditions objectives pour le vol et le pillage au détriment du peuple et au bénéfice substantiel de la classe dirigeante. L’argent vénézuélien était le pétrole de la corruption qui a permis une certaine stabilité du gouvernement ces dernières années.
16.- Depuis onze ans, différents scandales ont été dévoilés sur les trafics d’influence, les relations putrides avec les hommes d’affaires, etc. Le peuple a ressenti la dégénérescence croissante des fonctionnaires gouvernementaux et de leurs associés en tant que victime de vols, d’abus de ses droits, de chantages, de violences et de mépris quotidiens.
17.- Avec l’épuisement de l’argent vénézuélien, la politique sociale quelque peu adoucie temporairement a cessé d’être efficace pour faire accepter un régime autoritaire. Pour rappel, l’argent vénézuélien a servi à promouvoir un ensemble de programmes sociaux visant principalement à se garantir une clientèle sociale. Toutefois, cela était inefficace pour réduire la pauvreté qui ne pourrait l’être que fondée sur stratégie de développement social.
18.– Le gouvernement Ortega-Murillo s’approche rapidement d’une insolvabilité politique. Ses faiblesses dépassent sa capacité à défendre son édifice. Le gouvernement est en échec. L’aggravation de la crise et l’isolement international ne sont pas dans l’intérêt de la « nouvelle classe » [coalisée] pour son maintien au pouvoir, car le gouvernement a perdu la confiance des investisseurs internationaux, de ses partenaires du secteur entrepreneurial privé, local et/ou régional.
19.- La relation d’Ortega-Murillo avec le gouvernement des Etats-Unis est à son point le plus bas au cours des onze dernières années. D. Ortega et R. Murillo seront-ils capables d’atteindre une nouvelle « détente » avec les Etats-Unis et seront-ils aptes à réduire les contradictions stratégiques avec l’establishment politique américain et avec les « classes » (les establishments) politiques du Nicaragua et de l’Amérique centrale ?
20.- Les conseillers du gouvernement pensent qu’en faisant des réformes, ils peuvent résoudre la crise. Ce sont eux qui promeuvent la stratégie d’atterrissage en douceur, qui consiste à isoler et/ou frapper les éléments « radicaux » qui proposent le départ immédiat d’Ortega.
21.– Les éléments favorables de la sortie « en douceur » proposent des réformes électorales et pensent que des élections anticipées en 2019 [et non en 2021] constituent une voie vers une « modération » et une option « sage » afin d’éviter le chaos et le vide du pouvoir.
22.- Cependant, alors que l’Alliance Civique pour la Justice et la Démocratie (ACJD) propose un dialogue pour trouver une issue à la crise, Ortega ne parle que de guerre. En raison de la gravité de la situation, Ortega est invité depuis l’extérieur à négocier avec l’Alliance.
23.- Les forces qui poussent à prendre leur distance avec gouvernement Ortega-Murillo sont en majorité celles qui pensent qu’il pourrait découler de cet accouplement des effets négatifs dans leurs rapports avec la « communauté latino-américaine » ; quand bien même, dans un passé récent, elles lui étaient associées. Or, Ortega a besoin de la communauté internationale pour stabiliser le pays, il doit éviter l’isolement (économique, financier, politique, etc.).
24.- Cependant, Ortega n’a aucune influence pour contrer les pressions états-uniennes sur l’Organisation des Etats américains (OEA) et d’autres organismes internationaux. Le danger pour Ortega est que les Etats-Unis ont mis à l’ordre du jour de l’OEA, depuis juin 2018, la question du Nicaragua. Les Etats-Unis ont besoin de stabilité dans la région de l’Amérique centrale pour contrôler les migrations et le trafic de drogue.
25.- Les Etats-Unis ont déclaré que le gouvernement Ortega-Murillo « est en dernière instance responsable des groupes paramilitaires pro-gouvernementaux qui ont brutalisé son peuple ».
26.- Avec la répression, Ortega croyait avoir réussi. Cependant, avec sa stratégie répressive, il a liquidé le système politique de type corporatif (grand capital et clan Ortega-Murillo) existant, il a provoqué une aversion publique, un rejet total de l’autoritarisme. Et débâcle historique pour Ortega-Murillo, cette politique a forcé les grandes entreprises à se différencier du boucher d’El Carmen [le quartier de Managua, transformé en bunker, où réside le gouvernement].
