Au sein de ce mouvement Gilets jaunes, certes hétérogène socialement et politiquement, se dégagent des voix qui font leur les besoins sociaux et donc qui engagent une bataille pour des droits qu’il s’agit s’imposer. Car il n’existe pas une ontologie des « droits » en dehors des besoins qui se traduisent dans des affrontements sociaux effectifs et qui sont ressentis, donc qui affectent. Et ces voix, parfois, peuvent traduire en perspective sociopolitique le ressenti, soit ce qui est éprouvé vivement par un large secteur de la société.
La question décisive n’est pas celle discutée par de nombreux commentateurs intellectuellement incarcérés dans les résultats des enquêtes d’opinion sur le degré de sympathie des Gilets Jaunes auprès des échantillons de Français. Le fait social et statistique suivant, bien compris par Roland Cayrol, qui dévoile la durée et la force de ce mouvement, réside dans les 16% des personnes interrogées qui se sentent membres des Gilet Jaunes.
Une force sociale – certes disparate, mais existe-t-il des mouvements sociaux qui ne le soient pas ? surtout dans le contexte présent et les expériences sociopolitiques depuis plus de 25 ans (1995) en France ? – qui n’a pas son pareil.
Certes, la contradiction est présente et peut s’exprimer par un vote Rassemblement national qui pourra déconcerter ceux et celles qui soutiennent et agissent dans ce « rassemblement ». Et qui le font avec la tonalité de l’antagonisme de classe au sens large et de sa dynamique qui se retrouvent dans cette intervention faite à Metz que nous publions ci-dessous. Pour citer Blaise Pascal dans Pensées : « Ni la contradiction n’est marque de fausseté, ni l’incontradiction n’est marque de vérité » (VI, 384, 1671). Ce qu’avait bien compris Lucien Goldmann.
C.-A. Udry, Rédaction A l’Encontre