“Aujourd’hui est un jour historique, un nouvel État providence vient d’être créé dans ce pays… La qualité de vie des Italiens va s’améliorer.” Luigi Di Maio, le vice-Premier ministre italien, ne cache pas sa satisfaction. Ce jeudi 17 janvier, le Conseil des ministres transalpin a approuvé le décret qui met en place le revenu de citoyenneté, une allocation de 780 € mensuels qui sera distribuée à tous les Italiens dont les revenus sont inférieurs à ce montant. Une promesse tenue du gouvernement qui, néanmoins, après les injonctions de Bruxelles, a dû revoir à la baisse le budget pour cette allocation, qui sera finalement beaucoup plus difficile que prévu à obtenir.
Le quotidien économique Il Sole 24 Ore énumère les critères qu’il faudra satisfaire pour ne pas être exclu du revenu de citoyenneté : “Le patrimoine immobilier ne devra pas dépasser une valeur de 30 000 €, mais le domicile principal sera exclu de ce calcul ; de plus, le patrimoine financier de la personne ne devra pas dépasser 6 000 €.”
Pas d’achat de voiture depuis deux ans
D’autres facteurs d’exclusion plus singuliers ont également été introduits, comme le souligneIl Corriere della Sera. “Il ne faudra pas avoir acheté dans les derniers deux années de voiture disposant d’une cylindrée supérieure à 1 600 cc, ni d’embarcations ou de motos de cylindrée supérieure à 250 cc.”Pour vérifier que l’argent du revenu de citoyenneté alimentera bien l’économie réelle italienne, celui-ci sera distribué sur une carte de crédit créée pour l’occasion, et tout l’argent qui ne sera pas dépensé dans le mois sera perdu. Selon les calculs du gouvernement, 5 millions de personnes environ bénéficieront de cette allocation.
Mais si le revenu de citoyenneté a été d’abord conçu comme un instrument pour lutter contre la pauvreté “extrême” très présente, surtout dans le sud du pays, Luigi Di Maio se défend d’avoir créé une mesure pour des assistés. Devant la presse, jeudi 17 novembre, le vice-Premier ministre a présenté une série de mesures, dites “anti-canapés”, qui visent à éviter que les bénéficiaires du revenu (dont la durée sera de dix-huit mois renouvelables) perçoivent leur chèque sans chercher du travail. Trois offres de travail seront proposées aux bénéficiaires, qui, s’ils n’en acceptent aucune, perdront leurs droits. Quant aux éventuelles fausses déclarations, celles-ci seront punies par des peines de prison.
Un peu de charité chrétienne
Grâce à cette mesure, Luigi Di Maio vise deux objectifs : combattre la pauvreté et le chômage. Ce deuxième point laisse dubitative La Repubblica : “Le revenu de citoyenneté, c’est objectivement un changement de paradigme par rapport à notre modèle d’aide sociale, mais le vrai problème, c’est qu’il n’y a pas de travail en Italie, et cela est dû, en partie, au fait que la demande et l’offre ne se croisent pas.”
La possibilité que le revenu de citoyenneté relance l’offre est contestée aussi bien à droite qu’à gauche de l’échiquier politique. Un timide soutien à ce nouveau dispositif arrive sous la plume du journaliste Cristiano Puglisi qui, sur son blog hébergé par Il Giornale, parle d’une allocation destinée“à des personnes désespérées qui vivent dans un système économique toujours plus brutal et compétitif. Dans cette optique, le revenu de citoyenneté est un dispositif qui fait appel à un peu de charité chrétienne, peut-être pas à la mode en Occident, mais moralement nécessaire”.
Beniamino Morante and Courrier international
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