27.– Dans cette phase, dominée par l’isolement d’Ortega-Murillo, la tendance générale est marquée par l’augmentation d’une répression généralisée, la hausse du chômage et la haine de la majorité de la population pour la nouvelle classe [« orteguiste »] et ses paramilitaires
28.- Il existe également des différences entre les fractions des dominants, mais elles sont certes de l’ordre du politique et de l’économique. Toutefois, ces secteurs dominants sont placés, de facto, sous la férule du capital financier et partagent des objectifs communs. Les divisions sont aussi liées à leur histoire et à leur culture.
29.– Compte tenu de la lassitude généralisée ainsi que de l’échec du modèle Ortega-grand capital qui a provoqué un appauvrissement de la population et qui a débouché sur cette nouvelle dictature, nous devons nous rappeler qu’il y a 40 ans, la population nicaraguayenne s’est levée en armes contre la dictature Somoza. Ce que nous avons vu depuis le 18 avril 2018 est un véritable soulèvement social et pacifique contre la nouvelle dictature Ortega-Murillo.
30.- Certains n’ont pas accepté que Ortega-Murillo représente la tentative de créer une nouvelle dynastie, ces gens n’ont pas perdu de vue la régression démocratique des onze dernières années (2007-2018) et n’ont pas accepté que s’instaure une situation similaire à celle de la dictature/dynastie Somoza.
31.- En Amérique latine et en Europe, beaucoup pensent qu’Ortega est un révolutionnaire qui pense et agit dans la foulée du processus révolutionnaire des années 1980. Aussi ceux qui, ayant une formation dogmatique dont ils n’ont pas pu se débarrasser, ont tendance à simplifier les choses : ils pensent que l’Ortega actuel est le même que l’Ortega passé. Ces « dogmatiques » – pour ne pas utiliser un autre terme – ne prennent pas en compte, avec un sérieux analytique, la nouvelle réalité sociopolitique et économique. [Au même titre ont été effacées de la mémoire les lois 85 à 87 adoptées entre le 29 mars et le 2 avril 1990 qui ont validé des appropriations de biens immobiliers par des membres des « sommets sandinistes ». Opération connue sous le nom de La Piñata, une sorte de paniers de friandises. Réd. A l’Encontre.]
32.- Ortega et le cercle intime du pouvoir ont incorporé une série d’éléments formels, ornementaux, analogues à ceux des années 1980. Et beaucoup de militants pensaient qu’une politique similaire serait mise en œuvre, tout en évitant des erreurs du passé révolutionnaire.
33.- Ortega-Murillo espérait continuer à utiliser ces éléments formels pour engourdir tous les secteurs de la société et construire la nouvelle dynastie. Mais cela a eu l’effet inverse : les « honnêtes gens » du Sandinisme historique et les secteurs sociaux émergents (étudiants et nouvelles franges paysannes) ont préféré se battre pour un Nicaragua démocratique.
34.- Si les négociations entre les différents secteurs bourgeois ne parviennent pas à un accord pour résoudre le conflit sociopolitique actuel, reste en dernier recours le seul organe militaire uni : l’armée.
35.- Aujourd’hui, après quatre mois de crise, un vaste secteur de capitalistes créoles [du pays par rapport à étranger] craint la récession et la répression aveugle. D’importantes sections de la classe dirigeante se distancient déjà ouvertement du gouvernement et ne croient pas que la solution est la ligne dure et la répression mise en œuvre jusqu’à présent. D’autres secteurs sociaux également s’expriment contre le régime.
36.- En outre, le sentiment s’accroît selon lequel le départ d’Ortega-Murillo est la seule option pour résoudre la crise actuelle. Les conditions nécessaires pour un coup d’Etat militaire s’accumulent donc, car les différentes factions ne peuvent pas conclure un pacte. Au contraire, elles commencent à craindre le danger d’un débordement du mouvement social. La seule chose qui freine cette option est la dépendance du haut commandement militaire à l’égard d’Ortega.
