TOKYO CORRESPONDANCE
Chez Hyundai Motor, aujourd’hui, les salariés syndiqués refusent de faire des heures supplémentaires et de travailler le week-end. Après avoir menacé de faire grève, vendredi 5 janvier, ils ont finalement reculé
La veille, la direction avait décidé de porter plainte contre 22 responsables syndicaux. Ces représentants du personnel du constructeur automobile sud-coréen sont accusés d’avoir agressé des gardiens et un responsable de l’entreprise lors de manifestations le 3 janvier.
Cet épisode reflète le climat de tension sociale qui règne au sein du conglomérat (chaebol) entre la direction et les 50 000 salariés. Des manifestations, et des grèves en décembre, ont été organisées pour protester contre une réduction d’un tiers des bonus de fin d’année. Une mesure qui sanctionne le non respect des objectifs de production fixés pour 2006.
L’année 2006 a été marquée par une longue série de conflits sociaux. Entre le 1er janvier et le 30 novembre, Hyundai a dû faire face à 10 grèves. Neuf d’entre elles étaient illégales, parce qu’elles répondaient à des motivations politiques (opposition à la signature d’un accord de libre-échange avec les Etats-Unis ou à la loi sur le nouveau statut des employés à temps partiel...). Une seule, qui aura duré 21 jours, concernait les salaires.
D’après la direction du groupe, ces grèves sont à l’origine de la perte de Hyundai en 2006, estimée à 1 520 milliards de wons (1,253 milliard d’euros). De fait, en raison des arrêts de travail, l’entreprise et sa filiale Kia Motor ont dû réduire leurs objectifs de production de 5 %.
Les problèmes de Hyundai Motor - qui avait déjà subi une grève coûteuse en 2003 - témoignent de la force des syndicats sud-coréens. D’après l’administration, 75 % des salariés de ce conglomérat, le deuxième en Corée du Sud, adhèrent à une organisation syndicale. Dans les 10 chaebols sud-coréens, le taux de syndicalisation ne dépasse par les 40 %. Et, dans l’ensemble de la société, il s’établit autour de 12 %.
DES LUTTES POLITIQUES AUSSI
Les mouvements sociaux qui ont agité l’entreprise en 2006 montrent à quel point les syndicats sont des acteurs importants de la vie politique sud-coréenne.
Historjavascript:barre_raccourci(’’,’’,document.formulaire.texte)iquement, les luttes des travailleurs sont indissociables des combats pour la démocratie. En 1953, une réglementation d’inspiration américaine garantissait les droits syndicaux. Mais les militaires, qui se sont succédé à la tête du pays dès les années 1960, ont restreint ces droits jusqu’à interdire les grèves en 1980. Dans le même temps, les chaebols recourraient à des méthodes de gestion du personnel très dures.
C’est en 1987 qu’a lieu le grand tournant de l’action syndicale sud-coréenne. Roh Tae-woo devient président à la place de Chun Doo-hwan, contraint de quitter son poste sous la pression des manifestations étudiantes et de la communauté internationale. Un processus de démocratisation s’engage. Le pays reconnaît les syndicats libres et restaure le droit de grève. Cette année-là, il connaîtra 3 749 conflits.
Les premières organisations syndicales se structurent. La KCTU, Korean Confederation of Trade Unions, aujourd’hui principal groupement du pays - il revendique près de 800 000 adhérents - verra le jour en 1994, au terme du rapprochement des groupes nés des luttes de 1987. Parmi les organisations membres de la KCTU figure le HTUC, le Hyundai Trade Union Council.
La KCTU se considère comme « un mouvement social pour la démocratie » et revendique une implication forte dans la vie politique. Elle a obtenu la reconnaissance officielle des autorités au terme des luttes de 1996-1997, quand le pays a été bloqué par une grève générale. Ce mouvement avait commencé après l’adoption par le gouvernement du président Kim Young-sam de textes de loi interdisant notamment le droit d’association des fonctionnaires et la pluralité syndicale.
Certains observateurs considèrent que l’action syndicale coréenne connaît un regain d’activité. Le creusement des inégalités et les inquiétudes sur l’économie alimenteraient ce mouvement.
Le Samsung Economic Research Institute a dévoilé un rapport sur les « 10 tendances qui devraient marquer l’année 2007 ». Dans un contexte d’activité au ralenti - le gouvernement ayant revu ses prévisions de croissance à la baisse à 4,5 % - et de campagne pour l’élection présidentielle de décembre, l’institut prédit un accroissement des restructurations dans l’industrie. Il annonce aussi une hausse des mouvements sociaux.
Encart
Chiffres
Hyundai. Le groupe sud-coréen a vendu 3,850 millions de véhicules en 2006. Parmi les constructeurs automobiles, il occupe le sixième rang mondial - en intégrant sa filiale KIA. Il ambitionne de devenir le cinquième d’ici à 2010.
Syndicalisation en Corée du Sud. En 2005, 11,9 % des salariés sud-coréens étaient adhérents à une organisation syndicale, contre 23,3 % en 1989 et 17,3 % en 1987, année de la démocratisation. On recense 5 971 organisations différentes.
Mouvements de grève. En 2005, le pays a connu 287 mouvements de grève. En 1987, il y en avait eu 3 741.
Les voitures destinées à l’Europe débarquent à Sète
Le port de Sète (Hérault) a accueilli, lundi 1er janvier, son premier cargo chargé de 644 voitures du constructeur coréen Hyundai Motor. Une seconde cargaison de 1 200 véhicules est attendue le 16 janvier.
Le constructeur coréen a choisi de faire de la ville sa porte d’entrée en Europe : 15 000 voitures transiteront par le port en 2007 et quelque 25 000 entre 2008 et 2009. Elles y seront stockées et mises aux normes.
Sète fait partie, depuis le 1er janvier, des 18 ports maritimes d’intérêt national qui ont été transférés, par convention, aux collectivités territoriales, en application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
Désormais sous l’autorité du conseil régional Languedoc-Roussillon et de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) locale, concessionnaire de l’infrastructure, le port sétois veut devenir un « pôle voitures » destiné à l’importation et à l’exportation d’au moins 80 000 véhicules d’ici à 2008.
« Ce développement est le fruit de deux ans de réorganisation des activités du port », explique Michel Mateu, président de la chambre de commerce de Sète, Frontignan et Mèze. A partir de mi-2007 et en 2008, l’exportation de 50 000 véhicules français neufs par an est prévue vers l’Algérie et le Maroc. Entre 15 000 et 20 000 voitures par an, françaises et étrangères (Renault-Logan, Ford, Fiat, Toyota), seront aussi exportées vers la Turquie, la Slovénie, la Roumanie ou la Grèce.
La CCI a par ailleurs signé un contrat de location de vingt ans d’une zone de 9 hectares du port de Sète avec l’entreprise française Sintax, filiale de la société espagnole Delgados, responsable de ces trafics commerciaux.