« Macron, t’es foutu, les gonzesses sont dans la rue. » Plusieurs centaines de femmes « gilets jaunes » se sont rassemblées, dimanche 6 janvier, dans plusieurs villes de France, au lendemain de l’« acte VIII » qui a réuni près de 50 000 personnes dans tout le pays. Leur but était de manifester pacifiquement et de donner une image « inédite » du mouvement, alors que les manifestations de la veille ont été marquées par de nouvelles violences.
A Paris, quelques centaines de manifestantes s’étaient rassemblées à 11 heures sur les marches de l’Opéra Bastille pour chanter la Marseillaise, des ballons jaunes à la main. Elles ont ensuite encerclé la place, perturbant la circulation, avant de se diriger vers la place de la République.
« En faisant cette première manifestation de femmes, on voulait avoir un autre canal de communication que la violence, car tout ce qui émerge du mouvement dans les médias ce sont les actes de violence et on oublie le fond du problème », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Karen, infirmière de 42 ans venue de Marseille et l’une des fondatrices du groupe Facebook « Femmes gilets jaunes ». « Cette manifestation n’est pas féministe mais destinée à donner une image inédite au mouvement », a-t-elle insisté.
Sophie Tissier, 40 ans, « mère isolée de deux enfants », a expliqué au mégaphone être au RSA depuis deux ans et demi : « C’est très difficile pour nous d’être mises en lumière dans la société en tant que femmes. Or nous sommes plus pacifiques que les hommes et on veut mobiliser de façon pacifique. (...) On est très nombreuses dans les manifestations, sur les ronds-points, car on est plus touchées par le travail précaire. »
« Précarisées, discriminées, révoltées »
A Toulouse, près de 300 femmes « gilets jaunes », selon la préfecture, s’étaient réunies derrière une grande banderole noire sur laquelle on pouvait lire : « Précarisées, discriminées, révoltées, femmes en première ligne ». Les manifestantes se sont rassemblées à 11 heures sur la place Arnaud-Bernard avant de s’élancer vers les boulevards du centre-ville, encadrées par une présence policière discrète.
Les slogans visaient principalement le président de la République : « Macron démission », « Macron, t’es foutu, les gonzesses sont dans la rue » ou encore « Macron, si tu ne viens pas, c’est nous qui venons chez toi ».
« Je suis venue pour l’avenir de nos enfants, expliquait Monique, une fonctionnaire de 64 ans, on leur laisse une société pourrie. Beaucoup vont être au chômage et les personnes âgées vont travailler de plus en plus tard. Ils n’auront pas droit à la parole si on n’agit pas maintenant et le peuple a droit à la parole » .
A Caen, théâtre de scènes de violences samedi, une centaine de femmes accompagnées parfois de leurs enfants sont parties de la place de la Mairie pour défiler dans les rues aux cris de « Les femmes avec nous », « CRS avant de gazer, accouchez ».
« Le gouvernement veut nous faire passer pour des casseurs, mais aujourd’hui nous sommes des mères, des grands-mères, nous sommes les filles, les sœurs de tous les citoyens, et nous voulons dire que (...) notre colère est légitime. C’est lors des crises sociales que les droits des femmes sont le plus en danger », a déclaré Chloé Tessier, 28 ans, professeure d’équitation.
En Saône-et-Loire, à Montceau-les-Mines, une centaine de femmes « gilets jaunes » ont elles aussi défilé dimanche matin. Parmi les manifestantes, une dame âgée, avec une pancarte sur laquelle était écrit « Pour la France de nos enfants » et une jeune femme poussant une poussette avec l’inscription : « Je suis une fille et je ne veux pas d’enfant dans ce monde-là ».
AFP
6/01 - Manif femmes gilets jaunes Paris
La manif avait été appelée depuis un groupe facebook Femmes Gilets Jaunes sur un contenu très essentialiste (« nous sommes la mère patrie », « nous restons complémentaires et solidaires aux hommes ce n est pas une lutte féministe mais féminine » etc.), appelant les femmes à sortir de leur « discrétion » pour prendre la place qui est la leur dans la révolution : en tête de manif !, à reprendre toutes les revendications des Gilets Jaunes car « nous sommes les Gilets Jaunes ».
Au plus fort de la manif 2000 personnes et en moyenne entre 1000 et 1500. Une très très large majorité de femmes, manifestement des classes populaires, du coup beaucoup de femmes racisées.
Pas de cortège organisé, quelques cheminotes et une présence de groupes féministes : Collectif Féministes Révolutionnaires, quelques militantes du Planning, du CNDF et de quelques assos historiques du mouvement féministe.
Manif qui part en direction de République, pause pour rendre hommage aux lycéen·ne·s de Mantes-La-Jolie.
Comme toute manif des Gilets Jaunes, pas vraiment de cortège organisé, un joyeux bordel avec beaucoup de slogans « macron démission » et « macron président des patrons », et très peu de slogans féministes. Quelques discussions houleuses à plusieurs moments de la manif quand des personnes entendent d’autres personnes tenir des propos ou sexistes ou racistes ou homophobes.
Arrêté·e·s plusieurs fois à cause de la police, puis à République contournement des flics qui protégeaient la place, et nassage dans une rue adjacente.
Ca dure un peu mais ça s’énerve dans la nasse, ça pousse, ça gaze, ça repousse et dénassage ! C’était vraiment un très beau moment, grosse joie à avoir réussi à forcer une nasse de flics. On s’arrête un peu place de la République, on chante, se félicite et puis une dizaine de minutes plus tard ça repart à toute allure boulevard des italiens.
Puis manif qui se fait coupée en deux car les flics bloquent à une rue, mais finalement on se retrouve une demi-heure après dans la joie au croisement d’une rue ! Direction opéra, arrivé·e·s là-bas on se disperse sur la place, ça se regroupe sur les marches de l’opéra, ça chante pas mal (des slogans, l’hymne des femmes et surtout la marseillaise reprise très largement - et lancée par une femme qui avait autour du cou une pancarte dénonçant les violences policières).
Les gens se dispersent puis d’un coup les flics nassent la totalité de la place. Énorme présence policière (une cinquantaine de camions pour 200 personnes nassées !) Ca durera plus de 2 heures dans le froid, sans endroit pour pisser, plusieurs moments où ça chauffe entre manifestantes et flics, un peu de gazs et de matraques qui volent, mais pas grand chose au vu des violences auxquelles nous sommes habitué·e·s depuis la loi travail...
Les bus pour emmener à garde-à-vue arrivent et ils finissent par laisser sortir au compte-goutte. Aucune idée de s’il y eu des gardes à vue, mais ça ne m’étonnerait pas que ce soit le cas, car un chef CRS qui avait repéré mon petit groupe qui chantait des slogans politiques ne voulait pas nous laisser sortir de la nasse et était parti pour nous attraper. Mais un gendarme avec qui on avait discuté plus tôt a pris notre défense en mentant et disant que nous n’étions pas de la manif, qu’il se trompait et qu’il ferait mieux de nous laisser partir.
Correspondante, site du NPA
• Lundi 7 janvier 2019 :
https://npa2009.org/node/54577