37.- Une autre option possible pour les différentes fractions des capitalistes réside dans la cooptation des forces populaires (paysans, étudiants et la population en général) en faveur une solution bourgeoise à la crise actuelle conforme à leur idéologie, à leur programme et à la composition des principaux cadres potentiels d’un prochain gouvernement.
38.- Bien que je ne dispose d’aucune preuve à l’appui de cette déduction politique, je pense que des secteurs du Département d’Etat américain et du Pentagone sont peut-être en train d’évaluer cette possibilité d’un « coup militaire » – qui impliquerait une certaine collusion (ou « intelligence ») entre avec des institutions militaires de la région – afin d’éviter que la situation ne devienne incontrôlable avec des répercussions négatives pour l’ensemble de la région de l’Amérique centrale.
39.- La division présente entre les différentes fractions du grand capital aide Ortega à gagner du temps. Néanmoins la demande généralisée de justice et de démocratie nuit également aux intérêts du grand capital si la crise se prolonge pendant de nombreux mois, car la conjoncture économique ira se dégradant.
40.- Le gouvernement Ortega-Murillo n’a aucune possibilité de liquider-détruire le mouvement social sans une répression plus ample ; il ne peut pas non plus reconstruire son alliance avec le grand capital comme si rien ne s’était passé. Dans ces conditions, l’alternative d’une forme de coup d’Etat militaire apparaît comme un moindre mal pour freiner les mobilisations sociales au niveau national.
41.- Le but d’un tel coup d’Etat militaire serait d’arrêter les mobilisations et d’éviter un accord pourri entre Ortega et les partis politiques [de facto, très peu représentatifs].
42.- Le pays a besoin d’un véritable changement, et non d’un « gattopardisme » superficiel [que « tout change pour que rien ne change », selon la formule de Lampedusa]. Il est nécessaire de transformer la société en profondeur, c’est une nécessité incontournable. C’est pourquoi il est nécessaire de ne pas rester dans des exercices de simulation ou de retarder des changements de fond, pas seulement épidermiques. Les idées, les méthodes et les procédures doivent être revues.
43.- Le diagnostic est clair : pendant de nombreuses années, les différents secteurs de la société ont été marginalisés, du début à la fin, dans la mise en œuvre des décisions politiques. Il n’est pas possible de rester dans le diagnostic brut, il faut passer à des actions concrètes pour modifier le chemin et reprendre la voie du succès.
44.– Le défi du mouvement du 19 avril, dans ses différentes expressions locales, doit s’engager sur la voie d’un changement avec un programme ambitieux qui ne rejette pas les questions en suspens mais qui mette l’accent sur la modernisation. De l’autosuffisance alimentaire (un thème revendiqué) jusqu’à un engagement ferme, pour l’avenir, avec comme quatre piliers stratégiques : l’éducation-santé, la formation scientifique, la diffusion technologique adéquate et l’innovation.
45.- Un pays hétérogène comme le Nicaragua a besoin d’un parti représentatif de sa pluralité. La démocratie exige un gouvernement ayant la capacité de résoudre, mais aussi des freins et contrepoids institutionnels. Les changements sont imminents et la société nicaraguayenne s’attend à ce qu’ils soient pour le mieux. (Managua 12 août 2018 ; traduction et édition A l’Encontre)
Par notre correspondant à Managua
Post-scriptum
• La communauté internationale, la Conférence épiscopale (CEN) et l’Alliance font pression pour une solution pacifique et proposent des élections anticipées. Ortega n’acceptera pas.
• Ortega n’a pris aucune mesure pour résoudre la crise. Elle se poursuit selon la logique de la répression, des persécutions et d’emprisonnement des opposants. Les mesures économiques prises par le gouvernement conduisent à une augmentation de la crise économique, du chômage, de la pauvreté et de la migration et de l’exil. Ortega a annoncé des coupes dans le budget, sauf pour la police et l’armée.
• Malgré la répression, les morts et les blessés lors du week-end dernier (11 au 12 août), les mobilisations se poursuivent. Pour demain, mercredi 15 août, il y aura des mobilisations dans 15 villes différentes.
14 août 2018
• Publié par Alencontre le 15 août 2018 :
http://alencontre.org/ameriques/amelat/nicaragua/nicaragua-mise-en-perspective-et-conjoncture.html
Trois lectures sur l’effondrement d’Ortega et du FSLN
Comme dans d’autres situations dans notre Amérique meurtrie, ce qui se passe au Nicaragua a ouvert un débat qui a été vécu de façon dramatique par ceux qui en souffrent directement. Il est surprenant que de nombreux analystes mentionnent rarement ce que les gens vivent concrètement. Les trois lectures qui circulent sont classiques, dans certains cas elles s’accordent sur des arguments énoncés et dans d’autres cas elles diffèrent par les éléments cités en tant qu’information, certains de ces matériaux étant manipulés avec une malhonnêteté intellectuelle non dissimulée.
Première lecture. Il s’agit d’une conspiration de l’aile droite, de la CIA et de l’impérialisme, d’une tentative, sous diverses formes, de coup d’Etat. Deuxième lecture : il s’agit d’erreurs d’un gouvernement de gauche, d’une situation mal gérée, avec une issue à gauche et/ou révolutionnaire. Troisième lecture : un pacte entre les élites traditionnelles et la caste sandiniste fonctionnelle à la dérive d’un régime autoritaire et corrompu. Une nouvelle version d’autres expériences politiques au Nicaragua, d’une crise terminale et d’une démocratisation nécessaire.
Les lectures un et deux empruntent des idées similaires. Cependant, plusieurs hypothèses doivent être faites à cet effet. La première est qu’il existe effectivement un gouvernement de gauche avec un projet social et qu’il respecte les principes de base liés à la participation des secteurs populaires, à l’augmentation des droits et à une pratique d’intégrité ou d’éthique publique qui le différencie des régimes de droite décriés. Dans le cas du Nicaragua, cela n’existe pas. La seconde est qu’il s’agit d’« erreurs » d’un gouvernement de gauche et non d’un régime qui promeut un modèle autoritaire et corrompu.
Pour ce qui a trait à la conspiration de la droite, de la CIA, etc. Il n’est pas exclu que cela puisse se produire. Mais il est clair que ce n’est pas la CIA qui a poussé Daniel Ortega : à créer un régime familial clientéliste ; à voler les élections ; à usurper les institutions ; à coopter la police comme force de répression pour le gouvernement ; à privatiser la coopération vénézuélienne et à la transférer vers la dette publique lorsque les affaires exploitées à titre privé ont pris fin ; à en garder les profits et à devenir un groupe économique familial.
Une autre lecture est que la protestation sociale au Nicaragua est liée au Honduras et à la chute de Manuel Zelaya [en 2009], à la crise au Venezuela, à la chute de Fernando Lugo [en 2012] au Paraguay, à la situation au Brésil dans le cadre d’une stratégie commune de restauration de la droite et de l’impérialisme.
Cette fusion simplificatrice révèle une construction a priori et non une analyse. Le fait qu’il y ait des pressions extérieures, des relations explicites entre la droite et la géopolitique états-unienne n’est un secret pour personne. Mais si l’on suppose qu’il s’agit d’un déterminisme absolu, il vaut mieux ne pas faire de la politique et cela nulle part.
La troisième interprétation soutient que le pacte inter-élite s’est effondré et que sa représentation politique, le régime Ortega, accumulait le mécontentement, en particulier dans les campagnes et dans les secteurs urbains et de la jeunesse. Sa dérive oppressive s’exprimait de la sorte : toute manifestation était réprimée ; des meurtres de paysans [qui manifestaient, entre autres, contre le canal transocéanique] ; des bureaucrates éternels dans toutes les positions ; l’accumulation et l’ostentation de la richesse personnelle, etc. Tout cela était ressenti par la population d’un des pays les plus pauvres d’Amérique latine. Le conflit autour de la concession mafieuse pour le canal transocéanique, la répression des étudiants, le déni des droits, plus que la réforme de la sécurité sociale qui a été tentée, ont mis feu à la mèche.
Si vous examinez les grandes questions qui ont marqué l’évolution du pays au cours des 20 dernières années, vous pouvez voir que le parti sandiniste a opéré des zigzags permanents. Entre ce qui était proclamé et ce qui était fait, la distance augmentait. Dans la phase des réformes économiques, cataloguées comme néolibérales dans le discours, sous trois gouvernements conservateurs, le parti sandiniste (FSLN) non seulement les a partagées, mais s’y est aussi inséré afin d’en retirer des bénéfices sans prendre en compte des considérations programmatiques [proclamées] ou des revendications sociales. Lorsqu’il a prétendu s’engager en faveur de la démocratie et de la gouvernance au profit du pays, il a conclu un accord secret, maintenant public, avec la fraction la plus corrompue de l’aile droite avec laquelle il partageait des pratiques relevant de prébendes et des durs conflits en matière de distribution de la richesse. En retour, il a pu modifier la loi électorale pour être élu avec 35% au premier tour, si un écart de 5% existait par rapport au second parti. Lorsqu’il a parlé de réconciliation et de démocratie à son retour au gouvernement [en 2007], le parti a mis en place un système discrétionnaire autoritaire qui mélange rhétorique et pouvoir rude.
Chacun de ces zigzags lui a coûté des ruptures et des divisions, mais dans l’intérêt d’une structure de pouvoir en développement qui, à chaque occasion, a fait un pas de plus vers sa consolidation. Il est évident que la structure de pouvoir existait déjà. Mais le groupe « danielista » [référence à Daniel Ortega] était un parmi d’autres bien qu’avec plus de visibilité. La nouveauté résidait dans le fait que ce groupe a été plus personnalisé, plus privatisé et a acquis plus de bases économique et familiale [Daniel Ortega-Rosario Murillo].
La démocratisation des années 1990, post-révolution, et les différences politiques et économiques qu’elle a engendrées dans la structure du Front sandiniste ont conduit à la formation de nouveaux groupes d’intérêts.
Ces groupes sont nés dans les structures militaires, parmi les entrepreneurs, l’appareil syndical et les députés. Ils formaient un conglomérat interne impossible à délimiter. Ces secteurs renvoyaient à une histoire analogue et à un militantisme commun qui les rendaient légitimes, mais pas égaux. Ce fut une occasion manquée pour un renouveau politique et la création d’un régime de partis démocratiques. La peur d’un étalage public [des arrangements au sommet], de perdre des positions gagnées ou à gagner, et l’absence d’une proposition globale et démocratique de renouveau programmatique au profit non seulement du parti (FSLN), mais aussi du pays, ont enchâssé les intérêts propres de groupe dans une lutte fratricide.
La politique consistant à servir les intérêts d’un groupe fermé sur lui-même a remplacé un possible projet collectif qui aurait pu être proposé à la nation. Les mauvaises pratiques absorbées durant les années de pouvoir absolu ont été consolidées en tant que doctrine de remplacement. De ce mélange corrosif est venue l’élimination successive des figures historiques [du FSLN], prenant la forme d’une hémorragie constante.
De là a surgi le groupe dominant de Daniel Ortega – issu de son rôle d’intermédiaire entre diverses factions – qui a construit une structure pyramidale de subordination. Du débat interne entre les différents groupes, nous sommes passés aux cercles de pouvoir ordonnés en fonction de la distance par rapport au leader. Le premier cercle était bien sûr celui du secrétaire général, puis de l’appareil et, enfin, celui des entrepreneurs et des syndicats, en conflit. Les militaires sont sortis du jeu en consolidant l’indépendance corporatiste.
Enfin, ces cercles ont fini par être dissous et remplacés par des relations personnalisées avec les dirigeants, ce qui implique que l’on peut tomber en disgrâce ou obtenir des faveurs. Cela a aussi recomposé les lignes hiérarchiques de l’organisation, du contrôle et de la promotion, au détriment d’une certaine pondération de la représentation de la diversité, d’éventuels ajustements et débats et d’un certain niveau d’institutionnalisation interne indépendante de la direction personnelle et du sommet de l’appareil.
C’était le schéma dominant, avec une certaine survie des cercles jusqu’à l’arrivée au gouvernement. La double direction du pays et du parti dans un système de parti-Etat a déclenché l’arrivisme, la lutte pour l’influence et la corruption, à un moment où le parti manquait complètement d’un cadre institutionnel pour résoudre ces questions.
Dans ce vide par la simple proximité du pouvoir et de la dépendance personnelle par rapport au leader, l’épouse d’Ortega, Rosario Murillo, s’est installée au sommet. Etayée par un pacte de manipulation perverse provenant d’un obscur règlement de comptes personnel [1]. La montée de Rosario Murillo marque la personnalisation maximale et l’absence d’institutionnalisation de ce qu’on appelle le parti FSLN. Ce régime de parti, en raison de ses relations avec l’Etat, auquel il a transmis ses traits, a fait des ravages sur les institutions déjà faibles du pays. Sous le règne de cette pratique, la démocratie n’est pas un ensemble de normes et d’institutions qui font partie d’un contrat qui régit la vie sociale, ce sont des règles utilitaires qui sont utilisées ou violées selon les besoins, comme dans le parti.
Le modèle proposé conduit à un pouvoir vertical qui subordonne la société, et qui dans son déroulement met fin à la démocratie délibérative, c’est-à-dire celle qui reconnaît le conflit et la dissidence, l’alternance politique et la sanction de l’opinion.
Inévitablement, tout le discours sur le pouvoir des gens devient une rhétorique creuse. Que faisons-nous face aux autres, qui ne sont pas d’accord ? Ils deviennent, qu’ils soient majoritaires ou minoritaires, des ennemis ou des irresponsables, inconscients face à la vérité proclamée.
Les conséquences qui en découlent pour la relation entre le gouvernement et la société sont évidentes et pathologiques. La puissance devient paranoïaque et ne peut être exposée à la lumière publique. Et la différence entre la réalité et le discours conduit à l’hyper-idéologisation et à la surexposition à la propagande qui tente de cacher ce fossé, d’affirmer le leadership et d’écraser les ennemis. Il ne reste à la société qu’à obéir ou à s’opposer à cette logique du pouvoir avec des coûts toujours plus élevés si le système se consolide. Tous les régimes totalitaires et à parti unique s’arrêtent là. Et c’est ce qui s’est passé.
Le Nicaragua est entré pleinement dans une tentative de construire un pouvoir de néo-autoritarisme, personnalisé, cette fois-ci venant du cœur même du parti [FSLN] qui, au nom de la révolution, a tenté d’enterrer la dictature familiale du passé. En 2008, une lettre adressée au gouvernement nicaraguayen, présidé par Daniel Ortega du Front sandiniste, signée par un groupe de personnalités qui ont eu une relation de soutien et de solidarité avec le processus révolutionnaire qu’elles ont connu dans les années 1980 et qui ont maintenu des liens avec le pays, a mis en garde contre cela. Parmi les signataires figuraient des militants et des intellectuels tels que Mario Benedetti, Eduardo Galeano et Noam Chomsky. La lettre appelle au respect des droits politiques au Nicaragua.
Dix ans plus tard, le diagnostic confirme que le pouvoir absolu a confondu sa conservation avec l’appropriation du pays à tout prix. Plus de 365 morts, 1800 blessés, des kidnappés, des torturés et des disparus : accepteriez-vous que cela se produise dans votre pays ? Au nom de quoi ? Le seul moyen de s’en sortir ne peut qu’être la démocratisation et la justice, et que par la suite les options soient tranchées. Et la solution « magique », jusqu’à ce moment, semble être la plus naturelle au monde : il est nécessaire de refonder la légalité et la légitimité du pouvoir, c’est-à-dire avoir des élections crédibles pour la société et la régulation du pouvoir.
Angel Saldomando
• Article paru dans la rubrique « Opinion » de Confidencial en date du 8 août 2018 ; il s’agit d’extraits d’un article paru dans Le Monde Diplomatique, édition du Chili. Traduction A l’encontre publiée le 11 août 2018 :
http://alencontre.org/ameriques/amelat/nicaragua/nicaragua-debat-trois-lectures-sur-leffondrement-dortega-et-du-fsln.html
• Angel Saldomando est chercheur auprès du Centre interdisciplinaire de recherche en développement international et société (CIRDIS), Université du Québec à Montréal. Il est chercheur associé au Centre d’Etude stratégique sur les Politiques publiques (IEEPP) au Nicaragua et collabore avec divers centres de recherche dans des pays comme la Bolivie, le Pérou, le Chili. Il a publié en 2017 Logicas de Desarollo, Estractivisme y Cambio climatico.
Examen de la situation au 8 août 2018

Álvaro Leiva Sánchez de l’ANPDH contraint à l’exil…
1.- L’augmentation des menaces en provenance de l’appareil d’Etat et la criminalisation des secteurs de l’opposition, y compris les membres des organisations de défense des droits de l’homme, marquent cette phase. Cette situation a abouti à la fermeture contrainte, temporaire, du siège de l’Association nicaraguayenne des droits de l’homme (ANPDH) et le transfert de son secrétaire exécutif, Álvaro Leiva, au Costa Rica parce que ces membres étaient menacés [2].
2.- L’exil forcé de l’équipe de l’ANPDH est dû aux menaces de mort et à l’insécurité dans leur travail de défenseurs de droits humains. La persécution des défenseurs des droits de l’homme constitue une violation des obligations de l’Etat en vertu des normes interaméricaine.
3.- La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a documenté la mort violente de 317 personnes lors de la répression des manifestations ; l’ANPDH a enregistré 448 personnes. Ortega a reconnu l’assassinat de 195 personnes. En d’autres termes, indépendamment des chiffres émis par le gouvernement, Ortega reconnaît que les forces répressives de l’Etat ont tué autant de personnes sans défense.
4.- Les équipes de travail de la CIDH et du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme sont entravées dans l’accomplissement de leurs tâches par le gouvernement. Les activités de la CIDH par l’intermédiaire du Mécanisme spécial de suivi pour le Nicaragua (MESENI) devant assurer la visite des prisons n’ont pas été autorisées par le gouvernement.
5.- Depuis fin juillet, le gouvernement applique une nouvelle forme de répression, car elle vise la famille et la communauté. Le gouvernement exerce un contrôle répressif par le biais des forces irrégulières, une armée parallèle composée de paramilitaires. En même temps, la répression par les acteurs du système judiciaire a judiciarisé la criminalisation et il n’existe aucune garantie de procédure.
6.- Les habitants de Managua, Masaya, Jinotepe, Diriamba, Jinotega et León continuent d’être terrorisés par des paramilitaires armés et cagoulés. La population vit dans la crainte qu’à tout moment les forces « parapolicières » puissent arrêter un parent ou une connaissance. Le fait que les paramilitaires restent en fonction sert plusieurs objectifs : prohiber la relance et les expressions sociales de la protestation civique et renforcer la persécution de la population dans le nouveau contexte de tentative de condamnation de la mobilisation sociale.
7.- La question des prisonniers politiques est d’autant plus préoccupante pour ce qui a trait aux violations des droits de l’homme. En effet, les informations en provenance des familles ou d’autres prisonniers indiquent que la torture est fort répandue.
8.- Des milliers de familles endeuillées pleurent leurs proches qui ont été assassinés et pleurent pour leurs proches qui ont été emprisonnés, torturés, persécutés et traduits en justice pour avoir participé aux manifestations démocratiques, aux barrages, aux barricades et aux manifestations pacifiques dans les rues. La violence gouvernementale a atteint des limites que nous n’aurions jamais crues possible à atteindre au Nicaragua en « temps de paix ».
9.- Plus de 85’000 personnes ont perdu leur emploi formel entre le 18 avril et le 30 juin 2018 au Nicaragua, selon les statistiques de la Banque centrale du Nicaragua (BCN). Toutefois, les calculs de la Fondation nicaraguayenne pour le développement économique et social (FUNIDES) indiquent la destruction de 225’000 emplois, dans le secteur formel et celui informel. Ces derniers sont majoritaires, compte tenu le poids« l’informalité » de l’économie ; cette informalité est fonctionnelle au secteur dit formel. [Voir en outre, ci-dessous, les données énumérées au point 17).
10.- Le chômage résultant de la crise n’est pas seulement dû à la semi-paralysie de diverses activités économiques (micro-entreprises, ateliers dédiés à la production de meubles, au tourisme et au commerce), mais aussi à la répression de l’Etat. Des dizaines de personnes ont été licenciées du secteur public soit parce qu’elles ont participé aux manifestations, soit parce qu’elles ont fourni une assistance aux blessés, comme les médecins et autres agents de santé.
11.- Le gouvernement Ortega-Murillo a également ordonné des pillages d’entreprises, des invasions de terres, le tout au détriment de l’investissement étranger et local qui, les années précédentes, était la clé de la création d’emplois. En d’autres termes, il n’y a pas de « paix » et la vie n’est pas « normale » pour reprendre les formules utilisées par Ortega dans ses entretiens et déclarations. Le citoyen se sent impuissant, vulnérable, menacé et effrayé.
12.- Le gouvernement Ortega-Murillo a augmenté la chasse contre les personnes qui ont participé aux manifestations. Il a également déclenché des licenciements massifs et arbitraires dans les hôpitaux du système de santé public. Au moins 135 personnes ont été licenciées, dont des médecins, des infirmières, des brancardiers et du personnel administratif des hôpitaux de León, Jinotepe, Masaya et Managua.
13.- La tendance pour l’avenir économique du Nicaragua dans les années à venir est la suivante : l’endettement public et le chômage augmenteront ; il y aura au minimum un tassement net de la croissance ou un recul du PIB qui se situera sur un terrain négatif..
14.- Les femmes leaders d’opinion demandent au chef de l’armée de se conformer à la Constitution politique : désarmer les paramilitaires qui commettent des actes criminels contre la population civile. On peut nommer à ce propos Gioconda Belli, Cristiana Chamorro, Lea Guido, Rita Delia Caso et 12 autres femmes leaders d’opinion signent le document.
15.- Le gouvernement Ortega-Murillo déclare qu’il n’autorisera pas la Commission de l’OEA à entrer au Nicaragua. Il pourrait en résulter un gel des décaissements de prêts de la BID et de la Banque mondiale (BM), qui représentent 68% du financement total du Nicaragua. Il court également le risque qu’à la prochaine réunion de la Commission permanente de l’OEA, soit demandée la démission d’Ortega, comme cela s’est produit en 1979 avec Somoza.
16.- Le gouvernement Ortega-Murillo n’a aucune crédibilité face au consensus qui s’est établi au sein de la classe politique américaine. La requête de tenir des élections anticipées au Nicaragua est présentée comme un moyen pour résoudre la crise. La classe économique et politique d’Amérique centrale considère Ortega comme un facteur d’instabilité pour la région. Et les Etats-Unis indiquent qu’Ortega constitue une « menace pour la sécurité nationale ». Ortega est donc plus isolée que jamais. Le mouvement d’opposition au gouvernement d’Ortega-Murrilo est, de facto, interclassiste, ce qui n’est pas nouveau dans un affrontement face à ce type de régime autoritaire et répressif au sein d’une telle formation sociale (avec son histoire).
17.- Les estimations les plus réalistes envisagent une chute du PIB de 3%. Quelque 270 entreprises ont interrompu leurs activités. Le secteur du tourisme enregistre des pertes à hauteur de 230 millions de dollars et la perte d’emplois dans ce secteur s’élève à 70’000. Quelque 800 restaurants enregistrés ont fermé leurs portes ; de même que 80% des petits hôtels. Quatre parmi les compagnies aériennes ont réduit leur nombre de vols entre le Nicaragua et les Etats-Unis. Le manque de main-d’œuvre saisonnière a un grave impact sur la production caféière, avec une perte de revenus estimée à 400 millions de dollars. Les « occupations » de terres, stimulées par le gouvernement, dans la perspective d’étayer sa base sociale, ont aussi un impact sur divers secteurs de production agricole.
Managua, 7 au 8 août 2018
Par notre correspondant à Managua
• Traduction A l’encontre publiée le 9 août 2018 :
http://alencontre.org/ameriques/amelat/nicaragua/nicaragua-examen-de-la-situation-au-8-aout-2018.html